© A.Duclos
3:HIKLTA=\UXUUU:?a@c@h@n@k;
M 01907
- 273 -
F: 3,00 E
Au coeur
de la traque
du dernier nazi
Entretien avec
le grand rabbin de Paris
Diaspora :
Enquête sur la
communauté juive
d'Allemagne
Bernard-Henri Levy
Bernard-Henri Levy
N°273 - NOVEMBRE 2007 - 3
N°273 - NOVEMBRE 2007 - 3
Armand et Eliette
Abecassis :
Le livre
des passeurs
Entretien avec
le grand rabbin de Paris
Diaspora :
Enquête sur la
communauté juive
d'Allemagne
Armand et Eliette
Abecassis :
Le livre
des passeurs
4Réflexions sur le néo-antisémitisme
par Bernard-Henri Levy
8Le Grand Rabbin Messas, “La voix religieuse du Consistoire”
un entretien avec le Grand Rabbin de Paris
10 Ehud Olmert s’adresse à la communauté juive de France
par Sandrine Amiel
12 Au coeur de la traque du dernier nazi
un entretien avec Danny Baz
15 Les dérives du Mrap
par Maurice Winnykamen
16 L’humour perdu des juifs
18 Le livre des passeurs
par Albert Bensoussan
19 “Les auteurs que nous aimons
un entretien avec Armand et Eliette Abécassis
22 Le Consistoire de Paris sur tous les fronts
24 La hevra kaddicha ou les services du dernier devoir
par Jack-Yves Bohbot
25 Au temps des premières écoles primaires consistoriales de Paris
26 Samuel Cahen (1796-1862)
par Philippe Landau
28 Le commentaire infini du verset
30 “La France est un laboratoire pour penser les relations judéo-musulmanes”
un entretien avec Ari Alexander
31 756 fois appelé à la lecture de la Torah
32 “Buffault, une communauté spécifique”
un entretien avec le Rabbin Didier Weill
33 Rencontre avec la Communauté juive de Toulouse
un entretien avec Arié Bensemhoun
34 Enquête sur les nouvelles communautés juives en Allemagne
un entretien avec Olivier Guez
36 Walter Benjamin ou le rêve de vivre
un entretien avec Ami Bouganim
39 Variation ladino
40 Quand un ancien président ne lit pas ce qu'il publie
par Paul Giniewski
42 Histoire d'un intellectuel
par VM
A LA UNE
HISTOIRE
POLITIQUE
LA CHRONIQUE DE GUY KONOPNICKI
HUMOUR
JUDAÏSME
SOCIÉTÉ
LA VIE DE L’ACIP
BICENTENAIRE
BONNES FEUILLES
DISPORA
CULTURE
OPINION
COMMUNAUTÉS
POST-SCRIPTUM
Editorialiste : Josy Eisenberg
Chroniqueur : Guy Konopnicki
Comité de rédaction : Josy Eisenberg,
Michel Gurfinkiel, Victor Malka,
Joël Mergui, Philippe Meyer
Collaborateurs : Armand Abécassis,
Anne-Julie Bémont, Albert Bensoussan,
Paul Giniewski, Hélène Hadas-Lebel,
Carol Iancu, Gérard Israël, André Kaspi,
Naïm Kattan, Odette Lang, Annie Lelièvre,
Daniel Sibony.
Direction Administrative
et Financière :
Noémie Lasry
Maquette : Information Juive
Régie publicitaire : What you need
Tél. : 01 47 39 10 10 - Fax : 01 42 70 61 84
Edité par S.a.r.l. Information Juive
le journal des communautés
au capital de 304,90
Durée de la société : 99 ans
Commission paritaire des journaux
et publications : 0708K83580
Dépôt légal n° 2270.
Impression : SPEI Imprimeur
Tél. : 03 83 29 31 84
Les textes de publicité sont rédigés
sous la responsabilité des annonceurs
et n’engagent pas Information juive.
Abonnement annuel : 30
Abonnement de soutien : 46
Abonnement expédition avion : 37
Les manuscrits non retenus
ne sont pas renvoyés.
INFORMATION JUIVE
17, rue Saint-Georges
75009 Paris
Rédaction :
01 48 74 34 17
Administration :
01 48 74 29 87
Fax : 01 48 74 41 97
Fondateur :
Jacques Lazarus
Gérant de la SARL,
directeur de la publication :
Philippe Meyer
Directeur :
Victor Malka
ACTUALITÉ
SOMMAIRE
A LA UNE
4INFORMATION JUIVE Novembre 2007

Information juive : N'est-ce pas exces-
sif de votre part de considérer que la France
peine encore à se réveiller de Vichy ?
Bernard-Henri Lévy : Je suis content
que vous attiriez l'attention sur ces
chapitres qui, curieusement, sont ceux
dont personne ne parle. Ce sont des
éléments que je considère comme
importants dans ce travail. Bizarrement
dans tous les commentaires qui ont été
faits dans les journaux, à la radio et à la
télévision, personne n'aborde ces
questions. Je vous laisse le soin
d'interpréter ce malaise.
I.J : Comment l'interprétez-vous vous-
même ?
