L`acier dans la construction. Partie 1 : Corrosivité des

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TECHNIQUES & PRATIQUE
1 INTRODUCTION
L’acier entre dans le bâtiment sous de multi-
ples formes : tôles formées à froid pour les fa-
çades, les couvertures et les planchers, profilés
laminés à chaud pour les ossatures, armatures
pour les bétons, tuyaux pour les canalisations
ou encore cornières, châssis, escaliers, garde-
corps, ancrages, boulons et quincaillerie (cf.
figure 1). Il constitue l’un des métaux les plus
utilisés car il allie à sa légèreté des proprié-
tés techniques exceptionnelles et des atouts
économiques incontestables. Il possède entre
autres une bonne résistance à la traction, une
excellente aptitude à la déformation et une
bonne soudabilité.
Si l’acier possède incontestablement un cer-
tain nombre de qualités, il présente, comme
tous les métaux, l’inconvénient majeur de
s’oxyder au contact des éléments corrosifs qui
l’entourent. Sa corrosion risque alors d’altérer
les performances de l’ouvrage et d’en réduire
la durée de vie.
Les problèmes de corrosion de l’acier ne peu-
vent donc en aucun cas être négligés. L’évalua-
tion du risque de corrosion du métal dans son
milieu d’utilisation peut permettre de retarder
la corrosion, de limiter son ampleur et, dans le
meilleur des cas, d’éviter son apparition. Ceci
cessite de prendre connaissance des facteurs
de corrosion présents dans l’environnement
avant la réalisation de l’ouvrage. Une fois la
corrosivité du milieu déterminée sur la base de
ces facteurs, la nuance d’acier et son moyen de
protection peuvent ensuite être choisis en tenant
compte de cette contrainte.
De nouveaux alliages d’acier plus résistants à la
corrosion et de nouvelles techniques de protec-
tion de l’acier ont été développés afin de faire
face aux problèmes de corrosion. Le choix du
matériau adéquat permet alors de réduire les
coûts de fonctionnement, difficilement estima-
bles, qui seraient dus à l’entretien, à la paration
ou au remplacement des éléments corrodés.
L’acier dans la
construction
Partie 1 : Corrosivité des milieux
et nuances d’acier
Le secteur de la construction est
le plus grand consommateur d’acier,
celui-ci étant apprécié par les archi-
tectes et maîtres d’ouvrage pour sa
légèreté, sa parfaite homogénéité et
son comportement prédictible sur
chantier. Cependant, comme tous les
métaux, l’acier possède un point fai-
ble : il se corrode, ce qui entraîne des
conséquences économiques considé-
rables. Evaluer les risques de corro-
sion et bien choisir la nuance d’acier
et son système de protection sont
la garantie d’une meilleure durabilité
des ouvrages en acier. La première partie du présent article s’inté-
ressera aux principaux facteurs de corrosion
nécessaires à l’évaluation de la corrosivité
des différents milieux d’exposition de l’acier.
Les nuances d’acier et leurs systèmes de dé-
signation seront ensuite décrits et explicités.
Quant aux principaux moyens de protection de
l’acier contre la corrosion, ils feront l’objet de
la seconde partie de cet article.
Ce texte ne fournit pas de règles d’usage de
l’acier dans la construction mais peut servir de
guide en ce qui concerne les facteurs de risque
de corrosion de l’acier et les moyens d’évalua-
tion de ce risque. Il met à disposition des infor-
mations permettant d’identifier correctement
les aciers et permet, dans sa seconde partie,
d’en savoir plus sur les systèmes de protection
qui offrent à l’acier une meilleure résistance à
la corrosion.
2 CORROSIVITÉ DES MILIEUX EN
CONTACT AVEC L’ACIER
La corrosion est une destruction du matériau
par un retour spontané du métal à un état na-
turel de plus grande stabilité, c’est-à-dire sous
forme d’oxydes et d’hydroxydes. Suivant son
application, l’acier sera exposé aux environ-
nements plus ou moins corrosifs que sont l’at-
mosphère, l’eau, le sol et le béton. A chacun
de ces milieux correspond toujours une phase
aqueuse qui est manifeste lorsqu’il s’agit de ca-
nalisations ou de réservoirs d’eau, mais qui est
plus discrète lorsqu’il s’agit de béton armé.
