Mise en page 1 - Théâtre de l`Odéon

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dossier pédagogique
› Théâtre de l’Odéon
2O › 3O sept. O7
Illusions comiques
© Alain Fonteray
texte et mise en scène OLIVIER PY
› Rencontre à l’issue de la représentation du mardi 25 septembre O7
en présence d’Olivier Py et de l’équipe artistique
› Service des relations avec le public
scolaires et universitaires, associations d’étudiants
réservation : O1 44 85 4O 39 – [email protected]
actions pédagogiques : O1 44 85 4O 39 – [email protected]
dossier également disponible sur http://www.theatre-odeon.fr.
› Tarifs : 3O€ - 22€ - 12€ - 7.5€ (séries 1, 2, 3, 4)
tarif scolaire : 11€ - 6€ (séries 2, 3)
› Horaires :
du mardi au samedi à 2Oh, le dimanche à 15h
(relâche le lundi)
› Odéon-Théâtre de l’Europe
Théâtre de l’Odéon
Place de l’Odéon Paris 6e
Métro Odéon - RER Luxembourg
Illusions comiques
texte et mise en scène Olivier Py
décor, costumes Pierre-André Weitz
musique Stéphane Leach
lumière Olivier Py, assisté de Bertrand Killy
avec Olivier Balazuc, Michel Fau, Clovis Fouin, Philippe
Girard, Mireille Herbstmeyer, Olivier Py
et les musiciens Mathieu El Fassi, Pierre-André Weitz
production : Centre dramatique national/Orléans-Loiret-Centre, le Théâtre du Rond-PointParis avec le soutien de la Fondation BNP Paribas, de la région Centre et du Fonds
d’insertion pour jeunes artistes dramatiques
créé le 29 mars 2OO6 au Centre dramatique national à Orléans
Le texte de la pièce est édité chez Actes Sud-Papiers
Durée 2h5O avec entracte
Certaines parties de ce dossier sont tirées du dossier pédagogique réalisé par l’équipe des relations avec le public du Théâtre National de Strasbourg.
Illusions comiques / 2O › 3O sept. O7
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Hommage à Corneille, bien sûr, mais aussi au Molière de L’Impromptu de Versailles ou des
Fâcheux, ces Illusions comiques furent l’un des plus beaux succès publics et critiques
de la dernière saison. Ce fut également la plus franche incursion dans le domaine du rire
qu’ait réussie jusqu’ici le nouveau directeur du Théâtre de l’Europe. Mais si Olivier Py
a souhaité reprendre sa dernière création pour ouvrir la rentrée, c’est avant tout parce
qu’elle lui permet de présenter aux spectateurs de l’Odéon, en termes simples, directs et
vivants, sa façon de rêver la scène. Qu’arriverait-il donc, demande l’auteur, «si le monde
entier, les politiques, les prélats, les marchands de mode» étaient «soudainement pris
d’une épidémie d’amour du théâtre» ?... Olivier Py, présent sur les planches pour
interpréter le poète «Moi-même», sera à cette occasion entouré de Michel Fau (dans un
rôle qui lui valut le prix du meilleur comédien, décerné par le Syndicat de la Critique)
ainsi que des «camarades comédiens» qui l’accompagnent depuis ses débuts, prêts à
célébrer par l’exemple les fastes du théâtre dans tous ses états.
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› Extrait
Monsieur Balazuc. 1 – Sapiens sapiens se plante une épine dans le pied. Il voit que sa
douleur n’est pas partagée par ses camarades, alors il invente le théâtre.
Monsieur Girard. 2 – Non, Sapiens sapiens voit que son collègue s’est planté une épine
dans le pied et en ressent la douleur, c’est lui qui a inventé le théâtre.
Le théâtre est une épine dans la chair de l’autre.
Mademoiselle Mazev. 3 – Le théâtre est la première pensée humaine et sa dernière
question.
Monsieur Fau. 4 – Je n’aime pas le théâtre, dit-elle en mettant du rouge à lèvres.
L’adolescent. 5 – Nous sommes libres, voilà l’horreur, le théâtre est la musique de cette
liberté.
Dieu. 6 – Le théâtre est le lieu où les choses cachées depuis le début des temps sont
révélées sans qu’on puisse toutefois les comprendre absolument.
Le Pape. 7 – Le soleil ni la mort ne se peuvent contempler fixement, ô mort tu as perdu
ton aiguillon dans le miroir du théâtre. O soleil, une lampe suffit à te vieillir. Le
théâtre est vainqueur des dieux, il est le seul qui laisse la Nécessité sans voix.
Maman. 8 – Le théâtre a commencé sous le soleil et s’est continué sous les lampes, c’est
bien la preuve qu’il est le rabatteur de la liberté humaine.
Monsieur Fau. 9 – Le théâtre est le miroir du monde qui est le miroir du théâtre.
Tante Geneviève – Et notre présence au monde y est inversée et illisible.
Monsieur Fau. 1O – Le miroir est ce qui écrit en lettres inversées, et comme le monde
marche à l’envers le théâtre le remet à l’endroit.
Monsieur Fau. 11 – Le théâtre est un miroir au coeur de la ville qui sert à nous
rappeler que tout est théâtre.
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› Extraits
Maman. 12 – Le théâtre est miroir dans lequel la totalité du monde se recompose comme
totalité.
Monsieur Fau. 13 – Le théâtre est un Narcisse qui ne tombe pas à l’eau.
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› Note d’intention
Les Illusions comiques s’ouvrent sur un cauchemar en forme de farce ; le poète, «Moimême», découvre avec ses camarades que le monde entier est soucieux de sa parole. Les
journalistes, les politiques, les prélats, les marchands de mode, sont soudainement pris
d’une épidémie d’amour du théâtre. Comme si la mort des -ismes avait en dernier recours
ouvert une ère du théâtre, comme si l’humanité avouait qu’il est le seul outil de
métaphysique, ou au contraire la seule manière d’échapper à la métaphysique, la seule
manière de vivre dignement.
Le poète résiste d’abord à cette position inconfortable de «la parole entendue» mais, pris
de vertige et poussé par sa mère, accepte toutes les responsabilités du siècle. Il devient
en quelques heures le prophète et le héros qui peut répondre à tous les désarrois du
temps et à toutes les inquiétudes éternelles. Il sort de son rôle de contradicteur et
d’exilé, il n’est plus excentrique, il est le centre. On remet dans ses mains le pouvoir
suprême de changer le monde, on laisse son théâtre agir sur le réel et non plus sur le
symbolique. Le pape lui-même vient lui demander conseil. Lui seul est à même de donner
ce qui est plus précieux que l’égalité sociale, le sens de la vie.
De leur côté, ses camarades comédiens, dans leurs propres rôles, restent dubitatifs sur
ce succès planétaire de leur art et défendent que ce que le théâtre doit faire pour le
monde, c’est du théâtre et du théâtre seulement.
Qui peut penser aujourd’hui l’artiste comme un marginal révolutionnaire et non comme un
prêtre de la culture ? On voit bien que le sujet est trop grave pour susciter autre chose
qu’une comédie. Cette comédie donc, bien qu’elle emprunte son titre à Corneille, est une
paraphrase de L’Impromptu de Versailles de Molière.
La troupe, où chacun joue son propre rôle, tente de donner non pas une mais cent
définitions du théâtre et de parcourir son orbe. Elle fait entrer dans la cuisine obscène
des répétitions et de la question de l’esthétique du jeu, on assiste à l’ivresse et au vertige de figurer l’humain. Mais les questions d’artisanat conduisent vite aux questions
fondamentales. Le théâtre peut-il être encore politique ? Le théâtre est-il une image ?
Le théâtre est-il sacré et par quel mystère ? Le théâtre est-il une sorte de religion du
sens ou, au contraire, ce qui nous apprend à vivre dans l’absence du sens ? Les
différentes questions qui ont agité le bocal avignonnais en cet an de grâce 2OO5 sont
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› Note d’intention
réfléchies dans tous les miroirs possibles, théologie, révolution, statut de l’image,
civisme, politique culturelle, etc...
Les quatre acteurs et le poète jonglent exagérément avec les masques pour figurer poète
mort, politiciens de tout poil, mère de vaudeville, tante de province, pape, chien
philosophique, fanatiques, philosophes, autant de figures du monde qu’il est nécessaire
pour appréhender cent définitions du théâtre.
J’aimerais pouvoir rendre hommage aux acteurs qui, pendant quinze ans, ont subi mon
mysticisme et ma mauvaise humeur et se sont quelquefois pliés à ma diététique.
Mademoiselle Mazev, Monsieur Fau et Monsieur Girard m’ont enseigné l’art théâtral et je
les en remercie en volant leur parole, en me l’attribuant, avant de la remettre dans leurs
voix comme si elle ne s’en était jamais enfuie. Ils savent une chose de l’homme et ont
l’habitude de ne la dire que comme une farce. Moi, j’ai parfois entendu ce qu’il fallait
entendre et le poète s’est réchauffé à leurs paroles essentielles et à leurs mots
d’esprit. Il est temps que je leur rende ce que je leur dois et leur offre la possibilité
d’être absolument ridicules en jouant leurs propres personnages. À la différence du
metteur en scène, l’acteur ne commente pas le théâtre, il est le théâtre.
Le texte a la prétention ridicule de tout dire sur l’art dramatique et le mystère
théâtral. La cavalcade politique du poète, à qui on demande plus que des mots, est
entrecoupée de leçons de théâtre, dans lesquelles on découvre que le théâtre de
boulevard, la tragédie et le drame lyrique sont trois pensées de l’homme et de sa parole.
Cette farce, pièce satirique, comédie philosophique, c’est l’art de faire du rire avec notre
impuissance. Cette impuissance est peut-être la pensée la plus nécessaire à l’homme de
théâtre et il n’y atteindra, comme l’a fait Jean-Luc Lagarce -figuré ici par «Le poète mort
trop tôt»- à qui est dédiée la pièce, que dans un éclat de rire.
