Évolution des principaux indicateurs économiques chinois entre 1980 et 2014 Produit intérieur brut (PIB) Stocks et flux d’investissements directs étrangers (IDE) entrants (en mille milliards de dollars courants) DP 8108 / LA CHINE, PUISSANCE MONDIALE UNE PUISSANCE ÉCONOMIQUE MONDIALISÉE Production industrielle (1978-2010) 2 500 3 000 (en milliards de dollars courants) (en milliards de dollars courants) Échelle logarithmique (en milliards de dollars courants) 1 000 10 Importations et exportations 8 800 2 000 6 600 1 500 4 400 1 000 2 200 500 0 140 80 20 0 L’insertion réussie dans la mondialisation économique 0 Stock PIB chinois Source : Banque mondiale, 2015. Flux Importations Source : Cnuced, 2014. Exportations Source : Banque mondiale, 2015. Top 500 mondial : quelle place pour les entreprises chinoises ? Les cinq premiers pays importateurs et exportateurs mondiaux (stocks en milliards de dollars courants) Nombre d’entreprises chinoises parmi les 500 plus grandes entreprises mondiales entre 1999 et 2014 (en milliards de dollars courants) États-Unis : 17 419 Importations (en fonction du chiffre d’affaires) États-Unis : 2 770 Les différents graphiques ci-contre en témoignent, l’insertion de la Chine à la mondialisation économique est réussie. En 2014, la Chine affichait à l’échelle mondiale le second produit intérieur brut (PIB) et était le deuxième importateur et exportateur, chaque fois derrière les États-Unis. Elle était également, si l’on exclut Hong Kong, le cinquième pays récepteur d’investissements directs étrangers (IDE) cumulés, certes encore très loin de la puissance américaine mais talonnant la France et le Royaume-Uni, trois grandes puissances industrielles qui se sont ouvertes à l’économie mondiale bien avant elle. Cette insertion réussie se manifeste aussi par la croissance des investissements sortants et la multiplication, ces quinze dernières années, du nombre des entreprises chinoises figurant au palmarès des plus grandes entreprises mondiales. Comme le rappelle l’historienne Marie-Claire Bergère, la Chine a entamé sa “longue marche” vers son statut actuel de deuxième puissance économique mondiale à la fin des années 1970, avec “la réforme et l’ouverture” (gaige kaifang), mots d’ordre lancés par Deng Xiaoping. Une première décennie a eu pour priorité le développement des campagnes, la mise en place d’une économie marchande alors fondée sur des micro-entreprises (getihu) et l’ouverture au commerce international au sein des zones économiques spéciales (ZES) implantées dans les provinces côtières. Une deuxième décennie a vu l’État reprendre la main sur les affaires économiques, sans pour autant retirer toutes les prérogatives dans ce domaine aux pouvoirs locaux, s’attaquer à la réforme des entreprises d’État et lancer une large politique de 30 documentation photographique privatisation dans l’industrie, mais aussi dans les secteurs de l’immobilier, de la santé ou encore de l’éducation. Enfin, l’accession de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en 2002 a ouvert la troisième étape de son insertion dans la mondialisation économique. Elle a marqué le point de départ d’une très nette accélération de la croissance des exportations et importations ainsi que des flux et stocks d’IDE. La Chine est alors devenue le principal lieu de la production industrielle mondiale, avec une très nette domination dans le secteur des biens manufacturés comme le textilehabillement, le jouet ou encore l’électronique. C’est la sous-évaluation du yuan et le faible coût de sa main-d’œuvre qui ont permis à la Chine de devenir l'“atelier du monde” en un temps réduit. Mais attention à ne pas se tromper de raisonnement : la très forte augmentation du PIB chinois à partir du début des années 2000 laisse bien souvent penser, à tort, que cette insertion de la Chine au commerce mondial et l’augmentation des IDE sur son sol seraient seules responsables de sa croissance économique. La mise côte à côte ci-contre des graphiques relatifs aux évolutions du PIB, des IDE et du commerce extérieur amplifie d’ailleurs cette idée. Or, aux côtés des exportations de produits manufacturés bon marché à destination des marchés occidentaux, les investissements publics et, dans une moindre mesure, la consommation des ménages sont aussi deux importants contributeurs à la croissance du PIB chinois. Certes, la crise financière et économique de 2008, en provoquant une chute de la demande occidentale, a eu un impact sur l’évolution trimestrielle du PIB et, dans certaines provinces côtières, sur les activités industrielles et l’emploi. Cependant, le colossal plan de relance (près de 500 milliards de dollars) initié par le pouvoir central, et reposant principalement sur des investissements publics dans les infrastructures et l’immobilier, a permis de maintenir une forte croissance. Il n’a cependant pas entraîné une augmentation de la consommation des ménages aussi élevée que souhaité. Ces derniers ont en effet profité de la hausse des salaires non pour consommer mais pour épargner davantage. Il en