La présence de deux espèces oxydantes majeu-
res dans cette phase aqueuse, à savoir l’oxygè-
ne dissous et les ions H+ ou protons, favorise le
développement de la corrosion par oxydation
du fer, élément principal de l’acier, selon les
réactions électrochimiques suivantes :
oxydation du fer :
2 Fe 2 Fe2+ + 4e- (1)
réduction de l’oxygène :
O2 + 2H2O + 4e- 4OH- (2)
réduction des ions H+ :
4 H+ + 4e- 2H2 (3)
Ces réactions aboutissent à la précipitation
d’hydroxyde ferreux Fe(OH)2 qui s’oxyde en-
suite pour former des oxydes ferriques hydra-
tés tels que la lépidocrocite et la goethite.
Ces produits d’oxydation forment un film à la
surface du métal. Si, par chance, ce film est
imperméable, insoluble et non fragile, il peut
isoler efficacement le métal de son environne-
ment et enrayer le processus de corrosion. On
parlera alors de passivation du métal.
Dans le cas de l’acier, le film d’oxyhydroxyde
de fer n’est protecteur que dans des conditions
très particulières : en milieu acide fortement
oxydant ou en milieu alcalin (pH > 9-10). En
effet, l’acier (non allié) n’est pas un métal dit
‘passivable’, à l’inverse d’alliages d’alumi-
nium ou d’aciers inoxydables dont l’emploi
repose spécifiquement sur cette propriété.
Dès lors que le film n’est pas protecteur, l’oxy-
dation du fer se poursuit et entraîne progressi-
vement la dissolution de l’acier non protégé.
Il s’ensuit une réduction graduelle de son
épaisseur – soit localisée, soit généralisée – se
traduisant par une série de désagréments pas
forcément dangereux, mais souvent préjudi-
ciables et inadmissibles : taches et piqûres des
? P. Steenhoudt, ir., chercheur, laboratoire
‘Chimie du bâtiment’, CSTC
Fig. 1 Escalier extérieur en acier
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tôles et des profilés, éclats et fissures du béton
armé, percements de canalisations, …
En réalité, les réactions électrochimiques qui
conduisent à la corrosion de l’acier sont d’une
grande complexité et dépendent de multiples
facteurs. A chacun des milieux précités cor-
respond une série de paramètres spécifiques à
prendre en compte pour en évaluer la corrosi-
vité. Ces paramètres et les processus qui les
accompagnent sont explicités ci-après pour
chaque milieu en contact avec l’acier.
2.1 Corrosivité de latmosphère
2.1.1 Humidité relative : principal acti-
vateur de la corrosion atmosphé-
rique
Si la corrosion sèche existe, sa vitesse de déve-
loppement dans l’atmosphère est négligeable
et non préoccupante. Elle ne joue un rôle im-
portant que pour des appareils fonctionnant à
très haute température.
C’est principalement la teneur en vapeur d’eau
ou l’humidité relative de l’atmosphère qui est
à la base des phénomènes de corrosion atmos-
phérique de l’acier [9]. Si l’humidité relative
est élevée, il se forme à la surface de l’acier
un film d’eau fortement oxygéné, parfois in-
visible, d’épaisseur variable, qui constitue une
couche mince d’électrolytes. Si l’humidité re-
lative est faible (inférieure à 60 %), la vitesse
de corrosion de l’acier est négligeable. C’est
notamment le cas à l’intérieur des bâtiments
chauffés, ventilés ou climatisés, à l’exception
des pièces d’eau, des buanderies ou des cui-
sines qui peuvent présenter temporairement
une humidité relative particulièrement élevée
(jusqu’à 100 %).