C’était pour moi l’occasion de sculpter une sorte de tombeau de Jean-Luc Lagarce, comme
on le disait de ces textes qui, au grand siècle, servaient de mausolée littéraire à un
homme disparu. Échappé à l’immortalité, il est un spectre qui revient comme reviennent
les spectres au théâtre, paternel et exigeant. C’est lui qui le premier, moins encore dans
ses textes que dans sa parole au quotidien, a formulé la métaphore du voyage des
comédiens comme un exil ontologique. Se refusant à la métaphysique, il aimait se tenir
au bord des révélations, au chevet des gouffres, au risque du lyrisme. Cette façon
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› Note d’intention
d’envisager la transcendance sans la rejoindre définit peut-être le périmètre religieux
du théâtre, subtile incitation à la contemplation non des étoiles mais des destins. Je
tente de rendre sa pensée telle qu’elle était au moment de sa mort, sur le point de
naître. Il y a dans tous les destins un arpège du sublime, le théâtre est ce qui nous en
donne la conscience. C’est un tout jeune poète qui est mort, juste avant la gloire, à
l’aube de sa propre parole. Il n’y avait pas pour Jean-Luc Lagarce une place pour le
théâtre, toute la place était pour le théâtre. Le théâtre seul était son amitié dans l’agonie
et dans le doute. Il n’a jamais cherché à le comprendre absolument, il s’est laissé éblouir
par sa lumière, il a simplement célébré sa magie.
Il y a toujours une tentation de théoriser le plus informulable, de tenter de donner les
règles de la science théâtrale, de transformer en manifeste la plus empirique des
aventures. On se couvre souvent de ridicule, quand on ne devient pas le plus ennuyeux
des hommes. Et pourtant la soif de connaître l’envers du décor et la tambouille des
plateaux passionne toujours plus. On se demande même si l’envers du décor n’est pas le
seul décor désiré tant la question devient pressante : «Comment travaillez-vous ?» Et le
trou de la serrure est au fond le suprême désir du spectateur. Ceci ne serait pas sans
l’intuition que dans l’art théâtral quelque chose de la plus fondamentale aventure
spirituelle est en train de se jouer, que là, parmi les accessoires et les tréteaux, une
connaissance du fait humain bien plus indispensable que l’opinion et les faits divers est
à l’œuvre. Ce ne sont pas les metteurs en scène qui pensent, c’est le théâtre lui-même,
dans sa pratique, sa précarité, son prétexte. Et voir le théâtre, le Théâtre Lui-Même, est
le souhait de tous ceux qui vivent dans le jardin des questions.
C’est quand le théâtre parle de lui-même qu’il parle paradoxalement le plus justement du
monde. C’est à partir de son ambition folle que l’on peut attiser le feu du comique. Les
grandes paroles dont j’ai fait parfois mon style ont ici l’air de se parodier. Nous vivons
trop dans l’actualité et trop peu dans le présent. Tout comique est au fond un moraliste,
mais un moraliste qui a l’honnêteté de dire «Faites ce que je dis, ne faites pas ce que
je fais». Ou, pour dire autrement, il y a deux sortes de comiques, ceux qui rient des
autres et ceux qui rient d’eux-mêmes. Et plus mystérieux encore, ceux qui veulent rire
des autres ne font que se démasquer et ceux qui cherchent à rire d’eux-mêmes trouvent
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› Note d’intention
quelquefois, dans la boue de leur anecdote, des mythes écornés, des vérités inquiètes,
des sagesses boiteuses, des rites inversés, des viatiques saugrenus... autant de bois sec
que l’on ne peut dédaigner à l’approche de l’hiver.
Olivier PY, novembre 2OO5
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› La pièce, comme un hommage au théâtre
Olivier Py a écrit les Illusions comiques en hommage au théâtre en général et aux
acteurs, ceux qui l’accompagnent, en particulier. Au fil du temps et de sa carrière théâtrale, il s’est constitué une «famille» de comédiens qu’il aime à réunir à chaque occasion pour de nouvelles aventures. Ces retrouvailles se veulent toujours joyeuses, généreuses et jubilatoires. Olivier Py, dans une écriture, une mise en scène et un jeu sans
concessions pratique l’art de l’autodérision, parfois même jusqu’aux frontières du ridicule, et n’hésite pas à afficher sa prétention de «tout dire sur l’art dramatique et le
mystère théâtral». Dans sa folle entreprise, Olivier Py rend d’abord hommage à Jean-Luc
Lagarce, dramaturge, metteur en scène et comédien mort en 1995, «Le Poète mort trop tôt»
des Illusions comiques. Olivier Py a notamment monté sa pièce Nous, les héros il y a
quelques années. Elisabeth Mazev, qui joue tantôt son propre rôle, tantôt des personnages fictifs, évoque à plusieurs reprises également son amitié et ses nombreuses collaborations avec Jean-Luc Lagarce. Les autres comédiens, Olivier Balazuc, Michel Fau et
Philippe Girard incarnent également Messieurs Balazuc, Fau et Girard, et tour à tour des
personnages fictifs sortis de l’imagination fertile d’Olivier Py.
Olivier Py revendique le foisonnement parfois un peu hétéroclite de ses textes. A ses
yeux, le théâtre doit être multiple, pluriel dans toutes ses formes, comme il l’indique
explicitement dans le titre d’une de ses pièces écrites en 1998 Théâtres. Bien que plutôt proche de la comédie, Illusions comiques reste une oeuvre théâtrale hétérogène et
inclassable : «Le théâtre le plus commun dans mon œuvre est un théâtre dans lequel les
genres se bousculent, d’ailleurs c’est aussi le cas de cette comédie : même si elle a une
forte tendance à l’autodérision, elle contient aussi des passages mélodramatiques, élégiaques et philosophiques. J’ai toujours rêvé d’un théâtre très hétérogène dans la forme.
J’ai pris la leçon avec Shakespeare. Je n’aime pas trop les oeuvres pures. (…) Je crois
que quand le théâtre est réussi, il présente la totalité de l’humain et ces questions de
genre sont totalement dépassées.»
Olivier Py, propos recueillis par Catherine Richon,
24 mai 2006, publié sur le site www.fluctuat.net
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› Du vaudeville à la tragédie…
Dans Illusions comiques, Olivier Py s’amuse à passer de la comédie à la tragédie en
jouant autour du personnage de Tante Geneviève.
A la fin de l’acte I, Michel Fau donne à Tante Geneviève (que lui-même interprète
dans la pièce) une leçon de théâtre consacrée au théâtre bourgeois.
Monsieur Fau : Le masque est là mais doit bâiller, l’acteur de boulevard est une tante
Geneviève qui sait qu’elle en est une et qui fait bâiller son masque. Elle sait que
ce qu’elle dit est inepte, que sa vie est inepte et elle dénoue le songe bourgeois
en montrant qu’elle n’est pas dupe de l’imbécillité de ce qu’elle dit. Par exemple
elle dit : «Si potiche je fus, je ne serai pas cruche.» Pour ce faire, elle laisse légèrement tomber l’intonation, cesse d’interpréter les derniers mots de la phrase, et
passe à autre chose, qui ne sera toujours que vacuité. Il n’y a que des masques ; terreur, donc rire.
Tante Geneviève : Donc, elle joue faux
Le théâtre de Feydeau, théâtre bourgeois par excellence, est riche de scènes dans
lesquelles Tante Geneviève pourrait appliquer sa leçon de théâtre. Dans La Puce à
l’oreille, la scène entre Lucienne et Raymonde (Acte I, scène 4) est tout à fait
exemplaire.
Raymonde : Oh ! si, si ! Ne dis pas non, Lucienne. Tu étais ma meilleure amie au
couvent. Nous avons beau nous être perdues de vue pendant dix ans, il y a des choses qui ne s’effacent pas. Je t’ai quittée Lucienne Vicard ; je t’ai retrouvée Lucienne
Homenides de Histangua ; ton nom a pu s’allonger, ton coeur est resté le même ; j’ai
le droit de te considérer toujours comme ma meilleure amie.
Lucienne : Ça, certes !
Raymonde : C’est donc à toi que j’ai le droit d’avoir recours quand j’ai un service à
demander.
Lucienne, sans conviction tout en s’asseyant en face d’elle : Tu es bien bonne, je te
remercie.
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› Du vaudeville à la tragédie…
Raymonde, sans transition : Alors, dis-moi ! Qu’est-ce que je dois faire ?
Lucienne, ahurie : Hein ! Pour ?
Raymonde : Pour pincer mon mari, donc !
Lucienne : Mais est-ce que je sais, moi !... c’est pour ça que tu me fais venir ?
Raymonde : Mais oui.
Lucienne : Tu en as de bonnes ! D’abord, qui est-ce qui te dit qu’il est pinçable, ton
mari ? C’est peut-être le plus fidèle des époux.
Raymonde : lui ?
Lucienne : Dame, puisque tu n’as pas de preuves.
Raymonde : Il y a des choses qui ne trompent pas.
Lucienne : Justement ! Ton mari est peut-être de celles-là !...
Raymonde : Allons, Voyons !... Je ne suis pas une enfant à qui on en conte. Qu’est ce
que tu dirais, toi, si brusquement ton mari, après avoir été un mari !... Enfin, un mari,
quoi ! cessait brusquement de l’être, là, v’lan ! du jour au lendemain ?...
Lucienne, avec délice : Ah ! je dirais : «ouf !» …
Au début de l’acte II des Illusions comiques, Tante Geneviève continue à suivre ses
leçons de théâtre. C’est à présent Monsieur Girard qui lui enseigne les principes de
la tragédie.
Monsieur Girard : L’acteur tragique n’a aucune intention. Il est comme absent de sa
propre parole, trop de douleurs ont fait grandir en lui un éloignement splendide. Il
se tient au-dessus de son corps et sa tête échevelée touche les étoiles et les
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› Du vaudeville à la tragédie…
vérités indicibles. Il est à la fois présent, comme aucun homme n’a su l’être, ce bois
a peine à le porter tant sa douleur est lourde.
Donnez-moi une toge, avec un vieux rideau, très bien.
Non, ce n’est pas sa douleur, c’est celle des siècles, c’est celle des livres qui savent
que nous vivrons toujours exilés du sens et que tout est esclave de la Nécessité. Il
n’est plus seul. Il est devenu un mot dans ce grand, infini livre de la douleur
humaine. Il est là, oui, il a dans son manteau brodé et démodé les pierres avec
lesquelles on lapidera son image, il a les charpentes des temples à venir posées sur
ses épaules, il a toutes les lois et toutes les limites à la loi dans ses mains sous
forme de torches enflammées.
Tante Geneviève : Je frémis, je rougis, je pâlis !
Cette dernière réplique de Tante Geneviève semble de toute évidence être un clin
d’oeil à la célèbre tirade de Phèdre dans la tragédie de Racine.
Phèdre
Mon mal vient de plus loin. À peine au fils d’Égée
Sous les lois de l’hymen je m’étais engagée,
Mon repos, mon bonheur semblait être affermi,
Athènes me montra mon superbe ennemi.
Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
Je sentis tout mon corps, et transir et brûler.
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,
D’un sang qu’elle poursuit tourments inévitables.
Par des voeux assidus je crus les détourner :
Je lui bâtis un temple, et pris soin de l’orner ;
De victimes moi-même à toute heure entourée,
Je cherchais dans leurs flancs ma raison égarée.
D’un incurable amour remèdes impuissants !
En vain sur les autels ma main brûlait l’encens :
Quand ma bouche implorait le nom de la déesse,
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› Du vaudeville à la tragédie…
J’adorais Hippolyte, et le voyant sans cesse,
Même au pied des autels que je faisais fumer.
J’offrais tout à ce dieu, que je n’osais nommer.
Je l’évitais partout. Ô comble de misère !
Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son père.
Contre moi-même enfin j’osai me révolter :
J’excitai mon courage à le persécuter.
Pour bannir l’ennemi dont j’étais idolâtre,
J’affectai les chagrins d’une injuste marâtre ;
Je pressai son exil, et mes cris éternels
L’arrachèrent du sein, et des bras paternels.
Je respirais, Œnone. Et depuis son absence,
Mes jours moins agités coulaient dans l’innocence ;
Soumise à mon époux, et cachant mes ennuis,
De son fatal hymen je cultivais les fruits.
Vaines précautions ! Cruelle destinée !
Par mon époux lui-même à Trézène amenée,
J’ai revu l’Ennemi que j’avais éloigné :
Ma blessure trop vive aussitôt a saigné.
Ce n’est plus une ardeur dans mes veines cachée :
C’est Vénus toute entière à sa proie attachée.
Phèdre (Acte I, scène 3)
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› Molière et L’Impromptu de Versailles
Le titre de la pièce d’Olivier Py rend hommage, de l’aveu même de l’auteur à l’«étrange
monstre» de Pierre Corneille : L’Illusion comique.
La pièce du dramaturge baroque apparaît comme une œuvre inclassable, qui fait fi des
genres communément admis au XVIIe siècle : la comédie et la tragédie. La scène qui suit,
qui clôt la pièce, est un vibrant éloge de l’art théâtral et de ceux qui le pratiquent.
Mais la filiation sans doute la plus remarquable des Illusions comiques est celle de
l’Impromptu de Versailles de Molière.
L’impromptu trouve son origine dans la commedia dell’arte, sous le nom de commedia
all’improviso : il se développe autour des notions de soudaineté et de rapidité, de
spontanéité et d’improvisation, voire même de répétition théâtrale.
L’impromptu tel que Molière en définit pour la première fois le genre désigne donc une
fausse répétition, feinte ou fictive mais néanmoins écrite, fixée sur la scène et sur le
papier, en présence et sous l’autorité de l’auteur ou du chef de la troupe, au cours de
laquelle les acteurs expriment leurs doutes en même temps que leurs convictions sur
quelques grands ou menus sujets d’esthétique théâtrale, d’art du jeu ou de la
représentation, voire, dans certains cas plus contemporains, d’idéologie ou de politique
culturelle. La scène qui suit ouvre L’Impromptu de Versailles et présente la troupe de
Molière en train de travailler : il y est question de la polémique suscitée par L’Ecole
des femmes, et met en scène les comédiens de la troupe de Molière.
(…)
MADEMOISELLE BÉJART : Mais puisqu’on vous a commandé de travailler sur le sujet de la
critique qu’on a faite contre vous, que n’avez-vous fait cette comédie des comédiens, dont
vous nous avez parlé il y a longtemps? C’était une affaire toute trouvée et qui venait
fort bien à la chose, et d’autant mieux, qu’ayant entrepris de vous peindre, ils vous
ouvraient l’occasion de les peindre aussi, et que cela aurait pu s’appeler leur portrait,
à bien plus juste titre que tout ce qu’ils ont fait ne peut être appelé le vôtre. Car
vouloir contrefaire un comédien dans un rôle comique, ce n’est pas le peindre lui-même,
c’est peindre d’après lui les personnages qu’il représente, et se servir des mêmes traits
et des mêmes couleurs qu’il est obligé d’employer aux différents tableaux des caractères
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Molière et L’Impromptu de Versailles
ridicules qu’il imite d’après nature ; mais contrefaire un comédien dans des rôles sérieux,
c’est le peindre par des défauts qui sont entièrement de lui, puisque ces sortes de
personnages ne veulent ni les gestes, ni les tons de voix ridicules dans lesquels on le
reconnaît.
MOLIÈRE : Il est vrai ; mais j’ai mes raisons pour ne le pas faire, et je n’ai pas cru, entre
nous, que la chose en valût la peine ; et puis il fallait plus de temps pour exécuter cette
idée. Comme leurs jours de comédies sont les mêmes que les nôtres, à peine ai-je été les
voir que trois ou quatre fois depuis que nous sommes à Paris ; je n’ai attrapé de leur
manière de réciter que ce qui m’a d’abord sauté aux yeux, et j’aurais eu besoin de les
étudier davantage pour faire des portraits bien ressemblants.
MADEMOISELLE DU PARC : Pour moi, j’en ai reconnu quelques-uns dans votre bouche.
MADEMOISELLE DE BRIE : Je n’ai jamais ouï parler de cela.
MOLIÈRE : C’est une idée qui m’avait passé une fois par la tête, et que j’ai laissée là
comme une bagatelle, une badinerie, qui peut-être n’aurait point fait rire.
MADEMOISELLE DE BRIE : Dites-la-moi un peu, puisque vous l’avez dite aux autres.
MOLIÈRE : Nous n’avons pas le temps maintenant.
MADEMOISELLE DE BRIE : Seulement deux mots.
MOLIÈRE : J’avais songé une comédie où il y aurait eu un poète, que j’aurais représenté
moi même, qui serait venu pour offrir une pièce à une troupe de comédiens nouvellement
arrivés de la campagne. “Avez-vous, aurait-il dit, des acteurs et des actrices qui soient
capables de bien faire valoir un ouvrage, car ma pièce est une pièce. - Eh ! Monsieur,
auraient répondu les comédiens, nous avons des hommes et des femmes qui ont été
trouvés raisonnables partout où nous avons passé. - Et qui fait les rois parmi vous ?
- Voilà un acteur qui s’en démêle parfois. - Qui ? ce jeune homme bien fait ? Vous
moquez-vous ? Il faut un roi qui soit gros et gras comme quatre, un roi, morbleu! qui
soit entripaillé comme il faut, un roi d’une vaste circonférence, et qui puisse remplir un
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Molière et L’Impromptu de Versailles
trône de la belle manière. La belle chose qu’un roi d’une taille galante ! Voilà déjà un
grand défaut ; mais que je l’entende un peu réciter une douzaine de vers.” (…)
Molière , extrait de L’Impromptu de Versailles
Il convient en outre de rattacher la tradition ludique, humoristique et polémique des
impromptus à une thématique plus large et plus vaste : celle du théâtre dans le théâtre,
de la mise en abyme de la scène, de l’enchâssement des fictions ou encore du métathéâtre (c’est-à-dire le discours ou le commentaire sur le théâtre, au coeur même du
texte théâtral).
On peut se référer dès lors à la longue tradition qui utilise ce procédé :
Aristophane, Les Grenouilles
Shakespeare, Hamlet et Le Songe d’une nuit d’été
Corneille, L’Illusion comique
Marivaux, Les Acteurs de bonne foi
Pirandello, Six personnages en quête d’auteur et Ce soir on improvise
Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› L’engagement du poète
«J’écrivais pour vaincre ! Oh je voulais vaincre !»
Olivier Py, Théâtres (1998)
«Le théâtre peut-il être encore politique ? Le théâtre est-il une image ? Le théâtre estil sacré et par quel mystère ? Le théâtre est-il une sorte de religion du sens, ou au
contraire, ce qui apprend à vivre dans l’absence de sens ?»
Toutes ces questions que pose Olivier Py sont récurrentes dans son œuvre.
Dans un article publié dans le Monde le 30 juillet 2005, à l’issue du festival d’Avignon,
Olivier Py affirme une nouvelle fois les liens forts qui existent entre le politique et le
théâtre, le rôle du théâtre est d’interroger en permanence la sphère du politique.
«Si le théâtre n’est qu’une catégorie formelle dans le marché de l’art, une version réelle
de cette absence réelle qui est le moteur de la consommation, un objet d’échange
culturel vide de sens, alors il a peu de chance de survivre au formatage industriel de
nos comportements. Mais s’il est encore ce lieu où le silence se fait parole et où la
parole fait silence au désespoir, s’il est ce lieu où les hommes ne sont plus des masses
individuées mais des communautés d’esprits toujours en travail, s’il est au-delà des
modes, avec ou sans mots, non pas ce commentaire mais cette présence réelle d’un sens
dans nos vies, alors nous pouvons augurer qu’il ne s’éteindra qu’avec l’homme. Nous ne
serons pas présents lors de la réponse à cette question, mais en attendant, le festival
d’Avignon est notre question. Le théâtre pense le monde, et là comme nulle part ailleurs.
Et le festival d’Avignon triomphe encore à l’endroit où l’on peut craindre qu’il échoue
ou se perde. En remettant en cause les fondements même du théâtre, et en laissant au
public la liberté de réagir. Car c’est son public qui pose le plus de questions et ce sont
ses questions qui font sa vitalité, bien au-delà de tout jugement de valeur. Il n’y a plus
qu’à souhaiter au théâtre et à l’enfant de Jean Vilar non pas des lendemains qui
chantent mais des aujourd’hui qui nous interrogent inlassablement.»
Olivier PY, Texte paru dans Le Monde du 30 juillet 2005
Le verbe, la parole reste une arme qui permet de lutter contre les dérives d’une société
de consommation. A ce titre, le théâtre, et le théâtre par et pour lui-même tel que le
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› L’engagement du poète
réclament incessamment les acteurs des Illusions Comiques, reste une forme de salut pour
le monde. «Et moi, dans mon costume de tragédienne ridicule, je dis cela encore : l’homme
peut être sauvé par la parole et le rôle du théâtre est de montrer cela. De raconter cela
et tout en racontant cela, faire vivre cela, cette Expérience. Entre les acteurs, on raconte
cela de part et d’autre de la rampe, on ne le raconte pas, on le vit, on le vit comme vérité
vérifiée.»
