le shofar revue mensuelle de la communauté israélite libérale de belgique N° d’agréation P401059 SEPTEMBRE/OCTOBRE 2007 — n°287 / Tichri 5768 synagogue beth hillel bruxelles Le pardon: conjugaisons de l’amour et de la raison. n°287 SEPTEMBRE/OCTOBRE 2007 / tichri 5758 N° d’agréation P401059 re vue mensuelle de l a communauté isr aélite libér ale de belgique EDITEUR RESPONSABLE : Rabbin Abraham Dahan COMITÉ DE RÉDACTION : Rabbi Abraham Dahan, Rabbi Floriane Chinsky, Ralph Bisschops, Serge Boruchowitch, Gilbert Lederman, Philippe Lewkowicz, Jacqueline Wiener, Emmanuel Wolf Le Shofar est édité par la COMMUNAUTÉ ISRAÉLITE LIBÉRALE DE BELGIQUE A.S.B.L. N° d’entreprise : 408.710.191 Synagogue Beth Hillel 80, rue des Primeurs, B-1190 Bruxelles Tél. 02 332 25 28 Fax 02 376 72 19 www.beth-hillel.org [email protected] CBC 192-5133742-59 RABBINS : Abraham Dahan et Floriane Chinsky ONT EGALEMENT COLLABORÉ a cette livraison : Henri Lindner et Monique Ebstein CONSEIL D’ADMINISTRATION : Avishaï Ben David, Ralph Bisschops, Patrick Ebstein, Paul-Gérard Ebstein, Ephraïm Fischgrund, Josiane Goldschmidt, Gilbert Lederman, Philippe Lewkowicz, Willy Pomeranc, Elie Vulfs, Serge Weinber, Jacqueline Wiener-Henrion, Emmanuel Wolf. Mise en page : www.inextremis.be Les textes publiés n’engagent que leurs auteurs. Image de couverture : R. Bisschops Sommaire 05 Le mot du président Demain à Beth Hillel par Philippe Lewkowicz 07 JUDAÏSME Beth Hillel dans la tradition juive : Quelle est la date de SimHat Torah? T’auras ta simHa à SimHat Torah par Rabbi Floriane Chinsky 09 Le pardon 12 Le pardon dans le Judaïsme, conjugaisons de l’amour et de la raison. 07 Par Jacqueline Wiener – Henrion Par Rabbi Abraham Dahan 15 L’appel universel de Yom Kippour Entretien avec Rabbi Albert Dahan Par Ralph Bisschops, Dr. phil. 18 Les fêtes de Tichri à Beth Hillel 20 «L’enfer, c’est les autres»? Et le paradis? Par Henri Lindner 15 22 Agenda 24 Être plus Beth Hillel en 5768 27 Soukkot: Exubérance et réflexion Extraits talmudiques Par Rabbi Floriane Chinsky Par Ralph Bisschops 20 29 Un peu d’humour 30 CULTURE Naissance et développement du Judaïsme Libéral Par Rabbi Abraham Dahan 34 Nelly Sachs Ethique et modernité Par Monique Ebstein 34 41 COMMUNAUTÉ Nouvelles d’Israël et d’ailleurs 43 Informations utiles Pour l’organisation de vos Simhot Un nom: Solange! Un numéro: 0497.57.47.27! le shofar L e mot d u pr és i d ent Demain à Beth Hillel par Philippe Lewkowicz En juin dernier vous receviez le remarquable numéro de clôture de la saison du Shofar dont le thème était notre Judaïsme Libéral; j’en profite pour adresser toutes mes félicitations à l’équipe de rédaction et plus particulièrement à sa coordinatrice Jacqueline Wiener. -l’organisation d’événements communautaires où le public répond de plus en plus présent : Yom Hashoa, action Levovitch, visite de groupes étrangers, ... -action sociale : Bikkour Holim, invitations à des repas communautaires… Comme nous sommes avant Je voudrais donc consacrer tout une synagogue, je dois ce premier mot de l’année à la suite logique du numéro précédent. Nous aussi préciser avec plaisir que chaque Shabavons une idée de ce que nous sommes. Que bat, il y a toujours minyan et que le plus voulons-nous faire de cette identité ? Quelles souvent, on ne doit même plus se poser la question. sont les actions qu’elle induit ? Quels moyens devons-nous Les appels que De manière plus discrète, samettre en œuvre ? nous recevons chez aussi que les appels que Je voudrais limiter ici mon sont de plus en nous recevons sous différenformes sont de plus en plus propos à l’action collective de plus nombreux et tes nombreux et proviennent de notre communauté. En effet, tous les horizons. Ils concerproviennent depuis l’inauguration de notre nent aussi bien les passages nouveau bâtiment, beaucoup de tous les de la vie ; mariage, naissance, de choses ont changé, notre horizons. bar/bat mitzvah et malheureunouvelle infrastructure nous a sement aussi décès, que les asdonné l’outil nécessaire pour rencontrer des besoins nouveaux ou qui ne pects sociaux privés : rencontre, visite aux s’exprimaient pas dans toute l’amplitude personnes en détresse, questionnement personnel … que nous connaissons depuis. Ainsi, pour ne parler que des éléments les plus remarquables, citons : -notre Talmud Torah, qui accueille chaque année près de 60 enfants et qui constitue notre mission prioritaire. -l’enseignement pour adultes, les cours d’initiation et de midrash sont assidûment suivis. Ce développement encourage bien sûr tous les acteurs et bénévoles de la communauté et, en premier lieu, les rabbins qui se consacrent sans compter au bénéfice de celle-ci. Devons-nous continuer et trouver les ressources pour répondre positivement à ceux qui viennent nous voir, à ceux qui voient dans 5 J UDA Ï S M E Beth Hillel le lien avec le judaïsme qui leur manquait jusqu’ici ? Unanimement, les rabbins et le conseil d’administration ont répondu oui. Les moyens humains sont là, les moyens matériels aussi, mais aucun des deux en suffisance pour rencontrer les ambitions que nous avons tous pour notre communauté. Nous préparons donc pour l’année qui vient, des activités, des fêtes merveilleuses de Soukkot, Hannoucah, Pourim, des rencontres, un voyage et des moyens de communication qui sont autant de portes pour que celui qui le désire puisse les franchir et trouver - ou retrouver - la joie d’un judaïsme vivant, ouvert et actualisé car inspiré par les traditions de nos pères et l’audace de leurs lectures. Les moyens humains sont là, les moyens matériels aussi, mais aucun des deux en suffisance pour rencontrer les ambitions que nous avons tous pour notre communauté. Jusqu’ici, la vie de Beth Hillel a toujours été une succession de rencontres et de petits miracles; faisons tous ensemble en sorte que cela continue, nous avons confiance en vous. Pensez-y en ce début d’année, veille des fêtes de Tichri. Au nom du conseil d’administration, je présente à tous les lecteurs du Shofar, à toute la communauté, à l’Etat d’Israël et à ses citoyens une belle année 5768 dans la paix, la santé et la prospérité. Chana Tova 6 Le site de Beth Hillel est ouvert Découvrez le sur : www.beth-hillel.org Vous y trouverez e.a. l’agenda, les parashot, des infos, des photos et plein d’autres choses utiles. Le site n’est bien sûr pas parfait, nous voulons l’améliorer, n’hésitez pas à nous faire part de vos suggestions et critiques en écrivant à [email protected] Bonnes visites ■ le shofar Beth Hillel dans la tradition juive : Quelle est la date de SimHat Torah? T’auras ta simHa à SimHat Torah par Rabbi Floriane Chinsky Beth Hillel, une tradition au sein de la grande famille du judaïsme A Beth Hillel, nous portons notre réflexion sur l’identité juive d’aujourd’hui et de demain, nous essayons de créer les maillons nécessaires entre le passé et l’avenir. Mais pourquoi ne faisons-nous jamais rien comme les autres ? A cette question, une seule réponse juive est possible, et c’est évidemment une autre question : pourquoi les autres ne font-ils jamais rien comme nous ? A ces deux questions bien sûr, l’esprit juif formé par le Talmud ou l’humour juif qui s’en inspire ne répondra que d’une seule façon : ces questions sont mal formulées. En réalité, notre tradition se fonde d’une part sur la Torah (les sifré torah, la torah écrite), et d’autre part sur les décisions rabbiniques tissées les unes aux autres, à travers les âges (la torah orale, les responsa). Ces décisions se complètent, se recoupent, se contredisent, et ceci pour une raison bien compréhensible : elles essaient toutes de faire vivre dans leur présent les mêmes principes éternels, mais elles le font dans des réalités historiques, géographiques et sociologiques très différentes. Voilà comment, à travers les siècles, des rabbins et des communautés ont pu suivre des chemins divers, sans que jamais le tissu social de notre peuple n’en soit affecté. Ainsi, chaque synagogue a ses options, et il appartient à chaque rabbin d’accompagner les communautés dans leur identité juive, de décider en fonction des réalités sociales de l’époque. C’est le concept de mara déatra : « maître du lieu ». Un rabbin étranger ne peut imposer un avis. Seul le rabbin en charge de faire grandir le lien entre une communauté spécifique et l’identité juive en général peut prendre une décision, qui ne sera pas nécessairement la même dans une autre communauté. Il n’y a pas de recette stéréotypée de l’identité juive. La question du redoublement ou non des fêtes en est une illustration. Certaines communautés fêteront cette année SimHat Torah un jour après nous, pourquoi ? Nous aimons notre tradition, nous aimons nos fêtes. Pour elles, nous sommes prêts à faire le maximum. Faire pour le mieux, ce n’est pas toujours faire plus. En célébrant les fêtes durant un jour et non deux (ce qui ra- 7 J UDA Ï S M E 8 mène SimHat Torah au jour précédant), nous nous sommes à nouveau confrontés à la nénous rattachons à l’ancienne tradition du cessité d’examiner ce qui sert au mieux la floraison de « la tradition de nos peuple d’Israël, au calendrier Chaque ancêtres ». israélien actuel et au calenComment prendre soin de la drier, somme toute, de la masynagogue a tradition de nos ancêtres ? jorité des communautés juives ses options, et L’orthodoxie a pris le parti de dans le monde. il appartient à conserver les deux jours de fêA la période du Second Temtes en dehors d’Israël, le mouple, nous avons été confronchaque rabbin vement massorti laisse les tés à des complications liées d’accompagner communautés déterminer la à la détermination de la date des fêtes. Nos Sages ont su les communautés meilleure façon pour elles de porter la tradition et le mouveprendre leurs responsabilités dans leur ment libéral a voulu ne conseret ont institué un second jour ver qu’un seul jour. de fête, pour être certains identité juive. A chacun de rechercher la qu’Israël serait en mesure que meilleure façon de contribuer à faire briller la célébration ait lieu au moment voulu. Lorsque le calendrier perpétuel a été fixé, la notre tradition. question s’est posée de l’intérêt de conserver A notre époque où célébrer ne serait-ce qu’un cette pratique. Les Sages ont alors répondu seul jour de fête est difficile pour beaucoup, par un principe qui nous touche profondé- nous choisissons de concentrer notre énergie ment : « prenez soin de la tradition de vos pour faire de ce jour là un évènement qui porpères qui repose entre vos mains », de peur tera la tradition de nos ancêtres, qui « repose entre nos mains ». C’est de cette que d’autres circonstances façon que nous faisons ensemtragiques n’amoindrissent la Il n’y a pas ble de SimHat Torah l’expresconnaissance de la Torah et ne de recette sion de notre identité, de la joie portent atteinte aux fêtes. Cela de la célébrer ensemble, de la s’est traduit, à l’époque, par la stéréotypée de fierté d’être un peuple structuré conservation du deuxième jour l’identité juive. non pas autour de slogans ou des fêtes dans des circonstand’icônes, mais autour d’un texte ces où les Juifs déterminaient eux-mêmes les modalités de leur travail, de- vivant au sens toujours renouvelé : la Torah. puis l’époque du Talmud jusqu’au Moyen Age. ■ Désormais intégrés dans la société globale, Hag SaméH ! Bonne fête à tous ! Envie de nous écrire ? de participer à la rédaction du Shofar ? N’hésitez pas et contactez nous ! le shofar Le pardon Par Jacqueline Wiener – Henrion Le pardon. Que de nombreux méandres de la pensée humaine se cachent derrière ce substantif ! Il y en a tant, des pardons ! Il y a ceux requis, quémandés, où l’auteur de leur expression attend, passivement ou non, que l’interlocuteur accède à la requête. Il y a ceux accordés, avec ou sans