Université de Montréal Émanation et métaphysique de la lumière

Université de Montréal
Émanation et métaphysique de la lumière dans Vérité et méthode de
Gadamer
par
François Doyon
Département de philosophie
Faculté des arts et des sciences
Thèse présentée à la Faculté des études supérieures
en vue de l’obtention du grade de Docteur
en philosophie
Octobre 2012
© François Doyon, 2012
Université de Montréal
Faculté des arts et des sciences
Cette thèse intitulée :
Émanation et métaphysique de la lumière dans Vérité et méthode de
Gadamer
présentée par :
François Doyon
a été évaluée par un jury composé des personnes suivantes :
……………………………………….
président-rapporteur
Claude Piché
directeur de recherche
David Piché
codirecteur
……………………………………….
membre du jury
……………………………………….
examinateur externe
……………………………………….
représentant du doyen
iii
RÉSUMÉ
Ma thèse montre la présence et le rôle de la métaphysique dans Vérité et
méthode. Elle tente de démontrer que Gadamer s'inspire du néoplatonisme
pour surmonter le subjectivisme de la modernité et propose une
métaphysique à cette fin. Après avoir expliqué comment Gadamer se
réapproprie l’héritage de la pensée grecque pour critiquer la modernité en
situant son interprétation de Platon par rapport à celle de Heidegger, je
montre que Gadamer s’approprie la conception de l’être de Plotin de façon
telle qu’il peut s’y appuyer pour penser l’autoprésentation de l’être dans
l’expérience herméneutique de la vérité. L’art va, pour ce faire, redevenir
sous la conduite du néoplatonisme source de vérité. Gadamer redonne en
effet une dignité ontologique à l’art grâce à la notion d’émanation, notion
qui permet de penser qu’il y a une présence réelle du représenté dans sa
représentation, celle-ci émanant du représenté sans l’amoindrir, mais lui
apportant au contraire un surcroît d’être. La notion d’émanation permet
ensuite à Gadamer d’affirmer le lien indissoluble qui unit les mots aux
choses. En effet, la doctrine du verbe intérieur de Thomas d’Aquin
implique ce lien que Platon avait occulté en réduisant le langage, comme
la logique, à n’être qu’un instrument de domination du réel. L’utilisation
de la notion néoplatonicienne d’émanation permet donc de dépasser la
philosophie grecque du logos et de mieux rendre compte de l’être de la
langue. Je montre ensuite comment Gadamer radicalise sa pensée en
affirmant que l’être qui peut être compris est langage, ce qui veut dire que
l’être, comme chez Plotin, est autoprésentation de soi-même. Pour ce faire,
Gadamer rattache l’être du langage à la métaphysique néoplatonicienne
de la lumière. Les dernières pages de Vérité et méthode rappellent en effet
que la splendeur du beau est manifestation de la vérité de l’être. On
rattachera alors le concept de vérité herméneutique à ses origines
métaphysiques. La vérité est une manifestation de l’être dont on ne peut
avoir part que si on se laisse submerger par sa lumière. Loin d’être affaire
de contrôle méthodique, l’expérience de la vérité exige de se laisser
posséder par ce qui est à comprendre. Je démontre ainsi que Gadamer a
découvert dans le néoplatonisme des éléments permettant de s’opposer à
la dictature du sujet moderne, dictature qui doit être renversée, car elle
masque le réel rapport de l’homme à la vérité en faisant abstraction de la
finitude de son existence concrète. La critique du subjectivisme moderne
sous la conduite du néoplatonisme ouvre ainsi le chemin vers une
métaphysique de la finitude.
MOTS CLÉS
GADAMER – HEIDEGGER – HERMÉNEUTIQUE – MÉTAPHYSIQUE –
NÉOPLATONISME – PLOTIN – THOMAS D’AQUIN
iv
ABSTRACT
My thesis shows the presence and role of metaphysics in Truth and Method.
