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Le volcan Sakurajima,
entre risques et bienfaits
Le volcan en éruption
© Kagoshima Prefectural Visitors Bureau, 2009.
La récolte des
Sakurajima daikon
, des radis géants
© Farmland Sakurajima, 2009.
Des écoliers portant un casque de protection
contre les projections volcaniques
© Kurokami elementary school, Sakurajima, 2009.
Face à une nature à la fois
violente et bienfaisante
LE volcan Sakura-
jima, qui s’élève au
sud de l’île de Kyûshû, illustre par-
faitement les liens que les Japonais
entretiennent avec leur environne-
ment. Les risques existent partout sur
l’Archipel, ils sont nombreux, mais
les Japonais ont su s’y adapter, voire
même en tirer bénéfice.
Le Sakurajima s’est formé il y a
25 000 ans sur une caldeira (mot d’ori-
gine portugaise signifiant “chaudron”
car l’intérieur du volcan est vide).
Ses contours inondés constituent
aujourd’hui la baie de Kagoshima.
Celle-ci, fermée, offre une protection
naturelle idéale contre les tsunamis et
les typhons. Mais le Sakurajima est
l’un des volcans les plus dangereux
du Japon. Cela s’explique à la fois
par son type d’éruption (l’aléa) et par
l’importance des enjeux en présence
(la vulnérabilité).
Les éruptions du Sakurajima sont
explosives et peuvent engendrer des
séismes, des projections de cendres et
de pierres, des nuées ardentes (nuage
de poussière composé de gaz et de
lave brûlante dévalant les pentes),
des lahars (coulées mélangeant cen-
dres et eau), etc. Le Sakurajima est
d’autant plus dangereux qu’il est l’un
des volcans les plus actifs du Japon.
2009 fut une année record avec 548
éruptions contre 400 en moyenne !
Les éruptions sont donc permanen-
tes, comme en témoigne le panache
incessant de fumée et de cendres qui
s’échappe du sommet. L’éruption de
1914, l’une des plus fortes du XXe
siècle, a rattaché l’île volcanique (au
centre de la photographie) à la terre
ferme (en arrière-plan).
Les enjeux humains et économi-
ques sont particulièrement impor-
tants autour de ce volcan. Les trois
cratères du Sakurajima sont situés à
moins de 10 km de Kagoshima, ville
peuplée de 600 000 habitants et capi-
tale économique du Sud-Kyûshû. Au
premier plan de la photographie, on
distingue infrastructures portuaires et
industrielles, ainsi que de nombreu-
ses habitations.
La palette des risques autour du
Sakurajima reflète assez bien ceux
qui peuvent toucher le Japon dans son
ensemble, de l’arc des Ryûk(Oki-
nawa), au sud, à celui des Hopryôdo
(Kouriles), au nord. Aucune région
n’est particulièrement à l’abri des is-
mes, plus de 250 volcans sont actifs
sur l’Archipel, des tsunamis frappent
régulièrement les côtes du Pacifique,
les pluies d’été (en juin-juillet) puis
les typhons partir de la mi-août)
provoquent des glissements de ter-
rain, alors que les ondes de tempêtes
se joignent aux rivières et inondent
des quartiers entiers. Historiquement,
pourtant, l’exposition au risque sis-
mique ou volcanique a rarement été
déterminante dans le choix d’implan-
tation d’une ville : les considérations
stratégiques (contrôle de détroits ou
de passes) primaient. C’est seulement
récemment que cet élément a com-
mencé à être pris en compte, lors des
projets de relocalisation de la capitale
par exemple, Tôkétant situé dans
une des régions les plus exposées aux
risques telluriques.
Des catastrophes de grande am-
pleur peuvent survenir : le typhon de
la baie d’Ise en 1959 (5 081 morts)
ou le séisme du Hanshin à Kôbe en
1995 (5 600 morts) notamment. Pour
autant, le nombre de victimes de ca-
tastrophes est relativement limité et
constamment en baisse : 187 morts
en 1985, 100 en 1995 et 44 en 2005.
L’inondation du Tôkai (Nagoya) en
2000 ne fit qu’une dizaine de morts,
dont quatre seulement à Nagoya
même, alors que 37 % du territoire
de la ville était sous les eaux.
Le Japon a su en effet s’adapter
aux risques naturels, comme le
montre la vie des 5 880 habitants de
la péninsule du Sakurajima. Ainsi,
les écoliers circulant vers l’un des
six établissements scolaires établis
autour du volcan doivent obligatoi-
rement porter un casque contre les
produits éruptifs (cendres, lapilli
des projections volcaniques de
petite dimension – et bombes volca-
niques). Les exercices d’évacuation
de la presqu’île sont réguliers et le
volcan est très surveillé. Il consti-
tue même un laboratoire national
en matière de capacité à combiner
risque, système d’alerte et vie quoti-
dienne des habitants. Les victimes du
Sakurajima sont surtout des touristes
randonneurs qui ne respectent pas
la zone d’exclusion de 2 km autour
des cratères.
Le Sakurajima possède une autre
particularité : ses laves sont très ferti-
les et permettent la culture de gumes
géants, dont les célèbres “radis du
Sakurajima” (Sakurajima daikon).
Cela explique le maintien de villages
agricoles sur le pourtour du volcan.
Dans cette région en dépeuplement,
où le revenu par habitant est l’un des
plus faibles du Japon, des exploita-
tions familiales perdurent en vendant
des “produits célèbres” (meibutsu).
Ceux-ci sont exportés vers les grandes
villes et mis en avant par la promotion
touristique de la région, ainsi bien sûr
que le célèbre paysage qu’offre ce
volcan dangereux mais généreux.
Photographies prises en 2009.
Photographies disponibles sur transparent
DP 8076 LE JAPON. RENOUVEAU D’UNE PUISSANCE ?
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