Modélisation du transport et de la dispersion atmosphériques au

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Modélisation du transport et de la dispersion atmosphériques au Centre météorologique canadien
Alain Malo et Pierre Bourgouin*
Environnement Canada, Service météorologique du Canada, Centre météorologique canadien, Dorval, Québec, Canada
* Contact : Pierre Bourgouin ([email protected]), chef de la Section de la réponse aux urgences environnementales, Centre météorologique canadien, 2121 route Transcanadienne, H9P 1J3, Dorval, Québec, Canada.
Section de la réponse aux urgences environnementales
Le Centre météorologique canadien (CMC) fait partie du Service météorologique du Canada (SMC) d'Environnement Canada
(EC) et est le centre national pour la production de prévision numérique du temps (PNT). Ces données sont essentielles aux
Centres de prévision des intempéries (CPI) pour la production des prévisions météorologiques au Canada (avertissements,
prévisions publiques, maritimes, aviation, etc.).
Depuis plus de vingt ans, la section de la réponse aux urgences environnementales (SRUE) du CMC fournit à divers partenaires
des produits, des conseils et de l’expertise en modélisation du transport et de la dispersion atmosphériques de polluants
dangereux pour la santé et l’environnement. La dispersion atmosphérique est modélisée selon l’approche lagrangienne en
calculant les trajectoires d'un très grand nombre de particules d'air pour échantillonner adéquatement le panache de
dispersion.
Principaux atouts de la section
réponse opérationnelle 24 heures sur 24, 7 jours sur 7
solide infrastructure de superinformatique
logiciel avancé de réponse et de visualisation graphique 4D
modèles sophistiqués de dispersion de particules
capacités à toutes les échelles (de l’échelle urbaine à
l’échelle globale)
• personnel scientifique varié et hautement qualifié
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Applications en modélisation de prévision de la dispersion
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matériel radioactif émis lors d’accidents/tests nucléaires
cendres volcaniques lors d’éruptions importantes
fumée de feux de forêt
produits chimiques associés à des feux industriels
virus transportés sur des aérosols
modélisation inverse pour estimer les paramètres de la
source
Mandats internationaux
Mandats nationaux et réponse canadienne
PFUN : Plan fédéral en cas d’urgence nucléaire
Le Plan fédéral en cas d’urgence nucléaire (PFUN) permet de mobiliser rapidement la capacité fédérale d’évaluation des
risques radiologiques ainsi que d’autres ressources spécialisées nécessaires pour gérer les risques potentiels pour la santé liés
à une urgence radiologique ou nucléaire. Le PFUN est sous la responsabilité du bureau de la radioprotection de Santé Canada.
La SRUE du CMC supporte le PFUN à l’aide de modélisation de la dispersion atmosphérique intégré au système de prise de
décision d’accidents nucléaires ARGOS (Accident Reporting and Guidance Operational System). Ce système avancé permet,
entre autres, de calculer des doses à partir des produits de modélisation de dispersion (concentrations dans l’air et dépôts au
sol) fournit par Environnement Canada.
Urgence locale et régionale de nature chimique au Canada
Le CMC possède la désignation internationale d’être un centre météorologique régional spécialisé (RSMC : Regional
Specialized Meteorological Centre) pour le programme des urgences nucléaires de l’Organisation météorologique mondiale
(OMM) en support à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et aux Services météorologiques nationaux. Cette
fonction est assumée par la SRUE. Huit centres RSMCs dans le monde ont la responsabilité de suivre et prévoir le déplacement
et la dispersion des gaz et particules en cas de catastrophes nucléaires transfrontalières. RSMC Montréal a été activement
impliqué dans la réponse opérationnelle du Canada en regard avec l’accident nucléaire survenu à la centrale nucléaire de
Fukushima Daiichi au Japon en mars 2011. La SRUE a participé à l’estimation de l’impact de l’accident sur l’Amérique du Nord.
De concert avec d’autres centres RSMCs et services météorologiques nationaux, la SRUE a contribué à estimer à la fois le profil
d’émission à la source (aussi appelé terme de source) et à la vérification de la performance des modèles contre observations.
La SRUE opèrent une suite de modèles de transport et dispersion
atmosphériques pour des incidents à différentes échelles :
• MLCD (Modèle Lagrangien à Courte Distance) → modèle utilisé à courte
échelle (< 10 km) alimenté par des prévisions et observations
météorologiques.
• MLDP0 (Modèle Lagrangien de Dispersion de Particules d’ordre 0) →
modèle utilisé à grande échelle alimenté par un modèle 4D de prévision
numérique du temps.
