Rapport bibliographique - Michel Thomann - M2 EFCE

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Rôle fonctionnel de la diversité végétale et
importance des mécanismes en jeu
Site expérimental de Cedar Creek – Université du Minnesota
Rapport bibliographique
Michel Thomann
M2 EFCE
Année universitaire 2009/2010
Abstract
1. Human activities altered the structure and diversity of biological communities. The current
loss of biodiversity could alter ecosystem functioning and consequently important services provided to
human society. This explains that major research works have been dedicated to the relation between
diversity and ecosystem performance last two decades.
2. Studies that have manipulated species richness generally showed that increasing number of
species leads to higher production of biomass. However, opposite relationship have also been found,
and these disparate conclusions led to a great controversy.
3. Functional structure of communities is now consider as a key to predict ecosystem
functioning and notably plant productivity. Two major measures are used to assess functional structure
of communities: (i) aggregated trait value or (ii) functional trait diversity. The “mass ratio hypothesis”
relies mainly on the importance of the dominant species for ecosystem functioning and then on the
aggregated trait value while the “functional diversity hypothesis” suggests that the heterogeneity of
functional traits influences ecosystem functioning. Studies that have tested these hypotheses generally
showed that both are valid, although aggregated trait value often explained greater amounts of variation
in ecosystem functioning than functional trait diversity.
4. Three underlying mechanisms are widely proposed to describe how biodiversity might
influence ecosystem processes such as productivity: complementarity amongst species, facilitation and
the sampling effect. These mechanisms may operate simultaneously but biodiversity effects appear to
be best explained by complementarity or facilitation than by the sampling effect. Reviewed studies also
showed that biodiversity effects are not exclusively a result of legumes inclusion.
Keywords: biodiversity, functional structure, functional traits, ecosystem functioning, productivity,
complementarity, facilitation, sampling effect.
Résumé
1. Les activités humaines ont un impact considérable sur les communautés biologiques.
L’éventualité que l’érosion de la biodiversité puisse altérer le fonctionnement des écosystèmes et par
conséquent les services rendus aux sociétés humaines à fait émerger un fort besoin de recherche dans
ce domaine.
2. Les études manipulant le niveau de richesse spécifique montrent généralement que
l’augmentation du nombre d’espèces augmente la production de biomasse. Cependant des relations
opposées ont également été trouvées et ont généré des débats importants.
3. Désormais la structure fonctionnelle des communautés est vue comme un facteur clé pour
prédire les processus écosystémiques et notamment la productivité. Deux métriques sont utilisées pour
l’évaluer : (i) les traits fonctionnels agrégés et (ii) la diversité des traits fonctionnels. L’hypothèse de
« mass ratio » repose sur l’importance des espèces dominantes pour le fonctionnement des
écosystèmes, et donc sur les traits agrégés, tandis que l’hypothèse de « diversité fonctionnelle » insiste
davantage sur l’hétérogénéité des traits fonctionnels. Les études qui ont testé ces hypothèses concluent
généralement à leur importance quant à la variance des processus écosystémiques, bien qu’il semble
que les traits agrégés aient une puissance explicative supérieure aux indices de diversité fonctionnelle.
4. Les trois mécanismes explicatifs de l’effet de la biodiversité sont la complémentarité entre
espèces, la facilitation et l’effet d’échantillonnage. Ils peuvent opérer simultanément mais les résultats
disponibles montrent que les effets de la biodiversité s’expliquent essentiellement par les mécanismes
de complémentarité et de facilitation plutôt que par l’effet d’échantillonnage. Ces études montrent
également que les effets de la biodiversité ne sont pas seulement liés à l’inclusion des légumineuses
dans les assemblages.
Mots clés : Biodiversité, structure fonctionnelle, traits fonctionnels, fonctionnement des écosystèmes,
productivité, complémentarité, facilitation, effet d’échantillonnage.
SOMMAIRE
INTRODUCTION ..................................................................................................................................................1
1.
RICHESSE SPECIFIQUE ET PROCESSUS ECOSYSTEMIQUES.......................................................2
Le cadre heuristique général de la relation richesse fonction ..........................................................................2
Manipulation de la richesse spécifique ............................................................................................................3
Résultats empiriques disponibles et questions qui restent posées....................................................................4
2. CARACTERISATION FONCTIONNELLE ET PROCESSUS ECOSYSTEMIQUES .............................4
1. Notion de trait fonctionnel...........................................................................................................................5
2. Description de la structure fonctionnelle des communautés végétales ....................................................6
Traits fonctionnels agrégés ..............................................................................................................................6
Indices de diversité des traits fonctionnels ......................................................................................................6
3. Tests empiriques des hypothèses reliant structure fonctionnelle et processus écosystémiques………7
L’hypothèse de « mass ratio » .........................................................................................................................8
Test de l’hypothèse de « mass ratio » ..............................................................................................................8
L’hypothèse de « diversité fonctionnelle » ......................................................................................................9
Test de l’hypothèse de « diversité fonctionnelle »...........................................................................................9
Confrontation des hypothèses de « mass ratio » et de « diversité fonctionnelle »........................................10
Conclusion : vers une réconciliation des hypothèses en compétition ? .........................................................11
3. MECANISMES SOUS-JACENTS A LA RELATION DIVERSITE-PRODUCTIVITE ..........................11
1. Diversité des mécanismes en jeu ...............................................................................................................12
La complémentarité entre espèces .................................................................................................................12
La facilitation entre espèces ...........................................................................................................................12
L’effet d’échantillonnage ...............................................................................................................................12
2. Les résultats empiriques relatifs aux mécanismes opérant dans les relations diversité-fonction .......13
Distinction de l’effet d’échantillonnage des autres mécanismes ...................................................................13
Le rôle des légumineuses dans la relation diversité-productivité ..................................................................14
Conclusion .....................................................................................................................................................15
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVE DE STAGE .....................................................................15
Méthode de recherche bibliographique
Bibliographie
INTRODUCTION
Les activités humaines et les changements globaux qu’elles induisent présentent un impact
considérable sur la biodiversité et les écosystèmes (Hooper et al. 2005; Chapin 2003). Le Millennium
Ecosystem Assessment (MEA) (2005) et la Convention sur la Diversité Biologique (2006) distinguent
quatre principales menaces sur la biodiversité d’origine anthropique. Ces impacts négatifs seraient
principalement liés à (i) la modification des habitats (destruction, fragmentation, dégradation et
pollution), (ii) l’introduction d’espèces exotiques envahissantes (l’introduction de pathogènes peut y
être inclue), (iii) la surexploitation des populations et (iv) les changements climatiques. Malgré les
efforts actuels de protection et de conservation des espèces, l’érosion de la biodiversité atteindrait des
taux au moins 100 fois plus élevés que ceux observés dans les enregistrements fossiles (MEA 2005;
Pimm et al. 1995).