It attempts to show that Gadamer builds upon Neoplatonism to overcome
the subjectivism of modernity and offers a metaphysics in this regard. It
explains how Gadamer reclaims the legacy of Greek thought to criticize
modernity, placing his interpretation of Plato compared to that of
Heidegger, I argue that Gadamer appropriates Plotinus’ concept of being
in such a way that it may lean to think of self-presentation of being in the
hermeneutic experience of truth. In that sense, art is going to be a source
of truth under the leadership of Neoplatonism. Gadamer gives an
ontological dignity to art through the concept of emanation, a concept
which suggests that there is a real presence of the represented in its
representation, the latter derived from the represented without weakening
it, providing it instead with more being. The concept of emanation then
gives Gadamer an opportunity to affirm the indissoluble bond that unites
words and things. Thomas Aquinas’ doctrine of the inner word indeed
implies the link that Plato had covered up by making language, like logic,
a mere domination instrument of the real. The use of the Neoplatonic
concept of emanation makes it possible to overcome the logos of Greek
philosophy and to better account for the being of language. I then show
how Gadamer radicalized his thinking as he says that the being that can
be understood is language, which means that being, as in Plotinus, is self-
presentation. To this end, Gadamer links the being of language to
Neoplatonic metaphysics of light. The last pages of Truth and Method recall
indeed that the splendor of beauty is an expression for the truth of being.
The concept of hermeneutic truth is then connected to its metaphysical
origins. Truth is a display for the being in which we can partake only if
one gets overwhelmed by its light. Far from being a matter of methodical
control, the experience of truth requires to be possessed by what must be
understood. In this way, I demonstrate that Gadamer found in
Neoplatonism elements to challenge the dictatorship of the modern
subject, which must be reversed because it hides the real relationship of
man with truth by ignoring the finitude of its concrete existence. The
criticism of modern subjectivism led by Neoplatonism opens the way to a
metaphysics of finitude.
KEY WORDS
GADAMER – HEIDEGGER – HERMENEUTICS – METAPHYSICS
NEOPLATONISM – PLOTINUS – THOMAS AQUINAS
v
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION ......................................................................................................1
I – HERMÉNEUTIQUE DE LA FACTICITÉ ET MÉTAPHYSIQUE................................15
II – LA DOCTRINE DE HEIDEGGER SUR PLATON ................................................27
1. Platon en 1924 ............................................................................................28
2. Platon en 1927 ............................................................................................33
3. Platon depuis 1931.....................................................................................37
4. La critique de Friedländer........................................................................53
5. Conclusion..................................................................................................54
III – L’INTERPRÉTATION PHÉNOMÉNOLOGIQUE DE PLATON............................59
1. L’art de comprendre Platon .....................................................................62
2. La méthexis et le problème du chorismos .................................................73
3. Le savoir dialectique .................................................................................82
4. L’âme de la nature.....................................................................................89
5. Conclusion..................................................................................................94
IV – LE PROLONGEMENT DE LA PENSÉE DE PLATON DANS CELLE DE
PLOTIN.................................................................................................................100
1. La dialectique de l’Un et du Multiple...................................................103
2. La dunamis de l’être .................................................................................104
3. Conclusion................................................................................................107
V – LES THÉORIES ANTIQUES ET MÉDIÉVALES DE LART DANS LA PREMIÈRE
PARTIE DE VÉRITÉ ET MÉTHODE..........................................................................109
1. La phénoménologie du jeu esthétique..................................................121
2. La théorie aristotélicienne de la tragédie .............................................135
3. La réhabilitation de l’image et de l’allégorie .......................................143
4. Conclusion................................................................................................156
VI – LA PENSÉE CHRÉTIENNE DANS LA TROISIÈME PARTIE DE VÉRITÉ ET
MÉTHODE .............................................................................................................161
1. L’origine métaphorique des concepts...................................................166
2. Le mépris platonicien du langage.........................................................169
3. La dévalorisation du verbe extérieur chez Augustin.........................177
4. L’unité du mot et de la chose dans la doctrine du verbe intérieur
de Thomas d’Aquin.................................................................................185
5. Conclusion................................................................................................201
VII – LA THÈSE DE GADAMER SUR LÊTRE........................................................205
1 / 334 100%

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