Olivier PY,
Extraits de Epître aux jeunes acteurs pour que soit rendue la Parole à la Parole,
Actes Sud-Papiers / Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique, 2000
Si le théâtre est politique au sens étymologique du terme, il ne doit pas être au service
de la politique et encore moins au service d’une idéologie. Cette thèse défendue dans
Illusions comiques par les comédiens qui réclament du théâtre et seulement du théâtre,
peut être également illustrée par un texte de Eugène Ionesco. En effet, à la question «le
théâtre doit-il être politique ?», Eugène Ionesco apporte dans son essai Notes et
Contre-Notes (1962) une réponse claire : «le théâtre n’est pas le langage des idées».
C’est pourquoi Ionesco, bannissant idéologie et psychologie, se concentre sur ce qui
constitue la spécificité du langage théâtral. «Mais c’est justement sous cette forme que
le théâtre peut exercer une fonction idéologique ou spirituelle. Une esthétique
théâtrale de l’outrance et du paroxysme, marquée par le «grossissement des effets»
jusqu’à la farce, le recours à «la charge parodique extrême», la désarticulation du
langage, restitue au public cette «étrangeté du monde» qu’il ne perçoit plus. Un tel
théâtre, capable de «réaliser une sorte de dislocation du réel», conduit l’homme à «une
nouvelle prise de conscience, purifiée, de la réalité existentielle».
Commentaire de Nadine Toursel et Jacques Vassevière
Littérature : textes théoriques et critiques
Nathan Université, 1994
Le théâtre peut paraître un genre littéraire inférieur, un genre mineur. Il fait toujours
un peu gros. C’est un art à effets, sans doute. Il ne peut s’en dispenser et ; c’est ce
qu’on lui reproche. Les effets ne peuvent être que gros. On a l’impression que les
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› L’engagement du poète
choses s’y alourdissent. Les nuances des textes de littérature s’éclipsent. Un théâtre de
subtilités littéraires s’épuise vite. Les demi-teintes s’obscurcissent ou disparaissent
dans une clarté trop grande. Pas de pénombre, pas de raffinement possible. Les
démonstrations, les pièces à thèse sont grossières, tout y est approximatif. Le théâtre
n’est pas le langage des idées. Quand il veut se faire le véhicule des idéologies, il ne
peut être que leur vulgarisateur. Il les simplifie dangereusement. Il les rend primaires,
les rabaisse. Il devient «naïf», mais dans le mauvais sens. Tout théâtre d’idéologie
risque de n’être que théâtre de patronage. [...]
Si donc la valeur du théâtre était dans le grossissement des effets, il fallait les
grossir davantage encore, les souligner, les accentuer au maximum. Pousser le théâtre
au-delà de cette zone intermédiaire qui n’est ni théâtre, ni littérature, c’est le
restituer à son cadre propre, à ses limites naturelles. Il fallait non pas cacher les
ficelles, mais les rendre plus visibles encore, délibérément évidentes, aller à fond dans
le grotesque, la caricature, au-delà de la pâle ironie des spirituelles comédies de salon.
Pas de comédies de salon, mais la farce, la charge parodique extrême. Humour, oui, mais
avec les moyens du burlesque. Un comique dur, sans finesse, excessif. Pas de comédies
dramatiques, non plus. Mais revenir à l’insoutenable. Pousser tout au paroxysme, là où
sont les sources du tragique. Faire un théâtre de violence violemment comique,
violemment dramatique. Éviter la psychologie ou plutôt lui donner une dimension
métaphysique. Le théâtre est dans l’exagération extrême des sentiments, exagération qui
disloque la plate réalité quotidienne. Dislocation aussi, désarticulation du langage. Si
d’autre part les comédiens me gênaient parce qu’ils me paraissaient trop peu naturels,
c’est peut-être parce qu’eux aussi étaient ou voulaient être trop naturels : en renonçant
à l’être, ils le redeviendront peut-être d’une autre manière. Il faut qu’ils n’aient pas
peur de ne pas être naturels. Pour s’arracher au quotidien, à l’habitude, à la paresse
mentale qui nous cache l’étrangeté du monde, il faut recevoir comme un véritable coup
de matraque. Sans une virginité nouvelle de l’esprit, sans une nouvelle prise de
conscience, purifiée, de la réalité existentielle, il n’y a pas de théâtre, il n’y a pas d’art
non plus ; il faut réaliser une sorte de dislocation du réel, qui doit précéder sa
réintégration.
Eugène IONESCO, Notes et Contre-notes,
© éd. Gallimard, 1962, coll. « Idées », pp. 59 à 60.
Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Le théâtre est une révolte contre le virtuel
Il ne redoute aucune outrance, affronte crânement ses désirs les plus extrêmes,
s’affiche avec lyrisme catholique, homosexuel, poète à 40 ans, Olivier Py, dramaturgemetteur en scène-acteur-chanteur-romancier-videaste (et patron du Centre dramatique
national d’Orléans depuis 1998), est un de nos créateurs essentiels. Bien sûr, les très
consensuels Molières ne célébreront pas, le 24 avril, cet insolent et mystique trublion
aux allures d’adolescent diablotin. Les fringales d’absolu d’Olivier Py dérangent,
déroutent. N’est il pas capable d’écrire et d’orchestrer des spectacles de dix heures (La
Servante, en 1995, Les Vainqueurs, en 2005), d’imaginer des scènes-fleuves, rutilantes
d’amour et de plaisir, de souffrance et d’extase? Py aime Claudel et Dionysos, vénère
Christ et Orphée, sacralise la douleur et le verbe, chante l’archaïsme et le mystère. Il
ose toutes les tentations, des pires aux saintes. Heureusement, le Théâtre du Rond-Point
a décidé de rendre hommage plus d’un mois durant au lutin-démiurge. Avec sa
métaphysique échevelée, ses phrases labyrinthes, sa flamboyance baroque, son goût de
l’impur et du sacré mêlés et son humour potache, celui-là sait redonner la fièvre d’être
au monde. Défier la tiédeur, enseigner l’intensité.
Télérama : Que cherchiez-vous au théâtre ?
Olivier Py : A 8 ans, je m’imaginais assez bien prêtre, prostitué, bandit de grand chemin,
couturier... et pourquoi pas musicien, dessinateur, politique... Le danger des gens qui ont
trop de destins, c’est qu’ils finissent en général par n’en avoir aucun. Moi, au moins, je
savais qu’il y avait deux lieux où je pourrais vivre plus brillamment que n’importe où
ailleurs : le théâtre et l’Eglise.
Télérama : Votre famille est chrétienne ?
Olivier Py : Mais on n’est pas conditionné par son anecdote ! Rien de ce qui me caractérise n’a d’origine. Tout m’est venu d’en haut. Ma vocation théâtrale, ma vocation religieuse. Mon homosexualité.
Télérama : A l’heure de la psychanalyse, une telle affirmation n’est-elle pas naïve ?
Olivier Py : Aucun médiateur - homme ou femme - ne m’a conduit moi, vers le Christ ou
le théâtre. J’étais le fils unique d’un dentiste ; ma mère avait une boutique de mode. Ils
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Le théâtre est une révolte contre le virtuel
m’ont eu très jeunes. Ils venaient d’Algérie, s’étaient installés à Grasse -j’ai même
longtemps cru que c’était une «grâce» d’être né là-bas. Pas de bibliothèque à la maison,
pas de disques, pas de sorties culturelles. J’étais un adolescent d’une mélancolie
profonde, mais qui la travestissait avec talent. Bizarrement, il y avait ce mot
- «théâtre» - qui nourrissait obscurément mes espoirs. Je ne savais pas ce que c’était,
du jeu, simplement... Les enfants fondent toujours un espoir dans le jeu. Simplement, à
l’adolescence, il y en a qui n’arrivent pas à abandonner cet espoir-là. Vague, confus.
Aujourd’hui encore, ma vision du théâtre n’est absolument pas culturelle. M’intéresse le
théâtre «en soi». la révélation du fait théâtral dès qu’il apparaît. Et, pour moi, aller
dans une école, voir des enfants qui font du théâtre n’est pas si différent d’assister à
une représentation à l’Odéon.
Télérama : C’est quoi, le «fait théâtral»?
Olivier Py : La «présence réelle», comme disent les catholiques Ils pensent en effet que
l’hostie que le prêtre distribue au moment de l’eucharistie n’est pas symbolique, mais
réellement le corps du Christ. Au théâtre, il y a aussi cette présence réelle. Mais des
acteurs. Et dans un monde de plus en plus virtuel, où même à notre amoureux nous
parlons la plupart du temps virtuellement - via le téléphone portable -, elle acquiert
une force qu’elle a perdue partout ailleurs. On vient au théâtre pour confirmer que tout
n’est pas virtuel. Vous savez, je dois avouer que quatre ans d’études théologiques m’ont
mieux permis d’approcher le théâtre que mes années de Conservatoire. Le mystère de la
Trinité, par exemple - ce Dieu unique en trois personnes cosubstantielles, coéternelles,
le Père, le Fils et l’Esprit saint : eh bien ! il permet au chrétien, contre toute raison,
d’inscrire l’éternité dans l’instant. Le chrétien est celui qui ne sépare pas le temps de
l’éternité. Comme le spectateur de théâtre.
Télérama : C’est dans ce souci mystique que, selon vous, vos acteurs «incarnent» et non
«interprètent» ?
Olivier Py : L’interprétation renvoie à une idée bourgeoise de l’humain, héritée de la
télévision et du cinéma. Car la télé et le cinéma, c’est pareil, aujourd’hui : ils nous
donnent à voir des êtres stéréotypés, nous démontrent à longueur d’images que nous
sommes conditionnés politiquement, psychologiquement, socialement... Mais l’homme est
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Le théâtre est une révolte contre le virtuel
beaucoup plus grand que ce qu’on voit à la télévision. Beaucoup plus fou que ce qu’on
voit dans le cinéma français ! Il faut donc essayer d’inventer une autre manière de
représenter l’humain. Quand les masques tombent, quand l’homme dynamite sa petite
identité narcissique, communie avec l’humanité tout entière. Au théâtre, certains acteurs
- ce ne sont pas les metteurs en scène, mais les acteurs qui font ça - nous rappellent
qu’avant d’être pédé, femme, noir, pauvre ou riche nous sommes avant tout l’humanité.
Télérama : Le théâtre va-t-il devenir refuge ?
Olivier Py : ll est trop minoritaire. Même quand ses salles sont pleines, il ne fait jamais
huit millions de spectateurs comme le journal télévisé. L’art n’est pas pour tous. Seuls
les bourgeois décrètent que l’art est pour tous, parce qu’ils s’imaginent y avoir, eux, un
accès direct... Mais c’est faux. Observez des enfants qui viennent pour la première fois
au théâtre, il y en a toujours un qui pleure d’émotion et un autre qui s’ennuie.