Simultanément, il y a eu prise de conscience globale du rôle de la biodiversité dans le fonctionnement
des écosystèmes, et par conséquent dans les services rendus dont bénéficient les sociétés humaines
(e.g. production de biomasse, cycles de nutriments, épuration de l’eau, formation et entretien des sols,
pollinisation, voir Costanza et al. 1997). Il existe maintenant une demande sociétale pour prédire les
changements globaux et particulièrement leurs impacts sur les services écosystémiques.
De nombreuses publications récentes abordent les conséquences potentielles de ces changements sur
le fonctionnement des écosystèmes. Dans un tel contexte, apprécier et prédire les coûts associés aux
différents changements de diversité requière de répondre à deux questions fondamentales : (i)
comment les communautés, notamment végétales, répondent aux changements globaux (Lavorel &
Garnier 2002); (ii) dans quelle mesure, et par quels mécanismes, les changements du niveau de
biodiversité affecte les propriétés et les processus écosystémiques (Chapin 2003; Diaz & Cabido
2001).
Les relations entre le niveau de diversité des communautés végétales et l’intensité du fonctionnement
des écosystèmes (e.g. production primaire, décomposition de la litière) sont très étudiés en écologie
depuis le milieu des années 1990 (Naeem et al. 1994, Tilman et al. 1997, Hector et al. 1999, Lanta &
Leps 2006, Cardinale et al. 2007). Cependant, Hooper et al. (2005) remarquent que le niveau de
diversité est souvent évalué uniquement par la richesse spécifique, sans assez prendre en compte
d’autres composantes potentiellement importantes telles que l’abondance relative, la composition
spécifique des communautés, la présence d’espèces particulières ou le niveau de diversité
fonctionnelle... En particulier, McGill et al. (2006) soulignent que l’analyse des variations des
performances écosystémiques basée sur l’identité des espèces ne permet pas d’identifier les règles
générales à l’œuvre.
En outre, cette approche « taxonomique » ne permet pas de disposer d’indications sur les propriétés
fonctionnelles des organismes, elle manque donc de prédictibilité quant aux variations des
1
performances écosystémiques. Certains d’auteurs semblent considérer implicitement la richesse
spécifique comme un paramètre approchant la richesse fonctionnelle (e.g. Hector et al. 1999).
Cependant, bien que ces deux facteurs soient souvent corrélés, la richesse spécifique surestime ou
sous-estime la richesse fonctionnelle dans la majorité des cas (Diaz & Cabido 2001).
Par contraste, une approche fonctionnelle des communautés pallie l’essentiel des limites de l’approche
« taxonomique ». Elle vise à caractériser les communautés, notamment végétales, par les
caractéristiques fonctionnelles des espèces qui les composent et non plus par leur seule identité
taxinomique (Lavorel et al. 1997, Weiher et al. 1999). Il existe maintenant un large consensus
admettant que les effets des communautés végétales sur les propriétés et les processus écosystémiques
sont davantage liés aux caractéristiques fonctionnelles des espèces qu’à la richesse spécifique (Diaz &
Cabido 2001, Hooper et al. 2005, Grime 2006, McGill et al. 2006).
Ce rapport bibliographique s’intéresse à l’effet de la diversité des communautés végétales sur le
fonctionnement des écosystèmes, notamment sur le plan de la production primaire. Il a pour objet d’en
présenter les principales hypothèses et questionnements théoriques, les résultats empiriques associés,
ainsi que les mécanismes mis en jeu dans ces relations diversité-fonction de première importance.
1. RICHESSE SPECIFIQUE ET PROCESSUS ECOSYSTEMIQUES
La compréhension du rôle de la biodiversité (notamment végétale) pour le fonctionnement des
écosystèmes est un des objectifs majeurs des recherches en écologie depuis plus d’une vingtaine
d’année. (Naeem et al. 1994, Loreau et al. 2002, Hooper et al. 2005). Une des premières questions
posées concerne la manière dont l’addition des espèces change le comportement des écosystèmes
(Naeem et al. 1995, Fig. 1).
Le cadre heuristique général de la relation richesse fonction
Fonctionnement de
l’écosystème
2
1
4
5
3
1-Hypothèse nulle
2-Hypothèse de redondance
3-Hypothèse linéaire
4-Hypothèse idiosyncratique
5-Hypothèse espèce clé
Figure 1 : Schéma conceptuel résumant les principales
hypothèses de la relation diversité/fonctionnement des
écosystèmes. D’après Naeem et al 1995.
Richesse spécifique
La Figure 1 représente le cadre heuristique central de la relation diversité-fonctionnement des
écosystèmes. Il permet à la fois l’expression d’hypothèses a priori sur cette relation et fournit une
vision claire des patrons qui doivent être testés (Loreau et al. 2002) quant à la façon dont la
biodiversité affecte l’intensité des processus écosystémiques.
2
Les hypothèses présentées sont essentiellement issues de modèles verbaux théoriques. L’hypothèse
nulle (1) prédit que l’intensité des processus écosystémiques est insensible au niveau de diversité.
L’hypothèse de redondance (2) prédit que l’ajout (ou le retrait) d’espèces améliore (ou détériore) le
fonctionnement de l’écosystème (partie gauche de la trajectoire) jusqu'à un certain seuil au-delà
duquel la variation du niveau de diversité n’a plus d’impact (partie droite). La redondance correspond
à une compensation fonctionnelle entre les espèces, au moins partielle. L’hypothèse linéaire (3) prédit
que chaque espèce améliore, dans la même mesure, le fonctionnement de l’écosystème. L’hypothèse
idiosyncratique (4) propose que chaque espèce soit singulière et contexte-dépendante dans ses effets
sur l’écosystème, qui sont par conséquent imprédictibles. Enfin, l’hypothèse espèce clé (5) prédit que
certaines espèces « clés » soient déterminantes pour le fonctionnement de l’écosystème,
indépendamment de leur abondance (e.g. espèces ingénieurs).