contrepartie. Il y a les authentiques et les factices, les altruistes et les égotistes, les normatifs et les spontanés. Il y a ceux qui ont pour objet de ne pas plus longtemps tenir rigueur d’une offense et ceux qui ont pour objet de considérer une faute comme non avenue ou de moindre importance. Il y a aussi, ailleurs, selon un autre cheminement de l’esprit, celui de l’être responsable : le pardon éthique. Celui où ce n’est pas tant l’absolution implorée, la psychanalysante repentance ou une générosité masochiste qui comptent mais bien le prétexte à exigence de remise en cause de soi dans un but noble : celui d’essayer de faire mieux, d’être mieux, de donner de soi mieux qu’auparavant. Le pardon prend sens, alors, non en terme de coups de balai sur le passé mais comme volonté sincère de perfectibilité dans le futur. Certaines situations humaines sont bien fort éloignées de ce pardon éthique là et posent question par rapport à l’échelle de valeurs qui permettent, selon le sens commun générale- ment admis, de « pardonner ». Franz Ehrmanntraut, par exemple. On lui a « pardonné ». En effet, il est décédé de sa belle mort en 1971. Chez lui, dans son lit, en Allemagne, où il avait été renvoyé après avoir été gracié, puis libéré à l’occasion du traité franco-allemand de l’Elysée de 1963. Robert Nitsch aussi, on lui a « pardonné », tout comme à Albert Fuchs. Ces trois types là figurent parmi d’autres noms, dont ceux des professeurs Otto Bickenbach et Eugen Haagen. Ces derniers poursuivirent, après avoir également été graciés puis relâchés, leur carrière de médecin et chercheurs en Allemagne, où ils décédèrent, à l’instar de leurs sinistres acolytes, dans les années septante. Nous avons découvert l’application d’une notion de pardon à ces infâmes personnages en parcourant, cet été, les allées documentées du musée du camp du Struthof, à Natzweiler, non loin de Strasbourg. Le Struthof, c’est ce camp alsacien dont nous avions déjà évoqué l’existence dans un précédent Shofar1, au moment où la Belgique apprenait avec effarement –c’était fin décembre 2005-, au fil de quelques entrefilets publiés dans les grands quotidiens, que six de 86 Juifs cobayes de la médecine nazie strasbourgeoise découverts dans des bassines de 1 « Les cobayes de la médecine nazie : de Malines à Struthof », JWH, Shofar 2006 9 J UDA Ï S M E 10 formol de la Faculté de Médecine avaient été à conviction de leurs méfaits figés dans les vitrines du camp alsacien transformé en mudéportées de Malines… Les uns, donc, de ces abjectes absous étaient sée qui pour l’heure, resurgissaient… Au-delà de l’impossible pardon des hommes qui avaient œuvré pour la Shoah qui a déjà fait notamment à Mauthausen ou Au-delà de beaucoup d’encre, des Buchenwald avant d’atterrir à l’impossible pardon couler repentances officielles qui se Natzweiler où tantôt ils s’entraînaient au tir sur des cibles pour la Shoah, des succèdent et des réconciliahumaines, tantôt participaient réconciliations qui tions qui se poursuivront, de tels dénis de responsabilité, aux pelotons d’exécution2. se poursuivent, longtemps encore, nous heurLes autres étaient des médecins qui procédaient à des exde tels dénis de teront. Parce qu’aux comportements périmentations médicales sur responsabilité, de tels hommes a été appliqué des Juifs rapatriés pour ce faire d’Auschwitz. longtemps encore, un concept erroné de pardon. Jamais celui ci ne devrait, au Pardonné, donc, Eugen Haagen, le virologiste de réputation in- nous heurteront. minimum, s’éloigner de l’association entre une volonté, ternationale! Intégré dans les services d’hygiène du Reich dès 1933, sa dé- de la part de leur auteur, de comprendre couverte d’un vaccin du typhus lui avait valut les actes qu’ils ont accomplis et leur décid’être inscrit sur la liste des candidats au Prix sion sincère de les assumer dans une persNobel de Médecine en 1936. En 1937, il adhéra pective de finalités dorénavant altruistes, au Parti Nazi. Dirigeant l’Institut d’Hygiène de bienveillantes et constructives, à défaut de l’Université du Reich à Strasbourg pendant réparatrices. l’Occupation, il mena des expériences sur Or donc comment comprendre, accepter, le typhus au Struthof. Ses cobayes humains interpréter le peu de cas qui fut fait de ces étaient maintenus sur des paillasses, sans crimes gravissimes aux peines individuelleboire ni manger. Ce maître dans l’art de gué- ment absoutes ? rir inoculait à ses victimes le virus du typhus Les héritiers politiques et judiciaires de ceux tantôt par scarification, tantôt par voie intra- qui accordèrent leur pardon à ces gens, au début des années soixante, sont-ils interpellés, musculaire. Pardonné encore, Otto Bickenbach, res- aujourd’hui, dans le cours de l’Histoire dont ponsable de la section médecine à l’Univer- ils participent par de telles interprétations de sité de Strasbourg ! Lui, il mena une série la commuabilité de sentences ? d’expériences, dès le printemps 1943, sur le A la veille de Yom Kippour, peut-être aussi phosgène, un gaz de combat. Il administrait faudrait-il s’interroger sur la portée univeraux déportés des anticoagulants à des doses selle à donner au sens des dix jours qui le diverses, puis les obligeait à s’empoisonner précèdent. Car à Natzweiler, au camp du Struthof, cet eux-mêmes à l’aide d’ampoules de phosgène. Pardonnés ils furent, comme bien d’autres été, personne ne semblait percevoir l’incomgardes-chiourmes ou brillants docteurs mensurable incongruité de ces retours déd’alors. Mais ce sont ceux là, leur nom, leur bonnaires en outre-Rhin à une paisible vie ■ visage, aux photographies et autres pièces civile… 2 « … Pas un seul des quelques survivants du Lager Struthof qui ne se souvienne de Franz Ehrmanntraut… Reculer les bornes de la brutalité était chez lui une vocation. Voir enfoncer les crocs dans la chair des déportés, les voir déchirés par les bêtes furieuses qu’il lançait contre eux était sa distraction préférée… » - extrait de la déposition d’un survivant au procès de Metz, juillet 1954. DANS LE CADRE DE LA JOURNEE NATIONALE DU MARTYR JUIF DE BELGIQUE L’UNION DES DEPORTES JUIFS EN BELGIQUE – FILLES ET FILS DE LA DEPORTATION VOUS APPELLE A PARTICIPER AU 51ème PELERINAGE A L’ANCIENNE CASERNE DOSSIN A MALINES LE DIMANCHE 9 SEPTEMBRE 2007 A 11H00 RASSEMBLEMENT DEVANT LA CASERNE DES 10H30 DEPART DES AUTOCARS A 9H30 BRUXELLES : PLACE ROUPPE, ANTWERPEN : ROMI GOLDMUNTZ CENTRUM POUR VOIR LE FUTUR, IL FAUT REGARDER DERRIERE SOI Isaïe 11 J UDA Ï S M E Le pardon dans le Judaïsme, conjugaisons de l’amour et de la raison. Par Rabbi Abraham Dahan 12 Yom Kippour, pour la plupart des Juifs, et même des non Juifs, c’est la fête du pardon. Qui n’a retenu cette scène cocasse et surréaliste dans le film ‘Le Grand Pardon’ à la synagogue un jour de Kippour? Cependant, le mot Kippour ne signifie pas ‘pardon’, mais littéralement ‘expiation’. Il y a dans la racine KPR l’idée de reconnaître ses faiblesses et ses fautes, d’interroger sa conscience et de s’engager à réparer. C’est d’ailleurs l’expression essentielle de la très abondante liturgie de Yom Kippour: «Car en ce jour il y aura expiation pour vous, afin de vous purifier de toutes vos fautes devant l’Eternel…» L’Amida des jours de semaine compte douze demandes adressées au Créateur. La première demande le discernement, l’intelligence, la seconde la tchouva, la conscience et la repentance, c’est-à-dire une intelligence qui ne soit pas seulement mathématique et la troisième seulement, la demande de pardon. Et c’est significatif. Le pardon est certes une exigence de la tradition d’Israël. Dieu c’est le «Av Harakhamim», le père de miséricordes abondant en pardon. Mais le texte liturgique que nous venons de mentionner rappelle que Dieu ne peut pardonner que les fautes commises envers Lui: «Lifné Adonaï titharou», devant l’Eternel vous serez purifiés. Des fautes commises envers le prochain, le Créateur n’y peut rien. Elles exigent réparation. C’est pourquoi les dix jours qui vont de Roch Hachana à Yom Kippour portent le nom de «Asseret yemé tchouva», les dix jours consacrés au repentir. Et cela va même plus loin, puisque du 1er Eloul au 10 Tichri, toute cette période de quarante jours est consacrée à faire en sorte d’obtenir réparation, de régler autant que faire se peut les conflits et de se mettre en paix avec nos prochains. Ce temps est désigné par la tradition comme des «Yamim Nora’im», des jours terribles, redoutables, parce qu’ils nous mettent en face de nous-mêmes comme devant un miroir de vérité, sans retouches possibles. Le pardon n’est donc pas automatique. Dans beaucoup de cultures et de religions, il suf- le shofar sous prétexte d’amour des fisait pour l’obtenir de réciter Il n’y a pas de animaux, on revendiquera une certaines formules, d’accomplir certains rituels ou de se gomme magique qui charte des droits de l’animal, mettant ainsi sur le même plan confesser. Pour le judaïsme, supprimerait les l’homme et l’animal. C’est faux ce n’est pas le cas. L’accent est mis sur la notion de tchouva effets qui découlent et c’est dangereux. Il existerait des droits de l’animal comme qui implique un réel examen d’un acte. existent les droits de l’homme. de ses actes, une interrogation C’est une confusion entre dede sa conscience et le devoir voir et droit. Nous avons des devoirs envers d’agir pour le bien. La racine CHOUV exprime l’idée de retour, l’animal, certes, mais il ne peut y avoir de revenir de ses chemins négatifs, renoncer à droits de l’animal. N’y aurait-il pas un amour ses mauvais choix, choisir le bien et entrer des animaux qui cacherait mal la haine des dans l’action bonne. Alors seulement peuvent hommes? s’ouvrir les portes du pardon et d’une vie plus Ainsi en est-il du pacifisme, qui trouve vraie. Cette notion de tchouva est spécifique aujourd’hui beaucoup d’adeptes, animés des au Judaïsme. Elle implique l’idée que l’hom- meilleures intentions. Cependant, tout le me peut changer. Aujourd’hui encore, pour monde sait qu’il est des situations où il faut beaucoup de spécialistes, avant dix ans un se défendre, même si la violence la plus légiêtre humain est fait et ne varie plus. L’ensei- time est toujours signe d’échec et porteuse gnement juif sur ce point est si surprenant de dérives. que le midrach rapporte que dix choses ont Ainsi en est-il pour le pardon. Sous prétexte été prévues avant la Création, comme pour de charité et d’amour, on l’accordera sans déroger aux lois de la nature, et l’une d’elle exiger la reconnaissance de la faute, la dec’est la tchouva, la capacité de changer tout mande de pardon et la réparation. Comme pour ce que nous venons de citer, c’est faux au long de sa vie. La formule qui résume toute la liturgie de et c’est dangereux. Kippour est frappante par sa profondeur. Mais notre antique Tora va encore plus loin. «Tchouva ou tfila ou tsedaka ma’avirim et Le pardon, même quand il est mérité, n’efface roah hagzéra», la tchouva, la prière et l’acte jamais les conséquences de la faute, car les bon font passer la souffrance du décret. effets de la cause sont inéluctables. Il n’y a pas de gomme magique qui Tchouva, le retour, c’est aussi la réponse, trouver la réponse Selon les rabbis, il y supprimerait les effets qui déd’un acte. Dans notre à son problème; tfila, la prière, aurait une alchimie coulent tradition, quand Moïse obc’est l’expression, exprimer son problème; tsedaka, la cha- de la vraie tchouva tient le pardon d’Israël, cela ne supprime pas la sanction. rité-justice, c’est l’action bonqui pourrait Le pardon permet de la vivre ne, agir. Cela correspond à une inverser la faute autrement, de l’alléger, de formule actuelle que les psy’s connaissent bien: connais ton volontaire en faute l’adoucir, de l’apaiser… «Eternel, Eternel, Dieu de