
 
 
Les prépositions fi et bi de l’arabe marocain comparées à la préposition en du français 
Nizha Chatar-Moumni 
MoDyCo (Modèles, Dynamiques, Corpus), UMR 7114 
Université Paris Descartes, CNRS, Université Paris Ouest 
 
 
L’étude que nous proposons s’inscrit pour partie dans le cadre d’un travail d’équipe (MoDyCo) sur l’identité de la 
préposition en du français Il s’agit notamment d’en étudier les correspondants dans d’autres langues.  
En peut être rendue en arabe marocain par la préposition fi et/ou par la préposition bi (1) et (2). Elle peut également 
ne pas correspondre à une structure prépositionnelle (3) et (4) : 
 
1.  ža-t  f-/b-eṭ-ṭumubil        2.  ka-i-ˀaman  f-/b-Allāh 
  venir-elle.acc
  en/avec-la-voiture          pr-il.inac-croire  en/à Dieu 
  ‘Elle est venue en voiture.’          ‘Il croit en Dieu.’ 
 
3.  ḥmed ¿arqan            4.  ṭla¿-ø l-fuq 
  Ahmed suant              monter-il.acc le-haut 
  ‘Ahmed [est] en sueur.’              ‘Il est monté en haut.’ 
 
Dans un premier temps, nous décrivons les représentations sémantico-cognitives configurées par les prépositions 
de l’arabe marocain fi et bi dans les contextes où elles peuvent être rendues par le français en. Traditionnellement, on 
considère que fi – le plus souvent traduite par dans en français – exprime la  « localisation sans mouvement» et  que 
bi - traduite par par, avec, au moyen de en français – exprime « le moyen l’accompagnement ou la manière » (Caubet, 
1993, I : 205-6). Nous montrons ici que la localisation configurée par fi peut être dynamique et nous recourons à la 
notion de contrôle (Guillaume, 1919-1975 ; Melis, 1983) pour analyser bi.  
Nous considérons, dans un deuxième temps, des contextes du type de (5) et (6) ci-dessous :  
 
5.  ka-i-qra  l-ktab/ktab  6.
ka-i-qra  f-l-ktab/ f-ktab 
  pr-il.inac-lire  le-livre/livre    pr-il.inac-lire  dans-le livre/ dans livre 
  ‘Il lit/il est en train de lire le livre/un livre.’
  ‘Il lit/ il est train de lire le livre/un livre.’ 
 
où l’unité fi en (6) est le plus souvent analysée comme un marqueur casuel (marquage (indirect) de la fonction objet par 
opposition au marquage direct de cette même fonction (5)), et/ou comme un marqueur aspectuel, marquant le progressif. 
En  effet,  dans  sa  description  du  Parler  de  l’arabe  de  Djidjelli  (Algérie),  Philippe  Marçais  note  que  fi  exprime  « la 
continuité de l’action, sa répétition, ou encore l’intensité de l’action qui s’exerce sur plusieurs objets (…)» (1952 :511). 
De  même,  pour  Harrel  (1962-2004:229),  en  arabe  marocain,  fi  «before  the  direct  object  of  a  transitive  verb  indicates 
continuity  or  incompletness  of  action».  Brahim  (2007 :104)  considère,  quant  à  lui,  cette  préposition  comme  le  « seul 
moyen d’exprimer le progressif des verbes transitifs en arabe tunisien. » Quant à Lazard (1994) il analyse ce phénomène 
comme « un type particulier de marquage différentiel de l’objet » (p. 207) : le syntagme prépositionnel introduit par fi est 
un « complément partitif » qui confère [à l’inaccompli] la valeur progressive. » (p. 208). Par ailleurs, Brahim (2007 :95) 
affirme,  pour  l’arabe  tunisien,  que  le  « marquage  prépositionnel  locatif  du  second  actant  est  de  règle  quand  le  verbe 
transitif est à l’inaccompli (forme dite ‘préfixée’) de valeur progressive », mais que « le marquage locatif se trouve exclu 
quand  le  verbe  est  à  l’accompli  (…)  ou  à  l’impératif»  (p.96).  Un  exemple  comme  (7)  ci-dessous  ne  serait  donc  pas 
possible en arabe maghrébin :  
 
7.  *qra-t  f-l-ktab   
  lire-elle.acc  dans-le-livre   
  ‘Elle a lu le livre.’   
 
Nous montrons ici qu’en arabe marocain, la préposition fi localise un ‘objet’ ou ‘cible’ (Vandeloise, 1986), que nous 
notons  X,  à  l’intérieur  d’un  domaine  borné,  noté  D.  D  peut  être  spatial  ou  temporel.  La  localisation  opérée  par  fi  est 
statique ou dynamique; X peut n’occuper qu’un point de l’intervalle D ou le parcourir entièrement. Dans l’exemple (6) ci-
dessus, l’information sur la façon dont X occupe D est fournie par l’unité ka. Dans un contexte du type de (7), l’accompli 
présente le procès comme achevé ou comme un état résultatif, mais ne le ‘quantifie’ pas. Cette information, nécessaire à 
la ‘valence’ de fi doit être apportée de l’extérieur, par exemple par un complément de durée (8) : 
 
8.  qra-t  f-l-ktab  sa
¿
t-in/ḥetta sala-t-u 
  lire-elle.acc  dans-le-livre  heure-duel/jusque terminer-elle.acc-le 
  ‘Elle a lu le livre pendant deux heures/ jusqu’à ce qu’elle l’ait terminé 
 
                                                             
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 Abréviations : acc : accompli ; inacc: inaccompli ; pr. : présent.