L’obéissance de Mgr Lefebvre
Alors que le Motu Proprio Summorum Ponticum vient de reconnaître que jamais le Missel de saint Pie V n’a été
abrogé, il est juste de se remémorer ce que disait Mgr Marcel Lefebvre dont la délité à la messe de toujours a été
qualiée de désobéissance.
« Cette messe nest pas interdite et elle ne peut pas l’être. (…) Si un prêtre était censuré, voire excommunié à ce
titre (c’est-à-dire parce qu’il dit la messe traditionnelle), la condamnation serait absolument invalide. (…) Nous pou-
vons la dire en toute tranquillité et les dèles y assister sans la moindre arrière pensée, sachant au surplus qu’elle est
la meilleure manière d’entretenir leur foi ». (Lettre ouverte aux catholiques perplexes, p. 191-192)
« Nous avons à choisir entre, je dirais, une apparence d’obéissance – car le Saint-Père ne peut pas nous demander
d’abandonner notre foi, cela est absolument impossible – et la conservation de notre foi. Eh bien ! nous choisissons
de ne pas abandonner notre foi ». (Ibid. p. 178)
« Nous ne voulons pas nous séparer de l’Eglise ; au contraire, nous voulons que l’Eglise continue ! Une Eglise qui
rompt avec son passé, ce nest plus l’Eglise catholique. (…) Nous sommes certains qu’un jour la vérité reviendra. Cela
ne peut pas être autrement, le Bon Dieu n’abandonne pas son Eglise ». (Homélie, Genève, 15 mai 1978)
Abbé Alain Lorans
Citations extraites de La Messe de toujours par Mgr Marcel Lefebvre, Clovis éd.
Editorial
Motu Proprio
Summorum Ponticum
2
le numéro
N° 158
13 juillet 2007
SOMMAIRE
DOSSIER SPECIAL MOTU PROPRIO
Réactions et commentaires des évêques à travers le monde ....................................................................2
Le Motu Proprio et les traditionalistes ......................................................................................3
Informations déformations ...............................................................................................4
Parmi les réactions hostiles à linstauration du Motu Proprio .....................................................................5
DOCUMENTS
Motu Proprio Summorum Pontificum .......................................................................................7
Lettre de Benoît XVI aux évêques ........................................................................................10
Communiqué de presse du Supérieur Général de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
Lettre du Supérieur Général de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X aux fidèles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .12
Numéro spécial
DICI Nº 158
2
13 juillet 2007
LE JOURNAL
dossier spécial motu proprio
Réactions et commentaires des évêques à travers le monde
Au Vatican, selon une dépê-
che de lAFP du 7 juillet, le Père
Federico Lombardi a déclaré :
« Benoît XVI n’entend accomplir
aucune volution en ce qui concer-
ne la liturgie daujourd’hui novée
par le concile Vatican II, qui conti-
nuera à être suivie par la grande majo-
rité des dèles ». « Il n’impose aucun
retour en arrière, il ne veut aucun af-
faiblissement de l’autorité du Concile
ni de lautorité et de la responsabilité
des évêques », assure le porte-paro-
le du Vatican. Il souligne cependant
que la décision du pape comporte
« un important message » pour ceux
qui se trouvent à laise avec la ma-
nière actuelle de célébrer la messe :
« la liturgie doit être brée avec
soin et respect parce qu’à travers elle
on communique avec le mystère de
Dieu ». En eet, Benoît XVI a déplo-
dans sa lettre d’accompagnement
du Motu Proprio « certaines for-
mations de la liturgie à la limite du
supportable » auxquelles a donné lieu
la liturgie moderne au détriment du
caractère « sacré » de la messe.
En France, dans un entretien
à La Croix du 7 juillet, le cardinal
Jean-Pierre Ricard se veut, lui
aussi, rassurant pour les ptres et
les fidèles de la messe de Paul VI.
A Michel Kubler qui lui demande
s’il y a un risque de bi-ritualisme de
fait, il déclare : « Benoît XVI répond
que ces deux formes ne sont pas en
concurrence l’une de lautre (même
si, idéologiquement, cela prend par-
fois des allures de manifeste). C’est
pour lui laaire d’une minorité, et
il ne voit pas que l’usage de l’ancien
missel puisse connaître une extension
très grande.
