cite de la musique Conservatoire de Paris autour de Shlomo Mintz samedi 2 et vendredi 15 mars 1996 notes de p r o g r a m m e Invité par la cité de la musique et par le Conservatoire de Paris, Shlomo Mintz a accepté pour la première fois à Paris, de combiner master-classes de violon, travail d'orchestre à l'intention des étudiants du Conservatoire et un récital avec l'un de ses partenaires préférés, le pianiste Itamar Golan. A l'approche de la quarantaine, ce musicien exceptionnel persiste à croire à la primauté de l'âme sur la technique et à la vertu du travail quotidien pour fortifier son identité artistique dans le flot incessant des prodiges du violon. Pour ce pédagogue occasionnel, l'enseignement ne délivre que des permis de conduire, l'essentiel se passe après : encore faut-il suivre la bonne route, la plus escarpée, vers le sommet et savoir y rester. samedi 2 mars - 20h / salle des concerts Paul Hindemith Trauermusik, pour alto et orchestre à cordes (durée 6 minutes) Wolfgang Amadeus Mozart Concerto pour violon et orchestre n° 3, en sol majeur, K 216 (durée 26 minutes) entracte Johannes Brahms Symphonie n° 3, en fa majeur, opus 90 (durée 36 minutes) Shlomo Mintz, direction, violon, alto Orchestre du Conservatoire production cité de la musique/ Conservatoire de Paris Noël Leriche, régie générale Jean-Luc Pétrement, régie plateau Marc Gomez, régie lumières autour de Shlomo Mintz Paul H i n d e m t i h Trauermusik, pour alto et orchestre à cordes Hindemith demeura toute sa vie fidèle à sa formation première d'instrumentiste virtuose. Premier violon, à vingt ans, de l'Orchestre de l'Opéra de Francfort, altiste du Quatuor Amar qu'il avait lui-même fondé, il continuera (lorsque le métier de compositeur viendra compléter sa palette) à assurer la création de la plupart de ses œuvres concertantes. Parmi son immense catalogue, la musique pour alto occupe une place non négligeable. Outre Trois sonates avec piano, Quatre sonates pour alto seul, il écrira à son propre usage un concerto (1927) et Der Schwanendreher (Le joueur de vielle) (1935). La Trauermusik, œuvre de circonstance, s'inscrit dans la série des pièces concertantes. Ses quatre brefs mouvements furent composés après la mort de Georges V d'Angleterre en 1936 et créés aussitôt à la BBC, Hindemith tenant lui-même la partie d'alto. Cette « musique de deuil » porte la trace de la fascination du compositeur pour la musique du premier XVIIIe siècle. Loin des excès expressionnistes qui firent sa célébrité, Hindemith s'inscrit ici dans la tradition du tombeau, revisitée à la lumière d'un contrepoint néo-tonal. Après une introduction confiée à l'orchestre à cordes, des rythmes pointés (à la connotation funèbre ?) conduisent à un récitatif accompagné de l'alto. La suite du mouvement procède par alternance des deux protagonistes jusqu'à la reprise conclusive des premières mesures. Les deuxième et troisième mouvements ne présentent que les deux facettes d'un même thème. Entendu d'abord sous forme de mélodie accompagnée à l'alto, il est ensuite, dans un tempo plus vif, réparti entre orchestre et soliste dans un épisode de grande violence. L'ultime section est construite sur le choral Für deinen Thron tret ich hier mit dont chaque phrase, traitée en contrepoint strict, est ponctuée par des respirations quasi improvisées de l'alto. L'allusion à Bach vient ici légitimer la solennité du propos ; comme si au XXe siècle, musique funèbre et néo-classicisme ne pouvaient qu'entretenir des liens d'évidences. Rémy Campos notes de programme / 3 autour de Shlomo Mintz Wolfgang Amadeus Mozart Concerto pour violon n°3, en sol majeur, K 216 On sait l'importance de Leopold Mozart lors des premiers pas musicaux de son fils Wolfgang. Auteur d'une méthode de violon, parue en 1756 et rééditée plusieurs fois par la suite, le père donna dès le départ à son enfant une formation poussée d'instrumentiste, l'initiant au clavecin autant qu'au violon. A Salzbourg, le jeune Mozart cumulera les fonctions de compositeur, claveciniste et violoniste jusqu'à ce que les deux premières activités prennent dans son esprit le dessus, comme il l'écrit à son père le 11 septembre 1778, au moment de fixer les conditions d'un retour dans sa ville natale : « Je ne réclame qu'une chose à Salzbourg, à savoir de ne pas tenir le violon comme auparavant. Je ne me donne plus comme violoniste. C'est au piano que je veux diriger et accompagner les airs. » Les cinq concertos pour violon