DICI Nº 158 •
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13 juillet 2007
clusif de la messe tridentine. Cette « exclu-
sion » qu’ils contestent en droit leur garan-
tit l’exclusivité en fait.
A la question : « En publiant ce do-
cument, le pape pense-t-il aussi aux dè-
les de Mgr Lefebvre ? », l’archevêque
de Bordeaux répond : « Ce n’est dit
explicitement dans aucun des deux
textes. Mais d’une manière plus
large, Benoît XVI pense aussi à la
Fraternité Saint-Pie X. Il nous l’a dit
de vive voix (lors de la présentation
du Motu Proprio le 17 juin à quelques
cardinaux, N.D.L.R.). Mais, à mon
avis, ce Motu Proprio leur fera dif-
ficulté, en particulier pour tout ce
qui touche l’autorité de la réforme
liturgique que les prêtres et les dè-
les de cette fraternité refusent de re-
connaître ».
On comprend que Mgr Fellay,
dans sa lettre aux dèles du 7 juillet,
ait tenu à souligner le « désir certain
(de Benoît XVI) de réaffirmer la
continuité de Vatican II et de la mes-
se qui en est issue avec la Tradition
bimillénaire ». Cette négation d’une
rupture causée par le dernier concile
- déjà manifestée dans le discours à
la curie du 22 décembre 2005 – a été
contestée par la Fraternité Saint-Pie
X, et c’est bien là que doit se situer
un débat doctrinal, après le retrait du
décret d’excommunication qui frappe
les évêques de la Fraternité.
Parmi les réactions hostiles à l’instauration du Motu Proprio
Dans Le Monde du 7 juillet,
Henri Tincq se fait fort d’expliquer
l’attrait de la France pour la tradition
par une analyse de la situation plus
politique que religieuse, car « avec
les traditionalistes, le rite n’est ja-
mais loin de la politique ». Face aux
« nostalgiques du rite à l’ancienne »
qui tiennent « ‘la Rome de tendan-
ce néoprotestante et néomoderniste’
et des papes comme Paul VI et Jean
Paul II pour des fossoyeurs de la tra-
dition catholique », le journaliste du
Monde se pose en défenseur de ceux
« qui, depuis le XIXe, ont tenté de
mettre le catholicisme au diapason
de son temps ». - Il nous semblait que
l’Eglise devait être avant tout au diapason
de son fondateur, le Christ, le même hier,
aujourd’hui et pour les siècles ! Et que dire
d’une Eglise au diapason d’un monde mo-
derne en crise ? Elle ne peut être elle-même
qu’en crise !
« C’est pourquoi, écrit Tincq,
l’Eglise de France, dont les prêtres-
ouvriers et les théologiens d’avant-
garde avaient été soumis au silence
par Pie XII, était prête à accueillir
le prodigieux renouvellement de
Vatican II. Et les mêmes qui avaient
été sanctionnés sont devenus les ins-
pirateurs des réformes, ont changé
le regard des catholiques sur le mon-
de moderne, permis un fonctionne-
ment plus collégial de l’Eglise, admis
le droit de chaque homme à la liberté
de religion et de conscience, ouvert
une ère de dialogue avec les autres
confessions chrétiennes, avec les juifs
et les musulmans. »
Et de conclure : « Personne ne re-
prochera au pape Benoît XVI de vou-
loir tenter de réintégrer ses « brebis
perdues », mais comment ne pas
redouter qu’une fraction, même
minoritaire, de traditionalistes - la
« Résistance catholique » - ne tente
de reconquérir des positions de pou-
voir à Rome, dans le clergé français
et d’inéchir le meilleur des op-
tions catholiques des quarante
dernières années ? »
Même son de cloche dans l’édito-
rial en ligne de Golias qui titrait le
7 juillet : Le retour de la messe en latin.
« L’empêcheur de croire en rond », tel
qu’il se dénit lui-même, livre l’ana-
lyse critique de Christian Terras
et Romano Libero qui voient dans
le Motu Proprio la volonté armée
« d’un catholicisme pur et dur que
le Pape impose à tous » : « Le texte
se veut une condamnation d’une ra-
re dureté des « excès » qui ont suivi
le Concile. Dans l’esprit de Joseph
Ratzinger, manifestement, le missel
de Paul VI dans son état actuel, s’il
n’est pas hérétique, n’est pourtant pas
satisfaisant. Le Pape n’a pas oublié en
route son vieux projet de réforme de
la réforme, dans un sens tradition-
nel. (…)
« Ce jour est, du point de vue de
l’histoire de l’Eglise du temps pré-
sent aussi signicatif sinon plus que
celui de l’élection au trône de Pierre
de Joseph Ratzinger. Le catholicisme
entre décidément dans une nouvelle
période. L’autorité souveraine semble
dénitivement rompre avec la poli-
tique de compromis qui fut celle de
Paul VI, puis en partie encore celle
de Jean-Paul II, alors même qu’une
visée restauratrice se dessinait de
plus en plus nettement. (…)
« Un point nal est ainsi écrit à un
débat de l’après-Concile. Peut-être
aussi à l’utopie d’un œcuménisme
audacieux et novateur. Nous n’irons
pas jusqu’à parler d’une victoire pos-
thume de Mgr Marcel Lefebvre.
Par contre, nous sommes à présent
convaincus que la porte à un cer-
tain esprit du Concile est déni-
tivement fermée à Rome et qu’il
faudrait un véritable miracle pour
qu’elle s’ouvre à nouveau. »
Favorable lui aussi à la thèse du
complot traditionaliste, l’hebdoma-
daire Témoignage Chrétien a pu-
blié le 5 juillet son éditorial en latin
sous le titre « Ite, duae missae sunt ! ».
Avec dédain, amertume et ironie,
il s’emploie à démontrer la manœu-
vre du Vatican, et plus précisément
des traditionalistes, pour refermer
aujourd’hui la fenêtre ouverte sur le
monde par le concile.
« Soyons clairs : ce qui inquiète les
dèles conciliaires, dont nous som-
mes, ce n’est ni le latin, ni les encen-
soirs, ni les clochettes, mais le regard
sur le monde extérieur de la plupart
des défenseurs du rite traditionnel.
Le rite de Pie V était celui d’une