« Je le pense également. J’ai envie
de dire aux catholiques, et en parti-
culier aux prêtres : ne vous inqu-
tez pas ! Rien n’est chandans vo-
tre façon de célébrer. Le missel de
1970, né du Concile, reste la norme.
Simplement, acceptons que certains
puissent pratiquer aussi selon une
autre forme, qui a été en vigueur du-
rant des siècles.
« Il pourrait cependant y avoir
danger si la demande de célébrer se-
lon lancien missel s’accompagnait,
dans les paroisses qui en acceptent le
principe, de tout un mode particulier
de vie en Église, coupé de l’ensemble
de la communauté pour la catéchè-
se, l’animation des jeunes, la forma-
tion chrétienne, etc. Là, je craindrais
qu’on ne recrée des chapelles qui ris-
quent de se refermer sur elles--
mes ». Larchevêque de Bordeaux in-
dique que l’autorisation de la messe
traditionnelle ne doit pas aller jus-
qu’à lorganisation d’une vie parois-
siale avec ses catéchismes, ses mou-
vements de jeunes…, sous peine de
diviser les fidèles. Larchevêque de
Paris va dans le même sens.
En effet, Mgr André Vingt-
Trois, dans une lettre du 6 juillet
aux prêtres de l’archidiocèse de Paris,
écarte la possibilide paroisses per-
sonnelles, pourtant prévues par le
Motu Proprio, en résumant ainsi le
document romain : « - Il n’y a aucu-
ne mesure gérale pour remettre
en cause la « forme ordinaire » de la
liturgie paroissiale. - Nous sommes
invités à améliorer encore la qualité
liturgique de nos célébrations y com-
pris quand cest pastoralement pos-
sible avec des parties latines de l’Or-
dinaire de la messe. - Les prêtres qui
adhèrent à l’usage ancien doivent re-
connaître « la valeur et la sainteté »
de la messe selon le Missel de Paul
VI pour être autorisés à célébrer se-
lon le Missel de 1962. (…) Je n’ouvrirai
pas de paroisses personnelles dans le
diocèse de Paris car jestime que des
dèles qui demandent la célébration
selon le Missel de 1962 ne sont pas
des paroissiens ‘à part’ ».
Le cardinal Philippe Barbarin,
archevêque de Lyon, a déclaré au
quotidien Le Monde du 7 juillet que
« les risques de tensions entre dè-
les étaient els ». « S’il y a des dif-
ficultés, il est à craindre que des
prêtres quittent leurs fonctions », a
armé à l’agence œcuménique ENI
Mgr Jean-Louis Papin, évêque de
Metz.
En Autriche, Mgr Christoph
Schönborn, archevêque de Vienne
et président de la Conférence épisco-
pale, Mgr Alois Kothgasser, arche-
vêque de Salzbourg, ainsi que l’évê-
que de Graz, Mgr Egon Kapellari,
indiquent - dans une déclaration à
l’agence Kathpress, le 7 juillet - que le
Motu Proprio constitue « une contri-
bution pour surmonter les clivages
dans l’Eglise et puiser plus profondé-
ment dans les sources du mystère du
Christ ». Ce document est également
une « invitation à une utilisation plus
large du latin en tant que langue ma-
ternelle de la liturgie romaine », ajou-
te la déclaration.
Au Canada, dans Le Droit du
8 juillet, l’Archevêque dOttawa,
Mgr Terrence Prendergast, a fait
bon accueil à la lettre du pape Benoît
XVI : « Le geste du pape conrme à
la fois les enseignements du conci-
le Vatican II sur la liturgie, mais en
me temps il cherche à favoriser
le retour à la vie active dans l’Église
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des personnes attirées par la messe
telle qu’elle était lébrée avant 1970,
soit en latin. Parmi ces personnes, on
trouve tant des catholiques plus âgés,
qui se sont sentis aliénés de l’Église
depuis les changements dans la façon
de célébrer la messe, que de jeunes
catholiques, qui recherchent un culte
témoignant de la transcendance ».
