Le Japon » , N° 8076 , Juillet

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DP 8076 LE JAPON. RENOUVEAU D’UNE PUISSANCE ?
44-45
Face à une nature à la fois
violente et bienfaisante
Le volcan Sakurajima,
entre risques et bienfaits
L
E volcan Sakurajima, qui s’élève au
sud de l’île de Kyûshû, illustre parfaitement les liens que les Japonais
entretiennent avec leur environnement. Les risques existent partout sur
l’Archipel, ils sont nombreux, mais
les Japonais ont su s’y adapter, voire
même en tirer bénéfice.
Le Sakurajima s’est formé il y a
25 000 ans sur une caldeira (mot d’origine portugaise signifiant “chaudron”
car l’intérieur du volcan est vide).
Ses contours inondés constituent
aujourd’hui la baie de Kagoshima.
Celle-ci, fermée, offre une protection
naturelle idéale contre les tsunamis et
les typhons. Mais le Sakurajima est
l’un des volcans les plus dangereux
du Japon. Cela s’explique à la fois
par son type d’éruption (l’aléa) et par
l’importance des enjeux en présence
(la vulnérabilité).
Les éruptions du Sakurajima sont
explosives et peuvent engendrer des
séismes, des projections de cendres et
de pierres, des nuées ardentes (nuage
de poussière composé de gaz et de
lave brûlante dévalant les pentes),
des lahars (coulées mélangeant cendres et eau), etc. Le Sakurajima est
d’autant plus dangereux qu’il est l’un
des volcans les plus actifs du Japon.
2009 fut une année record avec 548
éruptions contre 400 en moyenne !
Les éruptions sont donc permanentes, comme en témoigne le panache
incessant de fumée et de cendres qui
s’échappe du sommet. L’éruption de
1914, l’une des plus fortes du XXe
siècle, a rattaché l’île volcanique (au
centre de la photographie) à la terre
ferme (en arrière-plan).
Les enjeux humains et économiques sont particulièrement importants autour de ce volcan. Les trois
cratères du Sakurajima sont situés à
moins de 10 km de Kagoshima, ville
Photographies prises en 2009.
peuplée de 600 000 habitants et capiPhotographies disponibles sur transparent
tale économique du Sud-Kyûshû. Au
premier plan de la photographie, on
distingue infrastructures portuaires et
industrielles, ainsi que de nombreuses habitations.
La palette des risques autour du
Sakurajima reflète assez bien ceux
qui peuvent toucher le Japon dans son
ensemble, de l’arc des Ryûkyû (OkiLe Japon a su en effet s’adapter
nawa), au sud, à celui des Hoppôryôdo aux risques naturels, comme le
(Kouriles), au nord. Aucune région montre la vie des 5 880 habitants de
n’est particulièrement à l’abri des séis- la péninsule du Sakurajima. Ainsi,
mes, plus de 250 volcans sont actifs les écoliers circulant vers l’un des
sur l’Archipel, des tsunamis frappent six établissements scolaires établis
régulièrement les côtes du Pacifique, autour du volcan doivent obligatoiles pluies d’été (en juin-juillet) puis rement porter un casque contre les
les typhons (à partir de la mi-août) produits éruptifs (cendres, lapilli
provoquent des glissements de ter- – des projections volcaniques de
rain, alors que les ondes de tempêtes petite dimension – et bombes volcase joignent aux rivières et inondent niques). Les exercices d’évacuation
des quartiers entiers. Historiquement, de la presqu’île sont réguliers et le
pourtant, l’exposition au risque sis- volcan est très surveillé. Il constimique ou volcanique a rarement été tue même un laboratoire national
déterminante dans le choix d’implan- en matière de capacité à combiner
tation d’une ville : les considérations risque, système d’alerte et vie quotistratégiques (contrôle de détroits ou dienne des habitants. Les victimes du
de passes) primaient. C’est seulement Sakurajima sont surtout des touristes
récemment que cet élément a com- randonneurs qui ne respectent pas
mencé à être pris en compte, lors des la zone d’exclusion de 2 km autour
projets de relocalisation de la capitale des cratères.
par exemple, Tôkyô étant situé dans
Le Sakurajima possède une autre
une des régions les plus exposées aux particularité : ses laves sont très fertirisques telluriques.
les et permettent la culture de légumes
Des catastrophes de grande am- géants, dont les célèbres “radis du
pleur peuvent survenir : le typhon de Sakurajima” (Sakurajima daikon).
la baie d’Ise en 1959 (5 081 morts) Cela explique le maintien de villages
ou le séisme du Hanshin à Kôbe en agricoles sur le pourtour du volcan.
1995 (5 600 morts) notamment. Pour Dans cette région en dépeuplement,
autant, le nombre de victimes de ca- où le revenu par habitant est l’un des
tastrophes est relativement limité et plus faibles du Japon, des exploitaconstamment en baisse : 187 morts tions familiales perdurent en vendant
en 1985, 100 en 1995 et 44 en 2005. des “produits célèbres” (meibutsu).
L’inondation du Tôkai (Nagoya) en Ceux-ci sont exportés vers les grandes
2000 ne fit qu’une dizaine de morts, villes et mis en avant par la promotion
dont quatre seulement à Nagoya touristique de la région, ainsi bien sûr
même, alors que 37 % du territoire que le célèbre paysage qu’offre ce
de la ville était sous les eaux.
volcan dangereux mais généreux.
Le volcan en éruption
© Kagoshima Prefectural Visitors Bureau, 2009.
Des écoliers portant un casque de protection
contre les projections volcaniques
La récolte des Sakurajima daikon, des radis géants
© Farmland Sakurajima, 2009.
© Kurokami elementary school, Sakurajima, 2009.
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