Manipulation de la richesse spécifique
Une des premières expériences de manipulations de la diversité a concerné simultanément différents
niveaux trophiques (Naeem et al. 1994, 1995), mais la grande majorité des études se sont concentrées
sur un seul niveau trophique, le plus souvent sur les communautés végétales herbacées. La focalisation
de la plupart des recherches sur le rôle de la biodiversité végétale pour la production des écosystèmes
s’explique par deux raisons essentielles : (i) les communautés végétales présentent une relative
commodité expérimentale puisque le niveau de biodiversité et la biomasse produite chaque année sont
relativement faciles à manipuler et à mesurer (Tilman et al. 2001) et (ii) en tant que producteurs
primaires, les plantes représentent la composante de base de très nombreux écosystèmes terrestres
(Loreau et al 2001). C’est donc un point de départ logique pour l’étude de la relation plus générale
biodiversité-fonctionnement des écosystèmes.
De nombreuses expériences sur la diversité des communautés de plantes ont été menées à partir des
années 90, depuis un continuum méthodologique allant de la manipulation de la diversité de microcommunautés synthétiques en serre, au retrait d’espèces des communautés naturelles sur le terrain,
voire au « simple » suivi de terrain (Diaz et al. 2003), bien que les publications basées sur l’étude de
communautés synthétiques soient largement majoritairement.
Différentes propriétés et processus écosystémiques ont été mesurés en réponse aux variations du
niveau de biodiversité (décomposition de la litière [Hector et al. 2000a], rétention de l’eau et des
nutriments [Naeem et al. 1994, De Deyn et al. 2009], résistance et résilience face aux perturbations
[Loreau et al. 2001, Isbel et al. 2009]…). Cependant, une attention particulière a été portée aux liens
entre diversité végétale et production primaire. En conséquence, dans ce rapport, nous nous sommes
concentrés particulièrement sur cette dernière relation.
3
Résultats empiriques disponibles et questions qui restent posées
La majorité des études réalisées montre qu’il existe une relation positive linéaire ou log-linéaire entre
la production de biomasse et la richesse spécifique (Hector et al.1999, Loreau et al. 2001, Diaz &
Cabido 2001, Hooper et al. 2005, Spehn et al. 2005, Cardiale et al. 2007, van Ruijven & Berendse
2005, 2009) (Fig. 2).
Figure 2 : Exemple de réponse de la production aux manipulations
expérimentales de richesse spécifique. Issue de Loreau et al. 2001.
Les premières expériences de manipulation de la diversité ont souvent été critiquées pour la durée
d’expérimentation relativement courte, qui ne permet pas de savoir si ces relations positives sont des
relations transitoires, typiques d’un stade immature de la communauté, ou des relations durables.
Cependant des expériences sur le plus long terme suggèrent qu’une relation positive peut se maintenir
dans le temps, voire se renforcer (Tilman et al. 2001, van Ruijven & Berendse 2005, 2009 Cardiale et
al. 2007)
Toutefois, ces relations positives ne sont pas systématiques et une absence de réponse, voire des
variations idiosyncratiques ont également été montrées empiriquement (Hector et al. 1999). Il a
également été montré que ces réponses observées pouvaient être générées par des mécanismes
différents (complémentarité, facilitation ou effet d’échantillonnage ; voir partie 3 du présent rapport).
Ces mécanismes sous-jacents différents induisent des implications et des significations fonctionnelles
bien différentes (Loreau & Hector 2001). C’est pourquoi la forme et la cause de la relation diversitéproductivité des écosystèmes ont été amplement débattues à la fin des années 1990 (Grime 1997,
Huston et al. 2000, Hector et al 2000b, Cardinale et al. 2000, Fridley 2001) et demeurent
controversées.
L’émergence de l’approche fonctionnelle qui considère la structure fonctionnelle des communautés
végétales plutôt que la structure spécifique est une des réponses proposées.
2. CARACTERISATION FONCTIONNELLE ET PROCESSUS ECOSYSTEMIQUES
La nécessité de considérer la composition et la structure fonctionnelle des communautés végétales
amène
au
moins
deux
nouveaux
questionnements.
Premièrement,
comment
caractériser
fonctionnellement les communautés végétales ? C'est-à-dire (i) par quel outil peut-on faire le lien
4
entre les communautés végétales et le fonctionnement des écosystèmes et (ii) quels indices (i.e.
métriques) peuvent traduire la structure fonctionnelle des communautés ? Deuxièmement, une fois
que ces indices ont été proposés, quelle composante caractéristique de la structure des communautés
végétales est la plus pertinente et la plus significative du point de vue du fonctionnement des
écosystèmes ?
Cette deuxième partie va permettre de présenter la notion de trait fonctionnel, outil conceptuel essentiel
pour faire la jonction entre communautés végétales et processus écosystémiques (Diaz & Cabido
2001). En effet, l’hypothèse centrale de l’approche fonctionnelle est que le fonctionnement des
écosystèmes est prédictible à partir de la composition et/ou de la structure fonctionnelle des
communautés végétales via les traits fonctionnels d’effet (Lavorel & Garnier 2002). Ainsi, cette
approche propose que les traits d’effet pilotent les processus écosystémiques.
Les caractérisations fonctionnelles de communautés végétales proposées et utilisées dans la littérature
seront ensuite examinées, en mettant en relief le contexte théorique auxquelles elles sont rattachées.
Enfin, les principaux résultats obtenus par les différentes méthodes seront confrontés.
1. Notion de trait fonctionnel
Les traits sont particulièrement utilisés dans l’approche fonctionnelle de l’écologie des communautés
et des écosystèmes (Keddy 1992, Lavorel & Garnier 2002). Cependant, le concept de trait et a fortiori
de trait fonctionnel est souvent utilisé sans définition claire, ou en référence implicite à des
mécanismes sous-jacents variés. Cela conduit Violle et al. (2007) à proposer une terminologie précise
de ces notions, présentée ci dessous.