Le Motu Proprio et les traditionalistes
Dans un article paru le dimanche
8 juillet, le journaliste du Corriere
della Sera, Vittorio Messori, p-
sente la action de Mgr Bernard
Fellay au Motu Proprio publié
la veille, reprenant les propos du
Surieur géral de la Fraternité
Saint-Pie X : « « Cest un jour vrai-
ment historique. Nous exprimons à
Benoît XVI notre profonde gratitu-
de. Son document est un don de la
grâce. Ce n’est pas un pas, c’est un
saut dans la bonne direction ». Pour
le Supérieur lefebvriste, la « norma-
lisation » de la messe « non de saint
Pie V », pcise-t-il, « mais plutôt de
l’Eglise de toujours », est « un acte de
justice, est une aide surnaturelle ex-
traordinaire en un moment de grave
crise ecclésiale ». (…)
Et l’auteur dEntretien sur la foi
avec le cardinal Ratzinger de com-
menter : « Pour arriver à ce résultat,
la résistance de Mgr Lefebvre et des
siens a été cisive, déjà le cardinal
Joseph Ratzinger pensait avoir une
dette envers ces frères qui expri-
maient un malaise partagé, au moins
en partie. Mgr Fellay admet certes
le rôle de la Fraternité, mais regarde
au-delà : « Oui, la Providence nous a
permis d’être des instruments pour
aiguillonner l’Eglise de Rome et ar-
river jusqu’à ce jour. Mais nous som-
mes aussi conscients de n’être que
le thermotre indiquant une f-
vre qui exige des remèdes adéquats.
Ce document est une étape fonda-
mentale dans un parcours qui pourra
maintenant s’accélérer, nous les-
rons avec des perspectives réconfor-
tantes, également sur la question de
l’excommunication ».
« Donc, aucune désillusion ? », de-
mande Vittorio Messori. « Je di-
rais non, même si certains passages
de la lettre d’introduction nous sem-
blent moins satisfaisants, l’on voit
bien les exigences de la politique ec-
clésiastique ». En tous cas le fait est
objectif et Mgr Fellay et les siens en
sont pleinement conscients : les qua-
rante années d’opposition, malgré des
aspects quelquefois durs et critiqua-
bles, n’ont pas été inutiles. (…)
« Les protestations de certains
évêques ? », sinterroge le journa-
liste italien avant de répondre :
« Certains font remarquer par d’in-
quiétantes projections dans l’avenir,
que dici moins de vingt ans un tiers
des diocèses de l’Occident y com-
pris la France, qui est celle qui dé-
sapprouve le plus l’initiative du pape
- devra être supprifaute de clercs.
Dicile, donc, pour des évêques ré-
duits à n’avoir plus qu’un soue de
vie, de faire la grosse voix contre
ceslefebvristes qui, au contraire
jouissent d’un ux ininterrompu de
vocations ». (…)
Dans un entretien accordé à Il
Giornale du 8 juillet, le cardinal
Castriln Hoyos déclare : « Avec
ce Motu Proprio, on ouvre la porte
pour un retour à la pleine commu-
nion de la Fraternité Saint-Pie X. Si
après cet acte, ce retour n’a pas lieu,
je ne saurai pas comprendre. Le car-
dinal colombien précise toutefois
que le document pontical n’a « pas
été fait pour les lefebvristes », mais
« parce que le pape est convaincu de
la nécessité de souligner qu’il y a une
continuité dans la tradition et, que
dans l’Eglise, on ne procède pas par
fractures ».
Dans le mensuel 30 Giorni de
juillet, le président de la Commission
Ecclesia Dei ajoute que le pape a réaf-
rmé que « le mode habituel de célé-
bration de la messe est celle du Novus
Ordo (Nouveau Missel) ». Ainsi les
partisans de Mgr Lefebvre « ne peu-
vent nier ni la valeur ni la validité du
Novus Ordo », déclare-t-il. « Cela
doit être clair », ajoute le cardinal
Castrillón pour qui le décret n’est
« nullement un retour au passé ».
Il révèle par ailleurs que des
« milliers de lettres étaient arrivées
à Rome pour demander la liberté de
pouvoir assister à la messe tridenti-
ne et » que « Jean-Paul II déjà voulait
préparer un Motu Proprio semblable
à celui qui est publié aujourd’hui ».
Le cardinal Jean-Pierre Ricard,
dans un entretien accorà La Croix
du 7 juillet, pond à la question de
savoir si les revendications des tra-
ditionalistes sont satisfaites : « Cest
vrai que la porte est largement ouver-
te… Mais le Motu Proprio xe aussi
des conditions à cette libéralisation.