miproblème, reconnais-le, expriinvolontaire et la séricorde et de grâce, lent à me-le et agis-le. Le pardon se mérite. Il n’est faute involontaire, à la colère, grand en amour et en Vérité, qui lève la faute, le jamais inconditionnel et il n’y a pas de pardon tout azimut. son tour, en mérite. crime, le manquement, mais qui n’efface pas» (Ex. 34, 6-7). Nous vivons une époque de grande confusion où le bien se confond trop C’est la remarquable formulation que donne souvent avec sa caricature. Par exemple, la Tora des attributs divins: l’amour, la grâce, 13 J UDA Ï S M E l’allègement de la faute, mais d’une part la vérité est exigée et d’autre part les effets de la faute ne sont pas effaçables. La loi semble implacable. Et pourtant, les rabbis, dans la liturgie de Yom Kippour, s’arrêteront au premier «venaké», et il efface. Donc, quand le pardon se mérite vraiment, la faute peut être effacée! Il y aurait un moment de la conscience, comme une alchimie, un miracle de la vraie tchouva qui, d’après la tradition, peut inverser la faute faite exprès en faute involontaire et la faute involontaire, à son tour, s’inverserait en mérite. Trois termes expriment en hébreu l’idée de pardon. Le premier, «slikha», ferait référence d’après certains exégètes aux anciens rituels et formules par lesquels on pensait obtenir l’absolution. Dans le second, «mekhila», il y a l’idée d’effacement, la faute pourrait s’effacer, on peut reconstruire sur des ruines, comme dans le second commandement; Dieu retiendrait ce qui construit: «qui reporte les fautes des pères sur les enfants pour trois et quatre générations… mais les bienfaits sur des milliers de générations». Dans «mekhila», il y a aussi «makhol», la ronde joyeuse, la danse de la vie. La joie du pardon? Enfin, le troisième terme, «kaper», où il y a l’idée, comme nous l’avons vu, d’expiation, de rançon, il y a un prix au pardon. Et, enfin, l’idée de couvercle, en hébreu «kaporet» ou «parokhet», le rideau. La faute non pas effacée, mais recouverte. Chana Tova ! 14 Laissez-vous séduire par le fait d’être chouchouté ! Concierge PRIVÉ pour particulier Arnaud 0477 90 24 18 Thomas 0472 97 76 40 www.privateconcierge.be ■ le shofar L’appel universel de Yom Kippour Entretien avec Rabbi Albert Dahan Par Ralph Bisschops, Dr. phil. R. B. : Pourquoi jeûnonsnous à Kippour? Cette exigence n’est pas biblique. notre tradition. Mais il y a des choses dans nos vies, des moments et des événements pour lesquels il y a un deuil à faire, et auxquels il faut donner un poids. Des choses qui demandent un acte à poser. Mais quand l’acte se fige en rite il se vide de sens. Pensez à la haftarah du matin de Kippour, notamment le texte d’Isaïe: « Faites d’abord justice à la veuve et l’orphelin, et venez jeûner après ».1 Mais il reste néanmoins vrai que le jeûne, comme celui de Tisha be Av, c’est un deuil. Rabbi Dahan : La Torah dit « vous affligerez vos personnes » , taanou et nafschoteichem (Lév. 16, 29); veïnitem et nafschoteichem (Lév. 16, 31). Le verbe « lehitanot » veut dire : « se punir », « se faire violence ». « Leanot isha, » dans l’hébreu biblique, c’est violenter une femme. C’est la même racine. C’est dur à accepter, mais il y a l’idée que les choses ont un poids, qu’il ne faut pas jouer au papillon. Certes, la culpabilisation et la R. B. : De quoi fait-on exacteIl y a une mortification sont des notions ment le deuil ? A Tisha be Av très éloignées de nous. Mais il y a comptabilité c’est à cause de la destruction des choses et des moments pour de l’âme qui du Temple. lesquels il faut poser des actes forts. souvent n’est pas Rabbi Dahan : Dans le jeûne de Il y a des factures; il faut payer la il y a deux choses. Kipen notre faveur. Kippour dette. La vie n’est pas un jeu. pour c’est Shabbath Shabbaton, Le génie de la tradition juive ce qui dénote l’idée de retrait. Ce consiste dans l’équilibre. D’une part il y a le retrait démultiplié, ce Shabbath absolu, perrefus d’un certain ascétisme et de la valori- met à l’âme humaine de descendre en ellesation de la douleur. Le cilice est étranger à même, l’examen sans mots de la conscience. 1 Isaïe, 58,5 : «Est-ce là un jeûne qui peut m’être agréable, un jour où l’homme se mortifie lui-même ? (...) Voici le jeûne que j’aime : c’est rompre les chaînes de l’injustice, de dénouer les liens de tous les jougs, de renvoyer libres ceux qu’on opprime, de briser enfin toute servitude ; puis encore de partager ton pain avec l’affamé ; quand tu vois un homme nu de le couvrir (...). » 15 J UDA Ï S M E 16 Pour permettre ce bain de l’âme, ce retrait tisme. Pour chaque Juif, même s’il n’est pas est nécessaire. Je ne peux pas rester dans le religieux, il y a quelque chose. Même s’il ne mouvement des choses, manger, travailler, se rend pas à l’office, il y aura un déclic dans lire mon courrier, écouter la radio et, en la tête. Kippour a un écho qu’aucun autre moment de l’année n’exerce. Le Juif même temps .... . Tout un chacun peut le comprenLa prière se sait, au fond de son être, même s’il connaît peu la tradition, que Kipdre, ce n’est pas nécessaire d’être compare à pour, c’est un jour qui ne rappelle Juif. Il y a un jour bilan qui a ses une piscine; aucun événement, qui n’est ratexigences. à aucune histoire. On peut Quant à l’idée du deuil, c’est très parfois la porte taché dire que Soukkot, c’est la cabane, paradoxal. Car d’une part, il y a l’exigence de mortifier nos êtres, est verrouillée, c’est une fête qui rappelle la trad’autre part, la tradition ensei- parfois elle est versée du désert. Le Shabbat, à la limite, nous rappelle la création. gne qu’il y a une joie de Kippour parce qu’il y a une confiance: le ouverte. Mais Pesach, c’est la sortie d’Égypte. pardon est possible. Ce n’est pas la teshouva est Ce sont des notions historiques et religieuses. Kippour, c’est très la détresse de la porte fermée. La porte est toujours ouverte. Selon comme l’océan. curieux, c’est le cœur même de la religion d’Israël et en même temps le midrach la prière se compare à une piscine, parfois la porte est verrouillée, ce jour n’est rattaché à aucun événement. Il parfois elle est ouverte. Mais la teshouvah, fait juste appel à l’âme de l’homme : « Tu es c’est comme l’océan.2 Au fond, le jeûne tra- homme : un embryon de conscience et une duit la conscience aiguë de nos faiblesses, de tête qui pense. Regarde-toi dans un miroir, nos manquements, de nos fautes et de nos en- de temps en temps, au moins une fois par an. gagements non suivis. Il y a une comptabilité Un miroir dans lequel tu vois ton reflet sans de l’âme qui souvent n’est pas en notre faveur. retouches. Et fais le point; regarde où tu en C’est de cela que nous portons le deuil et que es. Qu’est ce que tu cherches ? Qu’est ce que nous jeûnons. Il y a eu une destruction, il y tu as fait ? Et quel est ton projet ? » Ces quesa quelque chose qui s’est cassé. Ce fait-là, il tions s’adressent à tout le monde. Il n’est pas besoin d’être religieux, ou même d’être Juif. faut le marquer. Pour cette raison, Kippour est perçu par les R. B. : Comme expliquez-vous que Yom Juifs comme un appel purement et profondéKippour est aussi central dans la vie ment humain. Parce que toute notre culture juive ? La fête la plus importante reste porte à cette analyse-là. le Shabbath, car il est le signe d’alliance entre Dieu et son peuple. Comment se R. B. : Cela me rappelle une constatation fait-il que Kippour est le seul jour où qu’Abraham Yehoshua a faite dans un lipresque tous les Juifs se rendent à la sy- vre paru récemment.3 Dans le judaïsme il nagogue ? existe « un lien étroit entre appartenance nationale et appartenance religieuRabbi Dahan : C’est vrai. D’où vient cette se » que Yehoshua trouve problématique. magie de Kippour ? C’est comme un magné- Il imagine un judaïsme dissocié de sa 2 « La prière se compare au mikvé et la teschouvah à la mer. De même que le mikvé est tantôt ouvert tantôt verrouillé, ainsi les portes de la prière (shaarei tefila) sont parfois cadenassées et parfois ouvertes. Mais l’océan, c’est toujours ouvert. Ainsi les portes de la teshouvah le sont aussi. » Ekha Rabba, 3). 3 Israël, un examen moral. 2005. Paris: Calmann-Lévy (Le Livre de Poche) le shofar dimension nationale. Ceci permettrait à la loi. Qu’il y a des règles du jeu, c’est une un grand nombre de non-Juifs de « trou- idée générale et universelle. Ce ne sont pas ver dans le Judaïsme leur nourriture que des événements nationaux, même si un spirituelle »4. J’aime beaucoup cette ré- certain courant du Judaïsme préfère les voir ainsi. Et c’est en cela qu’il faut flexion, mais elle ne me semble pas réalisable, parce que « Qu’est ce que s’ouvrir. Tout cela ne concerne les repères du Judaïsme sont, tu cherches ? pas que moi en tant que Juif, sinon n’aurait aucun intérêt. Autre en tant que telles, déjà des reQu’est ce que tu cela exemple : Soukkoth, la fête des pères historiques, notamment l’histoire du peuple juif depuis as fait ? Et quel cabanes. Les rabbis ont très vite Abraham jusqu’à l’époque du est ton projet ? » dépassé le contexte historique. Si nos ancêtres ont construit des caDeuxième Temple. Mais à vous entendre parler, la notion de Ces questions banes, cela veut-il dire que nous Yom Kippour serait porteuse s’adressent à devons également habiter dans des cabanes ? Si mon père pord’une spiritualité universelle. tout le monde. tait un chapeau, dois-je aussi en porter un? Est-ce cela la Torah ? Rabbi Dahan : Je comprends Abraham Yehoshua. C’est vrai qu’il faudrait Nos textes vont plus loin: « Quarante ans vos nous ouvrir vers les nations, car Israël est aus- pères ont habité dans des cabanes et leurs vêsi le peuple témoin. Il ne s’agit pas de la reli- tements n’ont pas vieilli sur eux.5 » Ils ont tragion en soi et pour soi, au nom d’un soi-disant versé le désert et ils ont survécu. Une grâce salut. L’idéal est que nos valeurs humaines et porte l’homme. Et la soukkah est devenue le fondamentalement humanisantes imprègnent symbole de ce miracle. C’est le miracle d’être, tous les hommes. Il est vrai que nos fêtes évo- chose incroyable et en même temps si fragile. quent des événements historiques, mais ces C’est tellement rien, cette cabane, et ce rien événements ne s’adressent pas qu’à Israël. est magnifique! Et cela n’est pas que juif. Si Quand tu prends Pessach, c’est la libération. le judaïsme était une religion de salut, nous Cette libération, la première de l’histoire, est aurions le droit à l’exclusivité. Mais qui parle un enseignement pour tous les hommes. Les de ça ? Et c’est en cela que le peuple juif est pionniers américains se sont inspirés du récit un peuple témoin. Je suis sorti d’Égypte et j’ai de l’Exode. Pour eux, l’Europe c’était l’Égypte vu qu’il y a une fin aux régimes d’oppression. et l’Amérique la terre promise. La liberté n’est Cette expérience, porte-là et enseigne-là. pas l’apanage des Juifs. Et ce n’est pas seule- Donne corps à cette réalité. Tu l’as vécu; tu ment pour les Juifs que Shavouoth évoque le sais. ■ 4 Op. cit. p. 125 5 Dtn. 8,4. Si vous désirez recevoir notre Newsletter, envoyez votre adresse e-mail sur [email protected] avec, comme communication: Abonnement Newsletter. 