Dans les atmosphères ‘normales’ contenant
d’office des agents polluants (SO2, sels ma-
rins, suie, particules, ...), on admet que l’acier
ainsi que les autres métaux se corrodent à une
vitesse accélérée lorsque l’humidité relative de
la couche d’air située au-dessus de la surface
excède 70 % [2]. La condensation de l’eau à
des valeurs d’humidité relative inférieures à
100 % se produit notamment lorsque la tempé-
rature de l’air baisse ou si la surface elle-même
est refroidie par rayonnement et que l’air en
contact avec celle-ci commence, lui aussi, à se
refroidir au-dessous de la température du point
de rosée. C’est le cas, par exemple, lorsque la
surface rayonne vers un ciel nocturne dégagé.
Si la rencontre de l’air avec une surface froide
constitue l’une des causes de la formation
d’eau à l’état condensé, il en existe d’autres.
Il peut s’agir de la condensation de l’eau dans
des capillaires ou crevasses de taille molé-
culaire à la suite de phénomènes de tension
superficielle réduisant la pression saturante
à l’intérieur des capillaires [5]. Ceci met en
évidence l’importance de la rugosité de sur-
face dans les phénomènes de corrosion. L’eau
à l’état condensé dépend aussi de l’hygrosco-
picité des produits de corrosion solubles dans
l’eau et des poussières de l’atmosphère [2].
Ces produits peuvent favoriser la formation
d’un film électrolytique avant même d’attein-
dre les 70 % d’humidité relative.
Ajoutons que la géométrie et l’orientation
d’un ouvrage en acier influencent également
la condensation de la vapeur d’eau. C’est ainsi
qu’on peut observer la présence de rosée sur le
toit d’une voiture et non pas sur ses côtés (cf.
figure 2). Il en va de même pour les bâtiments :
la durée d’humidification (durée de mouillage
ou temps de persistance de l’humidité) à la
surface d’un toit en acier peut être deux fois
plus élevée que celle des éléments de façade.
On peut donc s’attendre à une augmentation
proportionnelle du taux de corrosion de la toi-
ture [39] (cf. figure 3).
2.1.2 Polluants gazeux et particulaires
Nombre de gaz et de poussières provenant des
activités humaines (industrie, agriculture, cir-
culation automobile, chauffage, …) sont injec-
tés dans l’atmosphère. Ces polluants atmos-
phériques peuvent se déposer sur les surfaces
qu’ils rencontrent ou bien réagir entre eux ou
avec la vapeur d’eau présente dans l’atmos-
phère. Les nouveaux composés formés peu-
vent à leur tour se déposer sur les surfaces par
voie sèche ou par voie humide (pluie, neige,
brouillard, condensation). Ces polluants sont
plus concentrés en région industrielle ou à for-
te densité de population qu’en région agricole
ou faiblement peuplée.
Parmi ces polluants, on retrouve des activa-
teurs de la corrosion atmosphérique tels que :
l’oxyde de soufre ou anhydride sulfureux (SO2)
Ce polluant gazeux des plus agressifs pro-
vient essentiellement de la combustion du
charbon et du pétrole (combustibles fossi-
les). Des corrélations entre le niveau de SO2
dans l’air et le niveau d’attaque de l’acier
ont prouvé que le SO2 accélère de façon
sensible le processus de corrosion. Les pré-
visions de la vitesse de corrosion dans une
région doivent tenir compte de la teneur an-
nuelle en SO2 dans l’atmosphère, mais aussi
de la pollution locale pouvant provenir, par
exemple, de la cheminée d’un bâtiment dé-
gageant du SO2 à proximité [39]
l’ozone
L’ozone (O3) de la troposphère (basses cou-
ches de l’atmosphère s’élevant du sol jus-
qu’à 20 km d’altitude environ) est un gaz
extrêmement irritant et incolore, dangereux
parce que nous le respirons, contrairement à
l’ozone de la stratosphère que nous ne res-
pirons pas et qui nous protège du rayonne-
ment solaire ultraviolet. Ce gaz provient de
la transformation des NOx (oxydes d’azote)
et des COV (composés organiques vola-
tils) sous l’effet des rayons UV. Sa teneur
habituellement faible dans la troposphère
semble augmenter dans l’hémisphère nord
en raison des activités humaines. L’ozone a
un pouvoir oxydant qui le rend, à concentra-
tion équivalente, aussi agressif vis-à-vis de
l’acier que l’oxyde de soufre [2]
l’acidité des eaux de condensation
Les ions H+ responsables de l’acidité des
eaux sont des oxydants qui participent aux
réactions d’oxydoréduction de la corrosion.