Les prêtres voulant célébrer selon le
missel de 1962 devront reconnaître
les richesses de la réforme liturgique
conciliaire. Ils ne pourront pas exclu-
re délibérément de célébrer eux-mê-
mes selon le missel dit de Paul VI
et l’on peut se demander alors ce que
devient l’usage exclusifde l’ancienne
forme du rite, concédé par exemple à
certains instituts ».
A la question : « La liturgie est-elle
le bon moyen pour refaire l’uniavec la
mouvance lefebvriste ? », le président de
la Conférence épiscopale de France
arme : « Le pape a voulu répondre
dabord à une demande touchant à
la liturgie : il a souhai permettre
largement une célébration selon l’an-
cien missel à des personnes qui ne
rejettent pas pour autant le conci-
le Vatican II. Mais il sait aussi que
beaucoup d’autres questions font pro-
blème aux membres de la Fraternité
Saint-Pie X, qui ne sont pas glées
par ce Motu Proprio : lengagement
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catholique dans le mouvement œcu-
ménique et le dialogue interreli-
gieux, la liber religieuse, etc. Ce
document est donc un pas, mais nous
ne sommes pas au bout de la route.
Benoît XVI sait qu’il faudra repren-
dre la discussion sur tous ces autres
points : il ne bradera rien du Concile,
et on le voit bien à l’importance qu’il
ne cesse d’attacher à ces domaines. Il
ne lâchera rien là-dessus ».
Dans un entretien du 7 juillet, réa-
lisé par lagence I.Media et l’heb-
domadaire fraais Famille ch-
tienne, repris par l’Apic, le cardinal
Ricard apporte les précisions sui-
vantes : « D’une part, le Saint-Père
s’adresse à ceux qui ont apprécié len-
richissement apporté par la réforme
liturgique. Il leur demande d’accepter
que le trésor de l’Eglise soit beaucoup
plus large que ce qu’ils pensent perce-
voir, et qu’on puisse aujourd’hui être
nourri par la messe tridentine, qui a
soutenu la vie chrétienne des dèles
pendant des siècles. Deuxièmement,
le pape vient dire aux autres, attachés
au missel de 1962, qu’ils doivent re-
connaître les bienfaits de la réforme
conciliaire. Il n’y a aucune contradic-
tion entre l’une et l’autre des formes
du missel romain. Le Saint-re com-
prend le Concile comme une conti-
nuité, un enrichissement et non pas
comme une rupture. Il leur rappelle
qu’on ne peut pas nier la gitimité
du missel de 1970 au nom de l’atta-
chement au missel de 1962 : « pour
vivre la pleine communion, écrit-il
aux évêques, les prêtres des commu-
nautés qui adhèrent à l’usage ancien
ne peuvent pas non plus, par principe,
exclure la célébration selon les nou-
veaux livres ». Cette disposition me
semble incompatible avec les statuts
de divers instituts dans lesquels gu-
rait l’utilisation exclusive de la forme
tridentine. Je crois qu’on ne peut plus
dire les choses ainsi après le Motu
Proprio ». Il semble ici que les prêtres
de la Fraternité Saint-Pie X (exclus des
dispositions du Motu Proprio dans son
article 5 § 4 : « Les prêtres utilisant le
Missel du bienheureux Jean XXIII
doivent être idoines et non empêchés
par le droit ») soient paradoxalement les
seuls à pouvoir se prévaloir de l’usage ex-
Informations déformations
Les journalistes savent écrire, c’est certain. Mais savent-ils lire ? C’est ce qu’on peut parfois
se demander. Ainsi dans Le Figaro du 9 juillet, Sophie de Ravinel, sous le titre Certains
catholiques remercient le pape, d’autres Mgr Marcel Lefebvre… : « On
est moins nuancé chez les lefebvristes, séparés de Rome. Plutôt que de remercier
le Pape, on préfère à la suite du responsable de la Fraternité Saint Pie X, Mgr Bernard
Fellay – ‘remercier aujourd’hui Mgr Marcel Lefebvre de nous avoir
maintenus dans cette délité à la messe de toujours au nom de la vraie obéissance contre tous
les abus de pouvoir’ ».
La journaliste du Figaro cite bien la lettre de Mgr Fellay aux dèles, mais « oublie »
de relever dans cette lettre quelques lignes plus loin : « C’est bien pourquoi nous
continuerons de prier pour le pape an quil demeure ferme après l’acte
courageux qu’il vient de poser ». Elle « oublie » surtout de citer le communiqué remis à la presse
qui disait : « Pour ce grand bienfait spirituel, la Fraternité Saint-Pie X exprime
au Souverain Pontife sa vive gratitude ».