17 J UDA Ï S M E Les fêtes de Tichri à Beth Hillel ROSH HASHANA Mercredi 12 septembre – office à Jeudi 13 septembre - office à Office des enfants à Office du soir à Vendredi 14 septembre – office à 19h00 10h00 11h00 19h00 10h00 PELERINAGE À GAN HASHALOM : Dimanche 16 septembre à 11h00 18 YOM KIPPOUR Vendredi 21 septembre à Samedi 22 septembre - office à Mousaf-minha Office des enfants à Yiskor à Fin du jeûne à 19h30 KOL NIDRE 10h00 14h30 16h30 18h30 20h35 SOUCCOT – SIMHAT TORA Construction de la Soucca le mercredi 26 septembre à 17h00 Apportez feuillages, fruits, légumes pour la décorer Erev Souccot Souccot I. le mercredi 26 septembre - office à 19h00 le jeudi 27 septembre – office à 10h00 Chmini Atseret/Simhat Tora le mercredi 3 octobre - office à 19h00 le jeudi 4 octobre – office (+ Yiskor) à 10h00 le shofar 19 J UDA Ï S M E «L’enfer, c’est les autres»? Et le paradis? Par Henri Lindner 20 Dans le journal «Le Soir» du 2 juillet dernier, William Bourton, l’auteur de «La chronique d’été», évoque une expression tirée d’une pièce de J.P. Sartre, «Huis Clos», et qui est devenue un adage: «L’enfer, c’est les autres…» Il oppose cela en quelque sorte à Spinoza, qui soutenait que «la servitude humaine est la rançon de la liberté», tandis que Sartre prétend, au contraire, qu’il n’y a nulle fatalité à cela. «Quel que soit le cercle d’enfer dans lequel nous vivons, nous sommes libres de le briser».. De quelle liberté s’agit-il? Celle de la notion enfantine «Je peux faire n’importe quoi, j’ai le droit, je veux!»? Ou celle d’un adulte, celui qui voit, qui prévoit et agit en conséquence? Car la liberté, dans le sens enfantin très populaire aujourd’hui – même auprès des adultes – n’est qu’une fantaisie, une illusion. Nous sommes tous sujets à des dépendances, car la liberté sans dépendances n’existe pas. La différence entre un homme libre et un esclave, c’est que le premier peut – éventuellement – choisir ses dépendances, tandis que le second est privé de ce droit. Je dépends du cultivateur, du boulanger, du médecin, des caprices du climat, des réseaux de gaz, eau, électricité, et même des égouts, etc… L’empereur le plus puissant dépend de la bonne santé mentale de son coiffeur attitré, lequel, dans un accès de folie, peut l’égorger au lieu de le raser. (cf. «Obsession», une nouvelle de Maurice Carême). Pour que notre vie, tant qu’elle dure, se déroule le mieux possible selon nos rêves et nos souhaits, nous nous devons de faire le nécessaire pour qu’il en soit ainsi, tout en espérant que les autres nous y aideront. Pour obtenir cette aide, il faut en premier lieu que j’aide – moi – les autres autant que je puisse le faire. Car au début de ce chemin, il y a d’abord l’espoir de la réciprocité. La mère nourrit et soigne son bébé par amour et pour la joie que cela lui procure. Pour les adultes, hélas, c’est souvent différent. Et pourtant… Hillel, un des plus grands commentateurs et érudits du Judaïsme, a proposé à un païen une formule succincte pour résumer l’essentiel de l’enseignement juif: «Ne fais pas à autrui ce que tu ne veux pas qu’on te fasse; le reste n’étant que commentaire». Le même Hillel nous a laissé aussi un message devenu un adage: «Si ne je prends pas soin de moi, qui le fera? Et si je prends soin rien que de moi, que (sic!) suis-je? Et si ce n’est pas maintenant, quand le ferais-je?» (Maxime des Pères 1, 14). Les Israéliens en ont fait une chansonnette. Mais la Tora va plus loin. Le principe archiconnu «aime ton prochain comme toi-même» est énoncé dans la Tora (Lév. 19, 18). Et il est le shofar pond l’homme. L’ange l’amène devant une porte qu’il ouvre. Et que voit l’homme? Une salle immense, bien éclairée, on entend de la musique et, au milieu de la salle de belles tables garnies de nourritures et de boissons de tous genres, les unes plus appétissantes que les autres et, plein de gens autour. A genoux, ils mettent leur tête sur la table et essaient de happer les bonnes choses directement avec leur bouche. On en voit qui renversent et couPar ailleurs, des hommes et des femmes com- chent les bouteilles pour les faire couler et me par exemple le Dr Schweitzer, Mère Thé- ils essaient de laper la boisson sur la nappe. résa, le Père Damien, Andrée Geulen et des D’autres encore, couchés à plat ventre, lèmilliers de «Justes» présents dans chaque chent et gobent ce qui en reste par terre parmi les débris des assiettes et des génération tout au long de milliers d’années et jusqu’à ce jour, guidés La différence bouteilles tombées et cassées. Ceux qui sont debout poussent, par leur morale et leur cœur, ont passé leur vie à aider tous ces entre un homme cognent, donnent des coups de poing et de pied pour avoir accès «Autres». Et ils y ont trouvé leur libre et un toutes ces bonnes choses. On bonheur en même temps. esclave, c’est àcrie, on hurle et on s’insulte. Bref: La plus belle formulation poétique que le premier une pagaille sauvage et générade cette idée est peut-être celle de peut choisir ses lisée. «Que se passe-t-il ici?» demande l’homme à l’ange? «Ils ont l’écrivain-poète hindou, Rabindépendances, tous faim» répond l’ange, «mais dranâth Tagore: tandis que le ils sont handicapés. Ils ont les bras raides. Leurs bras ne plient «Je dormais et je rêvais que la second est privé pas au coude; ils sont raides de vie n’était que joie. l’épaule au poignet. Alors, ils esJe m’éveillais et je vis que la de ce droit. saient de saisir directement les vie n’était que servir. Je servis et je vis que servir était la joie.» aliments avec la bouche. Et tu vois le résultat…». «C’est terrible» dit l’homme. «MainEt, pour terminer, voici un conte pour adultes tenant, montre-moi le paradis.» Ils partent, (d’origine hassidique, si je me souviens bien): et l’ange ouvre une autre porte. Et que voit Un homme qui vient de mourir passe devant l’homme? Même genre de salle, même décor, le Tribunal Céleste, lequel trouve qu’il n’était même musique, mêmes tables et mêmes alipas un grand pécheur, mais pas un saint non ments et, autour, pas mal de monde. Mais plus; juste «entre les deux». On lui laisse le ici, les gens sont souriants et se promènent, choix. «Tu peux aller en enfer ou au paradis. discutent, papotent… «Ah!» dit l’homme, «on Comme tu le veux». «Mais, pour choisir, je voit qu’ici ils ne souffrent pas de la maladie veux d’abord voir les deux», plaide l’homme. du «bras raide»! «Si, si « répond l’ange «ils ont On lui donne un ange-guide qui lui demande le même problème, mais eux, ils se nourris■ ce qu’il veut voir en premier lieu? «L’enfer» ré- sent les uns les autres…» précédé dans le même verset par «ne te venges pas, ni ne garde rancœur». «Ton prochain»? Dans Deutéronome (10, 18-19), Moïse nous enseigne que «Dieu témoigne son amour à l’étranger»… et donc «vous aimerez l’étranger». Cette référence à l’étranger et à l’amour et au bon traitement que nous lui devons figure une quarantaine de fois dans la Tora. 21 AG EN DA SEPTEMBRE / OCTOBRE 2007 Samedi 1er septembre 2007 – 18 Eloul 5767 – KI TAVO 10H30: Office Bar Mitsva Nicolas Jeanrenaud Visite du groupe Eurojews 14h30: Séminaire avec le groupe Eurojews Lundi 3 septembre 2007 20h00 à 21h30: Pour tous, préparation des Fêtes de Tichri (1) avec Rabbi Floriane Chinsky: 22 Jeudi 6 septembre 2007 19h30: Réunion Talmidi avec les parents (voir annonce) Vendredi 7 septembre 2007 20h00: Office de Kabbalat Chabbat Samedi 8 septembre 2007 – 25 Eloul 5767 – NITSAVIM VAYAKHEL 10H30: Office Bar Mitsva David Smadja Lundi 10 septembre 2007 20h00 à 21h30: Pour tous, préparation des Fêtes de Tichri (2) avec Rabbi Floriane Chinsky: Mercredi 12 septembre 2007 – EREV ROCH HACHANA 19H00: Office Jeudi 13 septembre 2007 – ROCH HACHANA 1. 10H00: office du matin 11h00: office des enfants 19h00: office du soir Vendredi 14 septembre 2007 – ROCH HACHANA 2. 10H00: office du matin 20h00: office de Kabbalat Chabbat Samedi 15 septembre 2007 – 3 Tichri 5768 – Ha’azinou – Chabbat Chouva 10h30: Office Bat Mitsva Clara Wajskop Dimanche 16 septembre 2007 11h00: Pèlerinage à Gan Hashalom Lundi 17 septembre 2007 Pas de Cours Adultes Jeudi 20 septembre 2007 20h00: Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan Vendredi 21 septembre 2007 – EREV YOM KIPPOUR 19H30: Office – KOL NIDRE Samedi 22 septembre 2007 – 10 Tichri 5768 - YOM KIPPOUR 10h00: Office 14h30: Moussaf-Minha 16h30: Office des enfants 18h30: Yiskor 20h35: Fin du jeûne le shofar – ELOUL 5767 / TICHRI 5768 Lundi 24 septembre 2007 20h00 à 21h30: Pour tous, préparation de Souccot et Simhat Tora avec Rabbi Floriane Chinsky: Samedi 6 octobre 2007 – 24 Tichri 5768 BERECHIT 10H30: Office Mercredi 26 septembre 2007 – Erev Souccot 14h15 à 16h45: Rentrée de Talmidi 17h00: Construction de la Soucca (apportez feuillages, fruits légumes pour décorer) 19h00: Office de Souccot Mercredi 10 octobre 2007 14h15 à 16h15: Talmidi Jeudi 27 septembre 2007 – SOUCCOT 1. 10h00: Office de Souccot Vendredi 28 septembre 2007 – SOUCCOT 2. 20h00: Office de Kabbalat Chabbat Samedi 29 septembre 2007 – 17 Tichri 5768 – SOUCCOT 3. 10H30: Office Mercredi 3 octobre 2007 Erev Simhat Tora/Chmini Atseret 14h15 à 16h45: Talmidi 19h00: Office Jeudi 4 octobre 2007 Simhat Tora/Chmini Atseret 10h00: Office + Yiskor Vendredi 5 octobre 2007 20h00: Office de Kabbalat Chabbat Jeudi 11 octobre 2007 20h00: Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan Vendredi 12 octobre 2007 18h30: «Magikabbalat Chabbat» avec les enfants et la famille (voir annonce) 20h00: Office de Kabbalat Chabbat Samedi 13 octobre 2007 Roch Hodech Hechvan – NOAH 10h30: Office Bat Mitsva Yaël Gemeiner Lundi 15 octobre 2007 20h00 à 21h30: Cours Adultes: notre Judaïsme, pensée et pratiques avec Rabbi Chinsky 23 J UDA Ï S M E Être plus Beth Hillel en 5768 Par Rabbi Floriane Chinsky Roch Hachana, déjà. Une nouvelle année se prépare. « Se » prépare ? Ainsi que l’enseigne notre tradition, l’année ne « se » prépare pas d’elle-même, d’une façon abstraite, cosmique, prédéterminée. Quelque chose de transcendant vient accompagner le tissage permanent de nos vies, quelque chose qui est en nous et qui nous affirme que nous pouvons être plus nous-mêmes, que nos vies peuvent être plus proches de la façon dont nous les désirons. 24 Mettre une tête à notre année Le déroulement de l’an prochain n’est pas une donnée. Il ne s’agit pas de découvrir passivement dans les astres, les cartes, ou des entrailles de volaille, un destin écrit par des dieux capricieux ou des forces magnétiques mystérieuses. « Ein mazal léisraël ». Pour le peuple d’Israël, les astres n’existent pas. Ils sont impuissants. Ce qui fait notre année (chana), c’est notre tête (roch). C’est dans cet esprit que le seder de roch hachana séfarade introduit l’année en accompagnant la définition de nos priorités de façon culinaire. Chaque plat est associé à un vœu, à une astuce ou à un jeu de mot, en hébreu ou araméen. En français, on pourrait manger de la banane ou une « bananée » pour nous garantir une « bonne année », manger des rochers au chocolat pour que notre année soit bien solide, décorer notre table de pensées pour que notre année soit inspirée de bonnes pensées. Dans le monde ashkénaze, le vœu d’une année fruitée, un peu acide et suffisamment douce comme la pomme et le miel concrétise notre volonté de bonheur. Ce qui favorise réellement notre bonne année, ce sont nos souhaits, nos rêves, et la façon à la fois sérieuse et humoristique dont nous les abordons. Depuis des générations, dans le monde entier, Israël ne se satisfait pas du sort que l’histoire ou les hommes veulent lui imposer. Depuis des générations, nous utilisons la moindre marge de manœuvre, la moindre parcelle de liberté pour faire progresser notre projet, pour faire avancer l’alliance de vie. Pour cette raison, nos fêtes de ce début d’année ne comportent aucun rite de divination contrairement à la profusion superstitieuse de certains débuts d’année civile. Elles comportent au contraire un temps d’introspection, joyeux et grave à la fois, à la fois confiant et tremblant. C’est notre rencontre avec le temps, notre rencontre avec l’éternité, le renouvellement du grand battement de la vie. Nos sentiments et nos actes sont l’essence de nos vies, et bien audelà, ils construisent notre avenir, celui de nos enfants, celui de notre peuple, et aussi, nous l’avons vu dans le fil de l’histoire, celui de l’humanité. le shofar En ce point de jonction