A l’état naturel, l’eau atmosphérique est lé-
gèrement acide (pH 5,6) par dissolution du
dioxyde de carbone (CO2 + H2O HCO3
- +
H+), mais la pollution de l’atmosphère due à
l’industrie et à la circulation automobile rend
cette eau aujourd’hui beaucoup plus acide
(pH 4 couramment observé). Cette acidifica-
tion de l’atmosphère provient de la transfor-
mation dans l’air des NOx en HNO3 et des
SO2 en H2SO3 et H2SO4 [39], acides forts se
dissociant dans l’eau en libérant des protons.
Les NOx (NO + NO2) sont formés au cours de
tout processus de combustion à haute tempé-
rature, soit par oxydation de l’azote de l’air
par l’oxygène, soit par combustion des pro-
duits azotés contenus dans les combustibles
les chlorures présents dans l’atmosphère
La salinité atmosphérique due aux chlorures
augmente distinctement les vitesses de corro-
sion atmosphérique de l’acier, pas seulement
Fig. 2 Condensation sur le toit d’un
véhicule.
Fig. 3 Corrosion de la toiture d’un
bâtiment en acier.
Les Dossiers du CSTC 2006/4 Cahier 6 page 3
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par augmentation de la teneur en électrolytes
de l’eau atmosphérique, mais par l’influence
du chlore sur la concentration de l’eau en ions
H+ (pH) et par la solubilité des complexes de
chlorures de fer formés à la surface de l’acier.
Dans le cas de métaux comme le zinc et le
cuivre, les sels de chlore formés sont moins
solubles et la teneur en chlorures dans l’at-
mosphère influence donc moins la vitesse de
corrosion de ces métaux. L’impact des chlo-
rures sur la corrosion est surtout à considérer
dans les gions proches de la te. En effet, à
cet endroit, la concentration en chlorures dans
l’air est d’environ 100 µg/m3 alors qu’en zone
urbaine ou industrielle, elle est de l’ordre de
10 à 30 µg/m3. Dans un environnement atmos-
phérique maritime, les surfaces abritées de la
pluie, sur lesquelles les chlorures peuvent se
coller, présentent un risque de corrosion su-
périeur en raison de la présence de ces sels
hygroscopiques. Le dépôt des chlorures en ré-
gion côtière pend aussi des facteurs influen-
çant le transport des sels de mer à l’intérieur
des terres, tels que la direction et la vitesse
du vent, la topographie locale ou encore la
distance du front de mer. Les effets extrêmes
des chlorures sont principalement ressentis
dans des zones de très violents embruns et des
bords de mer des régions à climat chaud et
humide mais aussi dans des zones d’éclabous-
sures affectées par les sels deverglaçage
les dépôts de particules (suie, poussières,
cendres volantes) à la surface de l’acier
Les particules présentes dans l’atmosphère
sont de composition, de forme et de dimen-
sion très diverses. Les grosses particules pro-
viennent à la fois de sources naturelles, com-
me la terre ou le sable soufflé par le vent, et
de sources anthropiques, comme la poussière
des ouvrages de construction. Les particules
plus fines peuvent être émises directement
par les procédés de combustion (suie, cendres
volantes, …) ou résulter de la condensation
de gaz ou de réactions chimiques entre gaz,
donnant lieu à la formation d’un solide. Les
particules peuvent aussi s’agglomérer entre
elles. Plus les particules seront lourdes, plus
elles auront tendance à sédimenter et à former
des dépôts sur les surfaces rencontrées. Ces
dépôts peuvent déclencher la corrosion de
l’acier, soit en favorisant les processus d’aé-
ration différentielle aux zones de contact (voir
§ 2.2.3), soit en fournissant des électrolytes
hygroscopiques qui participent directement
aux réactions de corrosion.
