Médecine d'Afrique Noire : 1997, 44 (10)
sur le sein droit et les aires ganglionnaires axillaires, sus-
claviculaires et mammaires-internes, ainsi qu’une curie-
thérapie de 20 grays au niveau du lit tumoral initial.
Madame N.V. quitte l’hôpital le 28 mai 1991 après un bilan
de contrôle normal, un lymphodème modéré du bras droit
et une alopécie qui régresseront progressivement. Une
surveillance à long terme est instituée et respectée avec
examen clinique, bilan biologique et radiologique, écho-
graphie abdominale, I.R.M. et scanner tous les 6 mois à
Paris. Tous ces examens étant demeurés normaux, Madame
N . V. est autorisée 3 ans plus tard à tenter une nouvelle
grossesse.
Le 9 juin 1994, elle consulte pour une aménorrhée de 12
semaines. L’examen clinique et l’échographie sont en
faveur d’une grossesse évolutive. Celle-ci se déroule nor-
malement et elle accouche à 40 semaines d’un garçon
pesant 3.200 g, Apgar 10-10. Les suites de couches sont
normales. Les examens de contrôle à Paris 4 mois et un an
plus tard sont normaux, soit 5 ans après le diagnostic initial
de cancer du sein.
DISCUSSION
Fréquence : Les données de la littérature montrent une
fréquence variable selon les pays. La rareté de la décou-
verte du cancer du sein au cours de le grossesse - qui n’est
pas toujours recherché- explique cette variation.
DARGENT (5) l’a estimé à 2,1% sur 471 cancers du sein
en 1972, soit 1 à3/10.000 grossesses.
B A R R AT (2) en 1991 a trouvé 750 cancers du sein. En
Afrique du Nord SOUADKA et col.(15) ont estimé la fré-
quence du cancer du sein et grossesse à 4,6% en 1994
contre 6% pour EL ANDALOUSSI (6) de Tunisie en 1985,
de l’ensemble des cancers de sein. La fréquence corres-
pond probablement à celle du cancer du sein en général
chez les femmes avant 50 ans (15). Dans notre unité, c’est
le premier cas rapporté, le cancer du sein étant générale-
ment opéré en clinique générale, jusqu’à une époque récen-
te. La fréquence de cette association est dons inconnue au
GABON.
L’âge : Dans la plupart des séries (5-9-12-15) l’âge moyen
varie entre 31 et 36 ans. Dans la série de HOLLEB 74%
des patientes ont entre 30 et 40 ans. Notre patiente rentre
dans le cadre (32 ans). Généralement cet âge précoce est un
facteur de mauvais pronostic (9).
Clinique : La symptomatologie est la même qu’en dehors
de la grossesse. La forme nodulaire est la plus fréquente (2-
5-7-15). Cependant le diagnostic est plus difficile et s’en
trouve retardé par rapport aux femmes non enceintes, ce
qui aura une influence sur le pronostic (2). La diff i c u l t é
provient des modifications gravidiques de la glande mam-
maire. Au plan radiologique, les seins sont denses et les
images pathologiques sont difficiles à identifier. L’ é c h o -
graphie peut apporter quelques renseignements complé-
mentaires. Ces examens sont malheureusement très oné-
reux dans les pays sous médicalisés dans les centres où ils
sont praticables. Tout signe clinique : tuméfaction résis-
tante, asymétrie des 2 seins, écoulement séro-sanglant uni-
latéral persistant, doit faire suspecter un cancer du sein
pendant la grossesse et le post-partum.
FACTEURS PRONOSTIQUES
L’âge moyen : Nous l’avons vu, se situe entre 31 et 36 ans.
Le pronostic est d’autant plus aggravé que la femme est
plus jeune. Dans la série de JURET (9), avant 34 ans, 7%
de survie globale à 5 ans, contre 36% après 35 ans. Ce qui
correspond au pronostic chez les femmes en dehors de la
grossesse. Ainsi, pour BARRAT (2) la grossesse ne semble
donc pas être un facteur de mauvais pronostic.
Le délai : Le délai entre la découverte ou le premier symp-
tôme et le début du traitement est augmenté chez la femme
enceinte. Dans notre cas, il est encore rallongé par un
contexte socio-sanitaire défavorable, caractérisant les pays
en développement. Faute de laboratoire d’histologie et
anatomie pathologique fonctionnel toute l’année, 3 mois
supplémentaires de délai ont été «infligés» à notre patiente.
Le manque d’éducation sanitaire et l’importance des
croyances culturelles, ajoutés aux difficultés diagnostiques
et la temps de réflexion avant décision thérapeutique
usuels, même dans les pays développés (4-5-10) ne font
que rallonger ces délais.
L’âge de la grossesse : Il ne semble pas avoir d’influence
pour QUERLEU (14), alors que pour DARGENT (5) et
son équipe, la découverte du cancer du sein au troisième
trimestre serait d’un pronostic plus grave qu’au premier
trimestre (11% de survie au 3è trimestre par rapport à 48 %
au 1er trimestre).
La taille de la tumeur : Elle est plus importante lors de la
T. ENGONGAH-BEKA, J.F.MEYE, F.E.ONDO-NDONG,
C.DIANE, R.NGUEMA-MVE, D.MIKO-MI-ETOUA
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