entre le passé et l’ave- nous souhaitons devenir. Un seul Dieu, un nir, pendant ces deux jours de Roch Hacha- seul système de valeurs, que nous servons na, ces dix jours de retour (Téchouva, retour de tout notre être, pensée, cœur et action. à nous-mêmes, à nos désirs, nos espoirs, nos La redéfinition de ces valeurs et leur mise en pratique au niveau individuel et ambitions, nos valeurs, nos resDepuis des communautaire se fait de façon ponsabilités, nos priorités) et ce privilégiée à Roch Hachana et à jour de Kippour, il est bon d’être générations, Yom Kippour. Les expériences à la fois confiants et tremblants, d’ouvrir nos têtes, nos cœurs et nous utilisons la de l’année sont prêtes à se réinnotre action à l’avenir que nous moindre parcelle sérer dans notre grille de lecture monde. Nous le faisons endésirons. Le partage en commude liberté pour du semble, dans la même maison, nauté de ces grands moments les rend encore plus intenses. Nos faire progresser celle qui nous accueille comme sentiments de succès, d’échec, notre projet, pour nous sommes, bait. de désir, d’espoir, nos forces faire avancer Bait, c’est la maison qui nous aussi, se côtoient, se rencontrent, s’amplifient mutuellement l’alliance de vie. accueille comme nous sommes, c’est aussi nécessairement celle et sont amplifiées par la solennité qui se dégage de nos prières et de notre qui nous encourage à nous dépasser. Bait, c’est le lieu qui nous accueille chaleureuseprésence élargie en ces moments phare. ment, et également, de façon tout aussi nécessaire, le lieu qui accueille notre prochain. Construire une maison du cœur Pendant les fêtes de Tichri, Beth Hillel ac- C’est le lieu où nous sommes respectés, et où cueille tous ses membres et ses sympathi- nous respectons les autres, où nous grandissants au sens large. C’est l’un des grands sons en harmonie avec le développement de moments où nous réaffirmons notre mission chacun. Comment la même maison peut-elle d’être une bait, beit knesset, une maison, un tous nous accueillir, dans nos différences, de façon également chaleureuse ? Comment la lieu de rassemblement. même maison peut-elle accepter Bait, c’est la valeur de l’ouver- Considérer son à la fois celui/celle que j’étais, et ture, du bon accueil, de la convi- prochain comme celui/celle que je veux être, sans désavouer aucun d’eux ? Peut-on vialité, l’accueil de chacun pour son allié, c’est concilier les opposés ? celui qu’il ou qu’elle est, sans faux semblants, sans tricherie, créer un mode Beth Hillel, une maison d’alsans schizophrénie. Chacun a relationnel liance le droit, chacun a le devoir de C’est là que réside le secret de tendre vers l’unité. Être « UN », différent de Ce grand sage du Talmud c’est refuser le polythéisme celui du monde Hillel. tient une place très particulière dans toutes ses expressions, y compris celle qui consiste à de compétition et fondatrice dans notre tradition. Il est le symbole de l’aladopter certaines attitudes reauquel nous liance, la capacité de grandir ligieuses ou morales dans certains lieux où elles semblent sommes habitués. ensemble et de construire ensemble malgré les désaccords. adéquates pour en changer de façon opportuniste dans d’autres situations. Cette alliance est une attitude générale de Au contraire, toutes nos expériences, inté- Hillel. C’est sa façon d’être en relation avec grées, doivent se mettre au service de notre la personne qui lui fait face, qu’elle soit un compréhension de qui nous sommes et de qui géant de la tradition, comme son partenaire 25 J UDA Ï S M E 26 privilégié de controverse, Chamaï, ou qu’elle faisait parfois précéder. Son contradicteur soit un simple candidat à la conversion. De était pour lui son allié dans l’étude et la repar le simple fait que nous partageons la cherche de la vérité. C’est cette découverte responsabilité de l’avenir du monde, en tant extraordinaire sur le plan de l’humain qui a qu’humanité, ou celle de l’avenir du peuple valu à l’école de Hillel d’être préférée à celle juif, en tant que juifs, une alliance existe de Chamaï en tant que référence de la loi juive. Seule cette attitude était entre nous. Du simple fait de notre commune condition hu- Hillel respectait susceptible de permettre de construire la maison « Judaïsmaine, l’atteinte à notre dignité l’opinion de me » à travers l’histoire. C’est est l’atteinte à la dignité de l’enses opposants, cette attitude qui nous permet semble de l’humanité, atteinte à la dignité de chaque personne l’enseignait au d’exister en tant que nous même, sans préjudice de la légitimité partageant cette condition. Il s’agit d’une solidarité intrinsè- côté de la sienne, de celui ou celle que nous avons pu être par le passé ou que nous que, qui nous unit dans la même et la faisait deviendrons à l’avenir, sans volonté, dans la même alliance. parfois préjudice non plus de l’infinie Quelles que soient les différenlégitimité des autres. C’est bien ces, les divergences, la force ou précéder. l’attitude de confiance et d’alla faiblesse de celui qui nous fait face, cette alliance définit un intérêt com- liance de Hillel qui nous permettra de grandir mun et supérieur à chacun des partenaires. et de nous épanouir cette année, nous, notre Considérer son prochain comme son allié, communauté, et toutes les autres communauc’est créer un mode relationnel qui fonction- tés d’Israël. C’est bien cette attitude d’intelline sur des modalités totalement différentes gence qui nous permettra de mettre du cœur, de celles du monde de compétition auquel et du bon, dans l’année qui s’annonce. nous sommes habitués. C’est dans cet esprit que Hillel respectait l’opinion de ses oppo- Léchana tova tikatévou vétéHatmou, inscri■ sants, l’enseignait au côté de la sienne, et la vez-vous dans une bonne année. LECOBEL Votre agence immobilière 11, Place G. Brugmann • 1050 Bruxelles Tél: 02/346.33.55 • Tél: 02/343.94.82 www.lecobel.be le shofar Soukkot: Exubérance et réflexion Extraits talmudiques Par Ralph Bisschops Autant que les réflexions des rabbins relatifs à Yom Kippour respirent l’allégresse, l’humanité et le pardon, autant les textes qui portent sur Soukkot frappent par leur gravité. C’est comme s’ils voulaient à tout prix avertir l’homme, qui après Kippour, reprend le fil de sa vie avec une âme rajeunie, que le mauvais penchant (yetzer hara) le guette toujours. Cette fête qui excelle par son exubérance est également une réflexion sur la nature ténébreuse de l’être humain. L’énigme du mal Rabbi Jehudah: Dans le monde à venir le Saint béni-soit-Il fera venir le mauvais penchant et le fera abattre en présence des justes et des fourbes. Aux yeux des justes, il aura l’apparence d’une immense montagne, aux yeux des fourbes, par contre, il aura l’apparence d’un seul cheveu. Aussi bien les uns que les autres se mettront à pleurer. Les justes pleureront (de joie) et s’écrieront: «Comment avons nous été capables de franchir une montagne aussi gigantesque?» Et les fourbes pleureront et diront: «Pourquoi n’avions-nous même pas réussi à franchir ce cheveu?» Et Le Saint beni-soit-Il partagera aussi-bien l’étonnement des justes que celui des fourbes. (Sukkah, 52a) Chacun a son ombre Un jours Abbayé était en plein désarroi. Il rencontra un vieil homme, que la tradition identifie au prophète Élie. Celui-ci lui dit: Plus l’homme est grand, plus son mauvais penchant est puissant. (Soukkah, 52a) Difficile bonté Rabbi Eléazar: Celui qui exerce la charité et la justice est considéré comme s’il avait rempli le monde par sa bienveillance. (...). Mais pour que l’on ne dise pas que celui qui désire faire le bien y réussira sans problèmes, l’Écriture dit expressément: «Combien précieuse est Ta grâce, o Maître de l’Univers» [Ps. 36,8]. (Soukkah, 49b) Tradition et avenir Selon l’opinion du mortel, un vase vide peut recevoir un liquide, mais l’on ne peut rien ajouter à un vase plein. Pour l’Éternel, il en est autrement: un vase plein peut recueillir toujours plus, tandis qu’un vase vide ne peut même pas recevoir une goutte (...) Si tu es à l’écoute, tu continueras à écouter. Si tu ne l’es pas, tu n’entendras rien. Autre interprétation: 27 J UDA Ï S M E Si tu es à l’écoute de l’ancien, tu saisiras le nouveau, mais si ton cœur s’en détourne (de l’ancien), tu n’entendras pas (le nouveau non plus). (Soukkah, 46a 46b) Si tu es à l’écoute de l’ancien, tu saisiras le nouveau, mais si ton cœur s’en détourne, tu n’entendras pas le nouveau non plus. (Soukkah, 46a 46b) La supplication: approche rurale Rabbi Eléazar: Pourquoi la prière a-t-elle été comparée à une fourche à foin? Pour t’apprendre que de la même manière que la fourche remue le foin, la prière remue l’Esprit du Saint béni-soit-Il, et le fait passer de l’attribut de la dureté à celui de la clémence (Soukkah 14a). Les rabbins saltimbanques (Le jour de Souccot) Lévi jonglait en présence de Rabbi avec huit couteaux, Samuel faisait de même devant le Roi Shapur avec huit verres de vin (sans en renverser le contenu) et Abayé jonglait devant Rabbah avec huit oeufs certains estiment pourtant que ce n’en étaient que quatre. (Soukkah, 53a) Édition consultée: TALMUD BABLI, édité par Rabbi Dr. Isidore Epstein, Soncino Press, London, Jerusalem, New York. ■ SOUCCOT 28 Construction de la Soucca Le mercredi 26 septembre à 17h00 Apportez feuillages, fruits et légumes pour décorer la Soucca. Si vous avez des instruments de musique, apportez-les pour préparer Simhat Tora. Erev Souccot Le mercredi 26/09 office à 19h00 Souccot 1. Le jeudi 27/09 office à 10h00 SIMHAT TORA Le mercredi 3 octobre 2007 à 19h00 Soyez tous présents pour célébrer dans la joie la Tora! Nous danserons et chanterons ensemble avec les Sfarim, comme tous les ans. Venez avec vos enfants et vos amis Si vous avez des instruments de musique, venez nous régaler de vos talents. le shofar Un peu d’humour L’année des présidentielles américaines 2012 voit, pour la première fois de l’histoire des Etats-Unis, désigner à la tête de l’Etat une femme juive, Susan Goldfishwomen. « Ma princesse, commence à se plaindre la mère juive de la nouvelle présidente, tu sais bien que je ne digère pas bien ces aliments gras dont tes copains raffolent » Celle-ci appelle sa mère peu après son élection et lui dit au téléphone : « Bien, nous y sommes enfin arrivée. Je suppose, bien évidemment, que tu viendras à ma prestation de serment ! ». « Je ne pense pas, ma chérie. Cela représente dix heures de voiture, ton père n’est plus tout jeune et j’ai à nouveau mon épaule qui me fait souffrir… » « Ne t’en fais pas, Maman. Toute la nourriture des réceptions, déjeuner et dîner de gala sera assurée par le meilleur traiteur casher de la région. Maman, j’ai vraiment envie que tu viennes. S’il te plaît… » « Ne te préoccupe pas de tout ces petites tracas de santé, Maman. Je vais vous faire envoyer Air Force One pour vous emmener ici, puis vous ramener à la maison. Une voiture viendra vous chercher devant la porte et je ferai mettre une limousine à la descente de l’avion ». « Pff … je ne sais pas…Tout le monde sera tiré à quatre épingles ! Que veux tu que je mette sur le dos ?!? Cela fait longtemps que nous ne sortons plus à des machins chichi, ton père et moi ! » « Oh, écoutes, Maman, franchement ! Je t’en prie, viens ! On va t’envoyer ce qui faut du meilleur couturier de New York ! » Finalement, la maman de Susan Goldfishwomen accepte, embarque dans l’avion présidentiel en compagnie de son époux, revêtue d’un élégant tailleur, et le 21 janvier 2013, assiste à ce moment historique où sa fille devient officiellement Président des Etats-Unis d’Amérique. Assise au premier rang, au milieu des plus Grands de ce monde et un parterre des plus hautes personnalités du pays, elle se tourne vers son voisin de droite, un sénateur, et lui demande d’une