Télérama : Et celui qui pleure d’émotion n’est pas forcément celui à qui des parents
cultivés ont déjà parlé de théâtre...
Olivier Py : C’est vrai que le petit-bourgeois pourra s’ennuyer et faire croire qu’il ne
s’ennuie pas. Comme son papa et sa maman. Mais pas le vrai gamin ému.
Télérama : Quel est son avenir, alors ?
Olivier Py : La révolte contre le virtuel ! La révolte du désir. Elle n’est pas écrite dans
les sondages, les sociologues ne pourront jamais la percevoir : c’est la joie d’être là, en
face de toi qui es là. C’est du théâtre. Et cette chose-là va devenir plus nécessaire que
n’importe quel discours religieux et politique.
Télérama : Justement, le théâtre n’a-t-il pas renoncé à se battre pour les affaires de
la cité, à résister ?
Olivier Py : Mais c’est le politique qui a renoncé au politique ! Il est mangé par le
médiatique. Pour mieux passer à la télévision, un politicien préférera toujours taire ses
idées dérangeantes. Comment s’étonner que la politique française soit devenue ce
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Le théâtre est une révolte contre le virtuel
mauvais vaudeville ? Les logiques dominantes sont désormais économiques. Il n’y a pas
si longtemps, on accusait le politique de tous les maux, signe qu’il avait encore le
pouvoir. Aujourd’hui, c’est le monde marchand qu’on accuse, signe qu’il «est» le
pouvoir. En plus, je crains que la position de «résistance» que vous évoquez ne soit
nombriliste. Résister, c’est bien, mais ne suffit-il pas d’être là, à faire ce qu’on fait,
pour cette minorité qui n’a pas honte d’être petite ? Insistons. Insistons. C’est
suffisant. Ou alors ll faudrait se croire encore capable d’agir directement sur le
politique. Et plus personne n’y croit.
Télérama : Même votre génération d’auteurs-metteurs en scène, ces quadragénaires qui
dirigent les centres dramatiques nationaux ?
Olivier Py : Surtout elle, qui a été si narcissique... Pour nous, les subventions de l’Etat
étaient du mécénat d’art : elles devaient garantir une liberté esthétique totalement
dégagée des contraintes du monde marchand. Nous avons voulu ignorer le rôle civique
qu’elles nous imposaient aussi.
Télérama : Pourquoi ?
Olivier Py : Nous étions lessivés par la langue de bois des «pères» - les Planchon et
autres - sur le «théâtre populaire» ! Le devoir civique devenu devoir artistique. Nous
nous rendions bien compte que ces prétendus discours héroïques tournaient à vide, quand
ils ne servaient pas de prétexte ! Que le bon, le vrai théàtre ne s’adressait jamais aux
masses, mais aux individus. Même quand Brecht prône un théâtre politique qui fasse
réagir, qui «divise», il suggère un théâtre qui permette à tout individu de penser ses
contradictions privées. Pas collectives. Pour nous, il était donc clair que la subvention
était là pour faire de l’art et non se donner une bonne conscience citoyenne. Du coup,
nous refusions le moindre rôle civique. Or, ça, je pense maintenant que c’est un
dangereux malentendu. Nous devons absolument refonder l’idée de service public.
Télérama : Comment ?
Olivier Py : En pariant sur l’excellence esthétique en même temps que sur un lien fort
avec le public. La quadrature du cercle, en somme...
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Le théâtre est une révolte contre le virtuel
Télérama : Mais que peut être ce théâtre de service public, que vous affirmez
forcément minoritaire ?
Olivier Py : ll suffit que cette minorité ne soit pas catégorielle. Que des jeunes, des
vieux, des pauvres, des riches, des bourgeois et d’autres se retrouvent dans une salle.
C’est essentiel. Enfin, il y a «service public» quand le théâtre sort du spectacle.
Télérama : C’est-à-dire ?
Olivier Py : Théâtre et spectacle sont Abel et Caïn, c’est-à-dire frères ennemis,
indispensables l’un à l’autre. Fondamentalement, le spectacle est ce qui est pulsionnel,
qui ne nous laisse pas cette liberté de nous diviser. Face à un spectacle, nous sommes
souvent tous conquis. Face à du vrai théâtre, nous sommes au contraire divisés. Mais grâce
à lui, justement, nos contradictions enfin deviennent supportables. Car le théâtre
dénonce toujours le théâtre, nous rappelle qu’il s’agit de peinture et non de sang. Alors
que le spectacle veut nous abuser. Le «bon» théâtre cherchera même à nous persuader que
la peinture rouge est plus émouvante que le sang. Pourquoi ? Parce que nous ne sommes
pas que pulsions, mais faits de mots, d’héritages, de paroles, de relations à l’autre, de
songes. On n’est pas qu’un intestin et un sexe. On est aussi une bibliothèque.
Télérama : Etes-vous moderne, Olivier Py ?
Olivier Py : Moderne au sens de la Renaissance, oui : je suis issu de l’humanisme. Moderne
au sens du XXe siècle, non. Parce que cette modernité-là implique des ruptures, des
brisures, une cassure entre les mots et les choses. Elle est faite de désespoir. Et sur ce
désespoir-là, je ne peux plus danser librement. C’est très difficile de faire du théâtre
moderne.
Télérama : Pourquoi ?
Olivier Py : Mais parce qu’au théâtre on cherche sans arrêt à retrouver un geste
éphémère. Chez les Grecs, Shakespeare, Racine... Et à travers ce geste même à ressusciter
toute l’histoire du théâtre. Comment alors se contenter d’une avant-garde de forme ?
D’autant que l’art, c’est terminé. L’art, c’était la subversion, aujourd’hui, c’est un
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Le théâtre est une révolte contre le virtuel
argument de marketing. Tout ce qui faisait la subversion plastique il y a vingt ans se
retrouve aujourd’hui chez Benetton. La modernité est devenue l’alliée du monde marchand.
Télérama : Pensez-vous, comme on l’a beaucoup dit depuis le festival d’Avignon 2005,
qu’il y ait une crise du théâtre ?
Olivier Py : Mais c’est le contraire d’une crise ! Et les réactions des spectateurs et de
la presse lors du dernier festival d’Avignon sont le signe de la santé du dialogue...
On s’est enfin rendu compte qu’il y avait un fossé entre le public et les «opérateurs
culturels», c’est-à-dire, pour faire court vous, critique de théâtre, ou moi, metteur en
scène, patron et programmateur de centre dramatique... A Avignon, le public possède
encore cette conscience du rôle civique du théâtre que nous avons perdue, il demande au
theâtre de lui apprendre à vivre avec dignité, même dans une absence de sens
généralisée. Il redoute que le festival devienne un objet de mode. C’est sain. Si crise il
y a elle est plutôt du côté de la profession, divisée, atomisée Les intermittents ne
cessent d’être menacés par une société marchande qui se fiche d’eux. Les collectivités
locales, qui s’investissent de plus en plus dans le culturel - et c’est bien -, réagissent
souvent en bastions de potentats locaux ; elles n’ont pas compris que les esthétiques
avaient explosé, qu’il fallait accueillir la création européenne, que l’écriture
contemporaine était en plein essor. On monte bien moins de classiques. A part ça, nous
avons des institutions culturelles uniques au monde, qu’il faut se battre pour
préserver. La France a la plus belle surface culturelle du monde, c’est le pays dans lequel
il y a le plus d’émergences artistiques. Et ne me dites pas que je suis de droite j’ai
voyagé. En Allemagne, en Suisse, en Angleterre, en Irlande, en Russie, aux Etats-Unis...
Ne demandons juste pas au théâtre de faire pour le monde plus que du theâtre...
Télérama : C’est-à-dire ?
Olivier Py : Le theâtre, c’est la quête de la joie. Mais attention joie ne signifie pas
gaieté, bonheur. J’appelle joie l’accession au sens. Au théâtre, le sens se donne, non à
travers une réplique, mais par le seul fait d’être là.
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Le théâtre est une révolte contre le virtuel
Télérama : Comment faites-vous pour cultiver la Joie dans le monde d’aujourd’hui ?
Olivier Py : Je pourrais répondre grâce au théâtre, mais ça serait une trop belle réponse.
La vérite, c’est qu’il y a le travail. Tant que j’ai du travail, il y a un nous, «nous»
travaillons. Je crois absolument à la force du travail. Pour confirmer que ma liberte
existe, que la souffrance est un honneur, que j’y ai droit, mais que j’y ai droit pour un
temps assez court.
Télérama : La souffrance est un honneur ?
Olivier Py : Oui, la souffrance est un honneur. Oui, ça fait mal d’être en vie, mais quandmême on nous a donné ce court theâtre, ce bref theâtre, à vivre. Alors, faisons-le, c’est
ce que j’appelle le travail.
Télérama : Vous avez écrit une quinzaine de pièces, y voyez-vous un thème commun ?
Olivier Py : Mon théâtre célèbre, convie sur le même plateau plusieurs théâtres : farce,
satire politique, élégie, tragédie, vaudeville, drame bourgeois... Depuis Claudel, certes,
l’idée n’est pas originale. D’autant qu’à travers toutes ces formes, ces masques, il s’agit
toujours du journal d’une âme
Télérama : La vôtre ?
Olivier Py : Evidemment. Je me mets à écrire une pièce quand je pense avoir vécu une
expérience spirituelle. Quelquefois elle passe par le Golgotha, quelquefois elle va
retrouver Dionysos. Rien n’est résolu chez moi c’est pour cela que je suis un homme de
théâtre. Quand Claudel a résolu ses contradictions majeures, il a arrêté d’écrire du
théâtre, il s’est consacré à l’exégèse Tant qu’il y a chez un homme des oppositions - le
spirituel, le sexuel, par exemple -, il reste dialectique, peut trouver deux personnages
qui sont évidemment des figures de lui-même et les faire dialoguer sur scène.
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Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Le théâtre est une révolte contre le virtuel
Télérama : En fait d’oppositions, vous vous dites davantage «poète» que «dramaturge».
Qu’est-ce qu’un poète ?
Olivier Py : L’homme qui essaie de raccommoder l’unité perdue. Qui voit chaque objet non
pas indépendamment - comme une marchandise -, mais comme appartenant à la totalité
Quand on observe dans leur compotier deux petites pommes du peintre-poète Chardin, ce
ne sont en effet pas deux pommes qu’on voit mais toute une présence du monde...