Enfin, la température, l’intensité et la durée de
l’insolation, les précipitations (pluie et neige)
et la direction des vents constituent des pa-
ramètres environnementaux qui s’ajoutent à
ceux déjà cités pour influencer la corrosivité
de l’atmosphère.
Les facteurs cités ci-avant ont été considérés eu
égard aux atmosphères extérieures. Il est évi-
dent que, pour les atmosphères intérieures de
bâtiments destinés à une activispécifique (pis-
Tableau 1 Classification de la due de persistance de l’humidité sur les surfaces [33].
Classe Durée de persistance de l’humidité
τ1
τ2
τ3
τ4
τ5
Heures/an Pourcentage
τ 10
10 < τ 250
250 < τ 2500
2500 < τ 5500
5500 < τ
τ 0,1
0,1 < τ 3
3 < τ 30
30 < τ 60
60 < τ
Tableau 2 Classication de la pollution par les substances contenant du soufre [33] (*).
Catégorie Vitesse de dépôt du
SO2 (par jour) mg/(m2.d)
Concentration de SO2
µg/m3
P0
P1
P2
P3
Pd 10
10 < Pd 35
35 < Pd 80
80 < Pd 200
Pc 12
12 < Pc 40
40 < Pc 90
90 < Pc 250
(*) Représenté par le dioxyde de soufre (SO2).
cine, étable, usine de produits chimiques, …), il
faut tenir compte d’autres facteurs, trop nom-
breux pour être examinés ici. A titre d’exemple,
considérons le cas particulier de l’atmosphère
des bâtiments où logent des animaux et où les
causes de corrosion sont nombreuses. Les ani-
maux expirant un grand volume d’humidité
dans l’air, les risques de condensation s’ac-
croissent si les bâtiments ne sont pas bien ven-
tilés. En même temps, le gaz ammoniac, qu’on
trouve habituellement en milieu d’élevage, se
mélange facilement à cette humidité pour pro-
duire de l’ammoniaque liquide, qui attaque la
plupart des surfaces métalliques [14].
2.1.3 Classification de la corrosivité
des atmosphères
Lorsqu’on en vient à considérer la question de
la corrosion d’un métal destiné à être utilisé
dans un lieu donné, on doit d’abord établir l’en-
semble ou la moyenne des conditions environ-
nantes. C’est ce que prévoit la norme ISO 9223
[33]. Celle-ci propose un classement de corro-
sivité des différentes atmosphères en se basant
sur des classes de durée de persistance de l’hu-
midité (tableau 1) et des catégories de pollution
par les chlorures et l’anhydride sulfureux (ta-
bleaux 2 et 3). Ces deux substances permettent
en effet, à elles seules, de représenter l’ensem-
ble des atmosphères existantes, à l’exception
Tableau 3 Classification de la pollution par les sels contenus dans l’air sous
forme de chlorures [33].
Catégorie Vitesse de dépôt des chlorures (par
jour) mg/(m2.d)
S0
S1
S2
S3
S 3
3 < S 60
60 < S 300
300 < S 1500
des atmosphères extrêmes, telles que celles des
usines chimiques ou métallurgiques.
Comme de nombreux paramètres peuvent in-
fluencer la formation d’humidité sur les surfa-
ces métalliques (voir § 2.1.1), la durée de per-
sistance de l’humidité considérée dans la norme
correspond uniquement au laps de temps pen-
dant lequel l’humidité relative dépasse 80 % à
une température supérieure à 0 °C.