Un trait correspond à tout caractère morphologique, physiologique ou phénologique mesurable, au
niveau d’un individu, de l’échelle cellulaire à celle de l’organisme dans son ensemble. Un trait ne fait
donc pas appel dans sa définition à des informations d’ordre environnemental, bien que celles-ci
soient indispensables à l’interprétation de leur signification écologique (McGill et al. 2006). Ainsi la
tolérance au gel par exemple n’est pas un trait mais une performance écologique, c’est-à-dire la
réponse globale d’un organisme à son environnement, qui dépend souvent de nombreux traits (McGill
et al. 2006). De même, le recouvrement de la végétation ou encore la biomasse produite, mesurés à
l’échelle d’une entité spatiale (Petchey et al. 2004), ne représentent pas des traits mais des propriétés
de l’écosystème ou de la communauté. Les valeurs ou modalités que prend un trait dans un contexte
spatio-temporel donné sont des attributs.
Les traits fonctionnels comprennent également une grande variété d’acceptions suivant les domaines
biologique où ils sont exploités. Cependant, dans le cadre de l’écologie fonctionnelle, il convient de
définir les traits fonctionnels comme tout trait ayant un effet sur les propriétés de l’écosystème (i.e.
trait d’effet), ou qui répondent au milieu d’interaction (i.e. trait de réponse) (Hooper et al. 2005;
Fig. 3).
5
Figure 3 : Représentation du cadre conceptuel de
Lavorel & Garnier (2002) faisant le lien entre les
changements globaux d’une part, la composition des
communautés végétales et le fonctionnement des
écosystèmes d’autre part, via les traits fonctionnels.
Cette vision exige une certaine liaison entre traits
d’effet et traits de réponse (voir Gross et al. 2008
pour un support empirique). Issue de Lavorel &
Garnier (2002).
2. Description de la structure fonctionnelle des communautés végétales
La structure fonctionnelle renvoie à la valeur et à la gamme des traits fonctionnels des espèces
présentes dans un écosystème donné (Diaz & Cabido 2001). L’approche par les traits fonctionnels, en
tant que facteur explicatif des processus écosystémiques, propose que le fonctionnement des
écosystèmes dépende davantage des traits fonctionnels des espèces que du nombre d’espèces d’un
assemblage per se. On peut distinguer deux grands types de méthodes de caractérisation de la
structure fonctionnelle des communautés végétales : le calcul de traits fonctionnels agrégés et le calcul
d’indices de diversité fonctionnelle.
Traits fonctionnels agrégés
La structure fonctionnelle des communautés peut être caractérisée par le calcul d’une valeur
« d’agrégation des traits fonctionnels » (Community Weighted Mean = CWM) à l’échelle de la
communauté (Garnier et al. 2004, Vile et al. 2006, Gross et al. 2008, Schumacher & Roscher 2009).
Le CWM est défini comme :
où S est le nombre d’espèces de la communauté, pi est l’abondance relative de l’espèce i et traiti est la
valeur du trait de l’espèce i. Il s’agit d’une valeur moyenne des traits fonctionnels, pondérée par les
abondances relatives des différentes espèces de la communauté. Un processus écosystémique donné est
alors supposé être une fonction du trait agrégé (Vile et al. 2006).
Indices de diversité des traits fonctionnels
L’utilisation du CWM permet de synthétiser les valeurs de traits présents mais n’en considère pas la
variabilité. Au contraire, la structure fonctionnelle des communautés peut être caractérisée par un indice
qui cherche à rendre compte de sa diversité fonctionnelle, c’est à dire de l’hétérogénéité des traits
fonctionnels au sein d’une communauté (Petchey & Gaston 2006, Lavorel et al. 2008).
Une première option pour évaluer la diversité fonctionnelle au sein des communautés consiste à
établir des classifications fonctionnelles (Lavorel et al. 1997, Tilman et al. 1997, Tilman et al. 2001,
Fornara & Tilman 2008, De Deyn et al. 2009) et se traduit, le plus souvent, par la détermination, a
6
priori, de groupes (ou types) fonctionnels1 (i.e. groupe d’espèces qui répondent de la même manière à
une condition du milieu et/ou qui ont le même effet sur un processus écosystémique [Diaz & Cabido
2001]). Par exemple les légumineuses capables de fixer l’azote, les herbacées de type C3, les
herbacées de types C4, les « forbs » (i.e. herbacées florissantes non graminées), et les ligneux, sont
autant de groupes fonctionnels (e.g. Tilman et al. 1997). Le nombre de groupes fonctionnels présents
dans un assemblage est une mesure très courante pour apprécier le niveau de diversité fonctionnelle.
Cependant, la classification des espèces en présence en groupes fonctionnels discrets requiert de
nombreuses décisions arbitraires sur les limites intergroupes mais également sur le nombre de
divisions que l’on opère (Hooper et al. 2005, Wright et al. 2006). Pour Petchey & Gaston (2006), le
plus gros problème des classifications discrètes est le « gommage » de toute l’hétérogénéité
fonctionnelle entre les espèces classées dans un même groupe fonctionnel. Au sein d’un groupe, les
espèces sont donc considérées comme fonctionnellement redondantes.
Des mesures continues permettent également de quantifier la variabilité des traits fonctionnels au sein
d’une communauté et ont l’avantage de rendre compte de l’ensemble des dissimilarités fonctionnelles
entre les espèces de l’assemblage (Petchey & Gaston 2002). Cependant, ces mesures continues
peuvent résumer la diversité fonctionnelle d’une multitude de manière et de nombreux indices ont déjà
été proposés (Petchey & Gaston 2002, 2006, Mason et al. 2003, 2005, Mouillot et al. 2005, BottaDukat 2005).
Certains indices de diversité fonctionnelle peuvent prendre en compte simultanément plusieurs traits,
tandis que d’autres ne s’appliquent qu’à un trait à la fois. Toutefois, aucun indice ne fait actuellement
consensus et l’élaboration d’indices de diversité fonctionnelle est encore en développement
aujourd’hui.
3. Tests empiriques des hypothèses reliant structure fonctionnelle et processus
écosystémiques
Les deux types de métriques présentés au-dessus correspondent à deux hypothèses sous-jacentes
distinctes exploitées dans la littérature : l’hypothèse de « mass ratio » et l’hypothèse de « diversité
fonctionnelle ». Cependant, étudier l’influence des espèces sur le fonctionnement des écosystèmes via
l’analyse des traits fonctionnels reste une approche relativement récente. Seules quelques études
empiriques se sont intéressées spécifiquement au test des hypothèses de « mass ratio » ou de
« diversité fonctionnelle » vis-à-vis des processus écosystémiques, si bien que ni l’une ni l’autre des
hypothèses n’a reçu beaucoup de validations empiriques. De plus, ce n’est que tout récemment que
des études confrontent explicitement les puissances explicatives des différentes hypothèses. De cette
approche nouvelle, apparaît même une possibilité de réconciliation de ces deux paradigmes.