Le poète est celui pour qui être en vie est déjà une réponse. Un émerveillement. Car pour
lui la présence du mal, du diable, n’enlève rien à la beauté du monde. Le poète ne porte
pas de jugement moral. La beauté lui suffit. Et la pulsion de vie originelle. D’ailleurs,
plus on est dans l’obscurité, mieux on voit la lumière.
Propos recueillis par Fabienne Pascaud
Télérama du 19 avril 2006
Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› À la gloire du théâtre
Molière, Corneille, Guitry pourraient être les trois parrains de ces Illusions comiques,
pièce du comédien, auteur et metteur en scène Olivier Py. Molière en hommage à
L’Impromptu de Versailles, Corneille pour le clin d’oeil du titre et Guitry par cette façon
nonchalante de lancer le récit aux spectateurs comme on lance un regard à une femme
séduisante. Qu’est-ce donc que ces Illusions comiques ? Un amour fou du théâtre, une
manière de l’honorer, de se moquer de ses travers boulevardiers ou de le hisser au plus
haut de la tragédie. Les comédiens, prêts à jouer une scène intitulée Le Poète et la Mort,
se trouvent face à l’auteur. Mais ils veulent du léger, de la douceur, de la clémence. Le
poète résiste à la légerèté Pour lui, le théâtre propose soit des images soit un
engagement politique. Et il peut changer le monde. Foutaises disent les comédiens. Le
théâtre doit rester du théâtre. Et ils vont le démontrer.
Si l’on a reproché parfois à Olivier Py son lyrisme claudelien, ici, dans un registre plus
trivial, il fait merveille. Py est au cœur même du spectacle, tirant tous les mots comme
des ficelles. Il convie sa troupe et appelle même à la rescousse Dieu et la Mort. C’est
un cavalier qui chevauche toutes les scènes, pousse les murs jusqu’à y entrer de force
pour imposer sa loi. Celle du plaisir, de la dissidence ludique. En trois heures, il nous
fait visiter au galop tout le monde du théâtre, du grand tragédien à l’acteur de tournée,
parodique, sérieux, insolent, ne refusant pas un exercice de style à ses comédiens pour
que le bonheur s‘installe sur la scène. Et ils s’en donnent à cœur joie, ses fidèles
compagnons. Mais il en est un qui sort particulièrement du lot, Michel Fau qui interprète
Tante Geneviève. En tailleur imitation Chanel, la tête à la Balasko, rendant hommage à
Jacqueline Maillan, il provoque rire et délire en apprentie comédienne qui doit
interpréter une vingtaine de versions d’une même phrase sur le mode : «en regrettant
d’avoir pris du lapin à la moutarde à midi à la cantine». Un monument de théâtre.
JEAN LOUIS PINTE
Figaroscope du 24 mai 2006
Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
29
› La joie sur les planches
L’écrivain-metteur en scène, acteur également ici, se moque un peu de lui-même tout
en célébrant son art au milieu d’une troupe déliée et très douée.
OLIVIER PY propose, avec ses «Illusions comiques», une célébration joyeuse de l’art
dramatique tout en évoquant son propre chemin et en se moquant au passage pas mal de
lui-même. Il ne quitte pas ses thèmes de prédilection et l’on trouverait, brochés dans
bien des textes d’autres pièces, des noyaux qui renvoient exactement aux questions des
«Illusions comiques». Le jeu du réel et de l’illusion, l’exacerbation des sentiments,
l’exaltation d’être au monde, l’angoisse, la fuite dans la fiction, la question de la foi,
le rôle, le destin du poète. Dans un décor cadré de tubes de néon d’une blancheur
éblouissante un peu pénible aux rétines fatiguées et qui changent de couleur, huit
interprètes se démènent pendant trois heures. Dans ce spectacle, tout commence dans la
salle avec des allers et venues dans les travées, et le public est sans cesse pris à témoin
des atermoiements du personnage central, le poète, c’est-à-dire Olivier Py lui-même. Il
est sollicité par le monde entier, du Pape à la Tante Geneviève... Une comédienne,
Elizabeth Mazev, et aussi Michel Fau, formidable, comme l’est Philippe Girard, et comme
le sont Olivier Balazuc, Pierre-André Weitz, Julien Mouroux, Mathieu El Passi, tous,
engagés dans la joie, nous offrent une soirée jubilatoire. On rit tout le temps, on
partage tout ce que l’on aime au théâtre, cette hésitation perpétuelle entre la
dilatation de l’âme et la sourde angoisse qui nous dit qu’il vaut mieux en rire avant
d’avoir à en pleurer. Car, et c’est ce qui est bien avec Olivier Py, il est grave mais il
est loin de tout esprit de sérieux qui pourrait le dessécher. Ce qu’il aime, c’est le
partage. Et on en profite.
ARMELLE HÉLIOT
Le quotidien du médecin du 17 mai 2006
Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
30
› Olivier Py surmultiplié
[...]
A la manière des romans d’anticipation, ou bien des grandes oeuvres utopistes, Illusions
comiques, dernière pièce du metteur en scène, auteur, acteur et directeur du Centre
dramatique national d’Orléans Olivier Py, réinvente l‘ordre du monde. Et si tout était le
contraire de la réalité ? À première vue, un ailleurs exotique, attachant, idéaliste se
révélant in fine terrifiant, assourdissant, fasciste. En homme de théâtre patenté, Olivier
Py dresse des miroirs autour de son propre théâtre pour en rire. Cette comédie, où
l’auteur lui-même se voit soudainement porté au pinacle, encensé de tous côtés, joue la
farce du théâtre dans le théâtre et celle du pouvoir. Tout le monde croit soudainement
voir au théâtre la solution à tous les problèmes, la parole du poète démiurge est d’or.
Bien que résistant un peu au commencement, il se fait rapidement happer par les
trompettes de la renommée. Il délaisse ses amis, les comédiens, sa troupe, sa petite
famille, afin de se hisser au sommet. D’odyssée, l’aventure se transforme en déroute et
le poète retrouve sa place de prédilection : la fange. On l’accuse désormais de tous les
maux, on le lapide, on le nie. Il peut faire à nouveau acte de création. Et rebelote...
Autodérision. Créées à Orléans, le 29 mars dernier, ces Illusions comiques, clin d’oeil à
Corneille, alternent l’épopée grandiloquente du poète et les grandes leçons hilarantes
sur le théâtre. Py rigole franchement, d’abord de lui-même, des travers de son propre
théâtre oscillant entre mystique et pornographie, et balaie d’un grand éclat de rire les
fâcheux, les commentateurs, les jaloux, les orgueilleux, les aigres. Il faut de l’humour,
il n’en manque pas. Pour l’occasion il retrouve sa bande originelle et les personnages
de sa pièce portent les noms de ses camarades de scène : Mlle Mazev, M. Balazuc, M. Girard,
M. Fau, chacun jouant son propre rôle. Accessible, onirique, lyrique et très drôle, cette
pièce est aussi l’occasion d’un vibrant hommage au «poète mort trop tôt», Jean Luc
Lagarce, avec qui Olivier Py a aiguisé ses premières armes. Il faut être fou pour
imaginer que les poètes puissent gouverner le monde, comme il faut être fou pour faire
la révolution. Comme il faut être fou, et peut-être encore plus aujourd’hui où la parole
doit le plus possible coller à la réalité, pour encore faire du théâtre. Et là est bien le
propos de ces Illusions comiques : la clairvoyance de la folie.
Hervé Pons
La Tribune du 24 avril 2006
Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Olivier Py, le théâtre en joie
Au programme de la Grande Parade de l’auteur et metteur en scène au Rond-Point, une
formidable création : Illusions comiques
Faut-il encore présenter Olivier Py ? L’auteur, acteur, chanteur, metteur en scène (de
théâtre et d’opéra), scénographe, cinéaste et directeur de theâtre (au Centre dramatique
national d’Orléans) n’a «que» 40 ans. Et bientôt vingt ans de théâtre avec sa compagnie,
L’Inconvénient des boutures.
Catholique et homosexuel proclamé, héraut ardent d’un théâtre lyrique pour aujourd’hui,
il est un des acteurs les plus doués, les plus singuliers et les plus attachants de notre
scène. Toujours prêt au combat quand il s’agit de défendre une juste cause. Gréviste de
la faim aux côtés notamment d’Ariane Mnouchkine, en août 1995, pour dénoncer l’inertie
de la communauté internationale après le massacre de Srebrenica, en Bosnie. Ou prenant
parti, avec passion, pour un théâtre de parole, lors de la polémique qui a agité le
Festival d’Avignon, en juillet 2005.
Il est aussi, ces jours-ci, de ceux qui soutiennent Marcel Bozonnet, l’administrateur de
la Comédie-Française, dans sa décision de déprogrammer une pièce de Peter Handke en
raison des positions proserbes de l’écrivain sur la guerre en ex-Yougoslavie (Le Monde
du ll mai). Olivier Py occupe une place unique dans le théâtre français. Le Ministère de
la culture lui a propose de poser sa candidature à la succession du communiste Bernard
Sobel à la tête du Théâtre de Gennevilliers. Il a décliné.
[...]
Une comédie satirique
Avec Illusions comiques, on est dans la veine que l’on préfère chez Olivier Py.
la joie du théâtre s’offre pour elle même, sans justification religieuse. Celle où
anime ses vertigineux jeux de miroirs pour mieux dire le monde, notre monde,
selon Olivier Py, il est en train de changer radicalement, dans sa relation au
Celle où
la scène
tel que,
verbe et
au réel. La nouveauté, c’est que Py a cette fois-ci écrit une comédie. Satirique,
grinçante et très drôle.
Voilà donc le poète Moi-même (Olivier Py soi-même) et ses fidèles comédiens Olivier
Balazuc, Michel Fau, Philippe Girard et Elisabeth Mazev, dans leurs propres rôles Ils sont
en train de répéter pour la millième fois Le Poète et la mort quand tout à coup le monde,
notre monde, s’avise que seul le theâtre pourra le sauver, «s’opposer à la société du
... / ...
Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Olivier Py, le théâtre en joie
spectacle, contredire cette grande entreprise de virtualité abrutissante». Le poète Moimême est demandé partout, convoqué par le maire de Pans, le président de la République,
le pape et même le ministre de la culture, qui lui offre sa place. Nouveau messie, héros
national, on décide de lui élever une «statue toute en or et toute en larmes».