BHL : Il me semble que les thèses que
je développe notamment sur la question
du néo-antisémitisme sont des thèses qui
mettent mal à l'aise. Expliquer que ce néo-
antisémitisme ne sera plus l'affaire des
catholiques, qu'il ne viendra plus de la
droite raciste, qu'il n'aura plus la forme de
l'anti-capitalisme de l'époque de l'affaire
Dreyfus mais qu'il aura de nouvelles
formes dont je décris les trois moteurs qui
sont l'anti-sionisme, le négationnisme et
la compétition des victimes, que par
conséquent, il ne pourra naître que dans
les rangs de ceux que j'appelle les néo-
progressistes, tout cela jette naturellement
un froid. Dire que l'antisémitisme
redeviendra -ce qu'à Dieu ne plaise- un
mouvement de masse si fusionnent
ensemble, comme une molécule
chimique, ces trois éléments, c'est mettre
les pieds dans le plat et jeter un pavé dans
la mare.
Au demeurant, cette synthèse dont
j'évoque la possibilité s'est déjà faite dans
des pans entiers du monde arabo-
musulman ; elle s'est faite chez des gens
comme Dieudonné ou Tariq Ramadan et
d'autres. ; elle est en train de se faire dans
certaines officines (ou des laboratoires
d'idées) en marge de la gauche. Si elle
devait dépasser le stade de ces
laboratoires, alors il y aurait de nouveau
du souci à se faire.
Pour ce qui du réveil de Vichy, le
président de la République a bien dit que
la France n'avait pas commis de crime
contre l'humanité et qu'elle n'avait pas
participé au génocide, ce qui est pour le
coup juridiquement faux et ce qui
Réflexions sur
le néo-antisémitisme
UN ENTRETIEN AVEC BERNARD-HENRI LÉVY
équivaut à effacer d'une part le beau
discours de Jacques Chirac en 1995 et
d'autre part le procès Papon lui-même.
I.J : D'où vous concluez qu'il ne faut jamais
céder sur le devoir de mémoire.
BHL : Il est bien venu aujourd'hui, y
compris parmi des amis qui me sont
proches, ou des camarades de pensée, de
dire qu'on en a trop fait sur le devoir de
mémoire ou encore que la mémoire
étouffe l'histoire. Je crois personnellement
qu'on n'en a jamais fini avec la mémoire.
Ce beau concept de devoir de mémoire
qu'a inventé Primo Lévi - qu'aurait dû
inventer Emmanuel Levinas qui a écrit
qu'il y a des blessures qui saigneront
jusqu'à la fin des temps - doit se perpétuer.
A condition de ne pas le transformer en
une mémoire ressenti-mentale ou en cette
mémoire antiquaire que fustigeait à juste
raison Nietzsche.
I.J : Vous considérez l'anti-américanisme
comme une métaphore de l'antisémitisme. Vous
ajoutez que, chez beaucoup, on dit Amérique
et on pense juifs.
BHL : Quand je dis cela, je ne fais que
citer Hugo Chavez, Ahmadinejad, le
Hezbollah, le Hamas etc… Les uns et les
autres disent indifféremment Amérique
ou juifs. Ils parlent bien de l'axe
américano- sioniste.
I.J : Ne peut-on pas être anti-américain sans
être anti-juif ?
BHL : Vous jouez sur les mots. Si par
anti-américanisme on entend le fait de
détester Bush, d'être hostile à la guerre en
Irak, de trouver qu'il y a dans le mode de
Dans le nouveau livre qu'il publie aux éditions Grasset (Ce grand cadavre à
la renverse. 19 E 90) et qui est sans doute l'un de ses ouvrages les plus forts,
le philosophe Bernard-Henri Lévy aborde dans de nombreux chapitres des
thèmes comme le néo-antisémitisme, le dreyfusisme, le devoir de mémoire,
le judaïsme et ce que lui ont apporté dans ce domaine des philosophes
comme Emmanuel Levinas ou Benny Lévy. Il y analyse également des
notions comme la tolérance et la laïcité et ce qu'il appelle “la grande sagesse
biblique” et termine son livre sur les leçons que lui enseignent des penseurs juifs comme le Gaon de Vilna
et son disciple Haïm de Volozhin. Nous avons rencontré Bernard-Henri Lévy
Bernard-Henri Lévy
INFORMATION JUIVE Novembre 2007 5
A LA UNE
vie américain ou dans la modernité telle
qu'elle se déploie en Amérique des
éléments qui ne sont pas aimables, alors
je suis le premier anti-américain de
France. Mais si par anti-américanisme on
entend ce qu'on entend de Drieu La
Rochelle, des fascistes des années 30, je
dis alors qu'il s'agit d'un des piliers et un
des ressorts du fascisme. Quand vous
observez tous les fascismes (le fascisme
brun, hitlérien ou mussolinien, celui des
Frères musulmans ou d'Albana) vous
constatez que la haine de l'Occident -
considéré comme l'asile de tous les stupres
et de tous les maux - était un des piliers
essentiels de cette doctrine.