de 1775 ont donc été conçus avant le revirement du musicien. Mozart les destinait sans doute à une publication en recueil - regroupant six opus - comme on le pratiquait alors pour les symphonies ou pour les partitions concertantes. La confrontation d'un soliste à un orchestre était alors au centre des préoccupations du compositeur ; le célèbre Concerto pour piano en mi bémol - dit Jeune homme - date de 1777 et est contemporain d'une Symphonie concertante pour violon et alto. Dans le Troisième concerto pour violon, la partie orchestrale du premier mouvement est loin d'être réduite au rôle de « guitare d'accompagnement » : la trame polyphonique est soignée et tient une part importante dans la conduite du discours. Le soliste occupe quant à lui le devant de la scène à deux reprises : lors d'une première cadence à la fin de la fausse réexposition et une deuxième fois avant la coda. L'adagio déroule sur un tapis de cordes, rehaussé de quelques doublures des vents, une cantilène ornée confiée au soliste. Le rondo final recourt à la forme française du pot-pourri dans laquelle les retours du refrain sont séparés par des intermèdes écrits dans une couleur et un tempo différents de ceux du refrain lui-même. Le morceau est ainsi entrecoupé d'un andante en mineur où les cordes accompagnent le violon en jouant pizzicati et d'un allegretto au ton homonyme majeur, où la vélocité et les doubles cordes du soliste sonnent comme une variation avant l'ultime cadence. R. C. 4 | cité de la musique autour de Shlomo Mintz Johannes Brahms Symphonie n° 3, en fa majeur, opus 90 Lorsqu'il achève sa Troisième symphonie en 1883, Johannes Brahms est depuis longtemps familier de l'écriture orchestrale. Son catalogue comprend alors deux ouvertures, les Variations sur un thème de Haydn, des pages de musique concertante et religieuse, et surtout deux symphonies terminées en 1876 et 1877. La dernière venue de ces partitions, créée à Vienne sous la direction d'Hans Richter, ne rencontra pas le succès que pouvait en attendre son auteur et dut même essuyer les attaques violentes des partisans de Wagner et de Bruckner. L'opinion acerbe de Hugo Wolff sur les productions symphoniques de Brahms, qu'il qualifiait d'« œuvres défraîchies et ennuyeuses jusqu'à l'écœurement, complètement mensongères et confuses », résume assez bien les reproches couramment faits au compositeur du Requiem allemand, dans les pays germaniques autant qu'en France. L'accusation la plus répandue - celle de mauvaise orchestration - ne s'explique d'ailleurs que par un malentendu. Si Brahms ne sacrifie pas à l'idéal « coloriste » et brillant des Liszt, Berlioz ou Wagner, ce n'est certainement pas par incapacité. La Troisième symphonie est d'ailleurs là pour faire la preuve des qualités du musicien quant à une instrumentation dont l'idéal est plus proche de Schumann que de la transparence mendelssohnienne. Si le premier mouvement est bien traversé par une cellule de trois notes, exposée dès les premières mesures, on se gardera de la rapprocher des thèmes générateurs qui envahissent musique symphonique et opéras à la fin du XIXe siècle. Cet élément se superpose en fait à la forme sonate traditionnelle et constitue une sorte de structure à chacun de ses retours. La clarté de la construction (une forme sonate à deux thèmes) laisse, dans l'andante, libre cours au plaisir de l'alliage des timbres solistes (clarinette d'abord à laquelle s'ajoute un basson pour le deuxième motif) ou au trouble des sons éparpillés dans l'espace sur un fond tonal indéterminé (au début du développement puis de la coda). Le troisième mouvement n'a d'un scherzo que l'apparence extérieure : deux parties symétriques encadrant un trio où prédominent les bois. Loin de la virtuosité d'usage, Brahms semble suspendre la marche de sa symphonie vers le final par un mouvement de grand lyrisme (on a souvent parlé pour cette page de mélancolie). notes de p r o g r a m m e | 5 autour de Shlomo Mintz L'allégro qui conclut la partition n'est pas sans surprise. L'apothéose y a lieu « en creux », rejetée au milieu du mouvement par la présence de deux panneaux extrêmes, conçus dans la demi-teinte et les nuances piano. L'héroïsme de la section centrale, déchaînant trombones et fortissimi, vacille ainsi dans les phrases voilées d'un choral à peine esquissé. R.C. 6 | cité de la musique vendredi 15 mars - 20h / salle des concerts Franz Schubert Trois N° 1 N° 2 N° 3 sonatines pour violon et piano en ré majeur, D. 384 en la mineur, D. 385 en sol mineur, D. 408 Sonate pour Arpeggione, en la mineur, D. 821 (version pour alto et piano) (durée du concert Ih30) Shlomo Mintz, alto et violon Itamar Golan, piano Noël Leriche, régie générale Jean-Luc Pétrement, régie plateau Marc Gomez, régie lumières autour de Shlomo Mintz Franz Schubert Trois sonatines pour violon et piano A l'instar de Leopold Mozart apprenant à son fils le violon, c'est le père de Franz Schubert qui initia son enfant aux rudiments de l'instrument, son frère Ignaz se chargeant de sa formation pianistique. Entré au Konvikt, le jeune Schubert pratiquera intensivement le violon dans l'orchestre des élèves autant qu'en quatuor. En 1816, le compositeur conçoit trois sonates pour piano et violon qu'il destinait sans doute à une publication en recueil. Elles ne figurèrent au catalogue de l'éditeur Diabelli qu'à titre posthume, en 1836. Le manuscrit de la première précise : « Sonate pour le pianoforte avec accompagnement de violon ». Le soliste n'y occupe pourtant pas une position subalterne : dans le premier mouvement, l'unisson initial se transforme vite en un système dialogique simple mais efficace. L'andante exploite un changement de couleur fréquent dans les lieder contemporains, où la partie centrale est assombrie par une modulation en mineur. Le final tente un élargissement de l'écriture pianistique (où les octaves abondent) tandis que la partie de violon s'anime. Après cette sonate en miniature, le deuxième volet du tryptique est une sorte d'agrandissement expressif. L'opposition, très forte, des deux thèmes du premier mouvement (un motif en notes disjointes et une grande ligne mélodique), la tension des lignes de violon dans le développement contribuent à la dramatisation du discours. L'ambitus élargi de l'andante et la variété de ses figurations instrumentales, l'énergie du menuet, participent aussi de l'extension de la sonate. Le rondo final ne sacrifie pas à la virtuosité : l'écriture à trois voix du thème se maintient presque tout au long d'un mouvement sur lequel les imitations entre violon et piano du développement jettent une sombre couleur. L'allegro giusto qui ouvre la dernière Sonate du groupe inaugure une tout autre manière d'envisager les rapports entre les deux instruments : le violon s'émancipe, exploité pour ses timbres, ses modes de jeu propres (les trémolos par exemple), pris dans des combinaisons presque orchestrales. L'andante réalise un équilibre parfait des rôles, chacun des partenaires occupant alternativement le premier plan. Après un menuetto très conventionnel, le dernier mouvement agrémente une forme sonate d'une réexposition à la sous-dominante et d'une reprise du deuxième thème au ton homonyme majeur. 8 | cité de la musique autour de Shlomo Mintz Sonate pour Arpeggione, en la mineur, D. 821 Le domaine de la musique utilitaire est loin de se limiter, chez Schubert, aux innombrables partitions écrites pour le cercle étroit de ses amis. Si les Schubertiades ont permis au catalogue du musicien de s'enrichir en Lieder, danses ou pièces pour piano à quatre mains, les nombreuses commandes auxquelles il a dû répondre l'amenèrent à aborder des formations ou des genres parfois surprenants. Le cas de la Sonate pour arpeggione et piano est à cet égard exemplaire. En 1823, le facteur viennois J.G.Staufer venait de mettre au point un nouvel instrument, compromis entre le violon, dont il prenait la forme, et la guitare à laquelle il empruntait ses six cordes. C'est certainementVincenz Schuster, qui s'était institué virtuose de l'arpeggione qui commanda à Schubert une partition capable de mettre en valeur les qualités propres de l'instrument. Au morceau de genre, le compositeur préféra une plus ambitieuse sonate en trois mouvements qui fut créée par les deux musiciens à la fin de 1824, chez le soliste. La première édition de l'œuvre ne date que de 1871 : elle comportait, outre la partie originale pour arpeggione, des transcriptions facultatives pour violon ou violoncelle. L'invention de Staufer n'ayant rencontré qu'un faible succès, le nombre des adaptations s'élargit encore jusqu'à comprendre l'alto et la guitare. L'allegro moderato qui ouvre la Sonate met particulièrement en valeur le soliste, le piano se contentant de faire entendre quelques échos des motifs de l'arpeggione. De l'élan de la première mélodie à l'air de danse servant de deuxième thème, en passant par les passages en gammes à la