Les atmosphères se divisent subséquemment
en 5 classes de corrosivité croissante, décrites
au tableau 4 (p. 4) en fonction des vitesses de
corrosion de l’acier. Les valeurs numériques
renseignées correspondent à la vitesse de cor-
rosion relevée après un an sur des aciers de
référence exposés à des atmosphères de corro-
sivité déterminée. Les valeurs numériques rlin,
issues de la norme NBN EN ISO 9224 [34],
correspondent à des vitesses stabilisées de cor-
rosion résultant d’une longue exposition dans
ces mêmes atmosphères. La dernière colonne
du tableau 4 (p. 4) décrit les environnements
atmosphériques types correspondant à chaque
classe de corrosivité (NBN EN 12500 [23]).
En fonction de la classe de durée de persis-
tance de l’humidité et des catégories de pollu-
tion par les chlorures et l’anhydride sulfureux,
on peut déterminer la classe de corrosivité à
laquelle appartient une atmosphère donnée en
se référant au tableau 5 (p. 5).
Les Dossiers du CSTC 2006/4 Cahier 6 page 4
TECHNIQUES & PRATIQUE
Lorsqu’il faut décider d’une protection à ap-
pliquer contre la corrosion, l’étude du mi-
croenvironnement, c’est-à-dire des conditions
prévalant autour de la construction, est parti-
culièrement déterminante puisqu’elle permet
de connaître avec une plus grande précision les
conditions auxquelles sera soumis l’ouvrage.
Si ces conditions ne sont pas toujours connues
au stade de projet, le nécessaire doit toutefois
Classe
de corro-
sivité
Corrosi-
vité
Vitesse de corrosion de l’acier Environnements types (exemples)
rcorr g/(m2.a) rlin µm/an Intérieur Extérieur
C1 Très faible rcorr 10 rlin 0,1 Bâtiments chauffés à faible
humidité relative et pollution
insignifiante (bureaux, éco-
les, musées, …)
Zone sèche ou froide,
environnement atmosphé-
rique très faiblement pollué
et très peu humide (certains
déserts, centre de l’Antarcti-
que, …)
C2 Faible 10 < rcorr 200 0,1< rlin 1,5 Bâtiments non chauffés à
température et humidité re-
lative variables. Faible risque
de condensation et peu de
pollution (stockage, salles de
sports, …)
Zone tempérée, environ-
nement atmosphérique
faiblement pollué (SO2 <
12 µg/m3) (régions rurales,
petites villes, …)
Zone sèche ou froide,
environnement atmosphé-
rique peu humide (déserts,
régions subarctiques, …)
C3 Moyenne 200 < rcorr 400 1,5 < rlin 6 Volumes à fréquence
modérée de condensation
et pollution modérée due à
un procédé de fabrication
(usines agroalimentaires,
laveries, brasseries, laite-
ries, …)
Zone tempérée, environne-
ment atmosphérique moyen-
nement pollué (SO2 :12 à
40 µg/m3) ou moyennement
affecté par les chlorures
(régions urbaines, régions
côtières à faible dépôt de
chlorures, …)
Zone tropicale, environne-
ment atmosphérique faible-
ment pollué
C4 Forte 400 < rcorr 650 6 < rlin 20 Volumes à fréquence élevée
de condensation et à forte
pollution due à un procédé
de fabrication (usines, pisci-
nes, …)
Zone tempérée, environ-
nement atmosphérique
fortement pollué (SO2 : 40
à 80 µg/m3) ou substan-
tiellement affecté par les
chlorures (régions urbaines
polluées, régions industriel-
les, régions côtières sans
embruns salins, régions
fortement affectées par les
sels de déverglaçage, …)
Zone tropicale, environne-
ment atmosphérique moyen-
nement pollué
C5 Très forte 650 < rcorr 1500 20 < rlin 90 Volumes la condensa-
tion est quasi permanente
et/ou la pollution due à un
procédé de fabrication est
très élevée (mines, grottes
pour installations industriel-
les, hangars non ventilés en
région tropicale humide, …)
Zone tempérée, environne-
ment atmosphérique très
fortement pollué (SO2 : 80
à 250 µg/m3) et/ou très
fortement affecté par les
chlorures (régions indus-
trielles, régions côtières,
atmosphères marines avec
embruns salins, …)
Zone tropicale, environne-
ment atmosphérique forte-
ment pollué et/ou affecté par
les chlorures
Tableau 4 Classes de corrosivité et vitesses de corrosion de l’acier non allié pour une exposition dans les classes de
corrosivité correspondante [6, 8].
