PROCEDURE D’ADMISSION EN MASTER
Lundi 23 février 2015
NOTE DE SYNTHESE SUJET 2
durée de l’épreuve : 4 heures
Ce sujet comporte 20 pages, y compris celle-ci. Veuillez vérifier que vous avez bien toutes les pages. En
cas d'anomalie, avertissez le surveillant.
Vous devez traiter les 2 exercices A et B.
A/ A partir des documents suivants et de vos connaissances, vous rédigerez une note de synthèse sur
les enjeux sociaux et juridiques des nouvelles formes de parentalité (16 points).
LISTE DES DOCUMENTS
Document 1 Approche notionnelle, Xavier Molenat, Sciences Humaines, N°232 Décembre 2011
et Julien Damon, Sciences Humaines, N° 203 Avril 2009
Document 2 Qu’est-ce qui fait famille aujourd’hui ? Michel Billé, sociologue
CNDPF (Carrefour National des Délégués aux prestations familiales), Paris 2013
Document 3 Comment devenir parent ? Un métier qui ne va plus de soi
Xavier Molenat, Sciences Humaines, N°232 Décembre 2011
Document 4 Redonner confiance : le soutien à la parentalité,
Xavier Molenat, Sciences Humaines, N°232 Décembre 2011
Document 5 Le mariage pour tous est-il « straight » ?
Tribune de Bruno Perreau, Libération, 4 octobre 2012
Document 6 Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe
Portail du Ministère de la Justice
Document 7 Deux mères = un père ?
Tribune de Sylviane Agacinski, Le Monde, 3 février 2013
Document 8 La filiation doit évoluer
Tribune d’Irène Théry, Le Monde, 11 février 2013
Document 9 Proposition de Résolution relative à la GPA émanant de parlementaires
Enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 septembre 2014
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Document 10 Et le Conseil d’Etat autorisa de fait la GPA en France
François Martin, Atlantico, décembre 2014
Document 11 La Saine Famille
Michel Serres, Revue Etudes, Février 2013
Document 12 Scène de la vie conjugale au XIXème siècle, (Victorien Sardou en famille)
Auguste de Brély (Paris, musée de la Vie romantique)
B/ Question :
Que vous inspire ce tableau d’Auguste de Brély (document 12, page 20) ? (4 points)
Document 1 Approche notionnelle, Xavier Molenat, Sciences Humaines, N°232 Décembre 2011
et Julien Damon, Sciences Humaines, N° 203 Avril 2009
N°232 Décembre 2011
Parentalité : un concept déjà ancien
Devenu à la mode au cours des années 1990, le concept de parentalité est pourtant apparu dès la fin des
années 1950 en sciences humaines. Son histoire et la diversité de ses usages soulignent les multiples
dimensions de la transformation contemporaine du statut de parent.
PSYCHANALYSE : devenir parent, un processus
On considère généralement que la « mère » du concept de parentalité est la psychanalyste américaine Therese
Benedek. En 1959, dans un article intitulé « Parenthood as a developmental phase », elle met en évidence que
l'accès au statut de parent est une étape du développement de la personnalité au même titre que l'adolescence,
et fonctionne selon les mêmes processus. L'un des intérêts de ce travail est de ne pas faire intervenir la question
du genre: pères et mères sont concernés au même titre. La notion de parentalité est traduite et reprise par le
psychiatre français Paul-Claude Racamier dès 1961, mais ne suscitera guère d'intérêt avant les années 1990-
2000.
ETHNOLOGIE : l'éclatement des fonctions parentales
En ethnologie, Esther Goody distingue dès 1982 (Parenthood and Social Reproduction, Cambridge University
Press) cinq composantes de la parentalité : concevoir et mettre au monde, donner une identité à la naissance,
nourrir, éduquer et garantir l'accès de l'enfant au statut d'adulte (par le mariage ou le travail). À partir d'études de
terrain au Ghana, elle montre comment ces fonctions peuvent être concentrées sur les géniteurs ou bien
dispersées parmi un grand nombre d'individus et de lieux (parenté proche ou lointaine, placement chez un
patron...).
