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RÉSUMÉ
Ma thèse montre la présence et le rôle de la métaphysique dans Vérité et
méthode. Elle tente de démontrer que Gadamer s'inspire du néoplatonisme
pour surmonter le subjectivisme de la modernité et propose une
métaphysique à cette fin. Après avoir expliqué comment Gadamer se
réapproprie l’héritage de la pensée grecque pour critiquer la modernité en
situant son interprétation de Platon par rapport à celle de Heidegger, je
montre que Gadamer s’approprie la conception de l’être de Plotin de façon
telle qu’il peut s’y appuyer pour penser l’autoprésentation de l’être dans
l’expérience herméneutique de la vérité. L’art va, pour ce faire, redevenir
sous la conduite du néoplatonisme source de vérité. Gadamer redonne en
effet une dignité ontologique à l’art grâce à la notion d’émanation, notion
qui permet de penser qu’il y a une présence réelle du représenté dans sa
représentation, celle-ci émanant du représenté sans l’amoindrir, mais lui
apportant au contraire un surcroît d’être. La notion d’émanation permet
ensuite à Gadamer d’affirmer le lien indissoluble qui unit les mots aux
choses. En effet, la doctrine du verbe intérieur de Thomas d’Aquin
implique ce lien que Platon avait occulté en réduisant le langage, comme
la logique, à n’être qu’un instrument de domination du réel. L’utilisation
de la notion néoplatonicienne d’émanation permet donc de dépasser la
philosophie grecque du logos et de mieux rendre compte de l’être de la
langue. Je montre ensuite comment Gadamer radicalise sa pensée en
affirmant que l’être qui peut être compris est langage, ce qui veut dire que
l’être, comme chez Plotin, est autoprésentation de soi-même. Pour ce faire,
Gadamer rattache l’être du langage à la métaphysique néoplatonicienne
de la lumière. Les dernières pages de Vérité et méthode rappellent en effet
que la splendeur du beau est manifestation de la vérité de l’être. On
rattachera alors le concept de vérité herméneutique à ses origines
métaphysiques. La vérité est une manifestation de l’être dont on ne peut
avoir part que si on se laisse submerger par sa lumière. Loin d’être affaire
de contrôle méthodique, l’expérience de la vérité exige de se laisser
posséder par ce qui est à comprendre. Je démontre ainsi que Gadamer a
découvert dans le néoplatonisme des éléments permettant de s’opposer à
la dictature du sujet moderne, dictature qui doit être renversée, car elle
masque le réel rapport de l’homme à la vérité en faisant abstraction de la
finitude de son existence concrète. La critique du subjectivisme moderne
sous la conduite du néoplatonisme ouvre ainsi le chemin vers une
métaphysique de la finitude.
MOTS CLÉS
GADAMER – HEIDEGGER – HERMÉNEUTIQUE – MÉTAPHYSIQUE –
NÉOPLATONISME – PLOTIN – THOMAS D’AQUIN