d’Alphonse Allais6, mais son usage en était limité. Il envahit actuellement les médias : un
magazine de France 5 s’intitule « C dans l’air ».
. Et enfin au niveau de la prononciation, une tendance à la fermeture des voyelles finales (était
est souvent prononcé comme été) et le fait de placer l’accent d’intensité, non plus sur une
dernière mais sur une première syllabe.
Vers une nouvelle phonologie ?
Un autre aspect intéressant à analyser réside dans ce qui peut apparaître comme une
transformation du système phonologique français. En français standard, il y a opposition nette
entre voyelles fermées et voyelles ouvertes : dé ~ dès, jeûne ~ jeune, sol ~ saule. Cette
opposition ne se maintient en finale de mot ouverte (c’est-à-dire terminée par une voyelle)
qu’avec e fermé et e ouvert : pré / prêt, épée / épais, marée / marais. Les deux autres
oppositions sont neutralisées au profit de la voyelle fermée : jeu, peu, pot, sot, en finale de
mot ouverte alors qu’elles se maintiennent en syllabe ouverte non finale : jeûne / jeune, nôtre /
notre, etc. Depuis 2002, il y a une tendance dans les médias à systématiser cette neutralisation.
Les voyelles finales de paix, anglais, français sont réalisées fermées ainsi que les finales de
l’imparfait et du conditionnel : était est prononcé comme été. Un autre changement concerne
l’accent d’intensité. “ En français, c’est toujours la dernière syllabe accentuée du groupe qui
est la plus forte et qui porte l’accent principal ” 7. Or depuis 2002, cet accent d’intensité est
parfois placé par les présentateurs de journaux télévisés sur une première syllabe, lorsqu’ils
veulent souligner un événement ou exprimer leur indignation. Sous cet accent, la voyelle
s’allonge et, dans le cas de syllabe ouverte, se réalise fermée : la première syllabe de politique
est alors prononcée comme pot.
Discret à ses débuts, le phénomène a pris de l’ampleur avec la crise irakienne et la guerre en
Irak, comme l’attestent ces extraits glanés au gré de chaînes de télévision (TF1, France 2,
France 3, et surtout Canal +, LCI, Euronews) de février à avril 2003 (les sons vocaliques en
gras marquent l’accent d’intensité et la réalisation fermée de la voyelle alors que la
prononciation standard demande des voyelles ouvertes) :
6 Cf. Œuvres posthumes (1877-1905), Robert Laffont 1990, 588-590 (1900) : C’est que moi, je ne me contente
pas de transformer « Hérault » en « Ero » j’écris froidement « RO ». Non moins froidement j’écris « NRJ » pour
« Energie » et « RIT » pour « Hériter ». Je me garde bien de mettre : « Hélène a eu des bébés. » Combien plus
court, grâce à mon procédé : « LN A U D BB ». p. 590
7 Bertil MALMBER, La phonétique (1954), PUF, 1987, p. 91