Quelques formulations de la tétravalence à travers les conceptions matérialistes et idéalistes antiques
Dans l'opposition entre matérialisme et idéalisme, qui traverse la fin du néolithique que nous connaissons en
Occident sous le nom d'Antiquité, la logique divalente, le dilemme, sert à Aristote à réfuter l'idéalisme platonicien,
basé sur la tétravalence, semble t'il. Aristote veut une réelle action efficace sur le monde pour changer la condition
humaine et mieux la diriger.
En orient, le bouddhisme est, aussi, une tentative matérialiste pour se dégager de la vision de l'atman idéaliste du
brahmanisme de l'Inde du temps. C'est une démarche d'action pour améliorer la condition humaine, en se détachant
de tous nos attachements inutiles, ceux qui nous font souffrir et nous casser la tête pour rien. Nous sommes au 5e
siècle avant J.C. et un membre de la caste des guerriers, le prince Siddhartha Gautama, arrive à l'illumination pas
très loin du Gange. Il y prêche le sermon de Bénarès à quelques ascètes. On souffre parce qu'on s'attache à nos
objets de désir, dit-il. Si on réfléchit bien, on arrête les frais et par le lâcher-prise, on résout le problème de la
souffrance.
Dans le matérialisme d'Aristote, on s'attache, par contre, aux objets qui valent le coup, à ceux qui nous amènent des
solutions et du bonheur par un raisonnement juste. Si, dans le bouddhisme, on se détache de ce qui fait problème,
dans Aristote, on s'attache à ce qui fait du bien. Ce sont deux aspects assez complémentaires du matérialisme. Ce
sont deux doctrines pragmatiques de l'action. La différence, c'est que le matérialisme aristotélicien peut se réduire
facilement au dilemme : un pôle dialectique, c'est l'objet d'attachement utile, l'autre pôle c'est le pôle cognitif du
raisonnement,- mais d'un raisonnement limité à cette utilisation pragmatique d'une pensée structurée et, surtout, qui
ne dérape pas vers l'idéalisme philosophique, ni vers l'affect.
Tandis que dans le bouddhisme, pour créer un objet inutile, illusoire, se virtualisant, détachable, on ne peut se
passer de la logique tétravalente et d'une certaine dose de philosophie qui est, au départ, la doctrine de la
production conditionnée. Pourquoi faut-il une doctrine ? Parce que, s'il n'y a pas de réflexion structurée formalisée
quelque part, il n'y a pas de transmission et le mouvement se dissout de lui-même, dans des anachorètes
déambulants solitairement au gré de leurs détachements successifs, tandis que la société se morcelle et se retrouve
prête à être envahie,- ce qui est quand même arrivé pour de bon aux Indes avec l'invasion musulmane et la
disparition du bouddhisme indien au début du 2e millénaire.
Articulations logiques
Je vais utiliser un schéma très simple pour décrire les différentes articulations logiques de tout cela, qui est le
schéma dont je me sers habituellement pour expliquer le développement des pôles fonctionnels du psychisme.
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