résulte un important déséquilibre entre investissement et consommation dans la structure du PIB, déséquilibre le plus marqué parmi les principales économies de la planète. En réalité, l’un des grands défis de l’économie chinoise n’est pas tant de limiter la dépendance de la croissance du PIB aux exportations que celle, beaucoup plus importante, aux investissements. La multiplication de ces derniers a engendré par endroits une surcapacité d’offre, signe d’un endettement des pouvoirs locaux et d’une augmentation des créances douteuses dans le secteur financier. Tout cela rend désormais nécessaire, aux yeux des autorités centrales, un rééquilibrage de la croissance au profit de la consommation des ménages. Mais ce rééquilibrage ne peut être qu’un projet à long terme. Il explique et rend nécessaire le ralentissement de la croissance du PIB : encore à deux chiffres au début des années 2010, celle-ci est tombée à 7,4 % en 2014, son taux le plus bas depuis vingt-cinq ans. Quel impact cette transition vers un nouveau modèle de croissance aura-t-elle sur l’économie mondiale ? Telle est la question. /// Chine États-Unis Source : Productions calculées à partir des comptes nationaux des Nations unies, 2011. Top 5 mondial : quelle place pour la Chine en 2014 ? Les cinq premiers PIB mondiaux 19 7 19 8 80 19 83 19 85 19 88 19 91 19 93 19 96 19 99 20 02 20 05 20 07 20 10 0 19 80 19 83 19 86 19 89 19 92 19 95 19 98 20 01 20 04 20 07 20 10 20 14 19 80 19 83 19 86 19 89 19 92 19 95 19 98 20 01 20 04 20 07 20 10 20 13 14 10 20 07 20 04 20 01 20 98 20 95 19 92 19 89 19 86 19 83 19 19 19 80 300 Chine : 10 360 Japon : 4 601 Chine : 1 953 Allemagne : 3 852 1999 (6) Allemagne : 1 482 Royaume-Uni : 2 942 2004 (15) Japon : 934 Royaume-Uni : 859 Source : Banque mondiale, Indicateurs de développement dans le monde 2015. Les cinq premiers pays récepteurs d’IDE (en milliards de dollars courants) 500 plus grandes entreprises mondiales 2009 (37) Exportations 2014 (92) États-Unis : 2 262 Chine : 2 213 États-Unis : 4 935 Allemagne : 1 699 Royaume-Uni : 1 606 Entreprises chinoises Royaume-Uni : 806 Chine (avec RAS1 de Hong Kong) : 1 444 France : 800 France : 1 082 Chine : 957 Source : Cnuced, 2015. 1 Région administrative spéciale Source : Banque mondiale, 2015. L’ensemble des données a été consulté en juillet 2015. Source : Global 500, Fortune. Réalisation : Documentation photographique © Paris, Dila, 2015. LA PUISSANCE ÉCONOMIQUE DE LA CHINE UNE TRANSITION ÉCONOMIQUE EN TROIS ÉTAPES La transition économique s’est accomplie grâce à une politique de réforme et d’ouverture (gaige kaifang) qui a substitué des mécanismes de marché à ceux de l’économie de commande, et qui a intégré progressivement la Chine aux échanges internationaux […]. Le “cours de rattrapage” s’est déroulé en trois phases, d’environ une décennie chacune […]. Pendant la période initiale, de 1978 à 1989, la réforme […] remporte ses principaux succès à la campagne. […] Dans le secteur urbain et industriel, les progrès sont plus tardifs et plus limités. Le retrait partiel de l’État conduit à l’émergence d’une économie mixte faisant coexister, non sans désordre, une sphère d’économie planifiée et une sphère d’économie marchande essentiellement constituée de micro-entreprises (getihu). […] L’autre grand volet de la réforme à cette époque est l’ouverture de la Chine aux produits, techniques et capitaux étrangers. Cette ouverture reste prudente, contrôlée de près par le pouvoir à travers l’établissement de zones économiques spéciales (ZES) […]. Les investissements directs étrangers (IDE) commencent à affluer et les échanges commerciaux extérieurs, à se développer. […] Pendant la seconde phase de transition, de 1992 à 2002, la priorité accordée à l’économie rurale s’efface, le rôle des entreprises de bourg décline. La réforme du secteur urbain et industriel devient le principal objectif et les privatisations progressent rapidement. En même temps, le pouvoir fait un retour en force dans la gestion économique. La création d’institutions adaptées au fonctionnement de l’économie de marché s’accompagne d’un gros effort de recentralisation. […] L’accession [de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce en 2002] ouvre une troisième étape dans le processus de réforme. La Chine doit s’engager à faire disparaître toutes les barrières tarifaires et administratives pesant sur ses importations. Elle doit aussi promettre de lever les restrictions qui limitent la création d’entreprises à participation étrangère et d’ouvrir à ces entreprises de nouveaux secteurs d’activité. Pour accompagner cette intégration accrue au marché mondial, la Chine est appelée à harmoniser son droit des affaires avec la législation internationale. […] Cette troisième phase de la réforme coïncide avec un véritable grand bond en avant de l’économie chinoise, désormais étroitement intégrée au marché mondial ou, du moins, usant des avantages qu’il lui offre. Marie-Claire Bergère, Chine, Le nouveau capitalisme d’État, Paris, Fayard, 2013. 31 documentation photographique