Les acteurs du poète Moi-même, eux, sont dubitatifs : «Le théâtre fait pour le monde du
théâtre, c’est bien suffisant», font-ils remarquer. Accusés par le nouveau sauveur de
l’humanité d’avoir «trois combats de retard sur le réel», ils reprennent l’éternel voyage
des comédiens avec leurs mauvaises valises, dans des villes grises aux hôtels tristes.
Ce qu’il adviendra ensuite, on ne le racontera pas, laissant aux spectateurs la joie de
découvrir quelques personnages savoureux, comme le Marchand de modes, le chien Concept
ou le Pire Ennemi du poète, auteur d’un spectacle intitulé Vide-Shakespeare-hypothèseantimatierenumero 26...
Hommage aux comédiens
Olivier Py convoque les fantômes de Molière (la pièce est inspirée de L’Impromptu de
Versailles), de Jean-Luc Lagarce, qui fut son ami, et, plus inattendu chez lui, de Brecht.
Il jongle avec les masques, les idées, les genres (farce, tragédie, vaudeville, drame
lyrique...). Son theâtre, dans la grande tradition, joue des simulacres pour mieux
dévoiler un certain nombre d’«illusions comiques» - y compris les siennes, ce qui rend
sa pièce d’autant plus percutante. La comédie du pouvoir et la foire aux vanités y sont
décapées avec une lucidité à la fois joyeuse et macabre c’est brillantissime. Cela devrait
faire un tabac - et faire grincer quelques dents, car Olivier Py n’y va pas avec le dos
de la cuillère -, tant tout, ici, fait théâtre avec une belle évidence, et tant est vif le
plaisir que l’on y prend. Plaisir du jeu, aussi la pièce est un magnifique hommage aux
comédiens en géneral et à ceux d’Olivier Py en particulier. Michel Fau, notamment, devrait
enfin être reconnu, avec ces Illusions comiques, pour ce qu’il est le plus grand clown
tragique du théâtre français. Il est l’Acteur, celui qui renverse les rôles, les sexes, les
identités. Ses apparitions en Tante Geneviève en tailleur rose bonbon déclenchent une
hilarité irrépressible. Il y a aussi la finesse tranchante d’Olivier Balazuc, le mélange
de poésie, de sensibilité et d’humour de Philippe Girard. Et Elisabeth Mazev, son ironie
vive et chantante qui, ici, porte avec un lyrisme retenu la part la plus émouvante de la
pièce. Bouleversante évocation du voyage des comédiens, dans sa gloire obscure et sa
mélancolie.
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› Olivier Py, le théâtre en joie
[...]
Olivier Py est bien le fidèle gardien de la servante, cette petite lampe qui, toujours,
veille dans la nuit du theâtre et du monde.
FABIENNE DARGE
Le Monde du 12 mai 2006
Illusions comiques / 2O › 30 sept. 07
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› Repères biographiques
› Olivier Py
Olivier Py, né en 1965 à Grasse, dirige l’Odéon-Théâtre de l’Europe depuis le 1er mars 2OO7.
Après une hypokhâgne, puis une khâgne au Lycée Fénelon, il entre à l’ENSATT (rue Blanche)
puis, en 1987, au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique, ce qui ne
l’empêchera pas d’entamer des études de théologie à l’Institut Catholique. En 1988, il
fonde sa propre compagnie, «L’inconvénient des boutures», et assure lui-même la mise en
scène de ses textes. Citons entre autres Gaspacho, un chien mort (199O) ; Les Aventures
de Paco Goliard (1992) ; La Jeune Fille, le Diable et le moulin, d’après les frères Grimm
(1993) ; La Servante, histoire sans fin, un cycle de cinq pièces et cinq dramaticules
d’une durée totale de vingt-quatre heures, présenté en intégrale au Festival d’Avignon
1995 et repris à la Manufacture des Oeillets à Ivry en 1996 ; Le Visage d’Orphée, créé
au CDN d’Orléans puis présenté au Festival d’Avignon, dans la Cour d’honneur du Palais
des Papes en 1997. Olivier Py met également en scène des textes d’Elizabeth Mazev (Mon
père qui fonctionnait par périodes culinaires et autres, 1989 ; Les Drôles, 1993) et de
Jean-Luc Lagarce (Nous les héros, 1997).
Nommé en juillet 1998 à la direction du Centre Dramatique National/Orléans-LoiretCentre, il y crée Requiem pour Srebrenica, qui a tourné en France, en ex-Yougoslavie, au
Canada, aux États-Unis et en Jordanie, puis L’Eau de la Vie et une deuxième version de
La Jeune fille, le Diable et le moulin (1999) ; L’Apocalypse joyeuse (juin 2OOO) ;
Épître aux jeunes acteurs (2OO1) ; Au Monde comme n’y étant pas (2OO2). D’autres
metteurs en scène commencent à monter ses pièces : Théâtres l’est par Michel Raskine au
Théâtre du Point du jour à Lyon en 1998, L’Exaltation du labyrinthe par Stéphane
Braunschweig au TNS en 2OO1, La Servante par Robert Sandoz en 2OO4 à Neuchâtel. Le
Soulier de satin, de Paul Claudel, dont Olivier Py donne une mise en scène en version
intégrale à Orléans en mars 2OO3, est ensuite joué au TNS, au Théâtre de la Ville, au
Grand Théâtre de Genève et au Festival d’Edimbourg en 2OO4, et reçoit le prix GeorgesLherminier, décerné par le Syndicat de la Critique au meilleur spectacle créé en région.
En 2OO5, création d’une trilogie : Les Vainqueurs, qui tourne au TNP à Villeurbanne, à la
Ferme du Buisson, au Festival d’Avignon, à Paris. La même année, Olivier Py met en scène
A Cry from heaven de Vincent Woods à l’Abbey Theatre à Dublin. En 2OO6, à l’invitation de
Jean-Michel Ribes, il présente au Théâtre du Rond-Point «La Grande Parade de Py», ensemble de six spectacles dont il est l’auteur et le metteur en scène : L’Eau de la Vie, La
Jeune fille, le Diable et le moulin, Épître aux jeunes acteurs, Les Vainqueurs, Chansons
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Illusions comiques / 2O › 3O sept. O7
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du Paradis perdu et une nouvelle création : Illusions comiques, jouée également à
Orléans, Lille, Strasbourg, Sartrouville, Caen, Douai, Lorient, Forbach, Annecy, Reims,
Creil ou Bordeaux avant d’être reprise en ouverture de saison 2OO7/2OO8 à l’OdéonThéâtre de l’Europe.
En juillet 2OO6, à l’occasion de la clôture du 6Oème Festival d’Avignon, Olivier Py met en
scène dans la Cour d’honneur du Palais des Papes un hommage à Jean Vilar, L’Énigme Vilar.
C’est également au Festival d’Avignon, en 1996, qu’il interprète pour la première fois son
personnage de cabaret : Miss Knife, dont le tour de chant, Les ballades de Miss Knife,
composé de chansons qu’il a écrites, mises en musique par Jean-Yves Rivaud, a été présenté au public à Paris (Théâtre du Rond-Point, Café de la Danse), Orléans, Cherbourg,
Lyon, au Petit Quevilly, à New York ou à Bruxelles (un disque a été édité par Actes Sud).
Mais Olivier Py a également joué dans des spectacles mis en scène par Jean-Luc Lagarce,
François Rancillac, Pascal Rambert, ou dans des longs-métrages signés Jacques Maillot,
Cédric Klapisch, Michel Deville, Laurent Bénégui, Peter Chelsom ou Noémie Lvovsky il tient
aussi un rôle dans son premier film : Les Yeux fermés, qu’il a réalisé en 1999 pour Arte.
Depuis une dizaine d’années, Olivier Py a abordé la mise en scène d’opéra. Il en a signé
huit à ce jour : Der Freischütz de C. M. von Weber à l’Opéra de Nancy (1999), Les Contes
d’Hoffmann de Jacques Offenbach (2OO1) et La Damnation de Faust d’Hector Berlioz (2OO3)
au Grand Théâtre de Genève, Le Vase de parfums (musique de Suzanne Giraud, livret
d’Olivier Py) à l’Opéra de Nantes (2OO4), Tristan und Isolde et Tannhäuser de Richard
Wagner au Grand Théâtre de Genève (2OO5), Curlew River de Benjamin Britten (Edimbourg,
2OO5) et dernièrement Pelléas et Mélisande de Claude Debussy au Théâte Musical
Stanislavski et Némirovitch-Dantchenko de Moscou dans le cadre du Festival International
Tchékhov.
Lauréat de la Fondation Beaumarchais et boursier du Centre national du Livre, Olivier Py
s’est vu décerner le Prix Nouveau Talent Théâtre/SACD (1996) ainsi que le Prix Jeune
Théâtre de l’Académie Française (2OO2). Certains de ses textes sont disponibles aux
Solitaires Intempestifs, aux éditions Grandvaux, à L’École des loisirs, chez Bayard ou ARTE
éditions ; la plupart de son œuvre est éditée chez Actes Sud (qui a notamment publié en
2OO5 son premier roman, Paradis de tristesse). Son théâtre a été traduit en anglais, italien,
allemand, slovène, espagnol, roumain et grec.
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› Pierre-André Weitz
Il passe son enfance sur les planches du Théâtre du Peuple de Bussang où il joue dès
l’âge de dix ans, dans le cycle Shakespeare de Tibor Egervari.
De 1975 à 1985, il suit des études instrumentales de trompette, saxo, tuba avant
d’entrer au Conservatoire de Strasbourg, section Art Lyrique. Parallèlement il suit des
études à l’École d’architecture de Strasbourg, où il obtient le diplôme d’architecte
D.P.L.G. Après avoir été assistant décorateur de Marie-Hélène Butel et Gilone Brun, il
signe son premier spectacle, décor et costumes, à l’âge de 18 ans : George Dandin de
Molière, mis en scène par Jean Chollet et enchaîne avec La Mouette de Tchekhov, mis en
scène par Pierre Diependaële. Il travaille ensuite avec Pierre-Étienne Heymann, François
Rancillac, François Berreur.
Il collabore depuis 1993 aux spectacles d’Olivier Py, dont il crée d’abord les décors :
Les Aventures de Paco Goliard, Les Drôles d’Elizabeth Mazev, puis les décors et les
costumes : La Servante, Nous les héros de Jean-Luc Lagarce, Le Visage d’Orphée, La Jeune
fille, le diable et le moulin et L’eau de la vie (d’après les frères Grimm), Requiem pour
Srebrenica, L’Apocalypse joyeuse, Le Soulier de satin de Paul Claudel et Les Vainqueurs,
ainsi que A Cry from heaven de Vincent Woods à l’Abbey Theatre, Dublin.
