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ce que vivent les personnes mourantes
au plan de la souffrance et des senti-
ments et ils savent comment ils doivent
se comporter avec eux. Ils connaissent
davantage les étapes qui mènent à la
mort et celles dans la progression de la
maladie. De plus, ces bénévoles com-
prennent mieux la mort et le deuil, et ont
aussi appris à devenir de meilleurs ac-
compagnateurs.
Pour les dix autres bénévoles,
leur expérience d'accompagnement a
modifié leur perception de la mort.
Ceux-ci sont passés d'une attitude de
négation ou d'acceptation partielle à une
plus grande acceptation. Ils ne se situent
pas complètement dans l'acceptation
mais plutôt dans l'acceptation partielle,
car ils réagissent de façon positive ou de
façon négative face au phénomène de la
mort et à ses nombreux aspects. Pour
eux, accepter totalement la mort n’est
pas une chose acquise. Ils ne l'acceptent
pas entièrement et ne la nient pas com-
plètement, mais ont une attitude à mi-
chemin entre les deux.
Pour ces répondants, la mort de-
meure tout de même une source d'inquié-
tude et de crainte et à cause de la nature
particulière de leur angoisse, il a fallu
introduire des nuances dans leur attitude
par un classement en trois catégories :
ceux qui ont peur de leur propre mort (la
mort de soi), ceux qui ont peur de la
mort des autres (la mort d'autrui), et ceux
qui ont peur de la mort en général (la
mort dans sa généralité). Les bénévoles
qui se situent dans la mort de soi (2) sont
ceux qui ont peur de mourir, c'est-à-dire
qu'ils appréhendent anxieusement leur
propre mort. Ceux-ci ne veulent pas
mourir et redoutent ce moment. Ceux qui
sont classés dans la mort d'autrui (3) sont
très anxieux face à la perte d'un être
cher. Un événement qu'ils estiment par-
fois difficile et douloureux à vivre sur-
tout à cause de la perte de relation et
d'avoir à admettre que la personne qu'on
aime n'existe plus. Finalement, pour
d'autres bénévoles (5), il s'agit d'une peur
de la mort en général. Pour eux, la mort
est absurde et ne devrait pas exister et
tout ce qui concerne la mort peut amener
chez eux une certaine angoisse.
Ajoutons que tous ces bénévoles
travaillent en vue d'acquérir une plus
grande ouverture sur la mort. Ils ont
conscience de leur attitude et vont vers
une plus grande acceptation. De plus,
leur passage (l'expérience auprès des
mourants et les cours suivis en soins
palliatifs) à la Maison leur a permis
d'avoir une plus grande facilité à parler
de la mort et à se trouver en compagnie
des personnes mourantes. Ils ont égale-
ment moins de sentiments négatifs à
l’endroit de celle-ci, comme la révolte et
la colère. La mort n'est plus perçue
comme une négation de la vie mais
comme faisant partie de celle-ci; on ne
nie plus son existence. Ces bénévoles
parlent davantage de la mort, ils
l’acceptent mieux, ils s'y résignent, ils la
regardent avec plus de sérénité et ils es-
saient de mieux la comprendre.
Ainsi, étant donné la diversité des
expériences de vie des répondants, la
Maison Michel Sarrazin a eu un impact
différent sur leurs attitudes. Ce qui veut
dire que l'influence de la Maison sur les
attitudes des bénévoles va dépendre du
cheminement de vie de chacun (par
exemple, la Maison n'aura pas la même
influence sur un bénévole qui, en plus de
nier la mort, a connu peu de deuils per-
sonnels au cours de sa vie que sur un
autre qui accepte déjà la mort et qui a
vécu de nombreux décès d'êtres chers).