TRANSMISSION NON-RECIPROQUE EXALTEE DANS UN GUIDE SEMICONDUCTEUR A BASE DE METAL FERROMAGNETIQUE NANO-STRUCTURE L. Magdenko1,2, M. Vanwolleghem1,2, P. Gogol1,2, P. Beauvillain1,2, J.-M. Lourtioz1,2, B.Dagens1,2 1 Institut d’Electronique Fondamentale, CNRS UMR 8622, Orsay, F-91405 2 Université Paris-Sud, Orsay, F-91405 [email protected] RESUME L’isolateur optique intégré est un élément clef du développement des laser bas-coûts et de leur insertion dans des circuits photoniques. Dans ce papier nous montrons théoriquement que les performances de l’isolateur optique intégré basé sur l’effet Kerr magnéto-optique transverse devraient être significativement améliorées par la nanostructuration en réseau de Bragg de sa couche de métal ferromagnétique. MOTS-CLEFS : isolateur optique ; optique intégrée ; magnéto-optique ; nanostructures métalliques. 1. INTRODUCTION Le développement des réseaux optiques pour l’accès et les transmissions métropolitaines nécessite des composants bas-coût, en particulier des sources laser compactes produites en grande série. Une solution pour réduire le coût d’un boîtier laser est d’en simplifier l’assemblage en intégrant monolithiquement l’isolateur optique avec le laser dans un processus de fabrication collective sur plaque. Un tel composant intégré permettrait également d’envisager l’insertion de sources laser-isolateur dans des circuits photoniques intégrés, sans risque d’instabilité de la source du fait de retours optiques dans le circuit. (a) (b) (c) Fig. 1 : Schéma de l’isolateur-SOA sur InP (a) et principe de fonctionnement (b). Schéma de l’isolateur de Bragg (c). Dans ce contexte, un concept d’isolateur intégré a été proposé théoriquement [1] en 1999, basés sur l’effet Kerr magnéto-optique transverse qui peut être généré par l’interaction entre un mode optique transverse magnétique (TM) et un matériau magnétique aimanté perpendiculairement au guide d’onde. Contrairement à l’isolateur de type Faraday, ce concept ne nécessite pas de polariseurs et peut être intégré. L’isolateur-SOA (amplificateur optique à semiconducteur) a été par la suite démontré expérimentalement dans la filière InP à 1,3μm [2, 3]. Dans ce composant, l’électrode de contact est constituée d’un métal ferromagnétique (FeCo) aimanté transversalement. La structure de couches du SOA est telle que l’interaction du mode optique guidé avec le métal ferromagnétique induit une absorption non réciproque de l’onde, donc dépendant du sens de propagation, comme illustré sur la Figure 1(a). L’injection du courant dans le SOA permet de compenser les pertes optiques dans le sens aller de propagation (sens subissant le moins de pertes) et de réaliser ainsi un isolateur fonctionnant à la transparence. Le taux d’isolation obtenu à la transparence est de 12,7 dB à 1,3μm, avec un courant injecté de 160 mA [3]. Alors que ce résultat constitue l’état de l’art concernant les isolateurs optiques intégrés fonctionnant à la transparence, la performance reste insuffisante pour les applications télécoms du fait du niveau élevé de courant requis dans cette configuration. Il est nécessaire d’augmenter de manière significative le rapport entre taux d’isolation (propagation non réciproque) et niveau de pertes à compenser dans le sens aller. 2. ISOLATEUR DE BRAGG Une évolution possible de la structure de la Figure 1(a) est basée sur la non-réciprocité de la partie réelle de l’indice effectif du mode propagé, qui accompagne nécessairement la nonréciprocité de l’absorption du mode induite par le métal (Fig. 1(b)). Cette propriété peut être utilisée dans une structure interférométrique comme proposé dans la filière des matériaux grenat [4]. Une autre évolution possible, qui fait l’objet de ce papier, consiste à exploiter un effet de résonance en réalisant une cavité de Bragg par nanostructuration de la couche de métal ferromagnétique (Fig. 1(c)). L’effet escompté est de réduire la dimension longitudinale du composant et l’absorption totale induite, et donc le courant à injecter dans le SOA, tout en gardant le taux d’isolation par effet de résonance. De plus la géométrie à fort rapport de forme des « fils » (section typique de 50x100 nm²) de FeCo favorise le maintien de l’aimantation perpendiculairement au guide d’onde, assurant ainsi un fonctionnement à long terme sans besoin de ré-aimanter la structure métallique. On notera également que cet isolateur de Bragg pourrait être utilisé comme filtre non-réciproque, en exploitant aussi la non-réciprocité de la partie réelle de l’indice effectif [5]. Dans ce papier, nous présenterons d’abord le simulateur développé pour étudier théoriquement l’isolateur de Bragg à effet Kerr transverse magnéto-optique résonant, puis nous montrerons les premiers résultats de simulation mettant notamment en évidence une augmentation relative de la transmission par rapport au taux d’isolation. 