l’expérience, il suffit d’un ordinateur et d’une connexion
internet, deux choses auxquelles n’importe qui a accès
de nos jours. Il n’y a pas besoin non plus d’avoir des
connaissances en solfège, même si certains admettent
qu’une base de connaissances musicales peut
représenter un avantage : « On peut toujours s’en sortir
à l’instinct ou à l’oreille, mais avoir des connaissances
théoriques et techniques dans le domaine, savoir lire une
partition, ça te permet d’avoir une compréhension
globale de la musique », m’explique Lucas. Mais ce
savoir de base en solfège est loin d’être systématique,
la plupart n’ont même jamais joué d’un instrument
classique : le budget que représente l’achat d’un
instrument et les cours nécessaires peut en décourager
plus d’un. Au contraire, la M.A.O. ne nécessite aucun
investissement financier, du moins pas au début. Pas
besoin non plus de s’engager à suivre des cours toutes
les semaines : les formations dans le domaine, si elles
existent (par exemple à la Fabrique, à Nantes, où 5
studios de formation sont disponibles), restent
relativement rares. En effet, dans ce domaine,
l’apprentissage se fait parfois seul derrière son écran,
mais très souvent via l’aide de proches plus
expérimentés.
Lucas, alias Tika, aux Caves du Castel en 2015 (© Charles Ripon)
Un apprentissage social
L’aspect technique de la M.A.O. étant relativement
complexe, il semble essentiel pour tout novice d’être
guidé par une personne plus expérimentée : « Mes amis
m’ont aidé à me familiariser avec les principes de base
des logiciels de séquençage.
Sans ce coup de pouce,
j’aurais sûrement abandonné
avant d’avoir réussi à
produire une mélodie
correcte », me confie Lucas, qui s’est lancé il y a un an.
En effet on peut facilement se laisser décourager par la
complexité apparente d’un logiciel. L’aide permet à la
fois de faciliter et d’accélérer le processus.
*clubs situés respectivement Rue Mathelin Rodier, près de la
cathédrale Saint-Pierre-Saint-Paul et au Quai des Antilles, sur l'île de
Nantes
Et pour les quelques courageux qui ont fait leur
apprentissage en autodidacte, c’est souvent l’entourage
qui a fait naître en eux l’envie de se lancer dans
l’aventure : « A la base c’est voir mon frère s’essayer à
la M.A.O qui a éveillé ma curiosité. Ça m’a tout de suite
semblé beaucoup moins inaccessible, et puis j’ai eu
envie de créer à mon tour. J’ai téléchargé mon premier
logiciel, et j’ai passé des semaines à l’explorer avant de
bien maîtriser ses fonctionnalités de base », me raconte
Nelson.
Une concurrence croissante
Du fait de la popularisation croissante de la M.A.O. chez
les jeunes, il devient, fatalement, de plus en plus difficile
de se démarquer et de se faire une place dans ce milieu.
Pourtant tous ont l’espoir d’une certaine réussite, une
notion dont la définition est propre à chacun. Pour
Nelson et Von, réussir c’est vivre de sa passion, un
objectif à la fois ambitieux et pragmatique. « C’est un
peu utopique, mais ce serait l’aboutissement idéal,
même si ça suppose beaucoup de réussites
intermédiaires, que ce soit progresser artistiquement ou
gagner en notoriété », m’explique Nelson. Pour Lucas
en revanche, la réussite est avant tout artistique et
sociale : « Devenir une référence dans mon domaine,
démocratiser mon style musical, et surtout, tirer mon
association vers le haut ». En effet, dans le monde très
concurrentiel de la MAO, le succès se construit à
plusieurs : c’est sûrement cet aspect social qui
caractérise le mieux cet univers musical.
Quand l’union fait la force : les associations
Comme Lucas, beaucoup de jeunes font partie d’une
association : ces organisations à but non lucratif
présentent de nombreux avantages pour les jeunes
artistes. Tout d’abord, le statut associatif permet gagner
en crédibilité auprès des organisateurs d’évènements,
des bars et autres scènes. En effet les occasions de se
produire en public restent rares et se présentent souvent
grâce à un bon réseau de relations. « Avant je n’avais
jamais mixé en soirée, et deux mois après être entré
dans mon association, j’étais déjà passé aux Caves du
Castel et à l’Altercafé*. Si tu
veux pas rester à faire de la
musique dans ta chambre,
c’est important de s’associer
avec des gens qui partagent
les mêmes centres d’intérêt et qui ont les mêmes
objectifs que toi », m’explique Nelson, qui a rejoint La
Cuisine Records, une association composée de DJs et
de producteurs de musique électronique, de groupes de
musique électronique et acoustique, mais aussi de
tatoueurs et de graphistes. Cette diversité est voulue :
« On cherche à former quelque chose d’assez
éclectique, qui regroupe différentes formes d’art »,
« Faire partie d’une association
m’encourage à faire de mon mieux »