Conduction électrique dans les électrodes polycristallines de Z n 0

J
Chim. Phys.
(1998)
95.
595-616
O
EDP
Suences.
Les
Ulis
Conduction électrique
dans les électrodes polycristallines
de Zn0 semiconducteur.
Importance des joints de grains
K.
Djembo-Taty,
L.
Plaindoux, J. Kossanyi et
J.C.
on fard-~aret'
Laboratoire des Matériaux Moléculaires,
CNRS,
2-8
rue
H.
Dunant,
94320
Thiais, France
(Reçu le
10
novembre
1997
:
accepté le
1
décembre
1997)
Correspondance et
tirés
a
part
RÉSUMÉ
Les propriétés électriques de pastilles frittées d'oxyde de zinc poIycristallin
pur et enrichi en oxyde de bismuth ont été comparées avec celles d'électrodes
analogues en contact avec un électrolyte aqueux. En bon accord avec le modèle des
varistances, les propriétés électriques des pastilles sèches enrichies en oxyde de
bismuth sont dominées par les barrières intergranulaires; la résistance
en
champ nul
est élevée et la polarisation appliquée se divise en autant de chutes élémentaires de
potentiel qu'il y a de barrières consécutives dans l'épaisseur des pastilles. La mise
au contact d'un électrolyte aqueux induit des modifications importantes de ces
propriétés; la résistivité des pastilles enrichies en oxyde de bismuth est fortement
diminuée. Le comportement des électrodes polycristallines se rapproche alors de
celui d'électrodes monocristallines
:
une polarisation anodique appliquée reste
confinée en une seule zone de charge d'espace
à
l'interface électrode-électrolyte.
Les résultats sont interprétés comme étant la conséquence du mouillage des joints de
grains par l'électrolyte en surface des pastilles, permettant l'injection directe
d'électrons dans les joints de grains.
mots-clés
:
électrodes polycristallines semiconductrices, oxyde de zinc, joints de
grains, conduction électrique.
ABSTRACT
The electrical properties of pure and bismuth-doped polycrystalline sintered
zinc oxide pellets have been compared with those of electrodes of similar
composition but operating in contact with an aqueous electrolyte. In good
accordance with the mode1 proposed for varistors, the electrical properties of the
bismuth-doped dry pellets are dominated by the intergranular barriers; the zero-
field resistivity is high and an applied polarization is divided into individual
potential drops, each corresponding to one grain Laundary barrier. These
K.
Djernbo-Taty
et
al.
properties are altered when the pellets operate in contact with an aqueous
electrolyte, the resistivity of the bismuth-doped pellets decreasing strongly. The
behavior of the polycrystalline electrodes is similar to that of single crystal
electrodes
:
an applied anodic polarisation is entirely sustained in a single space
charge layer at the electrode-electrolyte interface. The results are a consequence of
the wetting of the grain boundaries by the electrolyte at the surface of the pellets
allowing a direct electron injection
in
the grain boundaries.
key
words
:
polycrystalline semiconducting electrodes, zinc oxide. grain
boundaries, varistors, electrical conduction.
INTRODUCTION
Les céramiques composites
à
base d'oxyde de zinc sont utilisées comme
matière première dans la fabrication des varistances
[l-31.
Leurs propriétés
électriques dépendent essentiellement de la nature et de la concentration d'additifs,
le plus souvent d'autres oxydes métalliques, qui y sont présents. Parmi tous les
additifs certains, tel Co, se substituent
à
Zn dans le réseau semiconducteur tandis
que d'autres, tel ~i~+ (le plus utilisé) ou les ions de terres rares trivalents, restent,
en raison de leur taille et de leur charge, confinés en surface des grains, aux joints
de grains, ou ils agissent en tant qu'activateurs. Leur présence permet le piégeage
de charges électriques
à
la surface des grains de Zn0 avec formation concomitante
de doubles barrières de Schottky.
L'utilisation d'électrodes semiconductrices polycristallines en électrochimie se
heurte précisement aux conséquences de la présence des joints de grains et des
barrières qui y sont associées. Alors que les propriétés électriques des électrodes
semiconductrices monocristallines sont décrites sur la base d'une interface
semiconducteur-électrolyte supportant la totalité de la polarisation
141,
les barrières
intergranulaires associées aux joints de grains dans les électrodes polycristallines
peuvent modifier les propriétés du semiconducteur et remettre en cause ce modèle
i51.