Il travaille également avec Jean-Michel Rabeux pour les décors et costumes de : Arlequin
poli par l’amour de Marivaux, L’Homosexuel ou la difficulté de s‘exprimer de Copi,
Déshabillages de Jean-Michel Rabeux, Feu l’amour : trois pièces de Georges Feydeau, Le
Sang des Atrides, d’après Eschyle et Le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare.
Pour l’opéra, il signa les décors et les costumes des opéras mis en scène par Olivier Py
: Der Freischütz de Weber (Opéra de Nancy, 1999), Les Contes d’Hoffmann d’ Offenbach
(Grand Théâtre de Genève 2OO1), La Damnation de Faust de Berlioz (Grand Théâtre de
Genève, 2OO3), Le Vase de parfums de Suzanne Giraud (Opéra de Nantes, 2OO4), Tristan et
Isolde puis Tannhäuser de Richard Wagner (Grand Théâtre de Genève, 2OO5), Curlew river
de Benjamin Britten (Festival d’Edimbourg, 2OO5), Pelléas et Mélisande de Claude Debussy
(Théâte Stanislavski, Moscou, Festival International Tchékhov, 2OO7), ainsi qu’Othello de
Verdi mis en scène par Michel Raskine (Opéra de Lyon, 2OO3).
Il a également participé en tant que chanteur à plusieurs productions de l’Atelier Lyrique
du Rhin, de l’Opéra du Rhin et de l’Opéra de Lyon.
Il enseigne la scénographie à l’École Supérieure des Arts Décoratifs de Strasbourg.
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› Olivier Balazuc
Formé au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris, il a joué au théâtre, sous la
direction de Julien Sibre (Trois pièces courtes de Tchekhov et Le Legs de Marivaux), Gabriel Garran
(Autour de Kateb Yacine), Catherine Marnas (Qui je suis (parcours Pasolini)). Il a participé à des
lectures avec Stéphanie Loïk et Françoise Lebrun dans Les mers rouges de Liliane Atlan, Badier
Grégoire d’Emmanuel Darley et Philippe Adrien dans Campagne Première d’Antoine Bourseiller.
En tant que metteur en scène, il monte L’Institut Benjamenta d’après Robert Walser, Elle de Jean
Genet, Hot House de Harold Pinter, puis en 2OO6, Un chapeau de paille d’Italie de Labiche. Il est
auteur de nouvelles, de pièces de théâtre et a été lauréat deux années consécutives du Prix du
Jeune Ecrivain pour Icare, Mercure de France en 1998 et L’Odyssée interrompue, Editions Le Monde
en 1997.
Il a joué avec Olivier Py dans Au monde comme n’y étant pas, dans le cadre d’un atelier du
Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique, puis dans Le Soulier de satin de Paul Claudel
et Les Vainqueurs.
› Michel Fau
Après une formation au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris, il travaille
avec Michel Bouquet, Jacques Weber, Gabriel Garran, Gilberte Tsaï. Il joue sous la direction de
Laurent Gutmann dans Le nouveau Menoza de Lenz, Jean-Luc Lagarce dans La Cagnotte d’Eugène
Labiche, Jean-Claude Penchenat dans Peines d’amour perdues de Shakespeare, Pierre Guillois dans
Pélléas et Mélisande de Maeterlinck, Stéphane Braunschweig dans Le Marchand de Venise de
Shakespeare, Jean Gillibert, dans Athalie de Racine. Il crée le monologue Hyènes de Christian
Siméon, mis en scène par Jean Macqueron et travaille régulièrement avec Jean-Michel Rabeux : Le
Ventre, Meurtres hors champ d’Eugène Durif, L’Homosexuel ou la difficulté de s’exprimer de Copi,
Feu l’amour, trois pièces de Georges Feydeau. En 2OO5, il a joué dans Les Brigands de Schiller mis
en scène par Paul Desvaux et Le Balcon de Genet mis en scène par Sébastien Rajon.
Comédien de longue date d’Olivier Py : Les Aventures de Paco Goliard, La Servante, Le Visage
d’Orphée, L’Apocalypse joyeuse, Le Soulier de satin de Paul Claudel.
Il a mis en scène Thérèse Raquin d’après Zola, Les Créanciers de Strindberg, La Désillusion de
Frédéric Constant, American Buffalo de David Mamet ainsi que Le Condamné à mort de Jean Genet,
mis en musique par Philippe Capdenat (Festival de Saint-Céré, 2OO2), Cosi fan tutte de Mozart
(2OO3), Tosca de Puccini et dernièrement Madame Butterfly (livret de Giuseppe Giacosa et Luigi
Illica, d'après Madame Chrysanthème de Pierre Loti) à Dijon.
On a pu le voir au cinéma dans Harry, un ami qui vous veut du bien de Dominik Moll, Le Créateur
d’Albert Dupontel et Les yeux fermés d’Olivier Py.
Il enseigne au cours Florent et dans les conservatoires de région.
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› Clovis Fouin
Il a joué sous la direction de Léo Cohen Paperman (Compagnie On va y arriver), dans Novecento
(2OO4-2OO5) et Paris ou ta mère la reine des sans-abris de Lazare Herson-Macarel (2OO5-2OO6)
à Paris et Avignon.
Au cinéma, il a tenu un rôle dans le long métrage d’Anthony Mille Les Illuminatis.
› Philippe Girard
Formé à l’Ecole du Théâtre National de Chaillot (1983-86), il a notamment travaillé avec Antoine
Vitez : Hernani, Lucrèce Borgia, Le Soulier de satin, Alain Ollivier : Le Partage de midi, À propos de
neige fondue, Bruno Bayen : Torquato Tasso, Pierre Barrat : Turcaret, Eloi Recoing : La Famille
Schroffenstein, Pierre Vial : La Lève (de Jean Audureau) puis avec Stéphane Braunschweig : Franziska,
Peer Gynt, et Claude Duparfait : Idylle à Oklahoma. En 1999, il a joué dans Pour un oui ou pour un
non de Nathalie Sarraute, sous la direction de Benoît Lambert et dans Thyeste de Sénèque, mis en
scène par Sylvain Maurice. Il a mis en scène Les Mangeurs de mondes d’Anthony Wavrant.
Il a tourné au cinéma avec (notamment) Jacques Rouffio, Jean-Paul Rappeneau, Philippe Harel et
Pierre Salvadori.
De 2OO1 à 2OO5, il fait partie de la troupe permanente du Théâtre National de Strasbourg, où il
joue, sous la direction de Stéphane Braunschweig, dans Prométhée enchaîné d’Eschyle, L’Exaltation
du labyrinthe d’Olivier Py, La Mouette de Tchekhov, La Famille Schroffenstein de Kleist, Brand
d’Ibsen, ainsi que dans Maison d’arrêt d’Edward Bond, mis en scène par Ludovic Lagarde, Le Festin
de pierre de Molière, mis en scène par Giorgio Barberio Corsetti et Titanica de Sébastien Harrisson,
mis en scène par Claude Duparfait.
Avec Olivier Py, il a joué dans : Les Aventures de Paco Goliard, La Servante, Le Visage d’Orphée,
L’Apocalypse joyeuse, Faust nocturne, et Le Soulier de satin de Paul Claudel.
› Mireille Herbstmeyer
Actrice et fondatrice avec Jean-Luc Lagarce du Théâtre de la Roulotte en 1981. De 1981 à 1985,
elle participe aux créations, adaptations et mises en scène de Jean-Luc Lagarce, notamment : De
Saxe, roman, Les Solitaires intempestifs, Les Règles du savoir-vivre dans la société moderne ainsi
que Vagues souvenirs de l’année de la peste de Daniel Defoe, Instructions aux domestiques de
Jonathan Swift, Chroniques maritales de Marcel Jouhandeau, On purge bébé de Feydeau, La Cantatrice
chauve de Ionesco, Le Malade imaginaire de Molière, La Cagnotte de Labiche.
Elle a joué récemment avec Olivier Py dans Nous les héros de Jean-Luc Lagarce, Le Soulier de satin
de Paul Claudel et L’Énigme Vilar ; avec Michel Dubois dans Le Marchand de Venise de Shakespeare ;
avec Dominique Féret dans Les Yeux rouges de Dominique Féret et La Pesanteur et la grâce de Simone
Weil ; avec Jean Lambert-Wild dans Orgia de Pasolini ; avec François Berreur dans Prometeo de
Rodrigo Garcia et Requiem opus 61 de Mohamed Rouabhi ; avec Hubert Colas dans Hamlet de
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Shakespeare.
Elle travaille également pour la télévision et le cinéma : Mathilde, Farce noire, et Vacances volées
d’Olivier Panchot, Le Rouge et le noir de Jean-Daniel Veraeghe et La Vie nue de Dominique
Boccarossa.
› Mathieu El Fassi - musicien
Pianiste, compositeur-arrangeur et improvisateur, à la Scène Nationale de Saint-Quentin-en
Yvelines, il improvise et accompagne conteurs et comédiens de la «Maison du Conte» (dir. Abbi
Patrix) et forme un duo avec Romano Balogh, l’un des plus grands noms du violon tzigane. Il passe
de l’écriture d’Anacaona - sorte d’opéra moderne - à la composition de ... nous n’irons plus au bois... ,
pièces pour piano en forme de collage où il revisite et détourne le répertoire classique de son
identité traditionnelle. Tandis qu’en coulisse il transmet son expérience à des pianistes et
chanteurs d’horizons divers, il crée plusieurs spectacles mêlant la parole et la musique, parmis
lesquelles Angloklaxons : spectacle autour de la musique des années 193O à 195O, avec Phyllis
Roome (festivals d’Avignon, Edinbourg, Paris...), Abéceda : spectacle réunissant danse, poésie et
musique (création au Centre Tchèque de Paris) Un Tango pour Verlaine : spectacle où le monde des
bas-fonds et des cabarets de Verlaine rejoint le rythme entêté du tango, avec Christophe Le Hazif
(festivals d’Auray, Suze-la-Rousse, Valensole...), Justum... : récital sous forme de one-man-show,
où l’on fait entendre une voix qui raconte son histoire et enchaîne un lied, un air d’opéra, une
chanson, un tango, avec Christophe Le Hazif (création au théâtre Le Tivoli, Montargis) ou enfin
Leçons en-chantées : spectacle pour enfant sur des mélodies francaises du XXème, avec Chloé Waysfeld
(tournée nationale JMF).
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