CNUE : le Centre national des urgences environnementales → pivot du réseau national de notification des urgences
environnementales d’EC, 24/7 sur place, localisé à Montréal
CPI : Centre de prévision des intempéries → Fournit les prévisions et services météorologiques et environnementales,
24/7 sur place, localisé à Vancouver, Edmonton, Winnipeg, Toronto, Montréal, Dartmouth, Gander
CMC : Centre météorologique canadien → Fournit des produits numériques du temps, localisé à Dorval
CMC A&P : Section des analyses et pronostics du CMC → Suivi des passes opérationnelles du CMC, production de guides,
24/7 sur place
CMC SRUE : Section de la réponse aux urgences environnementales du CMC → Fournit la modélisation de la dispersion
atmosphérique et des conseils, 24/7 sur appel
SU-ST : Section des urgences – Sciences et technologie → Fournit des conseils scientifiques, de l’expertise sur les produits
chimiques et de l’échantillonnage, 24/7 sur appel, localisé à Ottawa
• MLDP1 (Modèle Lagrangien de Dispersion de Particules d’ordre 1) →
modèle utilisé à petite échelle alimenté par un modèle 4D de prévision
numérique du temps.
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Feux de forêt, Québec, mai 2010
• Trajectoire → modèle donnant un aperçu rapide de la dispersion en
relâchant quelques parcelles d’air à la source.
Au sein d’EC, la notification initiale d’une réponse opérationnelle à une urgence environnementale locale ou régionale dans
l’atmosphère pour des incidents de nature chimique (par exemple, feux industriels) est effectuée en partenariat avec les
principaux intervenants suivants:
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RSMC Montréal
Modèles de transport et dispersion atmosphériques
Volcan Cordón Caulle, Chili, juin 2011
• MLDPn (Modèle Lagrangien de Dispersion de Particules d’ordre n) →
modèle utilisé à petite/grande échelle alimenté par un modèle 4D de
prévision numérique du temps. Le modèle peut être exécuté en mode
avant ou arrière.
• CUDM (Système canadien de modélisation de dispersion urbaine) →
modèle utilisé à l’échelle urbaine alimenté par un modèle d’écoulement des
vents (dynamique des fluides numérique) prenant en compte la géométrie
3D des bâtiments.
Relâchement hypothétique à Vancouver, BC
Réponse à la tragédie de Lac-Mégantic, le 6 juillet 2013
• Vers 01h14 HAE : Un train de 72 wagons-citernes transportant
du pétrole brut léger déraille à Lac-Mégantic, Québec. Plusieurs
explosions ont lieu peu après, causant la mort de 47 personnes.
L’incendie fait rage au centre-ville pendant près de 40 heures.
• À 0452 HAE : Le superviseur de quart du CPI Montréal contacte
celui du CMC (A&P) suite à une demande du COG du ministère
de la Sécurité publique du Québec.
Réacteurs nucléaires endommagés à la centrale de Fukushima Daiichi, Japon. Cette image a été
prise le 20 mars 2011, 9 jours après le tsunami dévastateur.
Concentrations modélisées près de la surface de 137Cs [Bq m-3] 8 jours après le début du relâchement.
A. Le CNUE reçoit une demande de modélisation d’une autorité (territoriale, provinciale ou fédérale) ou d’une autre source.
Au Québec, par exemple, il peut s’agir du
1. Centre des opérations gouvernementales (COG) du ministère de la Sécurité publique du Québec (MSP),
2. ministère du Développement durable, de l'Environnement, de la Faune et des Parcs du Québec (MDDEFP) ou
3. météorologue de sensibilisation aux alertes (MSA) d’EC.
VAAC Montréal
Le CMC possède la désignation internationale d’être aussi un centre d’avis de cendres
volcaniques (VAAC : Volcanic Ash Advisory Centre) de l’Organisation de l’aviation civile
internationale (OACI) en support à l’industrie de l’aviation principalement au Canada et en
Amérique du Nord. Cette fonction est assumée conjointement par la SRUE et la Section des
analyses et pronostics du CMC (A&P). Neuf centres VAACs dans le monde ont la
responsabilité de suivre et prévoir le déplacement et la dispersion de nuages de gaz et
cendres volcaniques en cas d’éruption volcanique à partir de modélisation atmosphérique
et détection satellitaire. VAAC Montréal a été activement impliqué dans la réponse
opérationnelle canadienne lors des importantes éruptions des volcans Eyjafjallajökull
(avril-mai 2010) et Grímsvötn (mai 2011) en Islande.
B. Le CNUE contacte dans un premier temps A&P, qui contacte à son tour la SRUE et le CPI pour les informer qu’une requête
de modélisation est imminente (premier contact : préavis).
C. Un formulaire de demande de modélisation doit être complété par le CNUE, le CPI, A&P ou le MSCM concerné avec l’aide
du requérant. Ce formulaire comprend une première partie contenant les informations obligatoires (ex.: date et heure du
relâchement et emplacement de l’incident) et une seconde pour les informations optionnelles. Le formulaire est ensuite
acheminé à la SRUE via A&P et CNUE (deuxième contact).
