Busson Sandrine Maîtrise BPE Avril-Août 2003 Maître de stage: Manuel VALLAT Chargé de missions Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -1- REMERCIEMENTS Je remercie tout d’abord Monsieur Gérard Guillaud, président de la Fédération de Savoie pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique pour m’avoir accueilli au sein de cette structure. Je remercie sincèrement Manuel Vallat pour m’avoir fait confiance et pour m’avoir fourni tous les outils nécessaires à cette étude. Je remercie Olive et Dom pour leur sympathie et leur gentillesse. Je remercie Paul pour le prêt généreux de son bureau! Je remercie petit Rémy et la Goyarde pour leur bonne humeur. Je remercie Bertrand pour ses précieux conseils et son amitié. Je remercie Benoît pour son aide lors des pêches nocturnes. Je remercie toutes les personnes qui m’ont accordé un peu de leur temps en répondant patiemment à mes questions : Frédérique Grandjean, Michel Bramard, François de Georgie, Philippe Vallet et Olivier Gallet. Je remercie tous les gardes de la Brigade du CSP de Savoie (Jean-Marc, Gilles, Patrice, Gilbert et Roland) et plus particulièrement Anne-Sophie pour sa participation active aux prospections nocturnes ainsi qu’aux échantillonnages. Enfin je remercie Blandine et Gaëtan pour leur soutien et leur patience face à mes discours interminables sur les « cre-cre »! Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -2- SOMMAIRE INTRODUCTION I. ……………………………………………………………………...6 L’ÉCREVISSE À PIEDS BLANCS Austropotamobius pallipes 1. POSITION SYSTÉMATIQUE …………………………………………………..7 2. MORPHOLOGIE ………………….……………………………………………8 2.1. Critères de détermination spécifiques 2.2. Dimorphisme sexuel 2.3. Taille et poids …..……………………………8 …………………………………………………..8 ………………………………………………………....9 2.4. Couleur ……………………………………………………………….9 3. NUTRITION ……………………………………………………………….9 4. PRÉDATEURS ……………………………………………………………...10 5. REPRODUCTION ET DÉVELOPPEMENT 6. ECOLOGIE …………………………………………………………………....12 6.1. Habitat …………………………………….10 ……………………………………………………………...12 6.2. Paramètres mésologiques II. ……………..7 7. ETHOLOGIE 8. ECOLOGIE COMPARATIVE 9. LES MALADIES DES ÉCREVISSES 10. CAUSES DE RARÉFACTION 11. STATUT JURIDIQUE ET PROTECTION 12. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE …………………………………………...12 ……………………………………………………………...13 ………………………………………………....14 …………………………………………...15 ………………………………………………....17 …………………………………….18 …………………………………………...19 INVENTAIRE …………………………………………………………………….20 1. INTRODUCTION ……………………………………………………………...20 2. MATÉRIEL ET MÉTHODES 2.1. ………………………………………………....23 Description de la zone d’étude 2.2. Méthodes de prospections …………………………………….23 …………………………………………...24 2.3 . Description des cours d’eau prospectés ………………………………25 2.4. Description des cours d’eau où l’écrevisses a été contactée ……………26 3. RÉSULTATS ……………………………………………………………...27 3.1. Prospections nocturnes …………………………………………...27 3.2. Pose de nasses appâtées …………………………………………...28 Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -3- 3.3. Limites de répartition des populations d’écrevisses à pieds blancs contactées ……………………………………………………………...29 3.3.1. Ruisseau de la Chapelle …………………………………….29 3.3.2. Ruisseau des Chavannes …………………………………….29 3.3.3. Ruisseau du Montgandeux …………………………………….29 3.3.4 Ruisseau du Pomaray …………………………………………..29 3.4.5. Ruisseau du Reposet …………………………………………..29 3.4. Caractéristiques du biotope des écrevisses à pieds blancs …………...30 3.4.1. Caractéristiques générales …………………………………….30 3.4.2. Qualité de l’eau …………………………………………………30 3.4.3. Caractéristiques de l’habitat mosaïque exploité par Austropotamobius pallipes III. ÉCHANTILLONNAGE …………………………………….32 ………………………………………………………..34 1. INTRODUCTION ……………………………………………………………...34 2. MATÉRIEL ET MÉTHODES 3. …………………………………………………35 2.1. Estimation de l’effectif …………………………………………...35 2.2. Mesures morphométriques …………………………………………...35 2.3. Prélèvements génétiques …………………………………………...36 RÉSULTATS ……………………………………………………………...37 3.1. Estimation par capture/marquage/recapture 3.2. Estimation par captures successives ………………………..37 ………………………………39 3.3. Tableau récapitulatif des effectifs estimés ………………………..43 3.4. La population du ruisseau des Chavannes ………………………..44 3.5. La population du ruisseau du Montgandeux ………………………..46 3.6. Comparaison des populations du ruisseau des Chavannes et du ruisseau du Montgandeux 4. …………………………………………..48 CRITIQUE DES MÉTHODES D’ÉCHANTILLONNAGE ET DES ESTIMATIONS D’EFFECTIF ………………………………………………....50 4.1. Stratégies par épuisement des stocks 4.2. Capture/Marquage/Recapture ………………………………50 …………………………………….51 Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -4- 4.3. Sex-ratio des populations échantillonnée du ruisseau des Chavannes et du ruisseau du Montgandeux …………………………………….52 4.4. Comparaison de la taille des mâles et des femelles sur les ruisseaux des Chavannes et du Montgandeux ………………………………52 4.5. Comparaison de la taille des individus du ruisseau des Chavannes et du ruisseau du Montgandeux 5. PROPOSITIONS DE SUIVI IV. BIBLIOGRAPHIE …………………………………….52 …………………………………………………54 ……………………………………………………………...55 Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -5- INTRODUCTION. Depuis plusieurs années, les écrevisses autochtones (Austropotamobius pallipes et Astacus astacus) voient leurs aires de répartition régresser sur l’ensemble du territoire français. Le même phénomène a été constaté en Savoie. Il semble donc urgent de référencer les sites à Austropotamobius pallipes ou écrevisse à pieds blancs de façon à les protéger activement. En effet, cette espèce d’intérêt communautaire est très sensible aux pollutions environnementales et représente un bon bio-indicateur de la qualité du milieu. C’est dans cette optique que la FSPPMA (Fédération de Pêche et de Protection des Milieux Aquatiques) a décidé, dans le cadre du contrat rivière Arc, de réaliser un inventaire des sites à A.pallipes en basse Maurienne. A l’issu de cet inventaire, les limites de répartition des populations d’écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne seront intégrées à la base de données de la Fédération de Savoie pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique. Parallèlement à cet inventaire, nous tenterons de caractériser le biotope préférentiel de cette espèce. Un échantillonnage exhaustif des sites à A.pallipes sera également mené en vue d’évaluer l’état de santé actuel des populations. Différentes méthodes d’échantillonnage seront testées au préalable. Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -6- I. L’ECREVISSE A PIEDS BLANCS (Austropotamobius pallipes) 1. POSITION SYSTÉMATIQUE. CLASSIFICATION RÈGNE EMBRANCHEMENT CLASSE SOUS CLASSE SUPER ORDRE SOUS ORDRE FAMILLE CARACTÉRISTIQUES Animal Arthropodes Corps segmenté et présence de pattes articulées Crustacés Corps protégé par un exosquelette et divisé en 3 parties: le céphalon qui porte les 2 yeux et 2 paires d’antennes, le thorax et l’abdomen qui portent les appendices. Le segment abdominal (le telson) porte l’anus mais jamais d’appendice. Les sexes sont séparés. Malacostracés Nombre de segments fixe (20 somites). Le thorax porte 8 péréiopodes biramés et l’abdomen porte 6 pléopodes biramés. A cela s’ajoute 5 segments céphaliques et le telson. Eucarides Les 3 premiers péréiopodes forment les maxillipèdes. La tête et le thorax sont recouverts par un céphalothorax. Les yeux sont pédonculés. Décapodes Le céphalothorax recouvre complètement la base des péréiopodes et les branchies situées à leur base. 5 paires de pattes marcheuses et une palette natatoire (dernière paire de pléopodes + le telson) Astacidae Pas d’éperon sur l’ischiopodite de la 2ème patte marcheuse chez les mâles, pas d’épine incurvée à la face interne du carpopodite des pinces GENRE Austropotamobius ESPÈCE pallipes Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -7- 2. POSITION SYSTÉMATIQUE. 