I. Le rire dans les démocraties antiques : Athènes et Rome
I.1 L'humour durant l'Antiquité
Dans la mythologie grecque, Momos était le Dieu de la moquerie, du sarcasme et du
ridicule. Ces plaisanteries et mauvais tours auprès des autres Dieux le fit détester des hommes et
des dieux et lui coûtèrent l'exclusion par Zeus de l'Olympe. Une des premières personnes de
l'histoire à s'être intéressée au rire est Hippocrate, un grec, le «père de la médecine». On raconte
qu'il aurait été appelé dans un village pour consulter un homme que les habitants croyaient fou
parce qu'il passait son temps à rire. Après avoir fait son diagnostic, il en a déduit que « rire est
sain » et que tout le monde devrait en faire autant. La traduction du fou rire en grec est
équivalente de la secousse tant il était spontané et expressif.
Les Grecs et les Romains étaient donc de grands joueurs et l'un des trésors que nous avons
conservé de cette époque est le le Philogelos ("l'ami du rire", en grec ancien, rédigé en grec mais
datant de la république romaine), recueil où sont compilées 265 blagues. Si vous imaginez que les
blagues antiques sont d'un autre temps, vous serez étonnés de savoir que la certaines ont gardé un
caractère très actuel :
•Deux hommes se rencontrent dans la rue. Le premier dit : "Tiens, on m'avait annoncé que
vous étiez mort." L'autre, piqué, rétorque : "Bin, vous voyez que je ne le suis pas : je suis bel
et bien vivant." Mais le premier n'en démord pas : "Oui, mais l'homme qui me l'a annoncé
est drôlement plus fiable que vous."
Comme aujourd'hui, il y a des personnages types comme les intellectuels sont les cibles
principales et sont toujours les autres personnages ne manquent pas : les professeurs, les
médecins, les philosophes, les avares, les barbiers, les Thraces de la cité d'Abdera, de Kyme ou de
Sidon (Pourquoi les habitants de ces villes sont-ils l'objet de moqueries ? Mystère... Mais ils sont
l'équivalent de nos Belges) : tous font les frais de ces plaisanteries, dont l'humour réside dans les
stéréotypes, le décalage, l'absurde... Mais d'anciennes blagues ont tendances à ne plus nous
paraître drôles car nous sommes détachés du contexte historique comme par exemple les potins
des consuls ou sur les événements d'ont nous n'avons plus connaissance, d'autres ne sont (et n'ont
jamais été !) drôles, qu'elles contiennent des jeux de mots intraduisibles, les équivalents des
«blagues de Toto» d'aujourd'hui, ou le sens a changé comme par exemple :
•L'ami d'un professeur lui demande de ramener deux esclaves de 15 ans, de son prochain
voyage. Le professeur est d'accord, mais répond : "Si je n'en trouve pas deux jeunes de 15
ans, je t'en ramènerai un de 30 ans."
Aujourd'hui, on la rapproche immédiatement de la bonne vieille blague sexiste, de
l'homme qui cherche à échanger sa femme de 50 ans contre deux jeunettes de 25... Selon Mary
Beard, helléniste à l'Université de Cambridge, ce n'est pas ainsi que les Romains l'entendaient : il
s'agirait plutôt d'une plaisanterie sur la réalité des nombres et leur nature, et la problématique de
l'abstraction du système numéraire.
Aristote au IVème siècle, oppose le rire «bouffon» à l'ironie plus subtile dont il fait l'éloge
dans sa Rhétorique : « Nous avons dit [...], combien il y a d’espèces de plaisanteries, dont une
partie s’accorde avec le caractère de l’homme libre, l’autre non: vous devez donc veiller à n’en
prendre que ce qui est en harmonie avec votre personne. L’ironie est plus digne de l’homme libre
que la bouffonnerie; par le rire, l’ironiste cherche son propre plaisir, le bouffon celui d’autrui.»
A Rome, on rit surtou des despotes. Des défilés sont organisés, durant lesquels on ne se