La pensée écologiste dans les 3 religions
(confucianisme, bouddhisme , taoisme )
Thái Công Tøng
Abstracts
This essay succinctly articulates the current environmental crisis, connects this crisis to
the notion of worldview, and then looks at the relationship between religion and
worldview. From there the essay moves on to discuss the problems and promise of the
three religions (bouddhism, taoism, confucianism) in terms of the environmental crisis,
the resources that religions have for dealing with this crisis, and the responses of religions
to the crisis .
1.Introduction
Les livres de Rachel Carson
Silent Spring
(1962), de Jonathan Schell
The Fate of the
Earth
(1982) et de Bill McKibben
The End of Nature
(1989) ont trait aux 3 différents
types de problèmes d’ordre environnemental, à savoir respectivement la contamination
toxique de la chaine alimentaire, les conséquences planétaires de la prolifération
nucléaire et l’impact du réchauffement global . Ces avertissements entrainent des
changements majeurs sur la politique nationale et internationale : l’interdiction de
l’utilisation du DDT comme insecticide, les traités de réduction des armes nucléaires
entre les Etats Unis et l’Union soviétique et le protocole de Kyoto pour la réduction des
émissions des gaz à effet de serre . Chaque livre utilise des arguments scientifiques pour
discuter des affaires d’intérêt public. En plus, il partage une même vue globale
holistique, c’est à dire interreliée, dans la mesure où chaque action influencant une
partie du système peut influencer sur d’autres parties du système .
Notre présent essai vise à étudier les contributions du confucianisme, du bouddhisme et
du taoisme, -autrement dit, le
tam giáo
des Vietnamiens- dans la pensée écologique
globale . Mais l’on se demande d’abord sur ce que signifie l’écologie .L’écologie est
étymologiquement la ‘ science de la nature’ (du grec
oïkos
: maison, et
logos
: discours).
Bien que ce terme n’existe que depuis peu dans la langue française (il fut proposé au
XIXe siècle par Ernst Haeckel, naturaliste disciple de Darwin), il véhicule un concept fort
ancien, qui considère la nature comme notre ‘ maison commune’. Une maison aux pièces
magnifiques : mers, forêts, montagnes, plaines, déserts... abritant des familles
nombreuses et variées, formant ensemble ce que l’on nomme aujourd’hui un écosystème.
Nous allons d’abord aborder sur les problèmes actuels d’ordre écologique puis voir
comment les 3 religions ont répondu à ces enjeux
2. Les enjeux écologiques dans le monde d’aujourd’hui
21. déforestation. La déforestation est la résultante de nombreux facteurs tels que
l’urbanisation, le transport, l’agriculture, l’industrie etc. Cette destruction du couvert
végétal entraine de nombreuses conséquences: perte de la biodiversité, aggravation de
1
l’érosion du sol, abaissement du niveau de la nappe phréatique, diminution de la vapeur
d’eau atmosphérique dans l’atmosphère, augmentation des risques d’inondation ... La
forêt constitue pourtant un réservoir génétique, sans lequel pas d’amélioration végétale .
La forêt et le sous bois contribuent aussi à la conservation médecinale. La forêt joue un
role primordial dans l`hydrologie car elle conserve l’eau, régularise les courants, atténue
les effets néfastes des inondations. La forêt protège les sols contre l’érosion. C’est la forêt
qui par son action photosynthétique qui absorbe le Co2 et libère l`oxygène dans
l’atmosphère. La forêt ou les parcs aident à diminuer la pollution
22 désertification . De nombreuses régions d’ Afrique ainsi que d’autres régions sèches
du monde sont exposées à la désertification, dû aux mauvaises pratiques de surpaturage,
déforestation et mauvaises pratiques d’irrigation..
23. réchauffement de la planète
Avec les industries polluantes utilisant du charbon comme énergie, l’émission des gaz à
effet de serre est inévitable . Ces gaz (CO2, CH4 ..) forment une couche supérieure dans
l’atmosphère, et emmagasinent la chaleur, d’où réchauffement . Ceci provoque la fonte
des banquises, entrainant la montée des eaux de mer et risquent d’inonder les parties
basses des deltas .