être fait pour les identifier le plus exactement
possible.
2.2 Corrosivité des eaux
L’eau étant l’un des principaux éléments né-
cessaires à la corrosion, les ouvrages en acier
constamment ou temporairement immergés
dans une eau aérée ou véhiculant cette der-
nière subiront une corrosion plus importante
que ceux exposés à l’atmosphère et seulement
occasionnellement en contact avec l’eau de
condensation, la pluie ou la neige [3].
Si, pour certains ouvrages, des métaux peuvent
être immergés dans l’eau (ouvrages portuaires,
stations de forage en mer, pipelines, …), les
Les Dossiers du CSTC 2006/4 Cahier 6 page 5
TECHNIQUES & PRATIQUE
Tableau 5 Classe de corrosivité de l’atmosphère en fonction des catégories de pollution et de la durée de persistance de
l’humidité [33].
Durée de
persis-
tance
τ1τ2τ3τ4τ5
S0-S1S2S3S0-S1S2S3S0-S1S2S3S0-S1S2S3S0-S1S2S3
P0-P1C1C1C1
ou
C2
C1C2C3
ou
C4
C2
ou
C3
C3
ou
C4
C4C3C4C5C3
ou
C4
C5C5
P2C2C1C1
ou
C2
C1
ou
C2
C2
ou
C3
C3
ou
C4
C3
ou
C4
C3
ou
C4
C4
ou
C5
C4C4C5C4
ou
C5
C5C5
P3C1
ou
C2
C1
ou
C2
C2C2C3C4C4C4
ou
C5
C5C5C5C5C5C5C5
cas les plus fréquents de corrosion des métaux
par l’eau concernent les canalisations des ins-
tallations sanitaires et de chauffage ainsi que
les canalisations d’évacuation [9].
La nature de l’eau et sa chimie varient selon
son origine (eau souterraine, eau de pluie, eau
d’évacuation, eau de ruissellement, eau indus-
trielle, eau de ville, …) et selon son utilisation
(véhiculée ou stockée, aérée ou non aérée,
chauffée, surchauffée ou refroidie, …).
La série de normes NBN EN 12502 (parties 1 à 5)
[26] fournit des recommandations pour l’évalua-
tion du risque de corrosion interne des matériaux
talliques (dont les aciers) dans les installations
de distribution et de stockage de l’eau. Outre la
conception de l’installation, sa mise en service
et ses conditions de fonctionnement, ces normes
considèrent l’influence des caractéristiques de
l’eau sur le risque de corrosion.
L’eau en contact avec l’acier des canalisations,
des cuves ou des citernes peut contenir, en
quantités variables, des sels minéraux dissous,
des gaz dissous, des matières organiques ou
minérales en suspension (sable, limon, argile,
matières végétales, …) et des microorganis-
mes (bactéries, amibes, virus, …) qui consti-
tuent autant d’agents influençant la corrosivité
de l’eau.
2.2.1 Sels minéraux dissous
Les sels minéraux dissous (Na+, Ca2+, Cl-,
Mg2+, SO4
2-, CO3
2-, SiO3
2) ou électrolytes aug-
mentent la conductivité de l’eau, qui favori-
sera les échanges de charges, permettant une
dissolution plus facile des métaux.
Une eau ‘naturelle’ qui ruisselle sur le sol à la
suite de précipitations atmosphériques se charge
en sels par action physique et chimique sur son
parcours aérien et souterrain. Si le sol traversé
est gypseux, l’eau sera chargée en Ca2
+ et en
SO4
2-. Si c’est un sol calcaire, elle sera chargée
en Ca2
+ et en CO3
2-. Cette eau reste cependant
moins minéralisée qu’une eau de mer riche en
ions Na+ et Cl- et donc plus corrosive.