Plus récemment, Maurice Godelier proposait de définir la parentalité comme « l'ensemble culturellement défini
des obligations à assumer, des interdictions à respecter, des conduites des attitudes, des sentiments et des
émotions, des actes de solidarité et des actes d'hostilité qui sont attendus ou exclus de la part d'individus qui (...)
se trouvent, vis-à-vis d'autres individus, dans des rapports de parents à enfants (Métamorphoses de la parenté,
Fayard, 2004)», ce qui inclut les parents directs, par alliance, par adoption...
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SOCIOLOGIE: familles plurielles, familles quand même
Dans les années 1970, les chercheuses féministes parlent (déjà !) de « famille monoparentale » pour désigner
les foyers où les mères élèvent seules leurs enfants (que les Britanniques qualifiaient de « one-parent families »).
L’optique est clairement militante: il s'agit d'éviter les qualifications stigmatisantes (« fille-mère », « mère
célibataire »), et de montrer que ce sont des familles à part entière. Le terme « parentalité » se généralise à l'orée
des années 1990 pour nommer des situations familiales précaires (Vincent de Gaulejac et Nicole Aubert,
Femmes au singulier ou la parentalité solitaire, 1990), puis se décline au fur et à mesure que s'inventent de
nouvelles manières de faire famille: pluriparentalité, homoparentalité ...
N° 203 Avril 2009Les mots qui comptent
Régulièrement, de nouveaux mots surgissent dans les débats d'idées et de société. Ils se répandent comme une
traînée de poudre à travers revues et médias. En s'appuyant sur les statistiques de l'AFP, Julien Damon analyse
chaque mois l'un de ces top ten de notre vocabulaire.
Le sens de l'expression omniprésente « parentalité » n'est jamais bien défini. Parfois présentée comme « l'art »
d'être parent, la parentalité est dans certains cas synonyme de « fonction parentale » ou de parenté. Dans
d'autres cas, la parentalité est formellement distinguée des rapports entre ascendants, des relations de
consanguinité et des liens de filiation.
On ne commence véritablement à s'inquiéter de « parentalité » qu'à partir de 1997, dans des analyses relatives
aux rôles des pères, dans des débats portant sur les couples homosexuels et dans des controverses concernant
les parents de délinquants. C'est en particulier en raison du développement d'initiatives visant à « soutenir la
parentalité » que le terme s'est affirmé.
Aujourd'hui la parentalité semble s'être bien implantée, seule ou avec ses trois principaux préfixes: mono, homo
et co. La coparentalité (équivalent de « parité parentale ») donne d'ailleurs lieu à des propositions d'évolution du
droit de la famille, notamment pour ce qui relève de l'autorité parentale. Celle-ci devrait pouvoir toujours être
exercée par les deux parents, même si ceux-ci sont séparés et dispersés aux seins des nouvelles constellations
familiales. D'extraction démographique, le néologisme « parentalité » prend ainsi peu à peu pied dans le droit.
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Document 2 Qu’est-ce qui fait famille aujourd’hui ? Michel Billé, sociologue
CNDPF (Carrefour National des Délégués aux prestations familiales), Paris 2013
Qu'on s'en réjouisse ou qu'on le déplore, ce qui structurait et soudait l'unité familiale a changé et continue à
changer avec nous, malgré nous, mais nous sommes désormais impliqués dans des organisations familiales qui
se structurent sur de nouvelles bases :
-Le « toit » faisait la famille. Il y a longtemps que la famille ne tient plus à l'unité d'habitation. La décohabitation
entre les générations est pratiquement devenue la règle et, même, elle n'est plus rare à l'intérieur du couple qui,
parfois, ne met en commun qu'une partie du temps, soit pour des contraintes professionnelles soit par peur de
l'usure de la vie commune, soit pour préserver une zone spécifique aux enfants issus d'un couple antérieur etc.
-Le « nom » faisait famille. On était du même sang, on portait le même nom. Fierté, parfois ou gêne, au
contraire, mais le nom (que l'on tenait du père et, par conséquent, du grand-père) scellait l'unité familiale, disait la
descendance, la transmission, la lignée. Les noms sont multiples, (ils le seront sans doute de plus en plus, la loi
le permet désormais) et ne disent plus grand chose de la nature des relations entre ceux qui habitent ou non
sous le même toit et se considèrent de la même famille.
