En fin de compte, la mise en cohérence des principaux éléments déjà développés dans des réflexions
antérieures, et la confrontation à l’effervescence actuelle autour du terme activité, nous conduisent à
proposer trois critères et un mode d’approche, localisant un usage spécifiquement ergologique du
concept d’activité, le distinguant de l’insertion de la notion dans un autre ensemble théorique. Nous les
indiquons dès maintenant, comme une sorte d’horizon de travail, à charge de vérifier in fine que le
parcours proposé les confirme.
1- Le concept ergologique d’activité est un concept de transgression : transgression des différents
champs de l’expérience humaine ; donc transgression des corps disciplinaires dans les sciences
humaines, qui se sont légitimement construits, en un premier temps, à partir d’enquêtes sur ces
différents champs. L’activité traverse le corps et l’âme, l’affectif et le rationnel5, l’inconscient, le
préconscient et le conscient, le non verbal et le verbal, le non codifié et le formalisé, le biologique6 et
le culturel … ou « le mécanique et la valeur » pour reprendre l’expression de Georges Canguilhem au
5 Voir à propos des spéculations sur les émotions notre conclusion [14, § 2-4] et plus généralement sur le « corps-soi »
comme matrice de cette transgression, nos deux contributions aux numéros 6 et 7 de la revue Travail et Apprentissage,
« Quel sujet pour quelle expérience ? » et « Pourquoi le concept de corps-soi ? Corps-soi, activité, expérience ». Il est clair
qu’un concept élargi de « santé » fait craquer les cadres disciplinaires définissant les registres limités de cette notion.
6 Voir par exemple cette remarque de François Hubault : « L’important, que Simondon, en " ingénieur" n’éclaire pas
suffisamment, réside en ce que le travail est activité d’un être biologique qui, en cela, cherche à s’adapter au milieu et à
l’adapter à lui. Il s’agit d’un comportement dont la motivation n’est pas verbalisable », p. 83 (La représentation de la
ressource humaine, Thèse de doctorat d’Etat de Sciences Economiques, Université de Paris I, 1983, 438 pages).