Du fait des nombreuses dislocations que sont, en réalité, les joints de grains, la
surface des électrodes en contact avec l'électrolyte se trouve auzmentée dans des
proportions qui rendent tout calcul aléatoire et qui ne permettent l'application
d'aucun modèle précis. De plus, les mesures d'impédance susceptibles de conduire
à
la détermination des caractéristiques du semiconducteur, ne donnent qu'une image
des charges piégées dans les dislocations en surface
[4].
Enfin, les joints de grains
sont autant de lieux de recombinaison réduisant les performances des électrodes
[5].
Des électrodes semiconductrices de Zn0 ou Ti02 po!ycristallin, ont fait l'objet
de quelques études et ont été comparées aux électrodes monocristallines analogues,
CONDUCTION
DANS
Zn0
POLYCRISTALLIN
597
sans pour autant que les problèmes posés par les joints de grains aient été abordés
[6-IO]. Seul, le rapport entre la surface apparente et la surface réelle des électrodes
a été considéré. Par exemple, dans le cas de Ti02, la comparaison de mesures
d'impédance, effectuées sur des électrodes polycristallines et mono-cristallines,
conduit
à
un facteur de surface voisin de 3
[SI
alors que des mesures de
photosensibilisation donnent une valeur voisine de
200
[IO].
Dans le cas de ZnO, la comparaison des voltarnmogrammes et des mesures
d'impédance d'électrodes polycristallines [6,7] avec ceux d'électrodes mono-
cristallines [4,11,12] ne fait pas apparaitre un comportement particulier qui puisse
être relié
à
la nature polycristalline des électrodes. Ceci peut être au fait que les
joints de grains de Zn0 pur polycristallin sont peu ou pas activés et donc que leur
influence est faible. C'est pourquoi cette étude pour laquelle les joints de grains de
l'oxyde de zinc ont été délibérément activés avec des ions
~i~+
a
été entreprise.
PARTIE EXPERIMENTALE
Les pastilles de Zn0 polycristallin, pur ou enrichi en ions
~i~',
ont été
préparées suivant la technique des céramiques. Les poudres de Zn0
(99,99
%
pur)
et Bi203
(99,9
%
pur) sont des produits Aldrich. Zn0 est utilisé soit tel quel soit
mélangé
à
Bi203 dans un mortier en agate en présence d'un peu d'éthanol. Des
pastilles d'oxyde de zinc pur ou de mélange sont ensuite préparées dans un moule
6
cylindrique sous une pression de
50
10 Pa. Elles sont mises
à
calciner pendant 6
heures sous air
à
1000'
C
dans un four
à
moufle Vecstar HFl. Afin d'éliminer au
maximum les causes d'incertitude, et de permettre une comparaison entre leurs
propriétes, toutes les pastilles sont calcinées ensemble, et leurs dimensions
(diamètre et épaisseur) sont mesurées au pied
à
coulisse après calcination.
Des contacts ohmiques utilisant l'alliage In-Ga sont réalisés sur les deux faces
des pastilles dans le cas du montage sec (varistance) ou sur la seule face arrière dans
le cas du montage humide (électrodes). La fabrication des électrodes a déjà été
décrite [13]. Les champs et les faces arrières des pastilles montées en électrodes sont
isolés de la solution électrolytique par de la résine epoxy (Araldite) de façon que
seule la face avant des pastilles se trouve au contact de l'électrolyte.
Les courbes intensité-potentiel des pastilles sont réalisées avec des multimètres
digitaux et une simple alimentation en courant continu. Les voltammogrammes des
électrodes en contact avec un électrolyte sont enregistrés soit
à
l'aide d'un
potentiostat
PAR
173 piloté par un programmateur PAR
175,
les potentiels étant
repérés par rapport
à
celui de l'électrode de référence au calomel saturé
(ECS),
soit
à
l'aide des multimètres et de l'alimentation en courant continu, sans électrode de
référence. La contre-électrode est dans les deux cas une feuille de platine de surface
598
K.
Djembo-Taty
et
al.
égale
à
1
cm2. Les courbes intensité-potentiel des électrodes sous éclairement sont
obtenues en focalisant tout le rayonnement d'une lampe
XBO
500
W
sur la face
avant des pastilles. Les spectres d'électroluminescence sont enregistrés avec un
spectrofluorimètre Perkin Elmer
MPF
44
en positionant l'électrode
à
la place du
porte échantillon. Afin de limiter l'usure des électrodes, le potentiostat est utilisé en
générateur
de
crénaux rectangulaires de potentiel
(0,O
V/ECS:1,0 ms; 10
V/ECS:100 ps). Dans tous les cas, l'électrolyte est une solution aqueuse 1,0
M
NaCl.
