© MASSON Maladie d’Alzheimer : les lésions et leur progression 4S21
C. DUYCKAERTS et coll.
Scheff et Price, 1993). L’analyse de protéines synaptiques
a montré que les composants membranaires (synaptotag-
mine, SNAP-25, and syntaxine 1/HPC-1) sont peu dimi-
nués (environ 10 p. 100 des témoins) au contraire des
composants vésiculaires (synaptobrévine and synaptophy-
sine – 30 p. 100 des témoins) (Shimohama et al., 1997).
L’immunohistochimie de la synaptophysine a montré une
baisse marquée et précoce : sa liaison statitistique avec la
détérioration intellectuelle a été jugée excellente par certains
(Terry et al., 1991) qui en font le meilleur corrélat de la
démence. Elle a au contraire été jugée inférieure à celle
observée pour les dégénérescences neurofibrillaires par
d’autres (Dickson et al., 1995). L’immunoréactivité de la
SNAP-25 reste élevée même dans les cas sévèrement
touchés (Dessi et al., 1997), ce qui est compatible avec le
maintien d’une surface d’apposition synaptique élevée,
observée en microscopie électronique.
LES MOLÉCULES
Plusieurs protéines ont été récemment impliquées dans la
pathogénie du syndrome d’Alzheimer.
Les présénilines
De nombreuses mutations ont été identifiées dans les cas
familiaux de syndrome d’Alzheimer. Les plus fréquentes
modifient la structure d’une protéine jusqu’alors inconnue, la
préséniline 1 dont le gène est porté par le chromosome 14.
Elles sont responsables de démences particulièrement
précoces (Alzheimer’s Disease Collaborative Group, 1995 ;
Campion et al., 1995). Il s’agit d’une protéine comportant 6
ou 8 domaines transmembranaires, qui semble intervenir
dans le métabolisme de l’APP (Cruts et al., 1996). Elle inte-
ragit avec d’autres protéines comme les caténines (Zhang et
al., 1998). L’immunohistochimie révèle la présence de
préséniline 1 dans une population de neurones corticaux et
dans quelques prolongements en dégénérescence de la
couronne des plaques séniles (Uchihara et al., 1996). Pour
certains, les neurones contenant de la préséniline serait plus
résistants et plus aptes à survivre (Giannakopoulos et al.,
1997), un résultat qui est encore l’objet de controverses
(Hendriks et al., 1998). La préséniline 2 (dont le gène est
sur le chromosome 1), quant à elle, est mutée chez des
patients descendant de familles Allemandes, émigrées en
Russie, puis aux États-Unis (« Volga German »). Le role
des présénilines est encore mal compris. Elles ont des
homologues chez C. Elegans (spe-4 and sel-12) : spe-4
intervient dans la spermatogenèse en régulant le traffic
protéique dans l’appareil de Golgi ; sel-12 joue un rôle dans
la ponte par un mécanisme cellulaire qui fait intervenir la
voie de signalisation de Notch. La préséniline 1 humaine
peut restituer une fonction normale aux mutants sel-12
(revue dans Mattson et al., 1998).
L’apolipoprotéine E
Plusieurs isoformes de l’apolipoprotéine E sont connues
E2, E3 et E4, codées par les gènes correspondants ε2,
ε3, ε4. Le risque de maladie d’Alzheimer est presque
doublé chez les hétérozygotes ε4 et décuplé chez les homo-
zygotes (Saunders et al., 1993 ; Slooter et al., 1998). La
présence d’ApoE dans la plaque sénile avait été remarquée
avant la découverte du facteur de risque (Namba et al.,
1991). Elle est aussi trouvée dans les macrophages au sein
ou à proximité de la plaque (Uchihara et al., 1995 ; Uchi-
hara et al., 1996 ; Uchihara et al., 1996 ; Dickson et al.,
1997). Les dépôts de peptide Aβ sont plus abondants chez
les patients dont le génotype comporte un ou deux
allèles ε4 (Schmechel et al., 1993 ; Berr et al., 1994).
L’ApoE pourrait jouer le rôle de protéine chaperone
c’est à dire qu’elle pourrait, à la manière d’un moule,
donner au peptide Aβ sa configuration spatiale tridimen-
sionnelle (Wisniewski et Frangione, 1992). En faveur de
cette hypothèse, la quantité de peptide Aβ, observée chez
les souris transgéniques portant un gène muté de l’APP, est
beaucoup moins importante lorsque le gène de l’ApoE a
été inactivé (croisement souris transgénique pour l’APP,
knock-out pour l’ApoE) (Bales et al., 1998).
L’alpha-synucléine ou NACP
(non amyloid component of the plaque)
L’analyse biochimique du cœur de la plaque sénile a mis
en évidence une protéine différente du peptide Aβ (Ueda et
al., 1993). Sa séquence a une grand homologie avec une
protéine synaptique la synucléine alpha (Clayton et
George, 1998). Une mutation de la synucléine alpha a été
trouvée dans plusieurs familles de maladie de Parkinson
familiale (Polymeropoulos et al., 1997). Les anticorps anti-
synucléine marquent les corps de Lewy et des prolonge-
ments nerveux anormaux rencontrés dans la maladie de
Parkinson et dans la démence avec corps de Lewy (les
« Lewy neurites ») (Spillantini et al., 1997; Lippa et al.,
1998 ; Spillantini et al., 1998). Ils marquent aussi les inclu-
sions gliales des atrophies multisystématisées (Waka-
bayashi et al., 1998). L’alpha-synucléine met donc à jour
des rapports inattendus entre la maladie de Parkinson, la
maladie d’Alzheimer et les atrophies multisystématisées.
LES CORRÉLATIONS
CLINICO-PATHOLOGIQUES
L’analyse de groupes de sujets âgés examinés de façon
prospective normaux ou souffrant d’une démence de
sévérité variée a permis d’établir des corrélations entre
la densité des lésions que nous venons d’envisager et la
détérioration intellectuelle (Blessed et al., 1968 ; Wilcock
et Esiri, 1982 ; Duyckaerts et al., 1986 ; Delaère et al.,
1989 ; Delaère et al., 1990 ; Delaère et al., 1991 ; Dickson
et al., 1995 ; Nagy et al., 1995 ; Bancher et al., 1996 ; Berg