2.1 Critères de détermination spécifique • céphalothorax avec une seule rangée d’épines(en général de 1 à 5) en arrière du sillon cervical • rostre à bords lisses et convergents • crête rostrale peu développée et non crénelée • éperon à la base de l’endopodite du pléopode 2 du mâle 2.2 Dimorphisme sexuel Mâles • • Femelles Pléopodes des segments abdominaux I • et II très développés et transformés en organes copulateurs Pléopodes du segment abdominal I réduits • Pléopodes des segments abdominaux II à V portent les œufs pendant l’incubation • Taille généralement inférieur à celle des mâles • Base de l’abdomen plus large que chez le mâle Taille généralement plus importante que la femelle Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -8- 2.3 • • 2.4 Taille et poids Les individus adultes ont une taille comprise entre 7 et 9 cm mais peuvent atteindre jusqu’à 10 voir 12 cm. Le poids moyen des adultes est de 70 à 90 g. Couleur Du brun rougeâtre au vert bronze, parfois gris avec une face ventrale plus pâle notam- ment au niveau des pinces. 3. NUTRITION L’écrevisses à pieds blancs appartient à la guilde trophique d’espèces typiquement omnivore et opportuniste. Son régime alimentaire inclus, en effet, des items très différents: • benthos (gammares; larves d’insectes, mollusques, trichoptères) • têtards et larves d’amphibiens • alevins qui constituent la composante animale, • hydrophytes (Myriophyllum, Renonculus) • hélophytes et amphibie telles que les cressons qui constituent la composante phytologique. Les feuilles mortes en décomposition abritant détritivores et bactéries peuvent constituer une source de nourriture appréciable. Les jeunes écrevisses consomment plus de matières animales que les adultes. Elles ont néanmoins besoin d’algues chlorophycées (Arignon). La plupart des écrevisses, et notamment les jeunes, consomment leur exuvie après la mue. L’écrevisse à pieds blancs fait également preuve de cannibalisme envers les classes d’âge immatures et les individus en mauvaise santé ou fragilisés par la mue. Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -9- 4. PREDATEURS Invertébrés : S’attaquent aux juvéniles, insectes aquatiques tels que coléoptères, larves et imagos de dytiques et odonates. Le crabe chinois s’attaque aux juvéniles ou aux animaux fragilisés par la mue. Autres écrevisses Vertébrés : Mammifères: mustélidés (putois, vison, loutre, hermine); renard ; rat musqué ; surmulot ; sanglier Amphibiens: grenouilles Oiseaux : canards ; corbeaux ; héron cendré ; martin-pêcheur ; hulotte ; aigrette garzette ; poule d’eau. Poissons : barbeau ; chabot ; lotte de rivière ; carpe ; perche ; brochet ; omble ; truite… 5. REPRODUCTION ET DÉVELOPPEMENT L’accouplement a lieu en automne (octobre-novembre) lorsque la température ambiante est inférieur à 10°C. Le mâle renverse la femelle sur le dos à l’aide de ses pinces et dépose les spermatophores (bâtonnets de spermatozoïdes) autour des orifices externes des oviductes de la femelle. Les œufs sont pondus 4 à 6 semaines plus tard. La femelle porte 80 à 100 œufs durant 6 à 9 mois. Les œufs sont incubés sur la face ventrale de l’abdomen de la femelle qui les aère à l’aide de mouvements des pléopodes. La durée d’incubation varie en fonction de la température du milieu et l’éclosion aura lieu au printemps (20 à 30 œufs). Les juvéniles restent accrochés aux pléopodes de la mère pendant 10 à 15 jours, jusqu’à leur seconde mue. Ils passent ensuite à un stade libre. Les juvéniles subiront 8 mues au cours de la première année. Ce nombre diminue ensuite avec l’âge pour n’atteindre plus que 1 à 2 mues par an à l’âge adulte. La maturité sexuelle est atteinte à 3-4 ans. Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -10- Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -11- Juvéniles libres (2ème mue) 8 mues la 1 ère année Adultes matures à 3-4 ans Accouplement (Octobre) Dépôts des spermatophores Juvéniles accrochés aux pléopodes de la mère 10 à 15 jours Fécondation Ponte Éclosion 6 à 9 mois d’incubation selon la température du milieu. A– Cordon B– Déhiscence C– Cordon D– Larve Quelques semaines Les femelles attendent la ponte dans une niche individuelle. Reproduction et développement des écrevisses à pieds blancs 6. ECOLOGIE 6.1 Habitat L’écrevisse à pieds blancs est connue pour affectionner les eaux pures, bien oxygénées et riches en calcium avec des blocs, graviers, sous-berges et racines. Un habitat mosaïque diversifié, structuré et attractif (sous-berges, chevelus racinaires, infractuosités des blocs…) semble être un facteur déterminant dans la distribution des populations (T.Broquet, M.Thibault, A.Neveu). Les pieds blancs exigent une profondeur d’eau minimale de 5 cm (N.Daguerre de Hureaux, Ch.Roqueplo). Le développement excessif d’hélophytes et l’exondation des berges constituent par contre des facteurs limitant la capacité d’accueil du milieu. 6.2 Paramètres mésologiques Le biotope de l’écrevisses à pieds blancs doit répondre à certaines caractéristiques afin de satisfaire ses exigences. • Température: L’écrevisse est un animal sténotherme d’eaux froides: préférendum pour une eau comprise entre 15°C et 18°C en été. On observe des perturbations physiologiques au delà de 22°C. La température semble jouer un rôle essentiel pour la mue, la croissance et le développement des individus. De plus, il semble qu’une température inférieure à 10°C soit nécessaire pour déclencher l’accouplement. • Calcium: Comme pour tous les crustacés, le calcium est d’une importance capitale pour la formation de l’exosquelette et pour la croissance des invertébrés aquatiques formant le macro-benthos qui représente une composante à part entière du régime alimentaire d’Austropotamobius pallipes. • pH: Comme la majorité des organismes vivants, l’écrevisse vit dans des eaux proches de la neutralité. Des valeurs extrêmes de pH entraîneraient des perturbations physiologiques. Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -12- • Oxygène dissous: L’écrevisse à pieds blancs affectionnent les eaux bien oxygénées. • Éclairement: Une ripisylve dense et équilibrée constitue une interface très biogène et assure un ombrage permanent. 7. ETHOLOGIE Les écrevisses sont des animaux plutôt grégaires, cependant, on observe un isolement des individus au moment des mues ainsi que pendant la ponte chez les femelles. Leur activité est ralentie l’hiver ou durant les épisodes froids où elles s’abritent dans des niches individuelles. L’écrevisse est une espèce lucifuge, elle se cache la journée sous les pierres ou dans les sous-berges et sort à la tombée de la nuit (parfois un peu avant). Sa phase d’activité maximale est en général entre 21 h 30 et 0 h 30 ainsi qu’en cycle nycthéméral fortement marqué (forte luminosité le jour et obscurité totale la nuit). Un fort éclairage à la lampe ne la fait pas fuir, elle s’arrête un moment puis reprend ses activités. Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -13- Écrevisse de Louisiane Procambarus clarkii Écrevisse du Pacifique ou signal Pacifactacus leniusculus Écrevisse américaine Orconectes limosus Écrevisse à pattes grêles Astacus leptodactylus Écrevisse à pieds rouges Astacus astacus Écrevisse à pieds blancs Austropotamobius pallipes Espèce Optimum en été entre 15 et 18°C Perturbations physiologiques à partir de 22°C Température Optimum en été entre 13 et 16°C Mort à 25°C Supporte de grands écarts thermiques Mort à 34°C Zones alternativement inondées et exondées, marais, étangs, fleuves, Optimum en été entre 22 et canaux et rivières lents. 