Egalement Gérard Leclerc, dans La France catholique du 9 juillet, écrit : « On
peut même trouver du côté de la Fraternité Saint-Pie X des gages de bonne volonté, Mgr Fellay
allant jusqu’à se féliciter de la perspective les deux rites ‘se
féconderaient mutuellement’. Sans doute de multiples obstacles s’opposent
encore à une pleine réconciliation avec l’aile traditionaliste la plus engagée dans la contestation
de Vatican II. Mais comment ne pas tenir pour très positive l’adhésion - au moins dans
l’ordre des vœux de réalisation - à l’herméneutique fermement dénie
par le Pape pour la réception du concile. Vatican II ne saurait être vécu
comme une rupture, il s’inscrit dans la continuité organique de la Tradition depuis les origines
apostoliques ».
se trouvent ces félicitations et cette adhésion ? La citation de la lettre de Mgr Fellay
est incomplète, il faut aller jusqu’au bout du paragraphe : « On peut y voir aussi (dans la lettre
d’accompagnement du pape au Motu Proprio) une expression de la réforme de la réforme
souhaitée par le pape où, comme il le dit lui-même dans cette lettre la messe de saint Pie V
et celle de Paul VI se féconderaient mutuellement. En tout cas, il y a chez Benoît XVI le
désir certain de réarmer la continuité de Vatican II et de la
messe qui en est issue, avec la Tradition bimillénaire. Cette négation
d’une rupture causée par le dernier concile - déjà manifestée dans
le discours à la curie du 22 décembre 2005 - montre combien l’enjeu du
débat entre Rome et la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X
est essentiellement doctrinal. C’est pourquoi il faut que l’indéniable avancée
liturgique opérée par le Motu Proprio soit prolongée - après le retrait du décret d’excommunication
- par des discussions théologiques ».
Et pour nir, ces deux titres qui montrent que les journalistes ne voient pas la même chose.
La Croix du 9 juillet titre « Les traditionalistes évitent le triomphalisme », précisant : « Ceux
qui, depuis quarante ans contestaient frontalement Vatican II obtiennent satisfaction sur la
liturgie, leur première revendication, mais ils restent prudents ». Alors que Le Monde du
10 juillet, sous le titre « Les catholiques traditionalistes confortés par le décret papal », écrit :
« Après le Motu Proprio de Benoît XVI autorisant la messe en latin, les schismatiques achent la
tranquille assurance de ceux qui ont eu raison avant l’heure ».
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clusif de la messe tridentine. Cette « exclu-
sion » qu’ils contestent en droit leur garan-
tit l’exclusivité en fait.
A la question : « En publiant ce do-
cument, le pape pense-t-il aussi aux dè-
les de Mgr Lefebvre ? », l’archevêque
de Bordeaux pond : « Ce n’est dit
explicitement dans aucun des deux
textes. Mais dune manière plus
large, Bent XVI pense aussi à la
FraterniSaint-Pie X. Il nous l’a dit
de vive voix (lors de la présentation
du Motu Proprio le 17 juin à quelques
cardinaux, N.D.L.R.). Mais, à mon
avis, ce Motu Proprio leur fera dif-
ficulté, en particulier pour tout ce
qui touche l’autoride la réforme
liturgique que les prêtres et les dè-
les de cette fraternité refusent de re-
connaître ».
On comprend que Mgr Fellay,
dans sa lettre aux dèles du 7 juillet,
ait tenu à souligner le « désir certain
(de Benoît XVI) de réaffirmer la
continuide Vatican II et de la mes-
se qui en est issue avec la Tradition
bimillénaire ». Cette négation d’une
rupture causée par le dernier concile
- déjà manifestée dans le discours à
la curie du 22 décembre 2005 – a été
contestée par la Fraternité Saint-Pie
X, et c’est bien là que doit se situer
un débat doctrinal, après le retrait du
décret d’excommunication qui frappe
les évêques de la Fraternité.
Parmi les réactions hostiles à l’instauration du Motu Proprio
Dans Le Monde du 7 juillet,
Henri Tincq se fait fort d’expliquer
l’attrait de la France pour la tradition
par une analyse de la situation plus
politique que religieuse, car « avec
les traditionalistes, le rite n’est ja-
mais loin de la politique ». Face aux
« nostalgiques du rite à lancienne »
qui tiennent «la Rome de tendan-
ce néoprotestante et néomoderniste’
et des papes comme Paul VI et Jean
Paul II pour des fossoyeurs de la tra-
dition catholique », le journaliste du
Monde se pose en défenseur de ceux
« qui, depuis le XIXe, ont tenté de
mettre le catholicisme au diapason
de son temps ». - Il nous semblait que
l’Eglise devait être avant tout au diapason
de son fondateur, le Christ, le même hier,
aujourd’hui et pour les siècles ! Et que dire
d’une Eglise au diapason d’un monde mo-
derne en crise ? Elle ne peut être elle-même
qu’en crise !
« C’est pourquoi, écrit Tincq,
l’Eglise de France, dont les prêtres-
ouvriers et les tologiens davant-
garde avaient été soumis au silence
par Pie XII, était prête à accueillir
le prodigieux renouvellement de
Vatican II. Et les mêmes qui avaient
été sanctionnés sont devenus les ins-
pirateurs des réformes, ont chan
le regard des catholiques sur le mon-
de moderne, permis un fonctionne-
ment plus collégial de l’Eglise, admis
le droit de chaque homme à la liberté
de religion et de conscience, ouvert
une ère de dialogue avec les autres
confessions chrétiennes, avec les juifs
et les musulmans. »
Et de conclure : « Personne ne re-
prochera au pape Bent XVI de vou-
loir tenter de réintégrer ses « brebis
perdues », mais comment ne pas
redouter qu’une fraction, même
minoritaire, de traditionalistes - la
« Résistance catholique » - ne tente
de reconquérir des positions de pou-
voir à Rome, dans le clergé français
et d’inéchir le meilleur des op-
tions catholiques des quarante
dernières anes ? »
Même son de cloche dans l’édito-
rial en ligne de Golias qui titrait le
7 juillet : Le retour de la messe en latin.
« Lempêcheur de croire en rond », tel
qu’il se dénit lui-même, livre l’ana-
lyse critique de Christian Terras
et Romano Libero qui voient dans
le Motu Proprio la volonté armée
« d’un catholicisme pur et dur que
le Pape impose à tous » : « Le texte
se veut une condamnation d’une ra-
re dureté des « excès » qui ont suivi
le Concile. Dans lesprit de Joseph
Ratzinger, manifestement, le missel
de Paul VI dans son état actuel, s’il
n’est pas tique, n’est pourtant pas
satisfaisant. Le Pape n’a pas oublen
route son vieux projet de réforme de
la réforme, dans un sens tradition-
nel. (…)
« Ce jour est, du point de vue de
lhistoire de lEglise du temps pré-
sent aussi signicatif sinon plus que
celui de l’élection au trône de Pierre
de Joseph Ratzinger. Le catholicisme
entre décidément dans une nouvelle
période. Lautorisouveraine semble
dénitivement rompre avec la poli-
tique de compromis qui fut celle de
Paul VI, puis en partie encore celle
de Jean-Paul II, alors même qu’une
vie restauratrice se dessinait de
plus en plus nettement. (…)
« Un point nal est ainsi écrit à un
bat de l’après-Concile. Peut-être
aussi à lutopie d’un œcuménisme
audacieux et novateur. Nous n’irons
pas jusqu’à parler d’une victoire pos-
thume de Mgr Marcel Lefebvre.
Par contre, nous sommes à présent
convaincus que la porte à un cer-
tain esprit du Concile est déni-
tivement fermée à Rome et qu’il
faudrait un véritable miracle pour
qu’elle s’ouvre à nouveau. »
Favorable lui aussi à la tse du
complot traditionaliste, l’hebdoma-
daire Témoignage Chrétien a pu-
blié le 5 juillet son éditorial en latin
sous le titre « Ite, duae missae sunt ! ».
Avec dédain, amertume et ironie,
il s’emploie à démontrer la mau-
vre du Vatican, et plus précisément
des traditionalistes, pour refermer
aujourd’hui la fenêtre ouverte sur le
monde par le concile.
« Soyons clairs : ce qui inquiète les
dèles conciliaires, dont nous som-
mes, ce n’est ni le latin, ni les encen-
soirs, ni les clochettes, mais le regard
sur le monde extérieur de la plupart
des défenseurs du rite traditionnel.
Le rite de Pie V était celui d’une
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