Détection satellitaire (différence de température
de brillance infrarouge) de cendres volcaniques à
partir de l’instrument Advanced Very High
Resolution Radiometer (AVHRR) à bord du satellite
NOAA-15, le 9 mai 2010 à 17h58 UTC, lors de
l’éruption du volcan Eyjafjallajökull en Islande.
OTICE : Organisation du Traité d'Interdiction Complète des Essais nucléaires
Procédure opérationnelle pour faire appel aux capacités de modélisation de dispersion de la SRUE lors
d’une urgence environnementale
Le RSMC de Montréal fournit un soutien à l’Organisation du Traité d'Interdiction Complète des Essais nucléaires (OTICE,
CTBTO : Comprehensive nuclear Test Ban Treaty Organization) afin de caractériser des sources potentielles associées à des
événements nucléaires. Ce support repose sur de la modélisation inverse à partir de détections de radionucléides mesurées à
des stations du réseau de surveillance de l’OTICE appelé IMS (International Monitoring System) afin d’estimer la localisation de
ces sources et la quantité de matière radioactive émise. Le CMC a fournit du support à l’OTICE durant l’accident de Fukushima
ainsi que lors des essais nucléaires souterrains nord-coréens de 2006, 2009 et 2013. Ce travail s’effectue étroitement avec le
bureau de la radioprotection de Santé Canada à Ottawa.
D. L’officier(ière) en devoir de la SRUE produira la modélisation à l’intérieur d’un délai de 90 minutes (critère de satisfaction
ISO). Au cours de la réponse, la SRUE et le CNUE peuvent faire appel au service de la SU-ST en cas de besoin.
Procédure opérationnelle pour l’envoi des résultats de modélisation de dispersion de la SRUE lors d’une
urgence environnementale
A. La SRUE envoie les résultats de modélisation simultanément à tous les intervenants d’EC, i.e. CPI, A&P, CNUE et SU-ST.
B. Le CNUE distribue dans un deuxième temps les produits à l’extérieur d’EC.
• À 05h06 HAE : Le superviseur de quart du CMC (A&P) contacte
l’officier d’urgence en devoir de la SRUE.
• À 05h31 HAE : L’officier d’urgence de la SRUE contacte celui du
CNUE pour s’assurer que le centre soit bien informé de
l’urgence environnementale en cours.
• À 06h36 HAE : La SRUE distribue aux différents intervenants les
premiers résultats de modélisation à courte échelle.
Image produite par la NASA comparant la luminosité normale à Lac-Mégantic
(panneau de gauche, le 4 juillet 2013) avec celle produite par les explosions et
l’incendie (panneau de droite, le 6 juillet 2013 à 02h21 HAE). Ces images ont été
captées avec l'instrument Visible Infrared Imaging Radiometer Suite (VIIRS) à bord
du satellite de nouvelle génération à orbite polaire Suomi NPP.
• Plusieurs autres simulations à plus grande échelle sont
effectuées dans les heures et journées suivantes afin de
raffiner les anciennes prévisions de dispersion atmosphérique
des polluants. Ces simulations numériques sont effectuées
pour le compte du COG-MSP, CNUE, MDDEFP et MAPAQ
(Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation
du Québec).
• Le CPI Montréal a déployé une station météorologique
portative près du site pendant plusieurs semaines.
• Une analyse approfondie a été menée par la SRUE afin
d’estimer la hauteur réelle et l’étendue géographique du
panache de polluants. Cette étude a combiné à la fois
télédétection (radar et satellite) et modélisation du transport et
de la dispersion atmosphériques. Les résultats indiquent que le
panache a atteint des hauteurs variant entre 2 et 5 km
d’altitude avec une hauteur moyenne entre 3.5 et 4 km. Une
heure après le début de l’explosion, le panache a été détecté
facilement sur une distance de 30 km et l’étendue maximale a
été estimé à environ 68 km.
Image produite à partir de données géo-référencées du canal à 3.7 μm en
provenance du satellite SUOMI NPP à 02h21 HAE le 6 juillet. On voit le point chaud
associé à l’intense incendie de même que le panache de fumée et la condensation
de vapeur d’eau qui en résultent.
La ligne verte délimite la région où le panache de fumée et la condensation de
vapeur d’eau produits par le feu sont facilement identifiables.
Les lignes jaune et orange indiquent les concentrations relatives modélisées de
polluants dans la couche 3500 à 4000 m à 02h20 HAE le 6 juillet.
La ligne rouge représente la frontière entre la province du Québec et l’état du
Maine aux États-Unis.
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