24. pollution. Avec la surconsommation, la surpopulation, les déchets sont plus
abondants. Ils sont soit brulés , soit enfouis et occasionnent de la pollution des nappes
souterraines. Les déchets des usines sont déversés directement dans l’eau sans aucune
mesure de protection. De même, la pollution de l’air dans les grandes villes est une chose
courante et occasionne des maladies du poumon ou des allergies.
3. Bouddhisme et écologie
31. Selon les 4 nobles vérités (
tÙ diŒu lj
) dont la première concernant la souffrance ou la
douleur, nous savons que l'existence telle que nous la connaissons, est souffrance
(kh°)
: la
naissance est souffrance, la vieillesse est souffrance, la maladie est souffrance, la mort est
souffrance, être uni à ce que l'on n'aime pas est souffrance, être séparé de ce que l'on aime
est souffrance.
De nos jours, l’on assiste à une
autre souffrance
avec la
détérioration du milieu vivant :
désertification, fréquence des typhons, inondation, sécheresse, engendrant une crise
alimentaire aigue. .
Si nous interprétons la deuxième noble vérité, à savoir la cause de la souffrance (
tÆp
),
l’on pourrait dire que la souffrance naît de l'envie. Le Bouddha estimait que les causes de
la souffrance humaine proviennent de l'incapacité à percevoir correctement la réalité.
Cette ignorance et les illusions qu 'elle provoque conduisent à l'avidité des hommes, à
leur désir de posséder davantage que les autres, à l'attachement
L’envie engendre le désir d’où l’avidité. Si on applique cette notion en écologie, l’on
perçoit que l’avidité dans notre société de consommation entraine la détérioration des
ressources naturelles, que ce soit la forêt, le bois, le pétrole, les ressources minières..
2
La troisième noble vérité est celle de la cessation de la souffrance (
diŒt
) et la quatrième
noble vérité est celle du chemin menant à la cessation de la souffrance (
Çåo
).
Ce chemin est le ‘noble sentier octuple’ (
bát chánh Çåo
) : pour parvenir à la cessation de
la souffrance, il faut pratiquer parfaitement les prescrits de moralité ou
gi§i
(parole
correcte, activité corporelle correcte, moyens d’existence corrects), de discipline mentale
ou
ÇÎnh
(effort correct, attention correcte, concentration mentale correcte) et de
compréhension-sagesse ou
huŒ
(opinion correcte, intention correcte) ; ce chemin permet
d'atteindre le nirvana. En particulier, l’attention correcte ou
chánh niŒm
(mindful
awareness) de l’universalité de la souffrance produit de l’empathie compassionnelle à
toutes les formes de vie.
32. Rappelons les 5 préceptes du bouddhisme (
ngû gi§i
), à savoir :
S'efforcer de ne pas nuire aux êtres vivants ni retirer la vie,
S'efforcer de ne pas prendre ce qui n'est pas donné,
S'efforcer de ne pas avoir une conduite sexuelle incorrecte  plus généralement
garder la maîtrise des sens,
S'efforcer de ne pas user de paroles fausses ou mensongères,
S'efforcer de ne pas ingérer tout produit intoxicant (drogue ) diminuant la maîtrise
de soi et la prise de conscience.
Le premier précepte nous dit de ne pas nuire aux êtres vivants ni retirer la vie. Or , la
destruction du couvert végétal implique aussi une destruction de la faune car celle ci doit
se servir des habitats naturels comme refuge. Avec la déforestation, la chasse, le
braconnage, la faune s’amenuise de jour en jour . Comme conséquence directe, le monde
assiste à la perte de la biodiversité
33. Les 3 poisons (
tam Ƕc)
. La religion bouddhiste cite souvent ces 3 poisons tels que
l’avidité (tham), la colère (sân) et l’ignorance (si). Ces 3 poisons sont la racine qui est
derrière nos souffrances.. Pour éviter cette souffrance, l`homme doit réaliser que le monde
est un tout interconnecté, interrelié: le monde animal doit se reposer sur le monde
végétal et celui ci doit s’appuyer sur le sol et l’eau pour se nourrir . Avec le Soleil qui
illumine la planète, les plantes vertes dégagent de l’oxygène, grace à leur photosynthèse .