1
Il est à noter que la notion de groupe fonctionnel précède celle de diversité fonctionnelle, qui l’intègre cependant.
7
L’hypothèse de « mass ratio »
L’utilisation des traits fonctionnels agrégés se place dans le cadre de l’hypothèse de « mass ratio »
formulée par Grime (1998). Cette hypothèse postule qu’au sein des communautés autotrophes, les
processus instantanés des écosystèmes (et notamment la production primaire) soient largement
déterminés par les caractéristiques fonctionnelles des espèces dominantes (i.e. qui représentent la plus
grande part de la biomasse érigée), mais soient relativement insensibles aux variations de richesse
spécifique des espèces secondaires ou transitoires. Cela implique donc que les effets des traits
fonctionnels des espèces soient liés à leur abondance relative au sein des communautés, et par
conséquent que les attributs des espèces dominantes aient proportionnellement plus d’influence sur le
fonctionnement instantané des écosystèmes (Schumacher & Roscher 2009). Il est à noter que Grime
(1998) insiste sur le fonctionnement instantané des écosystèmes, et n’exclut donc pas l’implication
des espèces secondaires et transitoires dans la détermination de la composition des communautés, du
fonctionnement des écosystèmes et/ou dans leur stabilité à plus long terme (e.g. Polley et al. 2006 ).
Test de l’hypothèse de « mass ratio »
Garnier et al. (2004) ont testé l’hypothèse de « mass ratio » pour quatre propriétés et processus
écosystémiques (production primaire, décomposition de la litière, stock de carbone et stock d’azote
dans le sol), à partir de trois traits fonctionnels foliaires (SLA : la surface spécifique foliaire, LDMC :
la teneur en matière sèche des feuilles, LNC : la teneur en azote foliaire). Il a été montré qu’il existe
une relation forte entre chacun de ces trois traits agrégés (CWMSLA, CWMLDMC et CWMLNC) et les
propriétés écosystémiques. De plus, quand les auteurs considèrent uniquement les traits des deux
espèces dominantes, la plupart des relations observées sont toujours valides. Ces résultats corroborent
donc l’hypothèse « mass ratio » de Grime (1998). En outre, dans cette même étude, les auteurs
montrent que les relations impliquant, non plus les traits fonctionnels, mais le nombre d’espèces et les
propriétés des écosystèmes étaient plus faibles, sinon non significatives, résultat qui va dans le sens de
l’hypothèse soutenue par l’approche fonctionnelle.
Vile et al. (2006) ont montré que le taux de croissance relatif maximum des espèces (RGRmax, qui
correspond donc à un taux de croissance potentiel, en conditions idéales) pouvait être considéré
comme un trait fonctionnel, et ont testé le pouvoir prédictif de ce trait sur la productivité primaire. Ils
montrent que quand la moyenne des RGRmax est pondérée par les biomasses relatives des espèces, il
existe une relation positive significative entre la valeur de ce trait agrégé et la productivité primaire, et
que cette relation explique 77 % de la variance (Fig. 4). En revanche, quand la moyenne des RGRmax
n’est pas pondérée par les biomasses relatives, la relation, bien que toujours significative, n’explique
plus que 36 % de la variance. Encore une fois, ces résultats vont dans le sens de l’hypothèse de « mass
ratio ».
8
Figure 4 : Relation entre la productivité primaire aérienne
nette spécifique (SANPP) et le taux de croissance potentiel,
agrégé à l’échelle de la communauté. La relation explique
77 % de la variation. Issue de Vile et al. (2006).
D’autres études, retrouvent, via l’indice d’agrégation des traits fonctionnels, les patrons décrits ici et
prédits par l’hypothèse de « mass ratio ». Ces études peuvent concerner d’autres propriétés des
écosystèmes herbacés que celle de la production primaire, telles que l’humidité du sol (Gross et al.
2008) ou la décomposabilité de la litière (Cortez et al. 2007, Fortunel et al. 2009).
L’hypothèse de « diversité fonctionnelle »
Les indices de diversité des traits fonctionnels se rattachent à l’hypothèse de « diversité
fonctionnelle ». Contrairement à l’hypothèse de « mass ratio », l’hypothèse de « diversité
fonctionnelle » insiste sur l’idée que la dissimilarité des traits entre les espèces d’une communauté
correspond à des différences dans les patrons d’utilisation des ressources entre les espèces (Petchey &
Gaston 2006). Ainsi une communauté fonctionnellement hétérogène maximiserait la complémentarité
dans l’acquisition des ressources, et utiliserait un maximum des ressources disponibles dans
l’écosystème (Diaz & Cabido 2001). Il en résulterait une meilleure production primaire par exemple.
Test de l’hypothèse de « diversité fonctionnelle »
Dans leur étude, Tilman et al. (1997) contrôlent la richesse spécifique, la diversité fonctionnelle (i.e. le
nombre de groupes fonctionnels présents dans un assemblage) ainsi que la composition fonctionnelle
(i.e. quels groupes fonctionnels sont présents). Les groupes fonctionnels sont les suivants :
légumineuses, herbacées en C3, herbacées en C4, « forbs » et ligneux. Ils ont montré que le nombre de
groupes fonctionnels présents dans un assemblage affecte positivement la productivité de
l’écosystème (Fig. 5), ce qui va dans le sens de l’hypothèse de diversité fonctionnelle. Si les auteurs
montrent par ailleurs que la composition fonctionnelle est également de première importance, il est
conclu de cette étude que la diversité fonctionnelle est plus importante que la richesse spécifique pour
les processus écosystémiques.
Figure 5 : Relation entre la biomasse aérienne et la
diversité fonctionnelle. Issue de Tilman et al. (1997).
9
De la même manière, après avoir définit 4 groupes fonctionnels différents (graminées herbacées,
hémicryptophytes à rosette, herbacées à stolons aériens et légumineuses), Lanta & Leps (2006)
montrent que le pouvoir explicatif du nombre de groupes fonctionnels est 3 fois supérieur à celui du
nombre d’espèces.
