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certain Rodolphe, qui convertit parfois par la force les Juifs d'Occident ou qui les tue, et il
rappelle la position traditionnelle de l'Eglise, celle que j'ai déjà eu l'occasion de dire selon
laquelle, certes il faut convaincre les Juifs de leur erreur, mais il faut le faire par la parole, par
l'amour, par la prière mais pas par la violence.
Il leur dit ceci: "Ne touchez pas aux Juifs, ils sont la chair et les os du Seigneur." Il ne s'agit
pas dire qu'ils ont raison, ils ont tort à ses yeux profondément de ne pas reconnaître que Jésus
est le Christ, mais ils sont de façon charnelle le peuple d'où vient Jésus et ils méritent donc
d’avoir le droit de vivre. Cela lui vaut la reconnaissance de certains auteurs, notamment un
certain Ephraïm de Bonn, dont on aura l'occasion de reparler et qui rend hommage à Bernard
de Clairvaux pour cette prise de position assez courageuse, hostile aux violences contre les
communautés juives d'Occident lors de la deuxième croisade.
Si j'évoquais l'ambivalence de Bernard à l'égard du peuple juif, c'est parce que par ailleurs il a
pu lui arriver de ne pas statuer en faveur des Juifs: en particulier lors d'une polémique qui
divisa l'Occident brièvement à propos d'un pape dont certains disaient qu'il avait des origines
juives qui le rendaient inapte à la fonction de pape et d'autres disaient que non. Finalement ses
opposants ont gagné: on l'appelle aujourd'hui antipape cet homme. Or, cet homme, Anaclet II,
fut disqualifié par Bernard de Clairvaux qui évoqua ses origines juives en disant que cela
le disqualifiait parfaitement pour monter sur le trône de Saint-Pierre. Voilà une position assez
étrange: le même homme qui avait défendu les Juifs lors de la deuxième croisade et rappelé
qu'il ne fallait pas les convertir autrement que par la bonté, l'amour, la prière, la parole, ce
même homme critiquait ainsi un antipape pour des raisons évidemment d'hostilité profonde à
ce peuple. Toutefois pour ce qui est la deuxième croisade, les persécutions ont été
relativement contenues, notamment grâce à Bernard de Clairvaux, mais pas complètement.
La troisième croisade, une quarantaine d'années plus tard en 1188, occasionne de nouveau des
violences contre les Juifs. Les Juifs d'Angleterre, une communauté assez jeune, assez peu
nombreuse, font l'objet de quelques violences à la fin du XIIème siècle. Les Juifs du monde
germanique encore et toujours et de diverses parties donc de l'Occident. Bref, il y a des
persécutions postérieures.
L’enluminure ci-dessous, terriblement violente représente des Juifs tués par des croisés ou par
des chevaliers chrétiens, ce n'est pas très clair. Il est clair en outre que ces chevaliers
semblent même coiffés de couronnes, donc une image dont l'élucidation n'est pas très claire,
mais qui est visiblement celle d'un massacre par des hommes armés d'épées démesurées, de
Juifs reconnaissables à leur barbe et à leur chapeau.