Regardez Heidegger, immense
philosophe qu'il faut lire inlassablement,
idéologue nazi. Son vrai problème, ce qu'il
hait le plus parce qu'il le considère comme
l'ennemi de cette pensée poétique dont
l'Allemagne devrait être l'épicentre, c'est
la modernité américaine.
I.J : C'est à Durban, en septembre 2001, que
l'on a assisté à l'acte de naissance d'un anti-
sémitisme osant, à nouveau, s'exprimer à ciel
ouvert et planétaire. Ce fut - écrivez-vous - "un
moment de honte, de mépris et de faillite
morale"
BHL : Je consacre en effet quelques
pages de mon livre à cette affaire de
Durban. Quelques jours avant l'attaque
du World Trade Center, il y a là un
rassemblement d'ONG destiné en principe
à parler du racisme, de l'esclavage et de
l'oppression dans le monde. Or que voit-
on ? Il n'y est question que du conflit
israélo-palestinien. Tout se passe comme
s'il n'y avait aujourd'hui qu'une guerre et
une seule source d'oppression :
l'occupation par Israël des territoires
palestiniens.
On a fait des Palestiniens la victime
absolue. Tous les opprimés qui espéraient
que leur martyr allait être évoqué - les
rescapés rwandais, les victimes d'un
possible génocide annoncé au Burundi
entre autres - sont complètement passés
par pertes et profits. Ils n'existent plus dans
ce grand théâtre d'ombres. D'autre part,
on assiste là à une véritable "nazification"
d'Israël et des juifs en général avec ce
slogan parmi d'autres : "One Jew, one
bullet" (une balle pour chaque juif ). A
Durban a commencé de se faire
cette synthèse des trois atomes que
j'évoquais : la compétition des victimes,
l'anti-sionisme et le négationnisme.
I.J : Comment expliquez-vous que, soixante
ans après la Shoah, cet antisémitisme perdure
et qu'il atteigne parfois de bons esprits ?
BHL : Il a toujours atteint de bons
esprits. L'une des lectures les plus difficiles
pour un juif et, au-delà, pour un esprit
éclairé, c'est l'Histoire de l'antisémitisme
de Léon Poliakov. La seule fois de ma vie
où j'aurais pu frôler la dépression nerveuse
c'est quand j'ai découvert, à 25 ans, que
les écrivains que j'admirais le plus, ceux
qui m'avaient formé et qui m'avaient
donné le goût de la langue française,
avaient pu écrire de telles horreurs sur
moi ou sur les miens.
Comment cela marche ? La vraie chose
qu'il faut comprendre c'est que
l'antisémitisme ne se contente jamais de
dire : je hais les juifs. Il se fabrique
toujours un système de légitimation. Il se
donne de " bonnes raisons " de les haïr.
L'antisémite catholique dit : les juifs ont
tué le Christ. Ils sont responsables d'un
crime immense. Pour cette raison-là, ils
doivent être détestés. Voltaire, à l'époque
de l'antisémitisme des Lumières, dit
l'inverse : les juifs ne sont pas haïssables
en soi mais ils ont inventé le Christ. Ils
sont donc responsables de cette peste
qu'est le monothéisme. Et moi, au nom de
l'anti-cléricalisme et de " Ecrasons
l'infâme", je les déteste. Quant à
l'antisémitisme de gauche - à l'époque de
Jules Guesde ou de Drumont -, il dit : les
juifs sont des banquiers et des ploutocrates
et oppriment les humbles et les petits.
C'est le même phénomène auquel nous
assistons aujourd'hui. Ces bons esprits que
vous évoquez disent : nous n'avons rien
contre les juifs mais regardez Tzahal et
l'occupation des territoires. Prenez
l'exemple de José Bové, quand il rentre
d'un voyage en Israël, il y a trois ans, il
donne une interview à Oumma.com (le
site où s'exprime parfois Tariq Ramadan)
il décrit Israël comme un pays entouré de
miradors et comme une armée de
barbares.
I.J : Robert Wistrich a dit de l'antisémitisme
qu'il était " la plus longue haine ". N'y a-t-il pas
dans cette haine quelque chose d'irrationnel,
peut-être de mystique ?
BHL : Vous voulez sans doute dire
d'énigmatique. Je considère pour ma part
que cela a à voir avec le fait que les juifs
sont les porteurs de la loi. Ce à quoi on en
veut, à la fin des fins, c'est à ce corps du
judaïsme : la loi, la haine de l'idolâtrie,
l'empêchement d'idolâtrer en rond.
L'humanité veut être idolâtre, elle veut
adorer l'Histoire, les idoles de fer et de
sang et elle trouve, en travers de sa route,
les juifs. C'est ce que dit Hegel : il y a ce
petit peuple qui me fiche en l'air mon
système dialectique et détruit ma
théodicée. Il y a un peuple qui résiste et
ne veut pas disparaître. Il continue
d'exister à l'abri de ses barrières invisibles
Emmanuel Levinas
La vraie chose qu'il faut comprendre
c'est que l'antisémitisme ne se contente
jamais de dire : je hais les juifs.
Il se fabrique un système de légitimation.
1 / 44 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !