Appendice A : STATUT JURIDIQUE DE L’AIDE MÉDICALE AU SUICIDE (AMS) DANS LES ÉTATS OÙ ELLE EST RÉGIE PAR LA LOI1 A) Admissibilité du patient à l’AMS au moment de la demande États-Unis2 Washington Vermont Oregon Europe3 Belgique Luxembourg Pays-Bas Le patient doit : majeur; être apte à prendre des décisions éclairées et à prendre lui-même les médicaments; résider dans l’État où l’AMS sera fournie; être en phase terminale (moins de six mois à vivre); demander volontairement l’aide médicale au suicide APTITUDE être Le patient doit : être majeur, mineur émancipé4 ou mineur5; être conscient6 et apte à prendre des décisions éclairées; éprouver des souffrances physiques ou psychiques; être en phase terminale; demander volontairement l’aide médicale au suicide. État des lois au Canada7 Québec Consentement Le patient doit : majeur; être apte à consentir aux soins; être en fin de vie8; être atteint d’une maladie grave et incurable; connaître un déclin avancé et irréversible de ses capacités; éprouver des souffrances physiques ou psychiques constantes et insupportables et qui ne peuvent être apaisées dans des conditions qu’il juge tolérables; être assuré au Québec; demander volontairement l’aide médicale à mourir (AMM). ÂGE STADE DE LA MALADIE DEMANDE VOLONTAIRE Faits saillants L’analyse qui suit a été réalisée dans le contexte de l’affaire Carter, qui remet en cause le statut juridique de l’aide médicale au suicide. Les lois des États européens mentionnés reconnaissent le droit des patients de recourir à l’euthanasie et à l’aide médicale au suicide. Le projet de loi 52 du Québec (Loi concernant les soins de fin de vie) emploie l’expression « aide médicale à mourir », qui doit être administrée par un médecin lui-même. être La définition de l’expression « phase terminale » varie d’une juridiction à l’autre : aux États-Unis, le terme s’applique à une durée de vie anticipée d’au plus six mois, tandis qu’en Europe, aucune limite n’a été fixée. Le projet de loi 52 suit le modèle européen. Le projet de loi 52 et les lois européennes reconnaissent la souffrance psychologique du patient comme un facteur, tandis qu’aux États-Unis, les lois ne reconnaissent que la souffrance physique. 1La terminologie employée dans le présent document est conforme aux définitions utilisées par l’AMC lors des discussions sur la fin de vie (voir l’App. 2 sur les soins de fin de vie). 2Le Montana et le Nouveau-Mexique ont reconnu le droit à l’aide médicale au suicide par des décisions judiciaires. Voir la section « Statut juridique de l’aide médicale au suicide: exception législative (Suisse) et jurisprudence (États-Unis) » (voir p. 8). 3La Suisse offre aux médecins un moyen de se protéger contre les poursuites liées à l’aide médicale au suicide. Voir la section « Statut juridique de l’aide médicale au suicide: exception législative (Suisse) et jurisprudence (États-Unis) » (voir p. 8). 4Les mineurs émancipés sont admissibles en Belgique; les mineurs sont admissibles aux Pays-Bas, sous réserve de l’approbation de leur tuteur. 5Aux Pays-Bas, les patients âgés de 16 à 18 ans que l’on juge apte à consentir aux soins peuvent recevoir de l’aide médicale à mourir suite à une consultation avec un parent ou un tuteur; les patients âgés de 12 à 16 ans le peuvent également avec l’approbation d’un parent ou d’un tuteur. En Belgique, si le patient est un mineur non émancipé, il doit être examiné par un pédopsychiatre ou un pédopsychologue. 6Le patient aux Pays-Bas peut être inconscient. 7Deux projets de loi d’initiative parlementaire, soit les projets de loi C-581 et C-582, ont également été présentés au Parlement du Canada par le député Steven Fletcher. 8Cette expression n’est pas définie dans le projet de loi 52. Appendice A : STATUT JURIDIQUE DE L’AIDE MÉDICALE AU SUICIDE (AMS) DANS LES ÉTATS OÙ ELLE EST RÉGIE PAR LA LOI B) Procédure à suivre lors d’une demande d’aide médicale au suicide (AMS) États-Unis Washington Vermont Oregon Le médecin doit : recevoir du patient une demande verbale et écrite (signée par deux témoins); recevoir une seconde demande verbale du patient après 15 jours; vérifier que le patient répond aux critères d’admissibilité (tels qu’indiqués ci-dessus); faire examiner le patient par un médecin consultant pour avoir un deuxième avis; conseiller le patient sur les conditions d’utilisation des médicaments et lui offrir la chance d’annuler sa demande9; remplir les exigences en matière de documentation; prescrire les médicaments après un délai d’attente de 48 heures. Europe Belgique Luxembourg Pays-Bas Le médecin doit : recevoir une demande du patient10; communiquer avec le patient pendant une « période de temps raisonnable » pour vérifier son admissibilité (selon les critères indiqués ci-dessus) et son consentement; renseigner le patient sur son état de santé, son espérance de vie et les possibilités de soins palliatifs qui s’offrent à lui11; croire que l’aide médicale au suicide est la seule option raisonnable et que la demande a été faite volontairement; faire examiner le patient par un médecin indépendant pour avoir un deuxième avis12; vérifier si des directives préalables de soins ont été rédigées13. Faits saillants Toutes les administrations exigent un deuxième avis. Les administrations américaines exigent qu’une séquence précise d’étapes soit suivie lorsqu’une demande est faite. Toutes les administrations exigent que le consentement soit vérifié et(ou) maintenu au cours d’une certaine période de temps. État des lois au Canada7 Québec Le médecin doit : recevoir un formulaire (formulaire prescrit par le ministre) signé par le patient (ou un tiers, si le patient est incapable physiquement de signer); que le patient répond aux critères d’admissibilité (tels qu’indiqués ci-dessus); renseigner le patient sur son pronostic et les possibilités thérapeutiques envisageable; communiquer avec le patient à des intervalles raisonnables pour confirmer sa volonté de recourir à l’aide médicale à mourir ainsi que la persistance de sa souffrance; faire examiner le patient par un médecin indépendant pour avoir un deuxième avis; demeurer auprès du patient et en prendre soin jusqu’à ce que la mort survienne. vérifier 9 Au Vermont, le médecin doit également renseigner le patient sur les possibilités de soins palliatifs qui s’offrent à lui. Tous les patients, peu importe leur état, peuvent faire l’objet d’une évaluation psychologique visant à vérifier leur capacité à prendre une décision éclairée. 10 En Belgique et au Luxembourg, la demande doit être faite par écrit. Si le patient ne peut signer le document, il peut désigner un tiers pour le représenter. 11 Aux Pays-Bas, le médecin n’est pas tenu de discuter des possibilités de soins palliatifs avec le patient. 12 En Belgique, si le patient est un mineur non émancipé, il doit être examiné par un pédopsychiatre ou un pédopsychologue. 13 Cette vérification est requise au Luxembourg, par la Commission nationale de contrôle et d’évaluation, et aux Pays-Bas. Appendice A : STATUT JURIDIQUE DE L’AIDE MÉDICALE AU SUICIDE (AMS) DANS LES ÉTATS OÙ ELLE EST RÉGIE PAR LA LOI C) Obligations des médecins et conséquences juridiques États-Unis Washington Vermont Oregon Les médecins : ne sont pas tenus d’offrir l’aide médicale au suicide; ne peuvent être punis pour faute professionnelle; sont exempts de toute responsabilité civile et criminelle; ne sont pas tenus d’intervenir lorsqu’un patient prend luimême un médicament létal, ni d’empêcher la prise de ces médicaments; sont tenus, s’ils ne veulent pas offrir l’aide médicale au suicide, de transférer le patient aux soins d’un autre médecin qui le fera; sont tenus de faire rapport au département de la Santé ou des Services sociaux; ne peuvent offrir l’aide médicale au suicide dans un établissement de soins de santé où cette pratique n’est pas conforme aux politiques. Europe Belgique Luxembourg Pays-Bas Les médecins : ne sont pas tenus d’offrir l’aide médicale au suicide; ne sont pas passibles de poursuite au criminel pour AMS; sont tenus, s’ils ne veulent pas offrir l’aide médicale au suicide, de transférer le patient aux soins d’un autre médecin qui le fera14; sont tenus de signaler tout cas d’aide médicale au suicide à une commission; peuvent procéder à une euthanasie selon des directives préalables de soins écrites si le patient est inconscient et qu’il répond à tous les critères d’admissibilité15. État des lois au Canada Québec Les médecins : ne sont pas tenus d’offrir l’aide médicale à mourir; ne sont pas passibles de poursuite au civil pour aide médicale à mourir16; sont tenus, s’ils ne veulent pas offrir l’aide médicale à mourir, d’en aviser le médecin-chef, qui assurera le transfert du patient; sont tenus de signaler tout cas d’aide médicale à mourir à une commission; ne peuvent offrir l’aide