-Le « droit » faisait famille. Droit coutumier ou droit formel, le contrat -de mariage- scellait l'unité familiale. Il y a
déjà quelques temps que le mariage ne fait plus la famille, en tous cas n'est pas seul à la faire, et que le juge
(des affaires familiales), en cas de conflit, remplace le contrat. (En 2005, 40 divorces pour 100 mariages.)
-Le « sang » faisait la famille. Aujourd'hui les sangs sont multiples, mélangés, métissés, plusieurs sangs se
côtoient dans les mêmes unités familiales. L'autre manière de dire le lien du sang était de dire que l'on était ou
non du même lit… L'expression un peu triviale a du mal à parler d'amour mais les amours sont multiples, les
partenaires peuvent l'être aussi ...
Au-delà du toit, du nom, du contrat et du sang, ce qui fait famille est devenu le choix. Dans une famille
tendanciellement élective, à provenances multiples, potentiellement, virtuellement indéfinie (et non pas réduite,
comme on a souvent tendance à le croire) dans cette famille, je choisis de me relier à certains membres de ce
réseau. Mais je ne peux me relier à tous, c'est tellement grand ... Choisir c'est renoncer. Je ne me relie donc, bon
gré, mal gré, qu'à quelques-uns. Dans un réseau les connections sont toujours réversibles. Dans cette famille-là,
elles le sont aussi; les liens sont a priori réversibles et ils se défont à défaut d'être activés, entretenus, cultivés.
Cette famille est devenue incertaine, instable, mouvante, virtuelle, presque aléatoire.
Les questions d'éducation sont ici immenses : comment apprendre à un enfant, à nos enfants et petits-enfants, à
se relier aux autres ? A choisir les liens et à les cultiver? A se relier aussi avec les plus faibles, les plus pauvres,
les moins enviables, les plus vieux? On sait depuis longtemps, avec plus ou moins de bonheur, imposer à un
enfant une éducation à la contrainte, en tous cas par la contrainte, comment inventer l'éducation au choix, à la
liberté vraie que nécessite cette nouvelle forme familiale?
Sans doute faut-il souligner également quelques questions fondamentales qui trouvent, dans ces nouvelles
formes familiales, des expressions elles aussi nouvelles: Qu'est-ce qu'être parent ? Père ou mère, quand le
ciment conjugal a laissé la place au ciment filial? L'enfant est placé au centre de la famille, c'est au tour de lui
qu'elle se construit, c'est lui qui en fonde la durée ? Qu'en est-il de la parentalité, de la paternalité d'enfants que
l'on n'a ni engendré ni adopté ? De la même manière qu'en est-il de la maternalité ? Qu'en est-il de la beau-
parentalité ? De l'homoparentalité ? Qu'est-ce que le lien de fraternité ? De quoi est-il fait s'il n'est fait ni de sang,
ni de nom, ni même de toit ?
La loi du 17 mai 2013 ouvre désormais le mariage à des couples de même sexe, étendant ainsi, de fait, le statut
de famille à des situations qui en étaient jusque-là écartées. De nouvelles questions se posent alors quant à
l'adoption d'enfants, l'assistance à la procréation, ou la gestation pour autrui... Décidément c'est bien ce qui fait
famille qui se transforme.
Quatre à cinq générations, place des personnes âgées.
La structure familiale en réseau se complexifie encore si l'on y regarde les rapports intergénérationnels. En effet,
pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, nous voyons apparaître des édifices générationnels où se
superposent quatre voire cinq générations :
• l'aïeul 95 à 105 ans
• les grands-parents 75 à 85 ans
• les parents 50 à 60 ans
• les enfants 25 à 30 ans
• les petits-enfants 0 à 5 ans
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Cinq générations avec lesquelles il nous faut apprendre à vivre ... car si la volonté de développer les rapports
entre les générations est évidemment sympathique, si idéologiquement, c'est une idée que l'on aime bien, il faut
bien admettre pourtant que le contenu des relations, (contenu vrai, pas seulement déclaré) au-delà de trois
générations n'est jamais gagné d'avance.
Par ailleurs, il faut développer une attention particulière à la génération « pivot » de cet édifice : celle de 50 à 60
ans ... et en particulier à la femme de cette génération. C'est sur elle en effet que, pour des raisons
essentiellement culturelles, repose l'édifice familial intergénérationnel. Elle donne sur tous les fronts dès que c'est
nécessaire ... certes elle donne volontiers, mais il ne faudrait pas pour autant que l'on en profite trop ...
