
le groupe de travail d’action canada sur les inégalités, la pauvreté
et l’économie du savoir - www.prospererensemble.ca
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n pourrait penser que les inégalités et la
pauvreté sont l’apanage des politiques
sociales, et non des « politiques économiques
et commerciales », le thème du programme
d’Action Canada pour cette année. On ap-
prend aux Canadiens à considérer les politiques
économiques et sociales comme des domaines
distincts. Et en effet, quand le groupe de travail
d’Action Canada sur l’inégalité, la pauvreté et
l’économie du savoir (« Le groupe de travail »)
a commencé à discuter du présent projet, c’était
avec une conception beaucoup plus étroite des
« politiques économiques et commerciales ».
Politiques économiques et politiques sociales
sont devenues indissociables à nos yeux – au
point que nous nous sommes convaincus que,
si l’on veut assurer la prospérité économique du
Canada à long terme, il est crucial de se pencher
sur des enjeux qui sont traditionnellement con-
sidérés comme sociaux. L’évolution même de la
pensée du groupe de travail montre combien les
inégalités et la pauvreté sont importantes d’un
point de vue économique.
Le groupe de travail a commencé par se concentrer
sur la lente croissance de la productivité au Cana-
da, tendance que certains attribuent à un manque
d’innovation au pays. Ces tendances négatives ont
retenu notre attention parce que, selon les théories
économiques conventionnelles, l’innovation en-
traîne une augmentation de la productivité, ce qui
résulte en des salaires, des revenus et des niveaux
de vie plus élevés pour tous. Mais, en y regardant
mieux, le groupe de travail a découvert que, dans la
pratique, cela se passe tout autrement. Entre 1980 et
2005, bien que la productivité de la main-d’œuvre se
soit considérablement accrue, le salaire réel moyen
des Canadiens a à peine augmenté. Autrement dit, la
majorité des Canadiens n’ont pas bénécié des retom-
bées escomptées de la « tangente innovation » prise
par le pays.
Le groupe de travail a ensuite pris un peu de recul
et s’est penché sur les ingrédients de base de la réus-
site dans l’économie du 21e siècle. L’idée que la plus
importante ressource dans l’économie actuelle est le
capital humain fait consensus – le savoir, les compé-
tences et les qualités des gens. Après avoir identié
les éléments clés du capital humain, nous nous som-
mes interrogés sur les conditions qui favorisent ou
gênent l’acquisition de ces éléments. Les membres du
groupe de travail ont trouvé plusieurs études qui sug-
gèrent que les inégalités et la pauvreté sont nuisibles
pour les diverses
composantes du
capital humain.
Après avoir consta-
té la performance
du Canada dans
ces domaines, le
groupe de travail
s’est rendu compte
qu’il manque une
dimension essenti-
elle dans le discours
sur les « politiques
économiques et commerciales » dans ce pays. Le
Canada se classe 17 eparmi 20 pays de taille compa-
rable en ce qui a trait à l’inégalité. Ces 30 dernières
années, celle-ci a augmenté plus vite qu’aux États-
Unis, le pays industrialisé où les inégalités sont les
plus grandes. Le problème est aggravé par le fait
que le système canadien de scalité et de transferts
ne corrige pas les inégalités de revenu attribuables
au marché du travail comme c’était le cas il y a une
vingtaine d’années. Si le taux de pauvreté est resté
le même pendant cette période, il demeure élevé par
rapport aux normes internationales, particulièrement
pour les enfants.
Le groupe de travail avait donc, à ce point, bouclé la
boucle. Si, dans une économie du savoir, la réussite
dépend du capital humain et si les inégalités et la pau-
vreté ont une incidence négative sur les composantes
du capital humain, alors les inégalités grandissantes
et les niveaux constamment élevés de pauvreté pour-
raient compromettre la capacité du Canada à pros-
pérer. La façon dont le Canada met en œuvre son pro-
gramme d’innovation – ne prêtant guère attention à
l’évolution inquiétante des inégalités et de la pauvreté
– pourrait en fait saper ses efforts. De l’avis du groupe
de travail, la question méritait que l’on y rééchisse
davantage.
Au cours de nos recherches et de nos consultations,
nous avons découvert que le débat sur ces questions
est bien plus polarisé qu’il ne le devrait. Alors que le
milieu des affaires déplore la lenteur du Canada à em-
brasser l’économie du savoir et que les défenseurs de
la justice sociale décrient les inégalités et la pauvreté,
aucun des groupes ne semble se rendre compte qu’ils