Les monnaies sociales et
compmentaires
Un outil du développement pour le
contexte africain ?
Tristan DISSAUX
Directeur de mémoire : M. Jérôme BLANC, Université Lumière Lyon 2 ; Maitre de stage :
M. Wojtek KALINOWSKI, Institut Veblen pour les réformes économiques, Paris
Master recherche
« Développement agricole durable : la sécurité alimentaire pour le développement »
Université Paris Sud - Faculté Jean Monnet
Année universitaire 2012-2013
Directeur de Master : M. Gérard AZOULAY
Les monnaies sociales et complémentaires : un outil du développement pour le contexte africain ?
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Remerciements
Je tiens tout d’abord à remercier Aurore Lalucq et Wojtek Kalinowski, qui m’ont offert
les conditions de travail, aussi bien humaines que matérielles, auxquelles aspire tout jeune
chercheur ; ainsi que Jérôme Blanc, qui a initié cette collaboration et qui a accepté de suivre ce
mémoire.
Ce travail a commencé par un projet de recherche, soumis à divers membres de la
communauté académique au sens large. A tous ceux qui l’ont (et m’ont) accueilli de façon
bienveillante, qui m’ont conseillé et guidé jusqu’ici, merci.
Ce mémoire aurait manqué de profondeur empirique sans les inépuisables ressources de
Carlos de Freitas, qui m’a finalement permis d’assouvir ma soif de terrain. A lui donc, merci,
ainsi qu’à Yolaine Guérif et Zoary Rafransoa qui ont organisé ma mission au pied levé. Merci
enfin à Didace, Gilbert et Evelyne qui m’ont accompagné dans mes enquêtes, et aux habitants
de Mahatsara qui ont tous bien voulu répondre à mes drôles de questions de vaza.
Les monnaies sociales et complémentaires : un outil du développement pour le contexte africain ?
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Les monnaies sociales et complémentaires : un outil du développement pour le contexte africain ?
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INTRODUCTION
Monnaie et développement : voilà deux thèmes majeurs de la recherche en sciences
économiques, mais qui n’ont pas vraiment fait l’objet d’une discussion conjointe. Si le
financement du développement a été au centre de nombre de ses théories, la monnaie en tant
que telle n’a que peu était considérée, passant le plus souvent dans l’analyse, non comme un
paramètre, mais comme une donnée, la monnaie étant alors perçue comme un "non-sujet".
Prétendre en plus que des monnaies puissent être "sociales" ou "complémentaires" peut, pour
beaucoup, sembler oxymorique. Pourtant, la monnaie s’est très diversement manifestée dans
l’histoire et selon les contextes. Les diverses crises récentes ont notamment montré une certaine
"ébullition monétaire", la monnaie prenant alors des formes évolutives qui interrogent la théorie
économique. Les monnaies sociales et complémentaires, résultat d’une innovation monétaire
amorcée par les situations de crises mais qui leur perdurent et les dépassent largement, doivent
alors être considérées par la théorie économique. En effet, « le principe fondateur de
l’organisation monétaire des sociétés contemporaines ne saurait fonder une réflexion
scientifique sur la nature du fait monétaire. » (BLANC, 2000)
S’il fallait définir une monnaie sociale et complémentaire, on peut retenir qu’elle est
une unité de compte spécifique développée à l’initiative d’un groupe de citoyens réunis au
sein d’un réseau permettant de comptabiliser et de régler des échanges de biens, de
services et/ou de savoirs (BLANC, 2006a), (FARE, 2011). Ces monnaies ne visent pas à
remplacer les monnaies nationales, mais plutôt à les complémenter. Au-delà de cette première
définition cependant, ces dispositifs prennent des formes diverses et variées, formes qui se
retrouvent dans la diversité des qualificatifs employés pour les nommer : en plus d’être
"sociales" ou "complémentaires", elles peuvent aussi prétendre être "communautaires" ou
"locales". Ces différences renvoient aux objectifs qu’elles se fixent et aux moyens qu’elles se
donnent pour les atteindre. Les monnaies sociales et complémentaires ont pour leur part comme
objectif de « définir, protéger et renforcer une communauté » et/ou de « protéger, stimuler ou
orienter l’économie » (FARE, 2011).
D’un point de vue historique, de nombreuses expériences de monnaies complémentaires
ont été fondatrices pour les différents modèles existants aujourd’hui. Sans développer l’histoire
de ce mouvement (voir pour sa généalogie BLANC & FARE (2010)), on retiendra qu’on peut
en faire remonter l’origine aux années 1930 : les premiers dispositifs répondent alors au
contexte de crise de la Grande Dépression. S’en est suivi un processus de diffusion, de
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