médicale à mourir dans un établissement de soins palliatifs où cette pratique n’est pas prévue aux politiques. Faits saillants Aucune administration n’impose une obligation de participer à l’AMS ou l’AMM. Chacune a mis en place une procédure de transfert des patients admissibles si le médecin traitant refuse de participer (cette disposition n’est pas explicite dans les Pays-Bas). Toutes exigent le signalement des cas d’AMM et d’AMS, pour en assurer la conformité. Suivant le projet de loi 52 et les lois américaines, les établissements de soins de santé ont le pouvoir d’exclure l’AMS et l’AMM de leurs services offerts sur les lieux. Selon les lois américaines et la loi du Québec, l’AMS et l’AMM ne peuvent être incluses à des directives préalables de soin. 14Cette obligation n’est pas inscrite aux lois néerlandaises. 15Aux Pays-Bas, les patients doivent être âgés de 16 ans ou plus pour avoir une directive préalable incluant l’aide médicale à mourir. 16Ce point n’est pas mentionné explicitement dans le projet de loi. Celui-ci apportent des modifications aux lois suivantes : le Code civil du Québec, le Code de procédure civile du Québec, la Loi médicale, la Loi sur la pharmacie et la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Appendice A : STATUT JURIDIQUE DE L’AIDE MÉDICALE AU SUICIDE (AMS) DANS LES ÉTATS OÙ ELLE EST RÉGIE PAR LA LOI Statut juridique de l’aide médicale au suicide (AMS) : exception législative (Suisse) et jurisprudence (États-Unis) SUISSE MONTANA Bien qu’aucune loi particulière ne régisse l’aide médicale au suicide, la Suisse a revu son Code pénal (article 115) afin d’y inclure une disposition sur cette pratique. Des organisations pour l’assistance au suicide, telles que Dignitas et EXIT, ont par ailleurs défini des critères d’admissibilité pour les patients et des lignes directrices pour les médecins. L’Académie suisse des sciences médicales, une fondation indépendante, a quant à elle formulé des directives et des recommandations médico-éthiques à ce sujet à l’intention des membres de la Fédération des médecins suisses. Il est également possible que d’autres lois, comme la Loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes de 1951, exigent indirectement des médecins qu’ils respectent certaines conditions. Pour ce qui est du patient, aucune exigence de résidence ne lui est imposée, ce qui explique la grande quantité d’étrangers qui ont recours à l’aide médicale au suicide en Suisse. Baxter v. Montana : Cette décision rendue en 2009 par la Cour suprême du Montana reconnaît le droit constitutionnel des patients à recevoir des médicaments létaux de leur médecin. Le patient doit alors se trouver en phase terminale, mais être toujours apte à consentir aux soins. Cette décision permet aux médecins de se défendre contre les poursuites et les accusations liées à l’aide au suicide. Art. 115 Incitation et assistance au suicide Celui qui, poussé par un mobile égoïste, aura incité une personne au suicide, ou lui aura prêté assistance en vue du suicide, sera, si le suicide a été consommé ou tenté, puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire. NOUVEAU-MEXIQUE Morris v. New Mexico : Cette décision rendue en 2014 dans l’État du Nouveau-Mexique (district judiciaire près d’Albuquerque seulement) reconnaît le droit fondamental des patients à recevoir l’aide de leur médecin pour mourir. Le patient doit alors se trouver en phase terminale et être mentalement apte. Cette décision a été portée en appel. Références États-Unis http://apps.leg.wa.gov/RCW/default.aspx?cite=70.245 Baxter c. Montana, 2009 WL 5155363 (Mont. 2009). Morris c. New Mexico, No. D-202-CV 2012 -02909, 2014. http://www.leg.state.vt.us/docs/2014/Acts/ACT039.pdf http://public.health.oregon.gov/ProviderPartnerResources/EvaluationResearch/DeathwithDignityAct/Documents/statute.pdf Europe http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/change_lg.pl?language=fr&la=F&table_name=loi&cn=2002052837 http://www.legilux.public.lu/leg/a/archives/2009/0046/a046.pdf#page=7 http://www.euthanasiecommissie.nl/Images/Wet%20toetsing%20levensbeeindiging%20op%20verzoek%20en%20hulp%20bij%20zelfdoding%20 Engels_tcm52-36287.pdf http://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19370083/index.html Projet de loi 52 http://www.assnat.qc.ca/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-52-41-1.html Information à jour au 11 juin 2014