8 MEDIZIN & PRAXIS «INFECTED WOUNDS»
Les infections retardent la cicatrisation.
Elles sont provoquées par des micro-
organismes pathogènes qui pénètrent dans
la plaie, s'y multiplient et y produisent des
toxines qui agissent à la fois sur les tissus
de la plaie, et sur l'organisme dans son
ensemble. Les approches thérapeutiques
habituelles comprennent l’administration
d’une antibiothérapie systémique et d’un
traitement antiseptique topique. Les agents
actifs utilisés dans ce but peuvent
cependant avoir des effets secondaires sur
les cellules endogènes. L'action du
pansement Cutisorb®Sorbact®en revanche
repose sur le principe de l'interaction
hydrophobe, et nettoie la plaie par un
procédé purement physique sans effets
secondaires. Cet article explique le principe
de fonctionnement et les différents
facteurs intervenant dans la cicatrisation.
Infection des plaies et traitement des plaies
Après avoir colonisé les tissus, les microbes se multiplient dans
la plaie, y provoquent des lésions tissulaires locales dues à la
libération de toxines et d'enzymes, et peuvent également se
propager à la circulation sanguine. L'organisme humain dispose
de multiples mécanismes de défense, notamment le système
du complément, la phagocytose, les peptides antimicrobiens
(défensines) et d'autres structures du système immunitaire
inné. Des anticorps spécifiques dirigés contre les micro-
organismes peuvent également être mobilisés pour réduire le
nombre des germes pathogènes. De nombreuses études ont
montré que des numérations tissulaires élevées de micro-
organismes retardaient la cicatrisation de la plaie. La dose
infectieuse est significativement réduite chez les patients
atteints de diabète sucré, traités par des corticostéroïdes ou
des immunosuppresseurs ou présentant une irrigation sanguine
périphérique altérée. La présence de corps étrangers comme
des sutures chirurgicales réduit également le niveau infectieux.1
Des numérations bactériennes supérieures à 105par gramme
de tissu par ailleurs sain ont montré une corrélation avec une
mauvaise cicatrisation de la plaie et une réduction de la survie
des greffons cutanés.2Par ailleurs, il a été montré, chez les
rongeurs, un nombre réduit de bactéries favorisaient le processus
de cicatrisation des plaies en stimulant la production
d'hydroxyproline de collagène.3, 4
Le traitement initial d'une plaie comprend généralement son
nettoyage mécanique avec de l'eau, des solutions tampons
ou des antiseptiques pour éliminer les bactéries et les débris.5,6
Cette étape est essentielle dans la mesure où les débris
empêchent la cicatrisation de la plaie. L'administration
systémique d'antibiotiques est indiquée si des signes d'infection
sont présents, ou si les bactéries se sont disséminées dans
la circulation sanguine. Des décennies d'expérience ont montré
qu'il est souvent recommandé d'éviter l'utilisation d'antibiotiques
locaux, en raison du risque d'antibiorésistance. Des problèmes
significatifs sont aujourd'hui rencontrés avec un certain nombre
de germes pathogènes présents dans les plaies et
multirésistants aux antibiotiques, notamment Staphylococcus
aureus, Enterococcus spp., Pseudomonas aeruginosa, mais
également les staphylocoques coagulase négatifs et les
streptocoques.7-9 Outre la limitation de l'utilisation des
antibiotiques aux situations pour lesquelles ils sont clairement
indiqués, il existe le besoin d'un procédé nouveau et efficace
pour traiter les infections de plaies. Le principe d'hydrophobie
offre une approche alternative intéressante au traitement des
plaies infectées.
Le principe d'hydrophobie et hydrophobicité
bactérienne
Les lois de la nature imposent qu'un système aura toujours
tendance à évoluer vers l'état énergétique le plus bas possible.
Lorsque deux molécules ayant la capacité de repousser l'eau
(hydrophobes) se rencontrent, les molécules d’eau
environnantes les forcent à former l'une avec l'autre des liaisons
hydrogène. Bien qu'il n'existe aucune force d'attraction entre
les molécules hydrophobes elles-mêmes, elles s'associent par
un processus dénommé interaction hydrophobe. Les molécules
d'eau expulsées entourent les molécules hydrophobes comme
un revêtement, et les maintiennent ensemble (Figure 1).10
De nombreuses études ont montré que les bactéries,
notamment Staphylococcus aureus et les streptocoques du
groupe A - des germes pathogènes fréquemment présents
dans les plaies - et la levure Candida albicans, exprimaient
généralement une importante hydrophobicité à leur surface
cellulaire.11-14 Cette propriété est d'une importance essentielle
pour les micro-organismes dans la mesure où, par exemple,
elle leur permet de se lier aux surfaces des substrats nutritifs.
Plusieurs structures rendant la surface cellulaire hydrophobe
ont été identifiées, notamment les appendices protéiques
piliformes, les fimbriae, d'Escherichia coli qui assurent l'adhésion
à la paroi intestinale.15,16 D'autres structures hydrophobes sont
constituées par l'acide lipoteichoïque de la paroi cellulaire des
bactéries Gram positif13 et les protéines de C. albicans qui ont
été désignées par le terme « hydrophobines ».17
Hydrophobicité de la surface cellulaire comme
trait caractéristique de la virulence
La phase initiale des infections de la peau et des muqueuses
est caractérisée par l'adhésion microbienne aux tissus
traumatisés, assurée par les interactions hydrophobes entre
les microbes et les structures tissulaires de l’hôte ou par des
interactions de charges électriques. Une méthode simple pour
déterminer l'hydrophobicité de la surface cellulaire est le test
d'agrégation au sel.18,19 L'utilisation de ce test a permis de
montrer que les conditions de croissance influençaient
l'expression de l'hydrophobicité de la surface cellulaire : des
conditions de culture reproduisant une plaie, c'est-à-dire en
présence de sérum et en incubation dans une atmosphère à
5% de CO2, ont favorisé l'expression de l'hydrophobicité de la
surface cellulaire de Staphylococcus aureus, des staphylocoques
A. Ljungh
T. Wadström
A. Ljungh, T. Wadström
Service de microbiologie médicale, Université de Lund, Suède
Un nouveau pansement antibactérien sans agent
pharmacologique actif pour le soin des plaies infectées