Comme corollaire, nous devons conserver l’équilibre dans tous les écosystèmes terrestres
ou aquatiques de notre planète, sans quoi, le monde subit des désastres écologiques
auxquels nous assistons malheureusement tous les jours avec pollution atmosphérique,
réchauffement de la Terre. Si nous voulons apporter la paix au monde, nous devons
commencer par changer nos manières mauvaises, à savoir nous débarrasser de l’avidité,
de la haine et de l’ignorance .
34. D’après la religion bouddhiste, les caractéristiques de l'existence sont le non-soi (
ngã
), et l'impermanence (
vô thÜ©ng
). L'impermanence veut dire que tout est constamment
3
changeant, rien n'est figé. Ayant constaté les caractères éphémère ou impermanent de la
vie, le bouddhiste doit vivre au moment présent car le passé est déjà l’histoire et le futur
n’est pas arrivé. Avec le non-soi du bouddhisme, l’homme pourrait diminuer son
arrogance et sa cupidité : ‘ceci est à moi’, ‘ceci est moi’, ‘ceci est mon ego’. Le non-soi
veut dire qu'il n'y a rien qui ait une existence indépendante et réelle par lui-même car
pour les bouddhistes, ce qui semble un ‘moi’ n’est en réalité, de façon visible et sensible,
qu’une combinaison impermanente des 5 agrégats inséparables (
ngû uÄn
) qui sont le
corps (
s¡c
), les sensations (
th†
), les perceptions
(tܪng
), les sentiments (
hành
) et la
conscience (
thÙc
). Il n’y a pas une entité permanente et inchangeable, inclus le Soi. Ces
agrégats ( en pali.
khandha
) sont impermanents car soumis eux aussi à la ‘coproduction
conditionnée’ (
lš duyên khªi
), dont le principe est
:
si il y a ceci, cela arrive; si ceci
s’éteint, l’autre aussi s’éteint. Autrement dit, tout a un ensemble de causes et un
ensemble de conséquences.
35. Les 4 incommensurables (
tÙ vô lÜ®ng
) signifiant conduites ou sentiments pieux. Ici,
l’on cite: la bienveillance universelle (
), la compassion (
bi
), née de la rencontre de la
bienveillance et de la souffrance d’autrui, la joie sympathique (
) qui consiste à se
réjouir du bonheur d’autrui et l’équanimité (
) qui est un état de paix face à toute
circonstance.
La compassion est une vertu cardinale du bouddhisme. C'est le fait de ressentir ce que
ressentent les autres, comme si vous le viviez vous-même. Joies, douleurs, angoisses,
états d'âmes.. Les environnementalistes bouddhistes ne prônent pas une dominance
hiérarchique de l’homme sur la nature mais plutôt une compassion empathique avec la
nature, envers les plantes et animaux ainsi que la Terre elle même. Comme l’a si bien dit
un moine thailandais, Buddhadasa : ‘Le cosmos entier est une coopérative . Le soleil, la
lune, les étoiles vivent ensemble comme une coopérative . Ceci est aussi vrai pour les
hommes et animaux, plantes et la terre .Quand on réalise que le monde est une
coopérative mutuelle, interdépendante alors on peut bâtir un environnement meilleur . Si
nos vies ne sont pas basées sur cette vérité, alors on va périr.
Dans le Bouddhisme Mahayana, les fidèles consomment uniquement le végétal, à savoir
fruits et légumes . Justement, ce végétalisme se porte au secours de l’environnement.
