Après tout le mois d'Eloul, Roch Hachana (le jugement face à Dieu), et Kippour
(le pardon), nous entrons enn, puriés, dans la joie de Souccot. Dans la Soucca, sous les ailes
de la Chékhina, sous les ailes du bon Dieu, nous allons manger, nous réjouir et vivre un moment
extraordinaire de joie. Souccot est la fête de la joie, de la sim'ha.
Que nous est-il demandé lors de cette fête ? Sachant qu'il n'y a pas de fête juive dans laquelle on ne
nous demande pas quelque chose d'essentiel, ne s'agit sûrement pas à Souccot de simplement manger
et faire la fête. Tout le monde comprend qu'à Roch Hachana on est jugé, et qu'il faut donc faire un travail
d'introspection et se dénir. Tout le monde comprend qu'à Kippour, on nous demande de faire téchouva,
de se repentir. Mais que nous demande-t-on a Souccot ? Quel est le travail spirituel, éthique, qu'il nous
est demandé de réaliser lors de cette fête ? En vérité, contrairement à ce qu'on aurait pu penser, le
travail que Dieu nous demande de réaliser à Souccot est ÉNORME, beaucoup plus difcile que celui
de Roch Hachana ou de Kippour.Durant tout le mois d'Eloul, nous aspirons à nous approcher de Dieu.
Lors du jugement de Roch Hachana, nous sommes dénis, recréés. A partir de cela, nous faisons une
téchouva extraordinaire, de purication. Et à Yom Kippour, comme nous l'avons expliqué une fois, nous
rejoignons l'intimité avec Hachem, nous nous arrachons des processus du monde. Nous cassons avec le
diktat de la sociologie, de ce qui nous entoure. On n'est plus déterminé par l'être,
par un temps extérieur; on est déterminé par le rapport essentiel avec ce que je suis, avec mon
intrigue, avec l'extraordinaire éclat divin qui est en moi.A la sortie de Yom Kippour, paradoxalement,
D.ieu nous demande de rejoindre le Monde. C'est cela Souccot: reconquérir le monde à partir du point
extraordinaire dévoilé à Yom Kippour. Ce point extraordinaire de lumière, de divinité qui est en nous,
mais qui pourrait nous conduire à l'isolement. Car, en effet, en sortant de Kippour, on pourrait se dire: "Je
suis tellement proche de Dieu que je n'ai plus besoin du monde." Et c'est un peu vrai car Yom Kippour
est de la dimension du monde futur. A Kippour, on est seul face à Dieu. Plus rien n'existe ! Le Satan
n'existe plus. Donc on pourrait, après Kippour, être tenté de s'isoler dans les grottes, en pensant qu'on
n'a plus besoin de personne et que la relation qu'on a avec Dieu nous suft.Sur cela, on nous dit "Non!
Après Kippour, usez de cette purication, de ce point de lumière, de ce baiser divin reçu à Kippour, de
cette extraordinaire intimité avec Dieu, pour conquérir, à partir de point non-naturel, le naturel. D'ailleurs,
Souccot a un lien avec la nature : on y agite les arba minim, les 4 espèces. On recouvre la Soucca de
palmes, et Souccot a une dimension universelle. En effet, chaque fois qu'on parle de Souccot, on parle
des non juifs: lorsque ceux-ci ont voulu faire une mitsva, D.ieu leur a donné la mitsva de Soucca. Les
sacrices offerts à Souccot étaient des parot (taureaux), au nombre de soixante-dix, et qui rappellent
donc les soixante-dix nations. Souccot a donc à faire avec l'universel, avec la nature ; en un mot, avec
l'autre. Car à Souccot, D.ieu nous dit: "Vous vous êtes isolés avec Moi, à Kippour, dans la sphère de la
vérité. Mais Je ne veux pas que cette vérité reste prisonnière. Je veux qu'elle aille conquérir le monde.
" Il veut tellement que la kedousha (sainteté) que nous avons reçue
à Kippour se propage dans le monde qu'Il nous demande: "Sortez de vos maisons! Allez dans les
cabanes! Allez dans le monde! Et allez là-bas sanctier l'endroit."C'est cela le travail que nous devons
faire à Souccot : partager la lumière que nous avons récoltée à Kippour. C'est pourquoi il y a un autre
jugement à Hochaana Rabba, car on nous juge alors sur notre capacité à partager avec les autres la
spiritualité extraordinaire que nous avons reçu à Kippour. Ce jugement est la continuité du jugement de
Roch Hachana, et du pardon.Au sujet du nom que la Torah donne au Etrog, péri ets hadar, la Guémara
donne plusieurs explications, et notamment une où elle établit un lien entre "hadar" et "hydro (eau, en
Grec)". Ce rapprochement qu'elle fait entre un mot de la Torah et la Grèce (qui, comme on le sait, est
la quintessence de l'esprit non juif, de la pensée non juive et de la beauté) est étonnant. Mais de quelle
beauté parle-t-on ? De la beauté de l'eau.La beauté, normalement, est universelle. Elle se partage, un
coucher de soleil peut être admiré et apprécié par un Juif ou par un non juif. L'esthétique est partageable
avec les non juifs, contrairement au sentiment religieux, par exemple. Donc on nous dit, encore une fois
d'entrer dans le monde. Comment ? À travers la beauté de l'eau.
En hébreu, l'eau (mayim) est le pluriel de "quoi?" (ma). D'ailleurs ce lien entre l'eau et le questionnement
existe dans toutes les langues, et notamment en :- Allemand, où "quoi" se dit "was", et "eau" se dit
"wasser";- Anglais, où "quoi" se dit "what" et "eau" se dit "water";
- Latin, où "quoi" se dit "quid" et "eau" se dit "aqua". Il y a donc un lien extraordinaire entre l'eau, et le
pluriel des questionnements, qui est la Torah elle-même (puisque "ein mayim éla Torah"). Pourquoi ?
SOUCCOT, LA FETE DE L'UNIVERSEL JUIF
(Par Rav Rephael Sadin)