3. MODELE ET RESULTATS NUMERIQUES Le principe du modèle utilisé repose sur le développement non-réciproque en mode propres des solutions modales de la structure, incluant les modes plasmoniques (Fig. 2(a)). Le spectre modal est calculé rigoureusement dans chaque section uniforme de la structure, ainsi que les matrices nonréciproques de transfert à chaque interface. (a) (b) Fig. 2 : (a) Schéma de principe de la décomposition non-réciproque en modes propres ; (b) coefficients de transmission de la puissance du mode d’ordre 0 en fonction de la longueur d’onde. La pertinence de cette méthode de développement en modes propres a été prouvée pour des guides réciproques avec ou sans pertes [6]. Nous l’avons étendue au cas de structures incluant au moins une couche d’indice complexe non réciproque. Des premières simulations ont été effectuées en considérant une structure de guide similaire à celle de l’isolateur-SOA, avec comme différence la structuration en réseau de Bragg de la couche de FeCo de 50 nm d’épaisseur. La période est de 200 nm pour une résonance attendue à environ 1,3μm, et le facteur de remplissage est de 50%. Une structure de 500 périodes, soit environ 100μm de long, a été considérée. L’indice optique du Fe50Co50 à 1,3μm s’élève à 3,4-j4,5 [7] et sa constante gyrotropique (élément non diagonal du tenseur de permittivité) à 1,7+j1,7. L’épaisseur de la couche de confinement entre le guide « actif » du SOA et le FeCo est de 300 nm. Cette épaisseur est un paramètre clef dans le compromis taux d’isolation - pertes induites de l’isolateur. L’amplification n’est pas prise en compte dans le modèle. Pour le calcul une base de 40 modes propres a été utilisée. La Figure 2(b) montre les spectres de transmission du mode fondamental pour les deux sens de propagation. La résonance autour de 1,3μm due à la cavité de Bragg apparait clairement, tandis que l’isolation en puissance obtenue avec cette structure de 100μm s’élève à 2,3dB. Cette valeur est à comparer au taux d’isolation de 3,9dB qui serait obtenu sans nanostructuration avec un isolateur-SOA de même structure et de même longueur. Il y a donc une décroissance du dichroïsme, mais qui n’est pas proportionnelle au facteur de remplissage du réseau. De plus les pertes totales du mode « aller » sont de 13dB avec le réseau de Bragg. Elles sont à comparer à une valeur de 39dB sans nanostructuration. Il apparait donc que la nanostructuration du métal réduit considérablement les pertes de transmission sans induire une réduction proportionnelle du taux d’isolation. Ce taux d’isolation pouvant être ajusté par optimisation de la structure guidante et du confinement optique dans la couche ferromagnétique, la structuration en réseau de Bragg semble prometteuse pour une amélioration significative des performances. 4. CONCLUSION ET PERSPECTIVES L’isolateur intégré est un élément clef des laser bas-coût et des circuits photoniques intégrés. L’isolateur-SOA à base d’effet magnéto-optique Kerr transverse a montré expérimentalement un taux d’isolation de 12,7dB à la transparence avec un courant d’injection de 160 mA. Ici nous montrons théoriquement que la structuration de la couche ferromagnétique de FeCo conduit à une exaltation de la transmission par rapport à la version avec couche continue, et constitue une solution, qui reste à optimiser, pour diminuer le courant d’injection tout en maintenant un taux d’isolation similaire. La fabrication de l’isolateur de Bragg à base de FeCo est en cours afin de valider expérimentalement ces prévisions théoriques. REMERCIEMENTS Ce travail est réalisé dans le cadre du projet ANR RECITAL. REFERENCES [1] M. Takenaka, and Y. Nakano, “Proposal of a novel semiconductor optical waveguide isolator”, Conference Proceedings IPRM'99, Davos, Switzerland, 16-20 May, 1999 [2] M. Vanwolleghem et al., “Experimental demonstration of nonreciprocal amplified spontaneous emission [3] [4] [5] [6] [7] in a CoFe clad semiconductor optical amplifier for use as an integrated optical isolator,” Applied Physics Letters, 85(18), p.3980-3982 (2004) W. Van Parys et al, “Transverse magnetic mode nonreciprocal propagation in an amplifying AlGaInAs/InP optical waveguide isolator”, Appl. Phys. Lett., 88, 071115 (2006) Y. Shoji, T. Mizumoto, H. Yokoi, I-W. Hsieh, R. M. Osgood, Jr, “Magneto-optical isolator with silicon waveguides fabricated by direct bonding,” Appl. Phys. Lett. 92, 071117 (2008) M. Vanwolleghem, L. Magdenko, P. Gogol, B. Dagens, P. Beauvillain, J.-M. Lourtioz, “Semiconductor optical Bragg isolator” IPRM’08, paper WeA3.2, to be presented at IPRM’08, 20th IPRM conference, 2529th May 2008, Versailles, France P. Bienstman and R. Baets, “Optical modelling of photonic crystals and VCSELs using eigenmode expansion and perfectly matched layers.” Opt. Quantum Electron. 33, 327 (2001) A. Lesuffleur, M. Vanwolleghem, P. Gogol, B. Bartenlian, P. Beauvillain, J. Harmle, L. Lagae, J. Pistora, K. Postava, S. Visnovsky and R. Wirix-Speetjens, “ Magneto-optical parameters of Co_90 Fe_10 and Co_50 Fe_50 ferromagnetic thin films for 1.3 μm integrated isolator,”J. of Magn. Magn. Mat., Volume 305, Issue 2, 2006, Pages 284-290