Le Monde
Comment peut-on guérir d'Ebola ?
22.08.2014 Par Alexandre Léchenet
Rapatriement de Nancy Writebol, qui a reçu un traitement expérimental contre Ebola, à
l’hôpital d’Atlanta (Georgie), le 5 août. | JOHN SPINK/REUTERS
Kent Brantly et Nancy Writebol, deux humanitaires américains rapatriés aux Etats-Unis après
avoir contracté le virus Ebola, sont sortis guéris de l'hôpital d'Atlanta, jeudi 21 août. Ils y
avaient reçu un traitement expérimental autorisé par l'Organisation mondiale de la santé,
baptisé « ZMapp ».
Ce traitement, qui n'avait auparavant été testé que sur huit macaques, a été également livré au
Liberia, pays particulièrement touché par l'épidémie, mais ses stocks sont désormais épuisés.
Quel est le traitement général de la maladie ?
Pour la majorité des malades pris en charge, l'équipe médicale tente de lutter contre les
symptômes de la fièvre hémorragique. En s'attaquant à la fièvre et à la diarrhée et en
réhydratant le patient, notamment par le biais de transfusions sanguines, l'organisme du
patient est en mesure de développer une réponse immunitaire.
« Le traitement des symptômes est le seul qu'on maîtrise, et qui ne produit pas d'effet
secondaire », analyse Sylvain Baize, directeur du centre national de référence des fièvres
hémorragiques de l'Institut Pasteur.
Mais, malgré ces soins, la maladie reste mortelle. Pour l'épidémie actuelle qui ravage
l'Afrique de l'Ouest, une personne contaminée sur deux meurt. En moyenne, le taux de létalité
de la fièvre Ebola varie entre 25 % et 90 %, en fonction notamment de la prise en charge des
malades, mais également de la souche du virus. Si l'épidémie actuelle est provoquée par la
souche « Zaïre », il en existe cinq différentes, qui ont un taux de mortalité plus ou moins
important.
Qu'est-ce que le ZMapp ? A-t-il permis de sauver des patients ?
Si de nombreuses recherches visent actuellement l'élaboration de traitements contre le virus
Ebola, tous sont encore en phase d'expérimentation. Le ZMapp est le seul à avoir été autorisé
par l'Organisation mondiale de la santé à titre expérimental, bien que tous ses tests cliniques
n'aient pas encore été effectués.
Lire notre décryptage : Ebola, les pistes de recherche de traitements et de vaccins
« Est-ce que le ZMapp fonctionne ? Nous ne le savons pas », confesse sur son site le
laboratoire Mapp, à l'origine du traitement. Si la recherche se poursuit, l'utilisation du
traitement pour soigner les personnes déjà touchées ne constitue pas un test clinique
satisfaisant. En effet, rien ne permet de savoir si les personnes ont guéri en raison du
traitement ou grâce aux autres soins prodigués. « Les essais cliniques ne se font pas sur deux
patients. Et il s'agit ici plus d'un acharnement thérapeutique que d'un essai clinique validé »,
poursuit M. Baize.
Le Liberia a reçu également des doses de sérum, qu'il a notamment injecté à deux de ses
médecins. Mais en les offrant au pays, le laboratoire Mapp a vidé l'intégralité de son stock
disponible, car cette production était jusque- réservée aux test cliniques sur les animaux. Le
processus industriel et biologique permettant de produire de nouvelles molécules prend du
temps.
Lire aussi : La course contre la montre des chercheurs
La transfusion de sang de patients guéris fonctionne-t-elle ?
Le Dr Kent Brantly, l'un des deux patients américains, avait également reçu le sang d'un
adolescent de 14 ans qui avait survécu à la fièvre. L'idée d'un tel traitement, essa depuis les
premières apparitions du virus, en 1976, est de faire bénéficier le malade des anticorps
produits par le survivant.
Maix ce choix d'en faire bénéficier le médecin américain surprend cependant l'expert en
maladies infectieuses, car « les résultats ont toujours été controversés ». « Le virus Ebola
n'induit pas de nombreux anticorps neutralisants », ajoute Sylvain Baize, c'est-à-dire que les
anticorps, s'ils permettent d'éradiquer le virus, ne le neutralisent pas complètement.
Peut-on être contaminé deux fois par le virus Ebola ?
« On n'a jamais eu à décrire des cas de survivants à la fièvre Ebola remis en contact avec le
virus. Mais d'après ce que l'on sait, quelqu'un qui a survécu à une première infection est
protégé de la seconde », explique M. Baize. « L'organisme produit des anticorps pendant très
longtemps, il est donc protégé du me type de virus. » Le malade n'a donc qu'un très faible
risque d'être à nouveau touché par le virus Ebola, pour autant qu'il s'agisse de la même
souche.
En effet, il existe plusieurs souches du virus, responsable des différentes épidémies depuis
1976. Celui qui touche les pays du golfe de Guinée actuellement est de souche « Zaïre », et
les survivants ne seraient protégés que de celle-ci.
Voir aussi notre vidéo : Pourquoi et comment l'Ebola s'est répandu aussi vite
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