Cependant, ces résultats ont été débattus dès leur apparition. En effet, d’autres études montrent au
contraire que l’identité des groupes fonctionnels présents est plus importante que le nombre de
groupes fonctionnels (Hooper & Vitousek 1997). Outre le problème de la délimitation lors des
classifications en groupes fonctionnels évoqué plus haut, il a été montré que le pouvoir prédictif des
classifications fonctionnelles a priori, non seulement est le plus souvent faible, mais est rarement
supérieur au pouvoir prédictif de classifications post hoc aléatoires (Wright et al. 2006).
Au contraire, l’utilisation d’indices de diversité fonctionnelle fondés sur des mesures continues devrait
permettre de pallier les limites des classifications fonctionnelles actuelles et augmenter leurs capacités
prédictives (Petchey et al. 2004).
Dans leur étude, Petchey et al. (2004) ont montré que la production des écosystèmes était
significativement reliée à diversité fonctionnelle. En effet, ils ont testé les relations entre des
indices de diversité fonctionnelle et la production primaire dans des assemblages synthétiques sur
différentes localités. En moyenne sur l’ensemble des sites, la production de biomasse aérienne varie
positivement avec le niveau de diversité fonctionnelle. De plus, le niveau de diversité des traits
fonctionnels explique jusqu'à 55 % de la variance de la production primaire pendant que la richesse
spécifique n’en explique que 33 %.
En revanche, Mokany et al. (2008) et Schumacher & Roscher (2009) ont montré que la productivité
pouvait être corrélée négativement à certains indices de diversité fonctionnelle (Fig. 6A). Ces résultats
suggèrent que le sens de la relation entre la diversité fonctionnelle et les processus écosystémiques
dépend à la fois du processus considéré et de la pertinence des traits vis-à-vis de ce processus
(Mokany et al. 2008, Fig. 6A et 6B).
A
B
Figure 6 : Relation entre la production
primaire aérienne nette et la diversité
fonctionnelle pour les traits : type
photosynthétique (à gauche) et relation
entre le taux de décomposition de la litière
et la diversité fonctionnelle pour les traits :
fixe l’azote et type photosynthétique (à
droite). Issue de Mokany et al. (2008).
10
Confrontation des hypothèses de « mass ratio » et de « diversité fonctionnelle »
Bien que peu nombreuses, au moins deux études ont confronté les puissances explicatives des deux
hypothèses présentées ici vis-à-vis des processus écosystémiques (Mokany et al. 2008, Schumacher &
Roscher 2009). Ces études s’accordent sur le fait que les valeurs de traits agrégés, mobilisées dans le
cadre de l’hypothèse de « mass ratio », expliquent une part plus importante des processus
écosystémiques que l’étendue des variations des traits, mobilisée dans le cadre de l’hypothèse de
« diversité fonctionnelle ». Néanmoins ces études sont encore trop rares pour être plus affirmatif quant
à la hiérarchie des pouvoirs explicatifs entre ces deux hypothèses. Les travaux en cours sur les indices
de diversité fonctionnelle permettent d’espérer disposer de mesures plus satisfaisantes, et ainsi d’être
mieux à même de tester l’hypothèse de diversité fonctionnelle.
Conclusion : vers une réconciliation des hypothèses en compétition ?
Les hypothèses de « mass ratio » et de « diversité fonctionnelle » ne sont pas mutuellement exclusives
(Mokany et al. 2008, Schumacher & Roscher 2009) et il semble raisonnable de penser que le
fonctionnement des écosystèmes soit à la fois piloté par les traits fonctionnels des espèces dominantes
et par l’hétérogénéité des traits fonctionnels en présence, même si la première semble avoir un rôle
plus marqué que la seconde. Il a été montré que l’intégration simultanée du CWM et d’une mesure de
diversité fonctionnelle, voire de paramètres abiotiques, dans un même modèle améliore
considérablement son pouvoir prédictif vis-à-vis des processus écosystémiques (Diaz et al. 2007,
Schumacher & Roscher 2009). Ces études proposent donc de réconcilier ces deux hypothèses via une
approche plus intégrative, permettant de meilleures prédictions quantitatives, même si elle passe par
une complexification de la vision du fonctionnement des écosystèmes qui dominait lors des premières
expériences de manipulation de la biodiversité.
3. MECANISMES SOUS-JACENTS A LA RELATION DIVERSITE-PRODUCTIVITE
La majorité des publications disponibles soutiennent que le niveau et/ou la structure de la biodiversité
des communautés végétales affecte le fonctionnement des écosystèmes. Comme énoncé dans la partie
1 de ce rapport, différents mécanismes reliant les propriétés et les processus écosystémiques aux
variations du niveau ou de la structure de la diversité ont été proposés. Il n’y a actuellement pas de
consensus sur les mécanismes à l’œuvre ou sur leurs importances respectives, et cela constitue un
point central du débat sur la relation diversité-productivité. Cette troisième partie du rapport va
permettre de présenter les différents mécanismes proposés dans la littérature quant aux relations
diversité-fonctionnement des écosystèmes, puis les résultats empiriques qui les soutiennent.
11
1. Diversité des mécanismes en jeu
Fridley (2001) suggère que les processus qui pilotent les interactions entre les espèces et l’assemblage
des communautés permettent à la biodiversité d’influer sur le fonctionnement des écosystèmes via
trois mécanismes généraux : la complémentarité, la facilitation et l’effet d’échantillonnage.
La complémentarité entre espèces
La compétition est le plus souvent vue comme l’interaction dominante entre les organismes. Dans ce
contexte, la complémentarité entre espèces correspond fondamentalement à une réduction de la
compétition interspécifique due au partitionnement de niches écologiques (Hooper et al. 2005). Par
exemple, si deux espèces exploitent les mêmes ressources mais différentiellement dans le temps (e.g.
différence de phénologie), dans l’espace (e.g. différence de profondeur d’enracinement), si elles
exploitent des ressources différentes ou différentes formes de la même ressource (e.g. différentes
formes azotées), ou encore si elles diffèrent dans les ratios d’utilisation de ressources (e.g. trade-offs
eau-lumière), alors leurs interactions négatives s’en trouveront limitées. La complémentarité peut ainsi
permettre la coexistence des espèces, via l’évitement de l’exclusion compétitive. En outre, cette
différenciation de niche permet également une exploitation plus complète des ressources disponibles
dans l’écosystème (complémentarité dans l’exploitation), et ce mécanisme de complémentarité entre
espèces est donc susceptible de contribuer à l’augmentation de la productivité totale de l’écosystème,
et l’augmentation des performances écosystémiques en général (Hooper et al. 2005).
