C’est la principale indication de dosage des peptides natriurétiques. Pour le BNP, une valeur inférieure à 80-
100 pg/ml permet d’écarter le diagnostic d’insuffisance cardiaque chez un patient admis aux urgences pour
dyspnée aiguë avec une valeur prédictive négative de 90 à 98 % selon les études ; le diagnostic est, quant à
lui, affirmé avec une bonne valeur prédictive positive (94 à 98 %) si cette valeur est supérieure à 300-400
pg/ml, selon les centres. Entre ces deux bornes (80-300 pg/ml), le BNP est moins discriminant et voit sa
pertinence diagnostique diminuée par l’émergence de faux positifs et négatifs, essentiellement liés à la
présence de dyspnées d’origine respiratoire compliquées de cœurs pulmonaires élevant les valeurs de BNP,
rendant le plus souvent nécessaire le recours à l’échocardiographie-doppler.
Concernant le NT-proBNP, les récents résultats de l’essai PRIDE ont permis de confirmer les seuils :
- une valeur inférieure à 300 pg/ml écarte le diagnostic dans cette indication dans 99 % des cas,
- une valeur supérieure à 900 pg/ml (450 pg/ml chez les sujets de moins de 50 ans, 1800 pg/mL chez les
patients de plus de 75 ans) l’affirme avec une valeur prédictive positive cependant discutable (77 %).
Devant une dyspnée aiguë, bien que le taux de BNP à l’admission aux urgences soit inférieur chez les patients
présentant une décompensation cardiaque à fonction systolique préservée, par rapport à ceux présentant une
décompensation cardiaque liée à une altération de la fonction systolique, les valeurs de BNP ne permettent
pas de trancher en faveur de l’un ou l’autre des mécanismes de décompensation, ce qui est logique, le BNP ne
reflétant alors que l’élévation des pressions intraventriculaires gauches qui sont augmentées dans les 2 cas.
Néanmoins, le dosage du BNP est particulièrement utile en clinique, où son élévation devant un tableau
d’insuffisance cardiaque aiguë, en l’absence d’altération de la fraction d’éjection et, bien sûr, d’une
valvulopathie mitrale, signe l’existence d’une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée.
Ce que nous devrions faire
Intérêt des peptides natriurétiques dans le dépistage d’une dysfonction ventriculaire gauche asymptomatique
(Tableau II).
Ces marqueurs ont été proposés comme outils de dépistage de dysfonction ventriculaire gauche systolique
chez des sujets asymptomatiques à risque. Dans cette indication, les auteurs retrouvent, dans une population
non sélectionnée, un seuil de BNP aux alentours de 20 pg/ml (de 15 à 22 pg/ml) avec différentes sensibilités
et spécificités mais de bonnes valeurs prédictives négatives permettant d’écarter avec une bonne probabilité le
diagnostic. Ce seuil de dépistage s’élève à 64 pg/ml si on s’intéresse à une population plus âgée (70 à 84 ans).
Pour le NT-proBNP, les études ayant dépisté des patients insuffisants cardiaques asymptomatiques de plus de
45/50 ans retrouvent des seuils compris entre 100 et 225 pg/ml en fonction de l’âge et du sexe, permettant
d’écarter le diagnostic avec une excellente valeur prédictive négative (99 %) (1).
Dans une situation hémodynamiquement stable, l’utilisation du BNP pour rechercher une dysfonction
diastolique reste par contre illusoire en pratique courante. En effet, les seuils proposés, de l’ordre de 60
pg/mL, sont très proches de celui des sujets âgés sains de plus de 75 ans qui constituent la population
atteinte d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée.
Il faut cependant rester prudent, le BNP et le NT-proBNP reflétant le niveau de pression télédiastolique
ventriculaire (surtout gauche) instantané et non la fraction d’éjection ventriculaire. Les niveaux de ces
marqueurs peuvent donc diminuer même en présence d’une dysfonction ventriculaire gauche si les conditions
de charge baissent comme lors d’une hypovolémie induite par les diurétiques par exemple. Les dosages des
peptides natriurétiques dans ces indications doivent donc être restreints à des populations à risque et ne sont
actuellement pas recommandés par les sociétés savantes.
Intérêt des peptides natriurétiques dans le diagnostic de l’insuffisance cardiaque chronique (Tableau III).
La tentation d’éliminer une insuffisance cardiaque chronique chez un patient symptomatique par un simple
test biologique est grande, surtout chez les médecins généralistes qui voient ainsi la possibilité de sélectionner
plus finement les patients à adresser à leurs confrères cardiologues. Dans cette indication, le seuil de BNP
retenu est de 100 pg/ml, au-dessous duquel la probabilité d’une insuffisance cardiaque est faible. Cependant,
la pertinence de ce seuil est de plus en plus discutée et la valeur-seuil probablement plus basse. En effet, dans
cette indication, ce seuil n’aurait qu’une valeur prédictive négative de 87 % et serait à l’origine d’une
méconnaissance du diagnostic chez des patients symptomatiques dans 21 % des cas. Certains auteurs vont