231
1996-2/3
Numéro 123-124 Résumés
Dette publique et taux de change dans les pays du G7 sur les deux dernières décennies
par Alain Paraponaris
Les travaux empiriques sur le taux de change se divisent grossièrement en modèles univariés et modèles macro-économiques en économie
ouverte. Les premiers n’ont aucun fondement particulier de théorie macro-économique mais présentent les meilleures performances
prédictives dans le court terme. Les seconds donnent des prévisions de court terme moins bonnes, mais aident à la compréhension de
l’évolution des taux de change à long terme. Ce papier présente rapidement quelques faits stylisés pour les pays du G7 en essayant de relier
l’évolution récente des taux de change avec celle de la dette publique. L’étude empirique s’appuie sur des tests de cointégration, des tests de
causalité au sein de modèles à correction d’erreur, des simulations de chocs sur variables et la décomposition de la variance d’erreurs de
prévision. Elle permet de distinguer les pays où la relation causale va de la dette publique au taux de change (Canada, États-Unis) de ceux où
la relation est inversée (Allemagne, France). La relation est bidirectionnelle pour la Grande-Bretagne et l’Italie, tandis que les résultats
obtenus pour le Japon ne permettent pas de conclure.
La cohérence temporelle des anticipations de change : une étude sur données d’enquêtes
par Agnès Bénassy-Quéré et Hélène Raymond
La cohérence des prévisions à différents horizons est une hypothèse moins exigeante que celle d’anticipations rationnelles, fréquemment
rejetée sur données d’enquêtes. Mais les tests de cohérence temporelle sont conditionnels à la modélisation des prévisions adoptée.
L’hypothèse de cohérence temporelle est ici testée pour les anticipations relatives à quatre taux de change, conditionnellement à quatre
modèles de prévision. L’exploitation de trois enquêtes différentes et l’estimation de plusieurs modèles garantissent une certaine généralité
des résultats qui doivent toutefois être relativisés suivant le pouvoir explicatif de chaque modèle. Il apparaît que les prévisions de change à
trois mois suivent un modèle naïf, tandis que les prévisions à plus long terme se rapprochent d’un modèle mixte
extrapolatif-adaptatif-régressif où la composante régressive est souvent prépondérante. Cette variété des modèles utilisés suivant les
horizons explique le fréquent rejet de l’hypothèse de cohérence temporelle et, par là, renforce l’hypothèse d’irrationalité des anticipations.
Crédibilité et fondamentaux macro-économiques au sein du SME : un examen empirique
par Benoît Coeuré et Antoine Magnier
Le lien entre la crédibilité des parités au sein du SME et l’évolution des fondamentaux macro-économiques est au centre du débat
économique né au lendemain des crises de change de 1992 et 1993. Cette étude propose une évaluation empirique de ce lien durant la
période 1983-1993. Dans un premier temps, nous construisons une mesure des anticipations de dévaluation des parités franc/mark et
lire/mark à partir de la méthode dite de “correction de la dérive” du taux de change dans un régime de zone-cible. Dans un second temps, à
partir d’une modélisation Var non-stationnaire, des tests de causalité au sens de Granger et le calcul de fonctions de réponse à des chocs
macro-économiques permettent d’évaluer le rôle des fondamentaux dans la formation des anticipations de dévaluation. Certaines variables
macro-économiques semblent bien affecter la crédibilité des parités considérées sur la période 1983-1993 mais ces liens apparaissent
généralement peu intuitifs et peu significatifs d’un point de vue économique. On constate toutefois que l’effet de chocs exogènes sur la
crédibilité de la parité franc/mark tend à s’estomper assez rapidement tandis que cet effet semble très persistant dans le cas de la parité
lire/mark. Les résultats ne permettent pas de conclure véritablement quant à la nature des crises de change de 1992 et 1993 mais suggèrent
que l’explication théorique des crises en terme d’équilibres multiples puisse être en partie justifiée. Ils soulignent surtout la nécessité d’une
approche économétrique plus structurelle.
Les modèles de crise de change : un essai de synthèse en relation avec la crise du franc de 1992-1993
par Olivier Jeanne
Cet article tente de présenter et comparer dans un cadre synthétique les mécanismes de crise de change proposés par la théorie économique ;
dégager les hypothèses qu’ils suggèrent sur l’origine de la crise du franc de 1992-1993, avant de les confronter aux “faits stylisés”. On
distingue deux approches théoriques, celle des modèles d’attaque spéculative et l’approche avec “clause de sortie”. Les modèles d’attaque
spéculative concentrent l’analyse sur le phénomène de fuite des réserves de change qui se produit au moment de la crise. Dans l’approche
avec clause de sortie, on s’interroge plutôt sur les raisons pour lesquelles les autorités monétaires choisissent de défendre ou non la monnaie
quand elle est attaquée. L’approche avec clause de sortie permet de faire le lien entre la crise du franc et certains fondamentaux comme le
chômage français ou la politique monétaire allemande. Par ailleurs, les deux approches sont compatibles avec l’hypothèse selon laquelle la
crise du franc n’était pas causée par les fondamentaux, mais autoréalisatrice.