voix un peu forte : « Voyez vous cette jolie jeune femme là-bas avec la main posée sur la Bible, et qui en ce moment, devient le Président ? » Le sénateur répond en chuchotant : « Oui, oui, je la vois » Alors, fièrement, elle continue : « Son frère est docteur ! » ■ JWH 29 CU LT UR E Naissance et développement du Judaïsme Libéral Par Rabbi Abraham Dahan 30 Le premier et le plus imporLe mouvement de réforme tant fut Moïse Mendelssohn dans le Judaïsme n’est pas (1729-1786). Il a été le premier né spontanément. Les déthéoricien de l’émancipation veloppements sociaux, inet le premier à défendre le tellectuels et politiques qui Judaïsme contre les accusavont conduire à son éclosion, tions et les assauts du chrisont leurs racines loin dans le tianisme. Mais sa traduction passé. de la Bible en allemand, avec La Renaissance en Europe un commentaire quelque occidentale verra naître une peu innovateur, ses plaidoinouvelle approche envers les ries pour l’émancipation des doctrines religieuses. La touJuifs, pour la suppression de te puissance de l’Eglise est la coercition religieuse, ses remise en question et lenteappels à réformer l’éducation ment la philosophie remplajuive, lui valurent la colère ce la théologie. Des hommes, en Europe, commencent à vouloir et à oser des rabbins. penser librement. Un repère éminent de cette Avec certes des divergences, on peut affirévolution en est, dans le monde juif, Baruch mer qu’à des siècles d’intervalle, les deux Spinoza (1632-1677). Il apparaît comme le Moïses, Maimonide et Mendelssohn, chacun fondateur du rationalisme religieux. Il sera à sa manière et avec les outils de son temps, mené un peu le même combat excommunié par l’institution rabLes efforts et ont et ont poussé dans la même direcbinique, mais son œuvre aura une grande influence sur la philoso- l’œuvre de Moïse tion: redonner au vieux Judaïsme phie moderne et ouvrira la voie à Mendelssohn un visage accessible et pour leur peuple et pour l’environnement la critique biblique. restent sous- non-juif, accusateur et hostile. Mais Spinoza lui-même a un loinLe premier au Moyen Age, dans tain précurseur, Moïse Maimoniestimés et l’univers musulman, le second au de (1138-1204). Maimonide, dans son œuvre magistrale, le « Guide presque ignorés temps des lumières pour les Juifs des Egarés », essaie de réconcilier dans les milieux dans l’univers chrétien. Les deux à subir l’opprobre de l’insla vérité religieuse de la tradition de l’orthodoxie. auront titution rabbinique. Maimonide révélée avec le rationalisme phisera accusé de s’être converti à losophique. Au 18ème siècle, il servira de modèle et de pas- l’islam et son œuvre majeure, le Guide des Egarés, a été mise à l’index pour longtemps. serelle aux précurseurs de la réforme. le shofar Mendelssohn, son sort sera moins enviable et beaucoup de difficultés. La chute de Napoencore, puisque, jusqu’à aujourd’hui ses ef- léon, la réaction qui s’en suivra, le rétablisforts et son œuvre restent sous-estimés et sement de la monarchie, mais le mouvement presque ignorés dans les milieux de l’ortho- était parti… doxie, alors que, depuis longtemps, le Judaïs- En Allemagne, il n’y avait pas eu de révome se vit et se pense beaucoup dans la ligne lution et les Juifs voulaient prouver qu’ils qu’il a préconisée, même dans les milieux à étaient dignes de la confiance qu’on leur ferait en leur accordant la citoyenétiquette orthodoxe, que ce soit dans leur comportement quoti- Où serions-nous neté. C’est pourquoi c’est là que se développera la «science du Judien, dans la pratique ou l’enseiaujourd’hui daïsme», une nouvelle approche gnement des écoles. de l’Histoire et de la Tradition, Le 18ème, c’est le temps des phisi l’Alliance pour émanciper le Judaïsme des losophes et des encyclopédistes. Israélite tentations dogmatiques. Je me Ils développeront et diffuseront Universelle souviens de la première question l’idée d’égalité entre les hommes. La révolution française donnera avait cédé aux qui me fut posée quand je demandai mon admission au séminaire corps à cette idée et les guerres napoléoniennes vont la diffuser revendications à Paris: lisez-vous l’allemand? en Europe. rabbiniques? C’est en Allemagne qu’était le savoir juif. Dans la deuxième moitié Pour les Juifs, l’émancipation, leur accession à la citoyenneté et à l’égalité - du 18ème et tout le 19ème siècle, il y eut là un après des siècles d’écrasement, d’oppression, nombre impressionnant d’intellectuels juifs, d’enfermement, de déchéance des droits les avec de grandes capacités et une immense plus élémentaires – va être un éblouisse- érudition, et qui étaient freinés et frustrés ment. Ce fut pour eux comme le temps du dans leurs droits parce qu’ils étaient Juifs. messie et l’optimisme est énorme. On ne se Ils cherchèrent avec passion le moyen de rend pas compte d’une vérité élémentaire déchirer le filet qui les emprisonnait. Entre qui est que si les idées autres, L. Zunz, E. Gans, évoluent, les mentalités, D. Lessman, J. Hilman, I. elles, sont beaucoup plus Marcus Jost, M. Moser et lentes à changer. Les prébeaucoup d’autres, dont jugés contre les Juifs, les Henri Heine, fondèrent clichés séculaires, les inune association pour rétérêts, les enseignements pondre aux attaques antide la haine et du mépris, sémites et rénover l’esprit ne s’effacent pas, même du Judaïsme. Le fait que, chez les gens les plus édude guerre lasse, certains qués et les plus évolués. se convertirent au chrisMême, parfois, chez ceux tianisme indique la presqui plaideront pour l’égasion qui les écrasait et les lité des Juifs. difficultés, les douleurs Mais les Juifs, fascinés de l’époque pour les Juifs. par le monde qui s’ouvrait Les premiers réformaenfin à eux – enfin des teurs furent d’abord des droits, une profession laïques qui optèrent pour normale, l’université – vont s’engouffrer dans des changements mineurs, esthétiques, sans la modernité. profondeur, car, disons-le, il s’agissait surL’émancipation connaîtra certes des à coups tout de plaire à l’environnement chrétien 31 CU LT UR E 32 hostile. Ils voulaient moderniser Le mouvement est une donnée immuable; il faut tout garder des coutumes et trale culte et conférer aux offices regénéral va dans ditions. C’est juste la manière ligieux décorum et dignité. Ils s’attaquèrent à l’éducation la direction de présenter les choses qui peut changer. A l’autre extrême, Sajuive traditionnelle qui se limitait d’un retour à muel Holdheim qui, malgré une à l’étude de la Bible et du Talmud, en ignorant le savoir général. Ils l’étude et à un formation orthodoxe et ses études dans les yeshivot d’Europe désiraient aussi faire le lien entre l’étude de la religion et la morale, traditionalisme Orientale, représentera (peutêtre à tort) la tendance de la rél’éthique. éclairé. forme radicale. Rappelons qu’en 1860, lors de la création de l’Alliance Israélite Universelle, Deux modérés, Avraham Geiger et Zahaqui fut à l’origine d’une chaîne d’écoles dans ria Frankel. Pour Geiger, le Judaïsme est les pays méditerranéens pour permettre aux une institution vivante, ni un instrument enfants juifs d’accéder à l’enseignement des de mort à entièrement reformuler comme langues et du savoir général, et pas seule- pour certains radicaux, ni un roc immuable, ment religieux, les rabbins réagirent avec même s’il est fossilisé comme pour Hirsch. violence. Où serions-nous aujourd’hui si La révélation est permanente et ainsi en estl’Alliance Israélite Universelle avait cédé il de l’évolution de la Halakha. Frankel sera le père du Judaïsme conseraux revendications rabbiniques? En Allemagne, à partir des années 1820, vative qui se veut fidèle à la Halakha, mais quelques rabbins vont se joindre aux réfor- qui, en fait, comprend les nécessités d’une mateurs et s’efforcer de mettre en cohérence évolution. Par exemple, les conservative oples réformes et les justifier par référence à teront pour le rabbinat féminin 20 ans après la Tradition. Ils espéraient aussi que leurs le mouvement libéral… réformes freineraient le flot des conversions C’est en Amérique que le Judaïsme non orthodoxe réussira parce que là le pays est neuf et au christianisme. A la suite de ces réformes, se développera il n’y a pas, pour les nouveaux immigrants, le l’idée de la nature évolutive de la Loi juive poids des structures de la vieille Europe, les pour qu’elle s’adapte aux conditions des mentalités sont libérées et plus audacieuses. nouvelles générations. Mais alors que, jus- Bien entendu, certains éléments dans les que là, l’évolution historique du Judaïsme mouvements de la réforme ont été perçus allait dans le sens de la complexité, les ré- comme des excès, mais c’est normal quand formateurs iront vers une simplification. il s’agit de la chose religieuse qui, par défiIls prendront appui sur l’enseignement des nition, est portée à la conservation même prophètes qui ont insisté plus sur la justice de ce qui ne parle plus à la génération. Mais sociale et le comportement moral que sur les aujourd’hui le mouvement se développe, lentement mais sûrement, en Europe et en Isprécisions rituelles. Très vite, des divergences apparaîtront et raël. Il faut espérer que les erreurs du passé trois conférences, en 1844, 1845 et 1846, nous servent d’expérience et, en tous cas, pour harmoniser les différentes tendances le mouvement général va dans la direction ne réussirent pas à créer un consensus gé- d’un retour à l’étude et à un traditionalisme éclairé, pour lequel le sens et le bon sens néral. Dans l’ensemble du mouvement, on peut dire sont importants, même si nous en savons les limites. Un Judaïsme pour lequel fidélité ne que quatre tendances se révèleront: Deux extrêmes opposés, Shimshon Rafaël se confond pas avec immobilisme. La mitsva Hirsch, père de la néo-orthodoxie, et Sa- et le rite sont, pour nous, des rappels et des ■ muel Holdheim. Pour Hirsch, la tradition repères. Des moyens et non des fins. CU LT UR E Nelly Sachs Ethique et modernité Par Monique Ebstein 34 Nelly Sachs, juive et allemande, née à Berlin en 1891, fut lauréate du Prix Nobel de Littérature en 1966, à l’âge de 75 ans. Elle le reçut en même temps que le romancier israélien Samuel Joseph Agnon. Elle mourut quatre ans plus tard d’un cancer, à Stockholm, la ville où elle avait trouvé refuge lorsqu’elle dut s’enfuir en 1940 devant le péril nazi. Cette femme, toute petite et fluette, de santé fragile depuis son enfance, et dont les yeux sombres mangeaient le visage était un très grand poète. L’écriture était son seul moyen pour survivre au drame absolu de la Shoah. Ses poèmes composent une oeuvre difficile, hermétique à un lecteur superficiel ou pressé. Mais celui qui accepte d’y plonger n’en sort pas indemne. En 2003, sous l’égide de l’Université Charlesde-Gaulle-Lille 3, Andrée Lerousseau, Claude Cazalé-Bérard et André Combes organisèrent un colloque international intitulé «Nelly Sachs, éthique et modernité» auquel participèrent des personnalités du monde universitaire et littéraire(1). Les Actes de ce colloque ont paru au cours du 1er trimestre 2007, et les différentes contributions dont nous ferons de nombreuses citations, sont précieuses pour approfondir une poésie où l’on hésite à juste titre à se hasarder seul. Nelly Sachs fut élevée au sein d’une famille de la grande bourgeoisie juive berlinoise, fortement assimilée et très éloignée de ses racines juives. Dès son plus jeune âge, une sensibilité exacerbée l’amena à s’isoler des autres enfants, à s’entourer d’animaux. Son père, avec qui elle avait une relation fusionnelle mêlée de crainte, lui avait offert une biche, une chèvre, un chien, car ce riche homme d’affaires était tout à fait d’accord pour que sa fille grandisse, entourée davantage de fleurs et de bêtes que de petits camarades de son âge. Il était bon musicien, et quand il se mettait au piano, sa fille dansait avec extase. Sa collection de minéraux fascinait l’enfant, car les pierres lui paraissaient être la châsse de forces cosmiques. Comme elle était poète dans le plus profond de sa nature, c’est par le hassidisme et la mystique juive qu’elle retrouva ses racines. La lecture du Livre d’Isaïe dans la traduction de Buber et de Rosenzweig déclencha le retour à ce qu’elle appelle les «fontaines d’Israël». Ce le shofar fut pour elle une révélation qui la fit entrer de plain-pied dans une tradition qu’elle portait au plus profond de son être. Sa poésie, comme le dit si bien Andrée Lerousseau, suit un itinéraire qui conduit «du silence au silence avec dans l’intervalle l’espace où se cherche la parole». Jean Halpérin constate avec pertinence que Nelly Sachs n’a jamais eu besoin que quiconque lui explique, comme Gershom Sholem «Wenn die Propheten einbrächen durch Türen der Nacht mit ihren Worten Wunden reissend in die Felder der Gewohnheit ein weit gelegenes hereinholend für den Tagelöhner der längst nicht mehr wartet am Abend ........ Wenn die Stimme der Propheten Auf dem Flötengebein der ermordeten Kinder blasen würde, ... (2) avait essayé de la faire vis-à-vis de Hannah Arendt, ce qu’est Ahavat Israël. Cette expression que l’on traduit en français par l’amour d’Israël «est un amour très spécial, très singulier qui ne peut pas être ramené à ce que le vocabulaire français désigne par l’amour. C’est un amour qui n’est pas aveugle, mais une passion exigeante, un souci, une préoccupation afin d’aider Israël à rester Israël». Cet amour fait des patriarches, des prophètes, de la terre d’Israël les principaux acteurs de ses poèmes: Si les prophètes faisaient irruption par les portes de la nuit avec leurs paroles mettant à vif des plaies dans le champ des habitudes rendant ce dont il fut écarté au journalier qui au soir n’attend plus depuis longtemps ......... Si la voix des prophètes soufflait dans la flûte taillée dans les ossements des enfants assassinés... Un amour pour une terre qu’elle n’a jamais vue, sa santé ne le lui ayant pas permis. Elle avait pourtant dit à André Néher qui, à partir de 1966, l’invitait à Paris ou à Strasbourg, «Si Dieu me donne des forces, mon premier voyage sera pour Israël et pour Jérusalem». Cette terre, elle la portait en elle et la connaissait depuis d’innombrables générations: «Aus dem Wüstensand holst du deine Wohnstatt wieder heim. Aus den Jahrtausenden, die liegen in Goldsand verwandelt. Aus dem Wüstensand treibst du deine Bäume wieder hoch die nehmen die Quellen hin zu den Sternen – Du sable des déserts tu as rapporté ta demeure. Du fond des millénaires qui gisent métamorphosés en sable d’or Aus dem Wüstensand in den so viel Schlaf einging vom Volke Israel ........ gräbst du die versteckten Gottesgewitter aus, wälzt die Steine zum Bethaus Du sable des déserts tu fais de nouveau croître tes arbres qui emportent les sources vers les étoiles Du sable des déserts où pénétra tant de sommeil du peuple d’Israël .......... tu déterres les éclairs enfouis des orages de Dieu, fais rouler les pierres pour la maison de prière, Steine, die fester Schlaf um die magische Nacht von Beth-El sind...... (3) pierres, sommeil profond enserrant la nuit magique de Beit-El........... 35 CU LT UR E Avec Buber et Lévinas, elle partageait ce sens de la relation à autrui, à ce Tu qu’il nous est donné d’appréhender par le visage. Nombre de ses poèmes s’adressent à cet Autre sans qu’il soit nommé, mais qui peut être le fiancé disparu, l’homme, la femme ou l’enfant rencontrés fortuitement, l’Israélien en train de reconstruire son pays, la victime assassinée, l’animal mort dans la souffrance. Ces visages font partie du Tu cosmique et transcendant qui les englobe tous, sans pourtant en remplacer un seul. Ce Tu auquel elle s’adresse avec les mêmes accents, voire les mêmes mots que Juda Halévi 36 «Du, Du, Du, Du Wo kann ich Dich finden, und wo kann ich Dich nicht finden ? Du, Du, Du, Du ! (4) Toi, toi, toi, toi ! où puis-je trouver, et où ne puis-je pas te trouver ? toi, toi, toi, toi ! «Yah ! ana emtsa’akha mekomekha na’alah ve-né’élam ve-ana lo emtsa’akha...... (5) Eternel ! où te trouverai-je ? Ta demeure est élevée et cachée Et où ne te trouverai-je pas ? Comme le rappelle Laurent Cassagneau, chez Nelly Sachs un autre personnage joue le rôle d’intermédiaire entre l’homme et l’invisible, entre l’homme et le transcendant, c’est l’Ange. Or contrairement à celui de la Bible et de la Cabale qui n’est pas accessible à la souffrance et qui remplit sans émotion la mission qui lui a été confiée, l’ange sachsien a un corps susceptible d’être mutilé par les malheurs qui affectent l’être humain: «durch den Stacheldraht der Zeit kam er zu dir geeilt, mit den Flügeln zerrissen......» (6) «...à travers les barbelés du temps, il se hâta vers toi, les ailes déchirées.....» M.E. Sa mission est double. Il doit garder vivante la mémoire des deuils d’Israël: «...Zwischen Gestern und Morgen Steht der Cherub.... Seine Hände aber halten die Felsen auseinander Von Gestern und Morgen Wie die Ränder einer Wunde Die offenbleiben soll Die noch nicht heilen darf» (7) «.....Entre Hier et Demain se tient le Chérubin ........ Et ses mains séparent les rochers d’Hier et de Demain comme les lèvres d’une plaie qui doit rester béante qui n’a pas encore le droit de guérir.» Il doit aussi être l’agent du Tikkun , de la «réparation», celui qui amène à Dieu les victimes des assassins. Il assure le lien entre la vie et la mort, entre le passé et l’avenir: «Engel der Bittenden, segne den Sand, lass ihn die Sprache der Sehnsucht verstehen, daraus ein Neues wachsen will aus Kinderhand.... (8) «Ange de ceux qui implorent bénis le sable, permets-lui de comprendre le langage de la nostalgie, pour que du Nouveau pousse au creux de la main d’un enfant le shofar Dans son intervention, Andrée Lerousseau rappelle que la première passion de Nelly Sachs enfant fut pour la danse. Elle s’éveilla à l’art en dansant sur la musique que son père improvisait au piano. Et comme elle l’écrira plus tard en 1959 dans une lettre à un ami: «La danse fut mon ... élément le plus intime. Ce n’est qu’à cause du lourd destin qui fut le mien que je suis passée à un autre moyen d’expression: le mot.» «Deine Schritte wussten wenig von der Erde Sie wanderen auf einer Sarabande (9) Tes pas connaissaient peu de chose de la terre Ils cheminaient sur une sarabande Elle écrira plus tard dans les «notes sur le poème Beryll»: «...on doit essayer de faire jaillir la parole du souffle avec des mouvements de tout le corps afin d’arracher le mot englouti à son mutisme ensanglanté et à son sommeil pour qu’à nouveau il resplendisse». La danse peut être celle de David, le poète musicien, «Samuel sah...... David den Hirten Durcheilt von Sphärenmusik..... Als die Männer ihn suchten Tanzte er, umraucht Von der Lämmer Schlummerwolle.......(10) Samuel vit.... David le pâtre transporté par la musique des sphères..... Lorsque les hommes le cherchèrent il dansait, enveloppé des fumées de la laine ensommeillée des agneaux....... M.G. 37 Mais David devint roi et perdit son innocence: «Da hatte die Königszeit begonnen – Aber im Mannesjahr mass er, ein Vater der Dichter, in Verzweiflung die Entfernung zu Gott aus, und baute der Psalmen Nachtherbergen für die Wegwunden Le temps du roi avait alors commencé mais à l’âge d’homme, lui, père des poètes, il mesura dans le désespoir la distance à Dieu et bâtit le havre des nuits des psaumes pour les blessures du chemin Sterbend hatte er mehr Verworfenes dem Würmertod zu geben als die Schar seiner Väter – Denn von Gestalt zu Gestalt weint sich der Engel im Menschen tiefer in das Licht ! (11) En mourant il eut plus d’abjection à donner à la vermine des tombeaux que toute la cohorte de ses pères Car de forme en forme l’ange dans l’homme se pleure plus profondément dans la lumière ! CU LT UR E La danse quand elle n’est plus l’expression d’une élévation vers la transcendance, se transforme en mouvement de mort, ce sont alors «les pas» qui, dans les poèmes scéniques «doublent la parole en mimant la tragédie de l’histoire»: 38 «Arme auf und ab, Beine auf und ab, und die untergehende Sonne des Sinaivolkes als den roten Teppich unter den Füssen. Bras et jambes au pas cadencé, et le soleil couchant du peuple du Sinaï En guise de tapis rouge sous les pieds. Arme auf und ab, Beine auf und ab, und am ziehenden aschgrauen Horizont der Angst, riesengross das Gestirn des Todes wie die Uhr der Zeiten stehend.» (12) Bras et jambes au pas cadencé, et couleur de la cendre l’horizon migrant de la peur, gigantesque l’astre de la mort Pareil à l’horloge du temps arrêté. Ainsi par la danse et l’écriture, le poète a le pouvoir de transformer la mort en nouvelle naissance, de faire surgir la lumière des ténèbres, et de déceler les traces des disparus dont il faut conserver la mémoire. «Eli» est une oeuvre écrite tout de suite après la Deuxième Guerre mondiale. Elle a été publiée pour la première fois en 1951. André Combes analyse de manière remarquable ce «mystère» qui retrace au sein d’une petite bourgade juive de Pologne «les souffrances d’Israël». De nombreux personnages apparaissent et disparaissent au cours de l’action qui se déroule dans ce shtetl , dont une grande partie des habitants a été assassinée par les nazis. Parmi les victimes, Eli, un enfant, a été tué alors qu’il voulait suivre ses parents que l’on emmenait. Michael, le cordonnier, a réussi à sauver un grand nombre de villageois, mais il n’a pas pu empêcher la mort d’Eli. Il essaye à présent de retrouver son assassin. La symbolique de son nom se traduit dans les gestes de son métier, car en assemblant avec son alène la semelle et le dessus des souliers qu’il fabrique, Michael réunit le monde supérieur des séfirot au monde inférieur de la création visible. Ce long poème en 17 tableaux est une cantilène presque insupportable de la douleur des survivants. «La Voix d’Israël» est le titre de la contribution de Vivian Liska qui cite Nelly Sachs: «que ce soit moi qui écrive tout ceci est parfaitement secondaire, ce qui parle, c’est la voix du peuple juif et rien de plus (13)». La poétesse ajoute ailleurs qu’elle avait «réellement écrit toutes ces choses pendant la nuit et dans l’obscurité. Mais «IL» était auprès de moi et m’a donné les mots (14)». Dans le recueil «Les Choeurs après minuit», elle fait entendre successivement le «Choeur des choses abandonnées», celui des rescapés, des migrants, des orphelins, des morts, des ombres, des pierres, des étoiles, des choses invisibles, des nuages, des arbres, des consolateurs, de ceux qui ne sont pas nés, pour finalement donner la parole à la «Voix de la Terre sainte». Les plaintes de ces choeurs sont bouleversantes: «Klagemauer Nacht ! Eingegraben in dir sind die Psalmen des Schweigens Die Fussspuren, die sich füllten mit Tod ...... haben bei Dir nach Hause gefunden. Die Tränen, die dein schwarzes Moos feuchten Werden schon eingesammelt. (15) Mur des Lamentations, Nuit ! Les Psaumes du silence sont enterrés en ton sein. Les traces des pas remplis de mort ..... ont trouvé auprès de toi leur demeure. Les larmes qui mouillèrent ta mousse noire sont déjà recueillies. le shofar Cependant, ils ne prononcent jamais de paroles de haine que ce soit envers les meurtriers, ou envers Celui qui les a laissés faire, d’où le reproche qu’on fera à Nelly Sachs d’avoir permis à des coupables de recouvrer trop facilement bonne conscience. C’est ce que reprochera aussi à Nelly Sachs son ami Paul Celan. Leurs relations complexes, dont l’expression poétique la plus juste se trouve dans le recueil «Die Niemandrose» (La rose de personne) de Celan, sont analysées par