En effet, l’élevage bovin consomme beaucoup d’espace; il est la cause de déforestations
massives, il consomme plus de 8% des utilisations humaines d’eau à l’échelle mondiale,
eau destinée à l’irrigation des cultures fourragères et il est à l’origine d’un important
dégagement de gaz à effet de serre du^ à l’expansion des paturages et des terres arables
pour les cultures fourragères, à la fermentation des ruminants et au fumier.
36.Quand on parle de l’écologie dans le bouddhisme, l’on pense immédiatement sur le
zen
(mot japonais) ou
thiŠn
(mot vietnamien) ou
chan
(mot chinois). Dans la tradition
Zen des monastères, le calme des forets, la quiétude de l’environnement invitent à la
méditation et la contemplation .Ceci revêt une importance particulière de nos jours car la
vie trépidante des villes, le manque d’espace vert dans les agglomerations urbaines ont
4
occasionné un stress immense, prélude à toutes sortes de malaladies. Il suffit ici de
rappeler qu’ il y a 2500 ans, le BouÇha a tout abandonné la vie heureuse des palais
impériaux pour chercher une vie simple et spirituelle et que sur le chemin, il a cherché
refuge auprès des forêts. Vers la fin, il a trouvé l’ illumination sous un arbre, le Bodhi.
Après l’ ìllumination, le Bouddha et ses disciples continuent à vivre dans des forêts .
Selon la tradition, le Bouddha préconise des mois de retraite pendant la saison des pluies,
car durant cette saison, trop de moustiques: on èvite de tuer des moustiques et piètiner
les jeunes pousses d`herbes. Tous les textes des sutras ont fait directement allusion aux
forêts de Shorea, de manguiers, de Bambous là où le Bouddha enseigne à ses disciples
durant plusieurs années avant sa mort .
4. Taoisme et écologie. Des trois courants de pensée dominants dans la Chine
ancienne (taoïsme, bouddhisme, confucianisme), le taoïsme est certainement celui qui
reflète la plus grande sensibilité écologique, assez proche en certains points du courant
‘naturaliste’ qu’a connu l’Occident avec Lamartine ou Rousseau, qui enseignait ‘qu’on ne
peut commander à la nature qu’en lui obéissant’. Le livre le plus connu du taoisme est
sans nul doute le
ñåo ñÙc Kinh
qui est encore une source d’inspiration pour ceux qui
recherchent la perfection spirituelle sans être liés par un dogme religieux. Taoïsme vient
du mot Tao qui signifie voie, chemin. Le Tao (
ñåo
), est le "Principe d'ordre" de la nature
toute entière, mais aussi de tout élément naturel qui se manifeste dans l'alternance
régulière des saisons et dans celle des jours et des nuits. C'est le cycle du froid et du
chaud, de l'ombre et de la lumière, du féminin et du masculin, du flux et du reflux des
marées..
Le Tao façonne chaque chose grâce à sa puissance et sa vertu. Tout vient du Tao, il est
au cœur de chaque chose et c'est lui qui leur donne la vie. C’est la Vérité première et
ultime, à la fois immanente et transcendante, qui est à la source de toute vie. Le mot Tao
n’est qu’un terme commode employé pour nommer une chose essentiellement
innommable et au-delà du pouvoir du langage :
La Voie que l’on peut exprimer par des mots n’est pas la Voie éternelle .Les noms par
lesquels il est nommé ne sont pas des noms éternels . (ñao ñÙc Kinh 1)
Alors que le Taoisme est à l'origine des théories du Yin/Yang(
âm dÜÖng)
et des cinq
éléments (
Ngû hành
) à savoir le métal, le bois, l’eau, le feu et le métal (
kim, m¶c, thu›,
hoä, th°
), et a des implications un peu partout, que ce soit dans la géomancie, la
gastronomie, l’art militaire , nous croyons que l’un des aspects les plus marqués en
écologie du Taoisme est sans doute le non-agir:
Le non-agir ne signifie pas ne rien faire mais ne rien faire qui soit en contradiction avec
la nature. Cela veut aussi dire de s’abstenir d’activités contraires à la Nature, de non-
interférence dans le cours des choses. Le non-agir implique le respect de l’ordre naturel
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