La facilitation entre espèces
La facilitation est un type d’interaction biotique positive. Il y a facilitation dans le cas où une espèce
modifie l’environnement et que cette modification est favorable à une autre espèce dans le voisinage
(Bruno et al. 2003). Cette interaction plante-plante fait donc intervenir une entité intermédiaire (e.g.
ressource, interaction, facteur de régulation) ce qui la démarque de la complémentarité (Fridley et al.
2001). Par ce mécanisme, si certaines espèces sont capables d’augmenter localement le niveau de
ressource (e.g. les légumineuses qui fixent l’azote), de limiter l’austérité de l’environnement, ou
encore de faciliter l’établissement d’autres espèces, il peut également y avoir augmentation de la
productivité des écosystèmes. La facilitation a été rapportée comme plus commune, ou d’une plus
grande importance dans les environnements stressants ou contraignants (Bruno et al. 2003).
L’effet d’échantillonnage
L’effet d’échantillonnage est classiquement décrit comme l’augmentation de la probabilité d’inclure
une ou des espèces particulièrement productives avec l’augmentation du nombre d’espèces dans un
assemblage (e.g. Loreau et al. 2001). Fridley (2001) complète cette définition en faisant observer que
l’effet d’échantillonnage procède en fait d’un amalgame entre quatre phénomènes distincts. Lorsque la
diversité augmente, l’effet d’échantillonnage peut correspondre à l’accroissement de probabilité
d’inclure dans un assemblage (i) une espèce avec un taux de croissance fort, (ii) une espèce bien
12
adaptée aux conditions locales, (iii) un groupe d’espèces complémentaires, ou (iv) une espèce
facilitatrice. Ainsi, dans la plupart des expériences de manipulation de la biodiversité, les méthodes
d’assemblage artificiel des communautés par addition (Lanta & Leps 2006) ou délétion (Diaz et al.
2003) aléatoire d’espèces peuvent conduire à l’observation de réponses écosystémiques par simple
effet d’échantillonnage, qui peut s’apparenter ici à un artefact statistique dû au design expérimental
(Huston et al. 2000).
2. Les résultats empiriques relatifs aux mécanismes opérant dans les relations
diversité-fonction
Les trois mécanismes présentés ici ne sont ni systématiques ni mutuellement exclusifs (Fargione et al.
2007). La possibilité de ces trois mécanismes fait consensus parmi les écologistes, bien que souvent
les mécanismes de complémentarité et de facilitation soient regroupés pour des raisons pratiques (e.g.
Loreau & Hector 2001, Cardinale et al. 2007). Cependant, il y a désaccord a priori sur le rôle relatif
de chacun d’entre eux dans les réponses du fonctionnement des écosystèmes aux variations du niveau
de diversité. De plus, si la complémentarité et la facilitation semblent réellement liées au niveau de
diversité, le fondement biologique de l’effet d’échantillonnage est plus discutable. Il importe donc de
pouvoir séparer, concernant les effets de la biodiversité sur le fonctionnement des écosystèmes, la part
de ce qui est attribuable à la complémentarité et/ou à la facilitation et la part de ce qui est attribuable à
l’effet d’échantillonnage (Fridley et al. 2001, Loreau et al. 2001).
Distinction de l’effet d’échantillonnage des autres mécanismes
Au cours d’une expérience de manipulation de la diversité sur le long terme, Tilman et al. (2001) ont
montré que le pourcentage d’assemblages montrant un effet positif du nombre d’espèces sur la
productivité (cf « overyielding transgressif », i.e. quand une polyculture atteint une biomasse
supérieure à celle des monocultures les plus performantes) augmente avec la richesse spécifique, mais
seulement lors des dernières années d’expérimentation. Ce résultat d’ « overyielding transgressif »
démontre l’existence de mécanismes tels que la complémentarité ou la facilitation. Ils ont également
testé l’effet d’échantillonnage en excluant des analyses les assemblages contenant au moins 1 des 9
espèces les plus performantes en monoculture. Puisque la biomasse des polycultures reste toujours
dépendante du nombre d’espèces et de la composition fonctionnelle, ces résultats ne soutiennent pas
l’effet d’échantillonnage en tant que mécanisme de première importance à plus long terme.
Cependant, la complémentarité-facilitation et l’effet d’échantillonnage peuvent opérer en même
temps, et les analyses d’overyielding transgressif ne permettent pas, à elles seules, de quantifier le rôle
relatif de ces deux composantes quant à la production dans un assemblage. Loreau & Hector
(2001) ont proposé une méthode de partition additive de l’effet net de la diversité (i.e. la différence
entre le rendement observé et le rendement attendu en polyculture, sur la base des rendements
observés en monoculture) en effet d’échantillonnage et en effet de la combinaison complémentarité13
facilitation. À partir de cette méthodologie, ils ont réanalysé les patrons de production primaire issus
de l’expérience de manipulation de diversité BIODEPTH, menée sur différents sites européens, qui
conclut à l’existence d’une relation générale log-linéaire positive entre diversité et productivité
(Hector et al. 1999). Pris sur l’ensemble des sites, la composante de cette relation due à l’effet
d’échantillonnage n’est pas statistiquement différente de zéro et ne varie pas avec la richesse
spécifique. En revanche, la composante due à la combinaison complémentarité-facilitation est
significativement positive et augmente avec la richesse spécifique.
D’autres études ont utilisé la méthode de Loreau & Hector (2001) et suggèrent également (i) que les
effets dus à la complémentarité-facilitation sont plus importants que ceux dus à l’effet
d’échantillonnage, (ii) que les effets de complémentarité-facilitation tendent à augmenter dans le
temps et avec le nombre d’espèces et (iii) que les effets d’échantillonnages ne montrent pas de
tendances temporelles (Cardinale et al. 2007, van Ruijven & Berendse 2005, 2009, Fargione et al.
2007, Fig. 7).