Martine Benoît ainsi que par Bernard Böschenstein. Les deux poètes furent à la fois proches par l’amitié personnelle, la parenté profonde de leur poésie et le traumatisme provoqué par la Shoa qu’ils avaient tous les deux traversée sans en être victimes, d’où leur culpabilité d’y survivre. Aussi leur éloignement fut-il d’autant plus dramatique que ce qui les divisa s’avéra être la conclusion même du parcours de chacun d’entre eux . Or cette conclusion était essentielle, car elle donnait son sens au questionnement incessant poursuivi tout au long de leur vie, et que chacun d’entre eux avait traduit dans son oeuvre. Nelly Sachs entrevoit un espoir de résurrection pour son peuple dans le poème «Voix de la Terre sainte», «O meine Kinder, .... Leget auf den Acker die Waffen der Rache Damit sie leise werden – Denn auch Eisen und Korn sind Geschwister Im Schosse der Erde - (16) O mes enfants.... Déposez dans les labours les armes de la vengeance afin qu’elles se taisent car fer et blé aussi sont frères dans le sein de la terre - Paul Celan, quant à lui, entretient sa colère, et dans le célèbre poème «Zürich, Zum Storchen» (Zurich, A la Cigogne) qu’il dédia à Nelly Sachs, il lui répond en fulminant: «Von deinem Gott war die Rede, ich sprach gegen ihn...... De ton Dieu il était question, je me prononçais contre Lui Paul Celan, quant à lui, entretient sa colère, et dans le célèbre poème «Zürich, Zum Storchen» (Zurich, A la Cigogne) qu’il dédia à Nelly Sachs, il lui répond en fulminant: «Von deinem Gott war die Rede, ich sprach gegen ihn...... De ton Dieu il était question, je me prononçais contre Lui Son refus de toute réconciliation l’entraîna au désespoir. Il se suicida en se jetant dans la Seine, à Paris, en 1970, quelques jours avant que Nelly Sachs ne meure d’un cancer à Stockholm. Il ne faudrait pas cependant terminer l’évocation de Nelly Sachs sans faire mention également de trois autres grandes poétesses juives de langue allemande qui furent ses contemporaines: Else Lasker-Schüler, Gertrud Kolmar et Rose Ausländer. Ces femmes-auteurs, encore relativement mal connues dans les pays francophones, vu la barrière de la langue, partagent toutes avec Nelly Sachs une relation complexe au judaïsme, un retour aux racines déclenché par le national-socialisme et une écriture poétique inspirée par la persécution, l’exil et l’extermination. Pour ces quatre femmes, la relation à la langue maternelle fut doublement traumatisante, vu qu’elle était à la fois la langue des bourreaux, mais aussi leur moyen d’accéder au langage poétique. 39 CU LT UR E La traduction est un métier difficile, traduire un poète est une tâche presque impossible. Traduire Nelly Sachs paraît être un défi quasi insurmontable. Seule une empathie profonde, une symbiose rare ont pu permettre à Mireille Gansel, une des principales traductrices de Nelly Sachs et co-organisatrice du colloque de re-écrire une partie de son oeuvre et de la faire connaître aux lecteurs francophones. ■ 40 (1) M artine Benoit, Université Charles-de-Gaulle-Lille 3, Bernard Böschenstein, professeur honoraire à l’Université de Genève, Laurent Cassagneau, Ecole Normale Supérieure-Lettres-Sciences Humaines, Claude Cazalé-Bérard, Université ParisX- Nanterre, Blandine Chapuis, Université Jean Monnet Saint Etienne, André Combes, Université de Toulouse 2- Le Mirail, Ruth Dinesen, Professeur émérite Université de Copenhague, Mireille Gansel, traductrice, Antonella Gargano, Université de Macerata, Jean Halpérin, Président du Centre d’Etudes Juives- Université de Genève et président du Comité préparatoire des Colloques des intellectuels juifs de langue française, Andrée Lerousseau, Université Charles-de-Gaulle-Lille3, Vivian Liska, Université d’Anvers, JeanYves Masson, écrivain, traducteur, professeur de littérature comparée à l’Université Paris Fois Nanterre, Claude Vigée, écrivain (2) Sternverdunkelung, Die Muschel saust (Eclipse d’étoile, Le coquillage murmure) (3) Sternverdunkelung, Land Israël (Eclipse d’étoile, Terre d’Israël) (4) Eli, zweites Bild (Eli, 2ème tableau) (5) Juda Halevi «Le Diwan» (6) Band III, «Gedichte der Nelly Sachs» Ed. Suhrkamp (7) Band I, Ibidem (8) Sternverdunkelung, Und reissend ist die Zeit (Eclipse d’étoile, Et lancinant est le temps) (9) S ternverdunkelung, Grabschriften in die Luft geschrieben), (Eclipse d’étoile, Epitaphes scrites dans les airs) (10) Sternverdunkelung, Die Muschel saust (Eclipse d’étoile, Le coquillage murmure) (11) Sternverdunkelung, Die Muschel saust (Eclipse d’étoile, Le coquillage murmure) (12) In den Wohnungen des Todes (Dans les demeures de la mort) (13) Briefe der Nelly Sachs ( Ed. Suhrkamp 1984) (14) Fritsch-Vivié, Gabriele Nelly Sachs (Ed. Rowohlt) (15) In den Wohnungen des Todes (Dans les demeures de la mort) (16) In den Wohnungen des Todes (Dans les demeures de la mort) Oeuvres de Nelly Sachs traduites en français: Eclipses d’étoile précédé de Dans les demeures de la mort traduction Mireille Gansel, Verdier 1999 Brasiers d’énigmes et autres poèmes, traduction Lionel Richard, Nenoël/ Les Lettres Nouvelles, 1967 Présence à la nuit traduction Lionel Richard, Gallimard, 1969 Eli suivi de Lettres et d’Enigmes en feu, traduction Martine Broda, Hans Hartje et Claude Mouchard, Belin, 1989 Correspondance Nelly Sachs/ Paul Celan traduction Mireille Gansel, Belin le shofar C O M M U N AU T é Nouvelles d’Israël et d’ailleurs A l’initiative de la Communauté Juive Marocaine, le défunt Roi du Maroc Mohamed V pourrait bientôt recevoir, à titre posthume, la distinction de « Juste parmi les Nations » et ajouter, ainsi, son nom à celui des actuels 21.758 Justes inscrits sur la liste officielle déposée à Yad Vashem. Le Président de l’Etat d’Israël, Shimon Pérès, soutiendrait cette candidature proposée en signe de reconnaissance pour la protection que le souverain accorda aux Juifs Marocains durant la Seconde Guerre Mondiale. En effet, le grand-père de l’actuel souverain, Mohammed VI, avait non seulement refusé d’appliquer les lois racistes du régime de Vichy à ses sujets juifs mais aussi catégoriquement répondu par la négative aux demandes pressantes du gouvernement français de les rassembler pour les lui livrer. *** Durant plus de soixante ans, son journal intime a été gardé dans le fond d’un tiroir, ignoré de tous ! Son auteur : une jeune juive polonaise de 14 ans, Rutka Laskier, qui a disparu dans l’enfer d’Auschwitz en 1943 et qui tenait ce cahier racontant la vie au ghetto, l’expérience quotidienne de la mort et aussi les premiers émois amoureux de la jeune adolescente qu’elle était alors. La détentrice de ce précieux document, Stanislawa Sapinska aujourd’hui âgée 89 ans, l’a remis récemment au Mémorial Yad Vashem. Rutka Laskier était son amie de jeunesse. Elles avaient respectivement 14 et 24 ans lorsque leurs vies se croisèrent sous l’occupation nazie, il y a soixante-cinq ans, à Bedzin, ville qui comptait une communauté juive de 28 900 âmes. Lorsque les Allemands y établirent un ghetto, la maison de Stanislawa fut réquisitionnée. Rutka et les autres membres de sa famille y furent consignés. Aux premiers temps du ghetto, l’accès à celui-ci était encore possible et Stanislawa, qui éprouvait de l’amitié pour Rutka, lui rendit parfois visite. C’est ainsi que l’adolescente, persuadée qu’elle ne survivrait pas, confia, un jour, un secret à son amie : elle tenait un journal intime qu’elle dissimulait sous le plancher d’un endroit bien précis de la maison, lui priant, « au cas où » de le récupérer afin que l’on sache ce que les Juifs avaient à endurer. Le 24 avril 1943, Rutka nota une remarque anodine sur une «journée ennuyeuse» et referma son cahier. Ce fut la dernière fois. Car quelques semaines après cette confidence entre les jeunes filles, les Nazis fermèrent le premier ghetto et déplacèrent les familles juives dans un autre quartier, proche du lieu où leurs troupes effectuaient la «dernière sélection» préalable au départ des trains vers Auschwitz. En août 1943, Rutka et tous ses proches furent déportés. On suppose que la jeune fille fut gazée dès son arrivée. A la fin de la guerre, Stanislawa et sa famille réintègrent leur maison. La jeune femme récupéra le cahier, le lut et l’enfouit dans le tiroir de sa commode, jusqu’à ce jour de novembre 2005 où son neveu la convainquit qu’elle ne pouvait dissimuler plus longtemps ce terrible témoignage. Seul, le père de Rutka, Yaakov, survécu. Il refit sa vie en Israël où il décéda en 1986, ignorant l’existence de ce manuscrit laissée à la postérité par sa fille et que vient de publier Yad Vashem. 41 C O M M U N AU T É « 5 FÉVRIER 1943 - La corde autour de nous se resserre petit à petit. Le mois prochain, il devrait y avoir un ghetto, un vrai, entouré de murs. L’été, ce sera insupportable. S’asseoir dans une cage fermée et grise, sans pouvoir voir les champs et les fleurs. L’année passée, j’allais souvent dans les champs ; j’étais toujours entourée de fleurs et cela me rappelait qu’un jour, il me serait possible d’aller jusqu’à la rue Malachowska sans courir le risque d’être déportée. Pouvoir aller au cinéma dans l’après-midi. Je suis déjà si «submergée» par les atrocités de la guerre que même les nouvelles les plus dures n’ont aucun effet sur moi. Je ne peux tout simplement pas croire qu’un jour, je pourrais quitter la maison sans l’étoile jaune. Ou même qu’un jour, cette guerre s’arrêtera... Si cela arrive, je risquerais de devenir folle de joie. Mais à présent, je dois penser au futur proche, c’est-à-dire au «ghetto»… 42 Et après qu’arrivera-t-il ? Oh, mon Dieu. Eh bien, Rutka, tu es probablement devenue folle. Tu fais appel à Dieu comme s’il existait. Le peu de foi que j’avais a été complètement anéanti. Si Dieu existait, Il n’aurait certainement pas permis que des humains soient jetés vivants dans des fourneaux et que des têtes de petits bébés soient fracassées par des crosses de revolvers ou bien poussées dans des sacs et gazées jusqu’à la mort... Ca sonne comme un conte de fées cruel ! Ceux qui n’ont jamais vu ceci ne le croiraient jamais. Mais ce n’est pas une légende ; c’est la vérité… » Cet extrait a été traduit et publié dans l’édition du 1er juillet 2007 du quotidien « Le Monde ». Souvent encore, il peut être lu, entendu, dit, affirmé que personne ne savait, pour les chambres à gaz. Rutka, 14 ans, savait. ■ Découvrir la magikabbalat chabbat Connaissez-vous le monde du chabbat ? Venez découvrir un nouvel univers : la Planète Chabbat Nous ferons ensemble la connaissance de personnages fantastiques : la princesse Chabbat, grand-père Guitare et de nombreux autres invités. Vous êtes tous les bienvenus, vous, enfants et parents, votre doudou chéri, votre déguisement préféré. Le chabbat est un moment magique de construction familiale que nous aurons la chance de vivre ensemble. le vendredi 12 octobre 2007 à 18h30: Magikabbalat chabbat à 20h00: Office habituel JWH In f o r mat i ons u t i les VIE COMMUNAUTAIRE OFFICES DE CHABBAT Vendredi à 20h et samedi à 10h30 ■ Talmud tora et preparation a la bar/bat mitsva Tous les mercredis après-midi. Voir calendrier. ■ Cours adultes et cercles d’etude Contactez Rabbi Abraham Dahan ou Rabbi Floriane Chinsky ■ Yiskor Si vous voulez être tenus au courant des dates de Yiskor pour des membres de votre famille, contactez Giny ( 02.332.25.28 SOCIÉTÉ D’INHUMATION A.S.B.L. GAN HASHALOM En cas de nécessité, téléphonez aux numéros suivants: Le jour A Beth Hillel ( 02.332.25.28 Le soir Rabbi Floriane Chinsky ( 0485.428.490 Rabbi Abraham Dahan ( 02.374.94.80 ou 0495.268.260 Si vous désirez souscrire à Gan Hashalom, téléphonez à Willy Pomeranc Le jour ( 02.522.10.24 • Le soir ( 02.374.13.76 Gan Hashalom est réservé aux membres de la CILB en règle de cotisation et ayant adhéré à la société d’Inhumation