S olutions MESURES PHYSIQUES Liquides chargés : l’optique “voit” tout Les suspensions rencontrées dans les milieux industriels ne sont pas faciles à analyser.La spectrophotométrie UV et la granulométrie ont chacune leur champ d’application.En les utilisant conjointement et en corrélant les résultats obtenus,il est possible de comprendre les phénomènes observés. ▼ Liquides chargés de particules minérales ou organiques, de forme granulaire ou fibreuse, les suspensions sont présentes dans tous les process industriels. Il est souvent intéressant de comprendre les conditions de leur stabilité, leur évolution dans le temps et leur composition. De nombreuses techniques de mesures peuvent être utilisées pour cela : la granulométrie et la spectrométrie ultraviolet, deux méthodes optiques, apportent beaucoup d’enseignements, comme le prouvent les travaux réalisés à l’Ecole des Mines d’Alès, et appliqués dans le cadre de coopérations avec des industriels… Q ue ce soit comme produit fini, intermédiaire de production, sous produit ou effluents industriels, les suspensions sont omniprésentes dans la plupart des secteurs industriels (pharmacie, agroalimentaire, matériaux, traitements de l’eau ou des déchets et rejets industriels…). Ces milieux sont généralement des mélanges de particules minérales ou organiques, de forme granulaire ou fibreuse, ainsi que de substances solubles ou adsorbées à la surface des particules. D’une façon générale, la stabilité des suspensions, influencée par de nombreux phénomènes comme l’adsorption, la solubilisation, l’agglomération/dispersion, conditionne aussi bien la qualité des produits synthétisés que le dimensionnement et la mise en œuvre de procédés comme les opérations de séparation. L’identification des différents composés présents au sein de ces milieux, leur caractérisation chimique et granulométrique, ainsi que leur stabilité, s’avère donc indispensable si on veut comprendre la dynamique de ces MESURES 753 - MARS 2003 systèmes complexes et choisir, dimensionner et contrôler les opérations unitaires dans un procédé industriel. Pour étudier les suspensions, il n’existe pas de méthode universelle et il faut donc en utiliser plusieurs. En associant deux méthodes optiques, la granulométrie laser et la spectrophotométrie UV, il est possible de caractériser qualitativement et quantitativement les suspensions dans leur globalité, c’est-àdire du domaine particulaire (millimètre) à la matière soluble (nanomètre). Simples et rapides, elles permettent d’identifier les différentes fractions granulaires et solubles, mais également de mettre en évidence les transferts de matière entre ces différentes fractions, contribuant ainsi à la compréhension des phénomènes influençant la stabilité de tels systèmes. Bien connaître l’interaction lumière-matière Lors de l’interaction d’un faisceau lumineux avec une particule solide, la lumière est renvoyée dans toutes les directions de l’espace. Ce phénomène est la diffusion dont les trois composantes principales sont la réfraction, la réflexion, et la diffraction. La lumière peut également être absorbée. Ces interactions rayonnement/matière dépendent principalement du rapport entre le diamètre des particules (d) et la longueur d’onde du faisceau lumineux (λ). Un paramètre (α) est généralement utilisé pour préciser les domaines de prépondérance de chacun des phénomènes précités. Il est lié aux précédents par la relation (1) : α≈ πd λ En fonction de la valeur du paramètre α et de la longueur d’onde (λ) L’essentiel de la source de lumière utilisée (ultraviolet, visible, proche infrarou- Le couplage de la spectrophotométrie UV et de la grage), trois domaines nulométrie permet de dimensionnels peuvent caractériser des suspensions être considérés : industrielles - le domaine des parti- Analyse de tous types de particules, de la matière soluble cules submicroniques (d aux particules millimétriques < 1 µm) où α est inférieur à 0,3. Dans ce cas, Mise en évidence les phénomènes d’agglomération, de le modèle optique utilisé dispersion, d’adsorption et est la diffusion de Raysolubilisation leigh, modèle dans lequel Autres paramètres étudiés : la lumière est diffusée forme ou surface des partidans toutes les directions cules, pH, conductivité ionique… de l’espace. - le domaine des parti- 31 Solutions Deux techniques pour mesurer un large spectre