Figure 7 : Effet net de la biodiversité partitionné en
effet de complémentarité-facilitation (cercles pleins) et
en effet d’échantillonnage (carrés vides) pour un
assemblage de 8 espèces. L’effet de complémentarité
augmente jusqu’en 2003, puis se stabilise. Il n’y a alors
plus de tendance temporelle. En revanche, aucune
relation de l’effet d’échantillonnage avec le temps n’est
détectée. L’augmentation de l’effet de
complémentarité-facilitation avec le nombre d’espèces
n’est pas montré ici. Issue de van Ruijven & Berendse
(2009).
Le rôle des légumineuses dans la relation diversité-productivité
La facilitation exercée par les légumineuses vis-à-vis des autres espèces d’un même assemblage, via la
fertilisation du sol en azote, a clairement une influence majeure dans la relation diversité-production
de biomasse (Tilman et al. 1997, Hector et al. 1999, Fornara & Tilman 2008), notamment sur le long
terme (Fargione et al. 2007). Puisque de nombreuses études comprennent des légumineuses parmi les
espèces manipulées, la question de savoir si, dans ces expérimentations, les effets significatifs de la
diversité pour la productivité ne proviennent pas simplement de la plus grande chance d’intégrer des
légumineuses par effet d’échantillonnage a été un objet de débat (Huston et al. 2000, Fridley 2001).
Cependant, il a été montré que les accroissements de productivité et de l’effet de complémentaritéfacilitation, observés dans les assemblages plus riches, n’impliquent pas seulement la facilitation entre
les légumineuses et les autres espèces, mais aussi un effet de complémentarité-facilitation entre les
espèces non-légumineuses (Loreau & Hector 2001, Tilman et al. 2001). De même, dans des
expérimentations qui n’incluent pas de légumineuses, des effets positifs de la biodiversité peuvent être
14
visibles et de la complémentarité entre espèces peut être détectée (van Ruijven & Berendse 2005,
2009).
Conclusion
Si l’on considère les résultats des études ayant cherché à tester l’importance des mécanismes présentés
plus haut, il est possible de conclure que les effets de la biodiversité sur la production de biomasse ne
s’expliquent pas par le seul effet d’échantillonnage, notamment sur le long terme. Au contraire, les
mécanismes de complémentarité et/ou de facilitation semblent quantitativement plus importants, bien
qu’en pratique ces deux mécanismes soient souvent évalués ensemble. En outre, l’enrichissement en
azote du sol grâce aux légumineuses, bien qu’étant un processus influant fortement la production de
biomasse des communautés végétales, n’est ni exclusif, ni indispensable.
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVE DE STAGE
Cette revue bibliographique montre que le fonctionnement des écosystèmes est en partie prédictible à
partir du niveau de biodiversité. La question de savoir quelle composante de la biodiversité est la plus
pertinente du point de vue du fonctionnement des écosystèmes a été très débattue et continue encore
de l’être aujourd’hui.
Néanmoins, on assiste à l’émergence d’un consensus selon lequel la composante qui pilote le
fonctionnement des écosystèmes correspond aux traits fonctionnels des espèces. Reste à savoir si la
structure fonctionnelle des communautés est mieux décrite par (i) une approche qui considère que les
effets d’une communauté sur les processus dépendent essentiellement des traits fonctionnels des
espèces dominantes, ou bien par (ii) une approche qui met davantage en avant la variabilité des traits
fonctionnels présents dans l’assemblage. Dans le deuxième cas, des travaux sont en cours pour mettre
en évidence des indices de diversité des traits fonctionnels permettant de rendre compte au mieux de
la diversité fonctionnelle des communautés.
La question des mécanismes à l’origine de l’effet de la biodiversité a aussi été très débattue et reste
encore largement ouverte. Un nombre important de travaux ont testé dans quelle mesure l’effet
d’échantillonnage est responsable ou non de l’effet observé de la biodiversité sur le fonctionnement
des écosystèmes. Il ressort aujourd’hui que les phénomènes de complémentarité et de facilitation entre
espèces en sont les mécanismes principaux.
Mon sujet de stage de recherche se situe dans le cadre de la problématique du rôle de la diversité pour
les services rendus et s’appuie sur l’approche par les traits fonctionnels. L’objectif sera de mettre en
relation une gamme de niveau de diversité fonctionnelle avec des valeurs de production primaire et de
teneur en azote (i.e. un aspect de valeur nutritive) mesurées pour différents assemblages, dans un
contexte de prairie humide pâturée (Loucouray et al. 2003, Rossignol et al. 2005).
15
Sur le plan des hypothèses à tester, ce sujet de stage vise à explorer le rôle du mécanisme de
complémentarité entre espèces ou entre groupes fonctionnels, pour les deux services rendus mesurés.
L’idée est de prendre en compte (i) la complémentarité liée à l’hétérogénéité de la distribution des
traits sur les plans racinaires et aériens, (ii) la complémentarité lié à des différences de calendrier de
croissance et de phénologie entre les espèces, au sein des assemblages. En outre, (iii) il s’agira
d’examiner si la valeur agronomique à l’échelle d’une prairie bénéficie d’un effet de
« complémentarité spatiale » entre les différents assemblages d’espèces (i.e. patchs de végétation) qui
la composent.
Méthode de recherche bibliographique :
Dans un premier temps, j’ai commencé par rechercher des articles sur les bases documentaires, avec
des mots clés assez généraux tels que « Plant functional trait diversity, complementarity of resource
use, biodiversity, ecosystem processes,…». Le but était de trouver de la bibliographie générale, de
découvrir les enjeux scientifiques et sociétaux, les raisonnements, les hypothèses générales du sujet.
Petit à petit j’ai pu prendre conscience des grands axes de réflexions parallèles ou complémentaires
autour de la relation diversité-fonctionnement des écosystèmes. Cela m’a permis de mieux évaluer la
pertinence des articles rencontrés vis-à-vis de mon sujet de rapport bibliographique.
Une fois plus familiarisé avec la thématique et avec quelques idées quant à la structure du rapport
bibliographique, j’ai pu être plus précis dans mes recherches en utilisant des mots clés plus appropriés.
De même, il est devenu plus évident de passer des publications lues aux publications citées qui
semblaient développer des idées intéressantes pour le sujet du rapport bibliographique. Globalement,
j’ai surtout utilisé la base documentaire de Web of Science, mais aussi Scopus, Science Direct, Google
Scholar, et directement les sites Internet des chercheurs quand les articles recherchés n’étaient pas
accessibles ou pas disponibles sur Web of Science.
16
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