RESULTATS
ET
DISCUSSION
Caractérisatiort du niatériau
Pastilles entre deux colztacts ohrttiques
Les varistances
à
base de
Zn0
sont des céramiques polycristallines dans
lesquelles la conductivité est contrôlée par des doubles barrières de Shottky
présentes aux joints de grains. Leurs propriétés électriques sont décrites par une
relation empirique reliant le potentiel appliqué V et le courant i
[l-31:
d(Lni) est appelé cafficient de non-linéarité; il permet
C
est une constante et
a
=
----
d(LnV)
de caractériser la qualité de la varistance. Le pouvoir limiteur de tension d'une
varistance dépend en effet de
a
:
plus sa valeur est élevée meilleure est la
varistance, et
à
une varistance idéale correspond une valeur infinie de
a.
Les caractéristiques courant-tension des varistances peuvent être divisées en
quatre zones de fonctionnement. La première zone, dite région ohmique,
correspond aux densités de courant les plus faibles, de l'ordre de 10-8
A
cm-'; le
cœfficient
a
y
est bien entendu égal
à
1
et la varistance peut être décrite par sa
résistance en champ nul
Ro.
La deuxième région est dite de préclaquage; les
densités de courant
y
sont comprises entre
IO-'
et
10-~
A
cm-2; les effets non-
linéaires commencent
à
apparaitre et la valeur de
a
croît. La troisième région est
dite région de claquage; la non-linéarité quantifiée par
a
y
est maximum et une
faible augmentation du potentiel appliqué entraine une forte augmentation du
courant jusqu'à
103
A
cm-2. La quatrième région est dite d'inversion; le courant y
est élevé, au delà de
103
A
cme2, mais la caractéristique
y
est de nouveau ohmique
et bien entendu
a
est de nouveau égal
à
1.
CONDUCTION DANS Zn0 POLYCRISTALLIN
599
La forte conductivité de Zn0 fait que, jusqu'au claquage, les barrières de
joints de grains supportent la totalité de la tension V appliquée
à
un échantillon
polycristallin. Le champ est nul
à
l'intérieur des grains et la polarisation totale se
divise en autant de chutes de potentiel individuelles et égales
Vg,
qu'il
y
a de
barrières consécutives transversales rencontrées. Si nu désigne le nombre de grains,
D
de joints de grains ou de barrières inter-granulaires, successifs rencontrés dans
l'épaisseur e d'une pastille polycristalline donnée on a
:
P
La conductivité d'un tel échantillon ne dépend alors que du nombre et de la
hauteur des barrières. Dans la région ohmique, elle est due
à
l'activation thermique
des électrons au voisinage des barrières de joints de grains. L'augmentation de la
non-linéarité dans la région de préclaquage provient d'un abaissement progressif
des barrières de joints de grains
[14,15].
Enfin, le claquage se produit quand les
barrières disparaissent complètement; elles sont alors soumises
à
des tensions
voisines de
3
V correspondant
à
la largeur de la bande interdite de ZnO. La
connaissance de la tension de claquage V,,
,
lorsque V est voisin de
3
V,
permet
g
alors une estimation du nombre
de
grains, de barrières ou de joints de grains, dans
l'épaisseur de la pastille
:
et par
une estimation de la taille du des grains de ZnO, définie comme la distance
D
moyenne entre deux barrières consécutives. A taille des grains constante, n est
i?
proportionnel
à
e
.
P
'
Les courbes intensité-potentiel de deux séries de quatre pastilles, les unes de
Zn0 polycristallin pur, et les autres de Zn0 enrichi en ions ([~i~']
=
1,5 at.
%
[zn2+]), d'épaisseur croissante comprise entre
1
et
3
mm,
sont présentées en
figure
1.
Le comportement des pastilles contenant des ions ~i~~ est ohmique aux
tensions les plus basses. Pour une tension inférieure
à
une vingtaine de volts dans le
cas de la plus mince et
à
une cinquantaine de volts dans le cas de la plus épaisse, le
courant est directement proportionnel
à
la tension appliquée. Au delà, le
comportement des pastilles est non-ohmique, et une forte augmentation du courant
est observée pour les tensions les plus élevées. En raison d'une conductivité plus
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