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Il demande alors la résiliation judiciaire de
son contrat de travail aux torts de l’em-
ployeur et obtient gain de cause en raison
de la rétrogradation qu’il a subie.
Il réclame également des dommages et
intérêts pour harcèlement moral. Cette
fois, les magistrats restent sourds à sa
requête. Ils considèrent en effet que les
faits litigieux (rétrogradation, mise à l’écart,
menaces et propos dégradants) se sont
déroulés sur une trop brève période de
temps, compte tenu des arrêts maladie
postérieurs à la reprise, et sont dès lors
insuffisants pour caractériser un harcèlement
moral.
La Cour de cassation n’est pas de cet avis
et va donner raison au salarié sur tous les
plans.
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Solution : il résulte de l’article L. 1152-1
du Code du travail que les faits constitutifs
de harcèlement moral peuvent se dérouler
sur une brève période. La Cour de cassa-
tion censure donc la cour d’appel pour avoir
ajouté au texte légal une condition qu’il ne
prévoit pas. Elle lui reproche par ailleurs de
ne pas avoir pris en compte l’ensemble des
éléments établis par le salarié, parmi lesquels
les documents médicaux relatifs à une alté-
ration de son état de santé [Cass. soc., 26 mai
2010, n° 08-43.152].
La demande de résiliation
est justifiée
Un salarié victime de harcèlement moral
peut agir devant le conseil de prud’hommes
afin de faire reconnaître les faits de har-
cèlement subis et d’être indemnisé à ce
titre. Il peut également demander la rési-
liation judiciaire de son contrat ou prendre
acte de la rupture aux torts de l’employeur
en raison du harcèlement avéré. Les
demandes sont alors liées.
ATTENTION
Le salarié qui obtient en justice la reconnaissance
du harcèlement moral et une indemnisation du
préjudice subi peut toutefois voir rejetée sa demande
de résiliation judiciaire pour harcèlement. En effet,
lorsque le juge est saisi, celui-ci se place au jour
où il statue pour apprécier le fondement de la rési-
liation judiciaire. Si, entre-temps, les faits de
harcèlement moral ont cessé, la rupture du contrat
de travail n’a pas lieu d’être [Cass. soc., 1er juill.
2009, n° 07-44.198 : dans cette affaire, le départ
d’un directeur harceleur avait mis un terme aux faits de
harcèlement, la demande de résiliation judiciaire n’étant
alors plus justifiée].
Ce n’est pas exactement ce qui s’est passé
dans l’affaire du 26 mai 2010. Certes, les
mêmes faits étaient à l’origine de plusieurs
demandes : la résiliation judiciaire du contrat
de travail et l’indemnisation du harcèle-
ment moral. Mais la demande de rupture
n’était pas explicitement fondée sur la recon-
naissance du harcèlement moral. Le sala-
rié invoquait à l’appui une modification de
son contrat de travail liée à une rétrogra-
dation ayant eu un impact sur sa rémuné-
ration. En effet, classé attaché commercial
de véhicules accidentés, il était censé réa-
liser l’ensemble des activités liées à la reprise
des véhicules d’occasion et notamment
l’estimation physique, la détermination de
la valeur et la négociation du prix de la
reprise du véhicule. Or, depuis son retour
dans l’entreprise, il était cantonné à de
simples tâches d’exécution qu’il n’avait
jamais exercées auparavant et n’était plus
autorisé à prospecter de nouveaux clients.
La cour d’appel a donc fait droit aux argu-
ments avancés en prononçant la résiliation
judiciaire de son contrat de travail.
Elle a en revanche considéré que les agis-
sements répréhensibles n’étaient pas consti-
tutifs de harcèlement moral du fait de leur
brièveté, et a par conséquent rejeté la demande
de dommages et intérêts formulée sur ce
fondement. La Cour de cassation ne l’a pas
suivie sur ce deuxième point.
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Social Pratique / N° 549 / 25 juin 2010
[santé, sécurité et conditions de travail]