de particules laser), la diffusion de Rayleigh intervient pour des particules inférieures à 70 nm et la diffraction de Fraunhofer pour des particules d’une taille supérieure à 7 µm. Pour la granulométrie laser et la spectrophotométrie UV, la diffusion peut donc être observable pour les fins colloïdes alors que la diffraction l’est pour les supracolloïdes et matières décantables. Des techniques standard La spectrophotomètrie UV et la granulométrie sont deux techniques très complémentaires.L’identification des fractions décantables,supracolloïdales et colloïdales est possible par granulométrie laser,alors que les fractions des fins colloïdes et des matières solubles sont plus particulièrement caractérisées par spectrophotométrie UV. cules dont le diamètre est supérieur à plusieurs microns (α > 30). Les lois de l’optique géométrique et de la diffraction sont alors applicables. La lumière issue de l’interaction entre le rayonnement et la particule est essentiellement diffractée vers l’avant de la particule par rapport au faisceau incident. La théorie de Fraunhofer permet de corréler la valeur de l’angle de diffraction au diamètre de la particule. - le domaine des particules microniques où α est compris entre 0,3 et 30. Ce domaine intermédiaire correspond à la limite de validité des deux domaines précédents (diffusion de Ray- 32 leigh et diffraction de Fraunhofer). Dans ce cas la diffusion peut également être fortement influencée par les phénomènes de réfraction et d’absorption pris en compte dans la théorie complexe de Lorenz-Mie. En résumé, pour des longueurs d’onde comprises entre 200 et 350 nm (utilisées en spectrophotométrie UV), la diffusion de Rayleigh intervient respectivement pour des dimensions de particules inférieures à 20 – 30 nm et la diffraction de Fraunhofer pour des dimensions particulaires supérieures à 2 – 3 µm. Pour une longueur d’onde de 750 nm (utilisée en granulométrie Granulométrie laser. Les analyses granulométriques ont été réalisées avec un granulomètre laser (modèle LS 230 de Beckman Coulter), le volume de la cellule d’analyse étant de 125 ml. Le principe physique de détermination de la taille des particules est basé sur la dispersion d’un rayonnement monochromatique, d’une longueur d’onde de 750 nm, par les particules solides de la suspension analysée. La figure de diffraction ainsi obtenue est caractéristique de la distribution granulométrique pour une plage de diamètres mesurables allant de 0,04 à 2000 µm. Les théories mathématiques interprétant la lumière diffractée et diffusée par l’échantillon sont modélisées pour des sphères, respectivement par la théorie de Fraunhofer et la théorie de Mie. Deux conditions expérimentales sont étudiées. Tout d’abord, la suspension est analysée après avoir arrêté l’agitation qui maintient les particules en suspension. Ceci permet de réaliser l’analyse dans des conditions proches de celles employées en spectrophotométrie UV. Une seconde analyse est réalisée sur le même échantillon, en maintenant l’agitation mécanique pendant la mesure (ceci correspondant aux conditions usuelles d’utilisation du granulomètre). Spectrophotométrie UV. La spectrophotométrie UV permet de caractériser globalement une suspension, chimiquement et physiquement. En effet, un spectre UV est à la fois une réponse chimique (due à la présence de composés comportant des groupements chromophores) et physique (due à la diffusion de la lumière par les particules solides). L’acquisition des spectres UV a été réalisée entre 200 et 350 nm avec un spectrophotomètre UV-visible de laboraMESURES 753 - MARS 2003 Solutions toire (Anthélie Light, Secomam). La bande passante est de 2 nm et la vitesse de balayage de 1 800 nm/min, vitesse choisie du fait de la présence de matières en suspension rapidement décantables. La cuve utilisée est en quartz Suprasil et possède un trajet optique de 10 mm. Si nécessaire, pour éviter une saturation du spectre, les échantillons sont dilués avec de l’eau déminéralisée. Les spectres sont exploités selon la méthode de déconvolution développée par Thomas O. (1995) qui considère que tout spectre est une combinaison linéaire de spectres de référence. La base de spectres de référence utilisée est constituée de spectres adaptés aux suspensions étudiées. Ces spectres sont représentatifs des MeS (matières solides en suspension), des colloïdes (de taille comprise entre 1 et 0,025 µm), des composés solubles (taille inférieure à 0,025 µm), des nitrates et des détergents. Cette méthode permet de quantifier différents paramètres globaux (MeS,…) et spécifiques (nitrates…). Pour faciliter les comparaisons de spectres (sans effet d’échelle), il est intéressant de les “normer” (aire sous spectre égale à 100 ua. nm). Deux types de suspensions Les suspensions étudiées sont des eaux usées urbaines, composées de particules granulaires, de fibres, d’hétéro-agglo- mérats pouvant atteindre des dimensions millimétriques, de micro-organismes… Cette phase solide, très hétérogène, est principalement de nature chimique organique (90-100 %). Deux suspensions ont été considérées, issues de la décantation (1 h) en cône d’Imhoff d’un échantillon représentatif d’une eau usée urbaine. La suspension A correspond au surnageant : la concentration en solides est relativement faible (MeS = 100 mg. l-1) et il n’y a pas de matières décantables. Pour la concentration B, c’est l’inverse : on y trouve pas mal de particules solides (MeS = 670 mg. l-1) et décantables. Les deux suspensions obtenues après décantation ont été diluées 5 fois pour les besoins des analyses. Dimensionnement des particules par la granulométrie. L’analyse granulométrique montre que les deux suspensions sont principalement constituées de particules supracolloïdales dont le diamètre varie entre 1 et 100 µm, avec une répartition monomodale centrée sur 30 µm. La suspension B présente un étalement granulométrique plus important caractérisé par une distribution multimodale et des particules de dimensions supérieures à 100 µm. La granulométrie laser est devenue la technique la plus communément utilisée pour mesurer la taille des particules du domaine submicronique au millimètre. Malgré tout, comme souvent en Mécanisme de diffusion de la lumière par une particule solide La nature de l’interaction du faisceau avec les particules présentes dans la solution dépend essentiellement de la longueur d’onde du faisceau et de la taille des particules. mesure, on oublie que l’on fait parfois travailler l’appareil à ses limites et que les résultats peuvent être entachés d’in- Des applications concrètes L’approche métrologique menée dans les laboratoires de l’Ecole des Mines d’Alès est actuellement appliquée dans le cadre d’un projet ayant pour objectif le recyclage des eaux et matières dans les circuits hydrauliques de l’industrie papetière (projet Recymeau labélisé par le réseau Riteau). L’enjeu est important car ces matières (fibres de cellulose et charges minérales) représentent 3 % de la production et engendrent des boues dont la gestion est de plus en plus problématique. Quatre autres partenaires sont également associés à ce projet : l’Ecole Française de Papeteries et des industries Graphiques, le Centre Technique du Papier, MESURES 753 - MARS 2003 la société Orélis et les Papeteries de Lancey. En étroite liaison avec les travaux sur le projet Recymeau, deux thèses sont en cours : - C. Berho : “Caractérisation des fractions hétérogènes au cours de la transformation de la matière organique d’origine végétale”. Soutenance prévue en 2003. - S. Bayle : “Etude de milieux hétérogènes issus de l’industrie papetière. Mise en évidence de contraste de propriétés en vue de séparations sélectives”. Soutenance prévue en 2004. Une autre étude est en cours de développement dans les laboratoires de l’Ecole des Mines d’Alès, visant à caractériser et maîtriser les traitements chimiques de surface de charges minérales, utilisées dans l’élaboration de polymères thermoplastiques chargés. Cette étude permettra notamment d’optimiser l’emploi des surfactants, minimisant ainsi les phénomènes d’agglomération responsables de la détérioration des propriétés mécaniques, d’ignifugation, de vieillissement, etc. de ces matériaux composites. Plusieurs partenaires industriels sont concernés : Pechiney Electrométallurgie, Talc de Luzenac, Vétrotex International, Alcatel, Multibase, Rhodia… 33 Solutions Comparaison des résultats des deux techniques d’analyse certitudes importantes. Ici, il faut s’interroger sur la validité de la mesure lorsque l’on a affaire à des particules de petites tailles. La théorie de la diffraction de Fraunhofer présente en effet une limite physique lorsque la dimension des particules est voisine de la longueur d’onde du laser, λ. Le modèle optique de diffraction peut être appliqué sans erreur uniquement si le paramètre de taille α est supérieur à 30, valeur correspondant à un diamètre de particules d’environ 7 µm lorsque λ est égal à 750 nm (voir formule 1). Pour des dimensions inférieures à 7 µm, l’analyse granulométrique peut donc présenter certaines incertitudes, particulièrement lorsque les particules sont transparentes. Dans ce cas, les phénomènes de réfraction et réflexion peuvent perturber le résultat obtenu par le modèle optique de diffraction de Fraunhofer. Compte tenu de l’hétérogénéité et de la méconnaissance des suspensions étudiées ici, il n’est pas possible de déterminer l’indice de réfraction des particules, et par là même l’application de la théorie de Mie, qui permettrait de prendre en compte ces phénomènes. Pour s’assurer malgré tout de la pertinence des résultats obtenus pour les particules de petite taille, l’existence de particules colloïdales a été confirmée par un photosédimentomètre (HoribaCapa 300), dont le principe physique d’analyse n’est pas basé sur des phénomènes optiques mais sur la loi de Stokes. Ces mesures complémentaires mettent clairement en évidence la validité des mesures obtenues par granulométrie laser pour des diamètres inférieurs à 7 µm. Caractérisation physique et chimique grâce à la spectrophotométrie UV. Intéressons-nous maintenant aux résultats obtenus par spectrophotométrie UV. L’allure des spectres d’absorption, décroissante et monotone, s’explique par la présence de nombreux composés (en faible quantité) absorbant dans le domaine UV et par la présence de particules qui diffusent la lumière sur l’ensemble du domaine spectral étudié. On note cependant Les suspensions A et B étudiées ont été obtenues après décantation en cône de Imhoff.Toutes deux comportent des particules solides (MeS), mais avec des concentrations différentes.Seule la suspension B contient des particules décantables de taille supérieure à 100 µm, qui diffusent peu la lumière. 34 quelques structurations, dues aux détergents responsables d’un épaulement à 225 nm ou à des substances de types humiques détectables à 270 nm. La spectrophotométrie UV permet donc de faire à la fois une mesure physique (tille des particules) et chimique (identification de la nature de certains types de substances). Plus précisément, la pente observée entre 200 et 240 nm s’explique essentiellement par la présence de particules colloïdales ou supracolloïdales et de composés solubles. En effet, plus les particules sont petites, plus elles diffusent la lumière et plus la pente initiale du spectre est importante. La suspension B présente une absorbance plus élevée que la suspension A (surnageant), sur l’ensemble du domaine spectral du fait de la concentration plus importante en MeS. Cependant, la différence d’absorbances (ou des valeurs des coefficients de contribution des MeS) n’est pas proportionnelle à la concentration en MeS. Cela s’explique par le fait que les matières en suspension (MeS) de la fraction B sont essentiellement composées de matières décantables, de taille supérieure à 100 µm qui diffusent peu la lumière. Cela signifie que la diffusion de la lumière par les MeS est essentiellement due aux supracolloïdes. Notons par contre que la quantité de colloïdes est comparable dans les deux suspensions étudiées alors que les détergents sont en quantité légèrement supérieure dans la suspension B, ce qui peut s’expliquer par leur adsorption à la surface des particules décantables. La “normation” du faisceau de spectres (en rendant égales l’aire sous les spectres) permet de comparer les deux suspensions en s’affranchissant des effets d’échelle. On constate que la présence de particules décantables dans la suspension B a pour effet de diminuer la pente avant 240 nm. L’agitation change beaucoup de choses… En conclusion, si la spectrophotométrie UV ne permet pas actuellement de discriminer les supracolloïdes des matières décantables (détectées par granulométrie laser), on constate cependant l’importance des supracolloïdes dans la réponse des matières en suspension. MESURES 753 - MARS 2003 Solutions Effets de l’agitation des suspensions sur les résultats de l’analyse granulométrique Suspension A Suspension B Aire < 1 µm Aire < T58µm Aire > T58µm Aire totale Aire < 1 µm Aire < T101µm Aire > T101µm Aire totale Sans agitation Avec agitation Différence 2 96 13 109 1 49 57 106 2 86 24 110 1 60 47 107 0 -10 +11 1 0 +11 -10 1 Ce tableau est issu des courbes ci-dessus et il donne les surfaces (aires), en %, sous chacune des courbes. Les valeurs négatives ou positives représentent respectivement la disparition ou la formation de particules. Dans tous les cas, ces variations de dimensions s’effectuent dans les mêmes proportions. L’agitation mécanique a pour effet de transformer les suspensions,et l’analyse granulométrique met en évidence ces transformations.Les différences apparaissent surtout au niveau des particules MeS,dont le diamètre est supérieur à 100 µm. Les courbes démontrent que les particules MeS de la solution A (qui sont uniquement des particules surpacolloïdales) ont tendance à s’agglomérer pour former des particules de taille plus importante. Pour la suspension B,dont les particules MeS sont constituées de particules surpacolloïdales et de particules décantables,les courbes montrent que les particules MeS décantables (d’un diamètre supérieur à 100 µm) ont tendance à se disperser pour former des particules surpacolloïdales,de taille plus petite. Afin d’étudier la stabilité de ces suspensions sous l’effet d’une agitation mécanique, des analyses granulométriques ont été systématiquement réalisées pour deux conditions expérimentales différentes : avec et sans agitation mécanique. Les suspensions prélevées directement en sortie du granulomètre sont ensuite analysées par spectrophotométrie UV. Transferts de matière entre les fractions supracolloïdale et décantable. Les courbes des analyses granulométriques des suspensions A et B, réalisées avec et sans agitation mécanique, montrent qu’aucune modification n’est observable pour la fraction colloïdale. MESURES 753 - MARS 2003 Par contre, l’agitation mécanique provoque une agglomération des particules supracolloïdales de la suspension A. Ce phénomène se traduit par une diminution du pourcentage volumique du mode à 30 µm et par la formation d’agglomérats de dimensions comprises entre 100 et 1 000 µm (particules décantables, alors qu’au départ cette suspension n’en contenait pas). La floculation des supracolloïdes est un comportement bien connu dans le domaine du traitement de l’eau, en partie dû à la forme fibreuse des particules. Pour la suspension B, la plus chargée en MeS et particules décantables, le transfert de matière est inversé. Dans ce cas, l’apport d’énergie mécanique disperse en partie les agglomérats décantables (>100 µm) pour former des particules supracolloïdales. Ce comportement est probablement dû à la forte concentration initiale d’agglomérats fibreux (MeS Pour en savoir plus = 670 mg. l -1 ), soit 7 fois supérieure à celle Sur la caractérisation des suspensions de la suspension A -1 Thomas O. (1995) Métrologie (100 mg. l ). En effet, des eaux résiduaires, Ed Cebeces agglomérats peuvent doc/Tec et Doc, Liège/Paris. en partie se dissocier - Coussot P. et Ancey C. (1999) lors de l’agitation de la Rhéophysique des pâtes et des suspension, mais égale- suspensions, EDP Sciences, Les ment disperser au sein Ulis. du milieu, des particules -Allen T. (1990) Particle size supracolloïdales préala- measurement, fourth ed., Chapman and Hall. blement piégées. Les deux courbes de dis- - Azéma N., Pouet M-F., Berho C., O. (2002) Wastewater tribution granulomé- Thomas suspended solids study by optitrique, avec agitation et cal methods. Colloids and Sursans agitation, mettent faces A : Physicochemical and en évidence un point Engineering Aspects, 204, singulier noté “point T”, 131-140. qui correspond à l’inter- Sur les techniques d’analyse section des deux courbes - www.secomam.com/ granulométriques (avec - http://www.beckman.com/ agitation et sans agita- - http://www.malvern.co.uk/ tion). Pour estimer et valider la relation qui peut exister entre la disparition (ou la formation) des particules supracolloïdales et la formation (ou la disparition) d’agglomérats décantables, les différences des aires sous les deux courbes, avant et après le point T, ont été calculées. Elles représentent le pourcentage volumique de particules dont le diamètre est inférieur ou supérieur au diamètre correspondant au point T (dTµm). Il est intéressant de noter que ce point, positionné à une dimension de 58 µm pour la suspension A et de 101 µm pour la suspension B, représente la frontière dimensionnelle, habituellement définie pour représenter la limite entre les fractions supracolloïdales et décantables. Transfert de matière entre les différentes fractions. La comparaison des résultats obtenus sans agitation et avec agitation est également intéressante lorsque l’on pratique une analyse par spectrophotométrie UV. Les résultats montrent qu’après agitation, les spectres UV des deux suspensions présentent à la fois une 35 Solutions Effets de l’agitation des suspensions sur les résultats de l’analyse spectrophotométrique suspension. Ces phénomènes peuvent être à l’origine de l’évolution de la matière organique dans les réseaux d’assainissement ou lors du vieillissement des échantillons au cours de leur conservation. Des comparaisons instructives L’agitation mécanique des suspensions se caractérise par des transferts de matière que met en évidence l’analyse par spectrophotométrie UV diminution de l’absorbance entre 240 et 350 nm et une augmentation de la pente initiale entre 200 et 240 nm. La première observation tend à montrer que l’agitation conduit à la formation de plus grosses particules (MeS, diffusant moins la lumière), probablement par agglomération. La deuxième observation signifie qu’il y a une dispersion des colloïdes vers la fraction de dimension inférieure à 0,025 µm (fins colloïdes et matière soluble). Il peut y avoir éventuellement une dispersion de supracolloïdes, mais en moindre mesure car ces particules ont des tailles relativement importantes. Ces interprétations sont confirmées par le suivi des coefficients de contributions obtenus par déconvolution des spectres UV. En effet, quelle que soit la 36 suspension étudiée, on constate une diminution du coefficient de contribution des colloïdes (>0,025 µm) avec une augmentation à la fois de la fraction “soluble” (qui contient également des fins colloïdes, de taille inférieure à 0,025 µm) et des matières en suspension (MeS) de taille supérieure à 1 µm. On note cependant que dans la suspension B, c’est le phénomène de transfert de matière vers la fraction “soluble” qui prédomine. Cette suspension plus concentrée semble limiter les transferts de matière entre les diverses fractions particulaires, probablement du fait d’un piégeage des colloïdes et des supracolloïdes au sein des matières décantables. Ces transferts de la fraction colloïdale vers les fractions “soluble” et “MeS” expliquent l’évolution des spectres et confirment l’instabilité de ce type de En comparant les spectres UV et les distributions granulométriques, il est possible d’expliquer l’effet de l’agitation sur la suspension A. La diminution de la population supracolloïdale (autour de 30 µm) peut en effet s’expliquer à la fois par une agglomération de ces particules et par leur dispersion conduisant à la formation de fins colloïdes de dimension inférieure à 0,025 µm. Pour la suspension B, les résultats peuvent sembler contradictoires puisque l’analyse granulométrique met en évidence une dispersion des particules décantables (>100 µm) conduisant à une augmentation de la population supracolloïdale (mode à 30 µm) alors que la spectrophotométrie UV indique une augmentation de la taille des MeS (> 1 µm). Sachant que la réponse des MeS est essentiellement due aux supracolloïdes, le phénomène aurait dû se traduire, sur le spectre UV, par une augmentation de l’absorbance sur l’ensemble du domaine, avec une pente initiale plus prononcée. On observe bien une pente plus forte, qui peut s’expliquer également par un transfert de matière vers la fraction “soluble” mais l’absorbance après 240 nm est fortement diminuée. Ce dernier point met en évidence la complexité des phénomènes mis en jeu et l’intérêt de disposer des deux méthodes optiques permettant, d’une part, de caractériser les particules sur un large spectre granulométrique, pour prendre en compte tous les transferts possibles de matière, et d’autre part, d’améliorer la compréhension de la réponse physique des spectres UV, liée à la diffusion de la lumière par les particules solides. Nathalie Azema* Marie-Florence Pouet** Ecole des Mines d’Alès *Centre des Matériaux de Grande Diffusion, **Laboratoire Génie de l’Environnement Industriel, Ecole des Mines d’Alès 6, avenue de Clavières 30319 Alès Cedex [email protected] [email protected] MESURES 753 - MARS 2003