Quand les familles se recomposent, sur le modèle du réseau, une constellation de membres potentiels de ce
réseau se connecte ou se déconnecte, sur des logiques amoureuses, affectives, économiques, affinitaires,
intéressées parfois, insoupçonnables souvent. Les ruptures de lien sont nombreuses, on le sait, on en souffre
plus ou moins mais les liens nouveaux sont multiples, parfois durables, dans un univers familial caractérisé par
l'éphémère et la réversibilité des situations.
Sur cette « toile », se dessinent de nouvelles relations grand-parentales. De même que les parents sont de plus
en plus nombreux à élever des enfants qu'ils n'ont pas « faits », du moins pas « faits ensemble », les grands-
parents, de plus en plus nombreux, sont amenés, si l'on peut dire, à « adopter » des « petits-enfants » avec
lesquels ils n'ont pas forcément de liens de parenté au sens où l'on comprenait, jusqu'à présent cette notion.
Il faut ajouter à cela les situations désormais fréquentes que l'on pourrait qualifier de « beau-grand-parentalité ».
En effet, les recompositions familiales créent des situations où, à l'intérieur d'un couple recomposé, l'un des deux
devient grand-parent alors que l'autre n'a aucun lien de parenté réelle avec le bébé qui vient de naître. Voici donc
le second, invité, de fait, à nouer une relation de type grand-parental simplement parce que son conjoint devient
grand-parent. Il n'est pas sûr, d'ailleurs, qu'il accepte d' entrer sur cette scène-là, ne serait-ce que pour une
question d'image de soi, d'âge ou de relation avec ses propres enfants qui peuvent être encore éloignés de la
période où eux-mêmes vont avoir des enfants et vivraient assez mal de ne pas être, eux, à l’origine de ce
nouveau statut de grands-parents pour leur propre père ou mère.
On imagine ainsi les conflits de loyauté qui peuvent être vécus par les « beaux-grands-parents » dans leur
« dynamique familiale propre », celle qui n'est pas en commun avec le membre du nouveau couple qu'ils ont
formé. Mais on peut aussi imaginer et observer, d'ailleurs, des relations très positives qui s'établissent dans ces
ensembles familiaux complexes où les places, rôles, statuts et attributions de chacun sont à inventer.
Comment penser un lien qui libère plus qu'un lien qui entrave?
« Familles ! Je vous hais ! Foyers clos, portes refermées, possessions jalouses du bonheur. » André Gide : Les
nourritures terrestres.
A quoi Serge Hefez répond : « Famille je vous haime ! »
Document 3 Comment devenir parent ? Un métier qui ne va plus de soi
Xavier Molenat, Sciences Humaines, N°232 Décembre 2011
Papa, maman et leurs enfants: le modèle familial traditionnel a du plomb dans l'aile. Nombre de familles
ne se composent plus d'un père et d'une mère mais sont monoparentales, recomposées ou
homoparentales. Au sein même des couples hétérosexuels, la répartition traditionnelle des tâches (papa
au boulot, maman au fourneau) est remise en cause, notamment par le travail des femmes. Être parent ne
va plus de soi si cela a jamais été le cas. Incertains sur la bonne manière d'élever leur enfant (lui
permettre de s'épanouir tout en sachant dire non et en étant vigilants sur les résultats scolaires !), les
parents d'aujourd'hui cherchent à définir leur place de mère au travail, de nouveau père impliqué ou
encore d'éducateur sans statut juridique (beau-parent, couple homosexuel...). La parentalité
contemporaine est ainsi largement en construction.
Il n'y pas si longtemps, tout était simple: papa et maman se marient, font un enfant, et maman s'en occupe
pendant que papa travaille pour nourrir la famille. On oublie parfois combien ce modèle traditionnel de la famille a
été ébranlé par la diversification croissante des configurations familiales. Aujourd'hui, les mamans jonglent entre
leur travail et leur rôle maternel, toujours soucieuses d'être de « bonnes mères » malgré des journées bien
remplies. Après un divorce ou une séparation, malgré les difficultés et les rancœurs, des parents maintiennent le
dialogue pour organiser et se répartir la garde des enfants en essayant de les maintenir hors du conflit. Dans les
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