virtuosité « obligée », le compositeur semble avoir voulu offrir un panorama des couleurs et des possibilités techniques de l'instrument. L'adagio débute par une longue cantilène soutenue par les batteries du piano, telle que l'imagination du maître du Lied viennois en produit quelquefois dans sa musique de chambre. Le développement, qui parcours dans toute son amplitude le registre de l'instrument, s'enchaîne au final. Après ce recueillement expressif, le soliste peut donner libre cours à sa virtuosité : un rondo d'allure populaire lui permet de briller dans des exercices parfois acrobatiques. R.C. notes de programme | 9 autour de Shlomo Mintz Shlomo Mintz Né à Moscou en 1957, Shlomo Mintz émigre en 1959 en Israël où il étudie avec Ileona Feher. A onze ans, il fait ses débuts, sous la direction de Zubin Mehta, avec l'Orchestre Philharmonique d'Israël, puis, sur les conseils d'Isaac Stern et grâce à la Fondation IsraëlAmérique, il poursuit ses études à la Julliard School de New York dans la classe de Dorothy Delay. En 1973, il fait ses débuts à Carnegie Hall avec l'Orchestre de Pittsburg sous la direction de William Steinberg, puis en Europe, trois ans plus tard. Il joue régulièrement sous la direction de Guilini, Abbado, Levi, Barenboïm, Mehta, Dorati, Sanderling, Celibidache, Maazel, Dutoit, Mutti. De 1989 à 1993, il ajoute à ses activités de violoniste celle de chef d'orchestre permanent de l'Orchestre de Chambre d'Israël. Depuis 1994, il est directeur musical de l'Orchestre Symponique de Limbourg. Il joue le violon Zahn, construit par Stradivarius en 1719, qui lui a été prêté par le Groupe LVMH/Moët Hennessy Louis Vuitton, et un alto de Carlo-Guiseppe Testore de 1696 lui appartenant. Itamar Golan Né en 1970 en Lituanie, Itamar Golan émigre en 1971 en Israël où il étudie le piano avec LaraVodovoz et Emmanuel Krasovsky. Depuis l'âge de sept ans, il se produit en récital et en musique de chambre en Israël et depuis 1985 aux Etats-Unis. Il a été plusieurs fois lauréat de la fondation IsraëlAmérique. De 1985 à autour de Shlomo Mintz 1988, il étudie le piano à Boston avec Léonard Shure, Patricia Zander et la musique de chambre avec Eugen Lehner et Chaïm Taub. Itamar Golan fonde le quatuor avec piano Aurora et plusieurs formations de musique de chambre. Il a joué comme soliste avec les orchestres philharmoniques d'Israël et de Berlin sous la direction de Zubin Mehta et l'orchestre de Jérusalem sous la direction de David Shalon. Il participe également à de nombreux festivals internationaux. Il se consacre essentiellement à la musique de chambre et joue avec des musiciens de renommée internationale tels que Shlomo Mintz, Maxim Vengerov, David Garrett, Midori, Tabea Zimmermann et Sharon Kam. A partir de 1995, il jouera en trio avec Shlomo Mintz et Matt Haimovitz. Depuis septembre 1994, il est professeur de musique de chambre au Conservatoire de Paris. Orchestre du Conservatoire Les orchestres du Conservatoire sont constitués à partir d'un groupe de plus de 500 instrumentistes qui se réunissent en des formations variables, par session, selon le programme et la démarche pédagogique retenue. Dès leur admission et pendant toute la durée de leur scolarité instrumentale, les élèves pratiquent ainsi la musique d'ensemble sous plusieurs formes (de la musique de chambre à l'orchestre symphonique en grande formation). notes de programme | 11 prochains concerts - mars r é s e r v a t i o n s : 44 84 44 84 rencontres d'orchestres de jeunes d'Ile-de-France vendredi 8 - 20h et samedi 9 - 16h30 Claude-Henri Joubert, direction artistique Jean-Sébastien Bach cantates profanes et sacrées musique de chambre samedi 16 - 16h30 Pierre Hantaï, clavecin samedi 16 - 20h et dimanche 17 - 16h30 Paul Dombrecht, direction Il Fondamento dimanche 17 - 15h Christophe Coin, viole de gambe Pierre Hantaï, clavecin samedi 23 - 16h30 et dimanche 24 - 15h Hopkinson Smith, luth samedi 30 - 16h30 Chiara Banchini, violon Françoise Lengellé, clavecin samedi 30 - 20h et dimanche 31 - 16h30 Gustav Leonhardt, direction Choir and Orchestra of the Age of Enlightenment dimanche 31 - 15h Conservatoire de Paris cite de la musique renseignemems 1.44 84 45 45 réservations individuels 1.44 84 44 84 groupes 1.44 84 45 71 visites groupes musée 1.44 84 46 46 3615 citemusique (1,29F TTC la minute) c i t é de la m u s i q u e 2 2 1 , a v e n u e Jean Jaurès 75019 Paris ® P o r t e de P a n t i n ^—, _ , Un événement • HTeleramar • t î *