George-Pompidou a été ouvert en périphérie
de la ville. Ce qui est intéressant dans ce nou-
veau projet d’urbanisme que j’ai conduit avec
la Société d’économie mixte (SemPariSeine),
c’est, tout d’abord, qu’une partie des bâtiments
a été conservée (ce qui représente la mémoire
physique de l’ensemble), mais surtout qu’une
partie des programmes reste charitable: il y a
une école, une crèche, des logements pour des
femmes maltraitées, des logements pour des
handicapés, une structure pour seniors dépen-
dants… La Santé, ce n’est pas que la construc-
tion des hôpitaux, c’est toute une série d’insti-
tutions, toute une série de services et non
uniquement la cure des maladies. La prise en
charge des déficiences, des dépendances, des
maltraitances fait partie intégrante de la Santé.
Ce qui a influencé le concept du projet, ce n’est
pas seulement la vocation initiale des bâti-
ments. Ce qui le caractérise notamment, c’est
qu’au regard de sa surface, nous n’avons
construit, à dessein, que la moitié de ce que le
Plan local d’urbanisme (PLU) autorisait. Nous
avons pu ainsi, garder, un espace vert central
– le square – ainsi que tout l’îlot sans aucune
circulation automobile à l’intérieur. L’ancienne
circulation interne de l’hôpital est devenue une
circulation piétonne interne à l’îlot. Par ailleurs,
nous avons cherché à exprimer la variété des
fonctions d’un ancien
hôpital en créant une
mixité fonctionnelle sur
le site: la pépinière d’en-
treprises représente, par
exemple, la recherche
dans l’ancien hôpital.
De la même façon, en plus de la construction
de logements, ont été réalisés des programmes
publics : une école, une crèche, un institut
médico-éducatif pour des enfants et des ado-
lescents atteints de troubles neuropsychia-
triques. Il est à noter que l’hôtel-pépinière est
consacrée aux entreprises informatiques de
pointe dont certaines sont dans le domaine de
la santé.
L. C. – Que doit-on prendre
en compte dans la conception
d’un quartier écologique?
P. C. – Tous les quartiers devraient être,
aujourd’hui, écologiques ainsi que tous les bâti-
ments. Le problème des écoquartiers, c’est
qu’ils peuvent devenir un alibi pour la
construction de mauvais logements dans la rue
d’en face. Je trouve que les logements actuel-
lement construits sont trop petits et ne sont pas
très écologiques, parce qu’ils sont trop chers.
La capacité des gens à acheter ou à louer est
faible et ils n’arrivent pas à se loger sur Paris et
sa région. Ils sont donc obligés de partir vivre
loin de la ville, d’emprunter des moyens de
transports individuels ou collectifs, qui eux sont
polluants (les transports collectifs ne sont pas
tous électriques).
Je suis très heureux d’avoir pu contribuer à la
réalisation de ce quartier écologique, mais sur-
tout à la conception écologique des maisons
elles-mêmes, dans leur habitabilité, dans la
qualité de l’isolation, la végétalisation des toits,
la présence d’espaces extérieurs et même des
ruches et des nichoirs
pour les oiseaux. Ces
derniers points pour-
raient passer pour
anecdotiques, mais je
pense qu’ils ne sont
pas tout à fait anecdo-
tiques. Il est nécessaire que la nature, même
dans son sens le plus civilisé, s’invite un peu
en ville. Ainsi, nous avons pris en compte, dans
la conception de ce projet, la lumière naturelle,
les plantations, le maintien des bâtiments exis-
tants en liaison avec les bâtiments neufs, etc.
Par ailleurs, la démolition n’est pas une action
neutre écologiquement, il faut la réfléchir. Elle
entraîne une consommation d’énergie pour la
démolition, mais aussi pour le recyclage. En
outre, des décharges sont nécessaires quand
on ne peut pas recycler. Au total, la non-démo-
lition ou la récupération sont tout aussi écolo-
giques que la préservation des oiseaux ou des
petites fleurs. L’écologie, c’est comme l’écono-
mie : la logique écologique doit être une
logique économique. Il faut s’interroger sur la
valeur des choses, la valeur du vert, la valeur
de l’eau, de la vie humaine, la valeur du désir
de vivre et la valeur de l’argent, aussi. Si on
consomme moins d’argent, c’est plutôt positif,
car l’argent ce n’est pas seulement une mon-
naie qui tourne, c’est la contrepartie du travail,
des ressources…
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“Il faut s’interroger sur la valeur
des choses, la valeur du vert, la
valeur de l’eau, de la vie humaine,
la valeur du désir de vivre… ”
ZAC Boucicaut,
l’incubateur d’entreprises
conçu par AUA Chemetov.
C. Demonfaucon