Résumé de l`intervention

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Séminaire Axe Santé du LAPCOS :
Lundi 16 Janvier 2017, de 13h30 à 15h, salle 128, 1e étage MSHS, Campus SJA.
Conférencière : Nancy MIDOL
TITRE : HYPNOSE ET CHAMANISME : se déplacer dans "L'ENTRE" pour créer du LIEN ;
Accéder à la beauté du MONDE pour SOIGNER
L'hypnose médicale et le chamanisme partagent un outil commun: l'usage de la transe1 ou EMC.
Les thérapies par l'hypnose sont directement héritières des chamanismes dont l'usage des
transes (traverser) déploie d'autres imaginaires et d'autres représentations du monde. Les
compétentes qui s'y développent sont celles du déplacement, du voyage dans les tissus
sensoriels et cosmiques d'une apparente complexité.
Plutôt que de favoriser la distinction pour s'identifier, l'identification dans la construction
chamanique se fait en voyageant auprès de tous ceux qui vivent inextricablement
interdépendants : autres êtres vivants de tous les règnes animal, végétal, minéral, et les éléments
eau, terre, feu, air, lumière avec des variantes comme l'éther (Inde) ou le métal (Chine), sans
oublier les ancêtres !
Mais une représentation, quelle qu'elle soit n'est jamais une abstraction, elle implique
l'engagement physique, affectif, émotionnel et cognitif, et cela se tisse ensemble,
interactivement, créant ce qui paraît 'naturel' ou 'allant de soi' dans le contexte vécu. C'est ce
qui constitue le ciment culturel qui fait le social.
Pour l'Europe, la révolution décisive qui nous a fait quitter ce 'naturel' a pris au moins trois
siècles (Renaissance, Classique, Lumières) et nous sommes devenus 'modernes'. (cf. polémique
de Bruno Latour).
Néanmoins les historiens de l'hypnose thérapeutique ont souligné son origine ancestrale et
populaire. Paradoxalement, à partir de Charcot, les sciences n'ont eu de cesse de la rapatrier sur
leur domaine2. I; Stenger et L. Chertok, et D. Michaux et d'autres ont souligné ce paradoxe.
C'est pourquoi à elle seule, l'hypnose constitue un rare paradigme qui pense de façon 'holiste'
au croisement des sciences humaines et sociales et des sciences biologiques. A l'heure où il
devient urgence d'entrer dans la complexité des interactions, le cheminement de l'hypnose
médicale (HM) peut inciter à renouveler les cheminements méthodologiques dans les sciences.
Ce que l'on fait en HM c'est déplacer le cadre structurel (patterns) construit depuis l'enfance
vers un autre espace / temps, c'est à dire une autre aperception du monde, de l'environnement,
de soi et des autres dans le monde. Ce qui est pris en compte est plus "l'espace entre", le lien
expérience- émotion - cognition ou la capacité à donner des sens nouveaux à son ressenti, même
s'il ne confirme pas le consensus culturel.
1
La transe comme outil n'est en soi ni positive ni négative. L'outil a une certaine puissance, quel usage
en fait-on?
2
Bertrand Méheust : 1999, Didier Michaux, Isabelle Stengers, François Roustang....)
Quitter le monde temporel chronologique et chronométré, celui des espaces structurés et
fonctionnels, celui des représentations sociales, morales, critiques, logiques et rationnelles pour
entrer dans un monde du surgissement de l'instant, à la spontanéité infantile ou enfantine, monde
fluctuant, plastique, sensitif et sensuel, monde saturé des images et des sons, de la kinesthésie
et du sentiment de gravitation, du goût et des odeurs... ce que les hypnothérapeutes avec les
neuro-linguistes ont nommé de système VAKOG , (Visuel, Auditif, Kinesthésique, odorant,
Gustatif ).
Bien que la vision cerveau droit versus cerveau gauche soit simplificatrice et pour cela fausse,
il s'agit néanmoins de favoriser dans le dialogue, la suggestion ou l'induction hypnotique (en
état de transe), la stimulation des neurones du cerveau droit, plutôt que ceux du cerveau gauche
et les échanges inter-hémisphériques. Il s'agit d'orienter la personne à l'écart de ses propres
routines, libérée de ses jugements critiques, donc disposée à la tolérance, pour être emmenée
vers des situations qui font appel aux ressources adaptatives, donc créatrices, avec si possible
des émotions positives, empathiques, compassionnelles, esthétiques. Emmener vers le plaisir
esthétique mobilise de manière concertée des ensembles de neurones qui unissent les fonctions
cognitives (cortex préfrontal) au système des émotions (système limbique) favorisant une
harmonie entre les émotions et la raison (JP Changeux, Le cerveau de la beauté). Dans ce
processus physiologique, il y a transformation de radiations lumineuses d'images visuelles ou
d'actions mécaniques dans l'audition... en activité électrique dans le cerveau qui analyse des
signes dans différentes parties du cortex pour re-synthétiser et donner accès à la conscience en
moins de cent millisecondes. Les neurosciences ont découvert que l'émotion esthétique
fonctionne dans un système de plaisir - récompense, avec sécrétion de dopamine, il s'agit d'après
Changeux d'une véritable inondation du cerveau par ces neurotransmetteurs. Le partage de
l'émotion esthétique renforce le sentiment d'harmonie d'ensemble, un partage éthique de la joie
de vivre, une "empathie esthétique" (Pierre Lemarquis). Il s'agit là d'un véritable "nouvel art de
vivre" dont on connaît les bienfaits sur la santé physique et mentale, l'effet réparateur sur les
états plus ou moins chroniques de stress, dépression ou autres troubles affectant le
comportement dans notre société.
Mais je vais arrêter là le discursif, et vous proposerai une expérience d'hypnose que vous
pourrez faire si vous en avez le désir, et ensuite nous réfléchirons ensemble à ce que peut faire
l'émotion esthétique comme outil thérapeutique.
Contact : Nancy MIDOL [email protected]
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