25°C Plans d’eau ensoleillés et peu Mort à 33°C profonds Grandes rivières et eaux calmes des plaines et des lacs. Vit aussi bien dans les eaux froides des ruisseaux que dans les eaux chaudes et turbides Eaux calmes, profondes, étangs et mares chargées en matières organiques. Vit également dans les eaux claires et fraîches Grands cours d’eau lents, lacs et étangs naturels et artificiels Optimum en été entre 20 et 25°C Perturbations physiologiques à partir de 26°C Mort à 35.5°C Eaux calmes, stagnantes mais Optimum en été entre 17 et riches en oxygène, étangs, lacs et 21°C grands cours d’eau à fond Peut supporter jusqu’à 30°C argileux Mort au delà de 34°C Eaux limpides, fraîches, bien oxygénées et riches en calcium Milieu Principalement végétarienne, mais aussi détritivore Principalement végétarienne mais aussi carnivore (surtout jeune) Débris végétaux, mollusques, larves d’insectes 80% de protéines animales (15% de détritus) 20% de végétaux aquatiques Omnivore (80 % de végétaux aquatiques) Débris végétaux mais aussi larves d’insectes, petits mollusques... Régime alimentaire Août – septembre Septembre à octobre Avril – Mai Fin de printemps Septembre à Novembre Octobre Période de reproduction 8. ECOLOGIE COMPARATIVE Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -14- 9. LES MALADIES DES ECREVISSES Les mycoses : ce sont les maladies les plus fréquentes chez les écrevisses. • Aphanomycose ou « peste des écrevisses » Son vecteur est un champignon de l’ordre des saprolégniales Aphanomyces astaci. Les attaques ont lieu au niveau des parties minces et relativement tendre de la carapace ; au niveau des lésions ainsi qu’au niveau des yeux. Les espèces d’écrevisses autochtones telles que l’écrevisse à pieds blancs y sont extrêmement sensibles. En revanche, les espèces américaines y sont relativement résistantes, elles peuvent être des porteurs sains. Les symptômes de la maladie sont difficilement observables à l’œil nu. Toutefois, on peut observer des changements comportementaux chez les écrevisses infestées tels des déplacements anormaux de jour, une posture dressée sur les pattes, une désolidarisation de l’abdomen et du céphalothorax. • les fusarioses atteignent les branchies ce qui provoquent l’apparition de tâches brunes dues à une réaction de mélanisation des filaments de Fusarium sp. On peut également observer des tâches tégumentaires brunes dues à une invasion des filaments dans la cuticule. Des ulcères de rouille généralisés peuvent apparaître sur le céphalothorax. Dans des conditions d’élevage, il existe aussi des infections par Saprolegnia sp. Les bactérioses : • les bactérioses septicémiques avec développement abondant d’organismes dans le sang, notamment au niveau du cœur et des branchies. Ces bactérioses sont majoritairement dues à Pseudomonas sp. La contamination se fait par voie orale ou au niveau de blessures. Les bactéries s’infiltrent dans les tissus musculaires et émettent une toxine. Le principal symptôme visible est l’apparition de mouvements très lents chez les écrevisses atteintes. Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -15- les bactérioses du tube digestif et de l’hépatopancréas sont souvent dues à des • entérobactéries qui entraînent la formation de kystes dans l’hépatopancréas par réaction inflammatoire. La partie ventrale de l’abdomen devient brunâtre. Ces bactérioses sont dues à Citrobacter sp. Les parasitoses : La thélohaniose ou « maladie de la porcelaine » est due à Thélohania contejeani. • C’est une microsporidie qui s’attaque aux fibrilles musculaires. L’infection se fait par voie orale. Les symptômes sont les suivants : muscles visibles au niveau de la face ventrale prennent une coloration blanc-nâcré ; troubles de ces mêmes muscles. • Autres parasitoses : il existe des ectoparasites de la cavité branchiale (petites sangsues du genre Branchiobdella ressemblant à de petites vers rosâtres de quelques mm). On trouve aussi des endoparasites tels que des cestodes, des nématodes et trématodes du genre Distomum ou Psorospermium haeckeli qui parasite les ovaires ou le tissu conjonctif. Ce dernier peut provoquer l’apparition de tâches orangées sur l’abdomen. Les infections virales: Il n’a pas été découvert de maladie d’origine virale chez les astacidae. Cependant des recherches sont également en cours et de nombreux agents vi raux létaux ont déjà été découverts chez les décapodes (Vey A). Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -16- 10. LES CAUSES DE RAREFACTION L’écrevisse à pieds blancs était présente partout en France au XIXème siècle. Il existe de nombreuses causes de raréfaction possibles : a) Les facteurs biologiques • pathologies • fragmentation du continuum fluvial et formation de sous-populations isolées • concurrence avec les espèces allochtones plus prolifiques, polluo-tolérantes et agressives • sur-prédation par des espèces piscicoles introduites telle que la PES • braconnage sur des stations isolées b) Les atteintes au milieu • Pollutions chimiques: pesticides (phosphates et nitrates), métaux lourds et xénobiotiques. L’écrevisse à pieds blancs est extrêmement sensible à ce type de pollution. En effet, après épuisement de sa réserve de complexants, l’écrevisse stocke les métaux lourds ou xénobiotiques. Il y a accumulation dans les tissus: bio accumulation par voie orale; bio concentration par voie respiratoire et bio magnification par voie trophique. • Pollutions organiques : au delà d’un certain seuil, l’accumulation de matières organiques peut devenir nocif. • Pollutions thermiques : la modification du régime hydrographique entraîne des modifications de la chimie de l’eau, de ses paramètres thermiques et oxydo-réducteurs. On observe souvent des restitutions d’eau dont la température est supérieure à celle du milieu récepteur. Ces augmentations de température brutales peuvent décimer les populations d’écrevisses à pieds blancs. • Pollutions mécaniques et dégradations physiques : construction de barrages, de digues, de routes… Chenalisation des cours d’eau, piétinement des berges par le bétail. Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -17- 11. • STATUT JURIDIQUE ET PROTECTION en Europe: L’écrevisse à pieds blancs est une espèce vulnérable dans la liste rouge (V) de l’U.I.C.N. Elle figure aux annexes II et V de la directive Habitats ainsi qu’à l’annexe III de la convention de Berne relative à la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe. • en France: Elle est protégée par l’arrêté interministériel du 21.07.83 relatif à la protection de la nature ainsi que par la loi pêche, la loi sur l’eau ainsi que la loi sur la protection de la nature. La taille de capture légale est de 90 mm. La période de pêche est limité à 10 jours consécutifs à compter du 14.07 ou du 15.08. • en Savoie: La pêche à l’écrevisse à pieds blancs est interdite toute l’année par l’arrêté préfectoral permanent. Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -18- 12. DISTRIBUTION GEOGRAPHIQUE en Europe: elle est présente en Angleterre, en Irlande, dans la péninsule ibérique, en Italie, en Suisse et dans les Balkans. en France:Espèce autochtone la plus répandue en France bien que les p e u p l e m e n t s semblent en régression du fait des diverses pollutions. Elle est présente sur tout le territoire français excepté en Bretagne, sur la façade atlantique et dans la région Nord-Nord Est. en Savoie: l’enquête écrevisse 2000 a permis de recenser 13 sites à Austropotamobius pallipes. Il existe, de plus, plusieurs sites en basse Maurienne recensés dans la présente étude. ainsi que quelques sites dans l’avant pays savoyard qui reste à recenser. Inventaire des populations d'écrevisses à pieds blancs en basse Maurienne /Avril-Août 2003 -19-