Une eau de ville considérée comme potable est
par contre traitée pour satisfaire aux exigences
de la directive européenne 98/83/CE relative à
la qualité des eaux destinées à la consommation
humaine (chaque Région ayant édité un règle-
ment basé sur cette directive) [8]. Ces exigen-
ces définissent notamment des valeurs limites
de concentration en sels tels que les chlorures,
les sulfates, les nitrates, les fluorures ou le so-
dium. La directive impose également une li-
mite en matière de conductivité de l’eau.
A priori, on ne doit pas vraiment s’inquiéter
des sels dissous dans l’eau en contact avec
l’acier lorsqu’on s’intéresse à la corrosion
de celui-ci, sauf en cas de pollution par les
chlorures ou les sulfates, encore appelés ions
remarquables, ou si l’eau est trop faiblement
concentrée en ions Ca2
+ et CO3
2- nécessaires à
la formation d’un film protecteur adhérant à la
surface de l’acier (voir § 2.2.2).
Les chlorures sont des ions particulièrement
mobiles, ils se concentrent facilement dans les
microfissures de la surface de l’acier. Ils en-
traînent alors localement une chute importan-
te du pH et favorisent une corrosion acide de
l’acier. De plus, ils s’adsorbent à la surface de
celui-ci et rendent poreux les dépôts formés.
Dans une eau de distribution, des chlorures en
concentration supérieure à la normale peuvent
provenir d’une défaillance d’un traitement de
désinfection de l’eau (les chlorures sont des
sous-produits de la désinfection au dioxyde de
chlore) ou du mauvais fonctionnement d’un
adoucisseur à résine échangeuse d’ions. Dans
une eau ‘naturelle’, l’origine des chlorures est
multiple : terrains salés, urines des animaux,
salage des routes, rejets de stations d’épura-
tion, rejets industriels et agricoles, …
A l’instar des chlorures, les sulfates rendent
les dépôts poreux et donc la surface de l’acier
sous-jacent accessible aux autres agents cor-
rosifs. De plus, ils participent au cycle des
bactéries sulfatoréductrices et, partant, au dé-
veloppement des corrosions bactériennes (voir
§ 2.2.4). L’origine des sulfates dans l’eau peut
être naturelle (altération des minerais sulfurés
tels que la pyrite ou le gypse, décomposition
de la végétation et de la faune avoisinante) ou
anthropique (infiltrations d’eau superficielle
contaminées par les émissions de soufre pro-
venant des combustibles fossiles, par les sul-
fatages agricoles, par les rejets ménagers et
industrielles).
D’autres facteurs, tels que l’altération des
matériaux métalliques constitutifs des cana-
lisations, des cuves et des appareils, peuvent
encore accroître la minéralisation de l’eau.
Cette altération entraîne un enrichissement de
l’eau en éléments chimiques indésirables (fer,
cuivre, zinc, plomb, …), ce qui pourrait nous
amener à dire que la corrosion est, dans un cer-
tain sens, un processus autocatalytique.
2.2.2 Gaz dissous
L’eau contient également des gaz dissous
(oxygène, anhydride carbonique, azote, …)
en quantités variables selon la température et
la pression. Parmi ces gaz, l’oxygène, qui se
dissout sans dissociation, constitue un initia-
teur et un activateur essentiel de la corrosion
de l’acier par l’eau. La teneur en oxygène dis-
sous peut atteindre 4 mg/l dans une eau aérée
et bien plus dans une eau saturée en oxygène
(environ 10 mg/l à 15 °C et à pression atmos-
phérique).
Une eau en contact permanent ou occasionnel
avec l’air sera plus corrosive qu’une eau isolée
de l’atmosphère. Cela permet d’expliquer les
différences de comportement de l’acier en mi-
lieu ouvert et fermé. Les conduites d’une ins-
tallation sanitaire dans laquelle l’eau est sans
cesse renouvelée (apport continu d’oxygène)
seront plus souvent sujettes à des problèmes
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