La fameuse confiance des ménages (D1)
Les pics de récession ou de reprise sont nettement moins marqués pour la consommation que
pour l'investissement. Ainsi, au plus fort de la récession du début des années 90, quand
l'investissement perdait plus de 6%, la consommation ne fléchissait que de 0,6%. Attention
tout de même: une petite variation des dépenses des ménages peut avoir des effets importants
sur la croissance, par un effet de masse (la consommation représente 2,7 fois
l'investissement).
Contrairement à des discours répandus, ces dépenses de consommation sont peu liées à l'état
d'esprit du moment. La fameuse "confiance", si souvent invoquée par les gouvernements, peut
provoquer des effets de relance durant quelques mois ou, quand elle se transforme en
défiance, alimenter une épargne de précaution temporaire. A moyen terme pourtant, c'est le
niveau de vie qui détermine le niveau des dépenses. La relative stabilité de la consommation
s'explique en partie par la rigidité à la baisse des salaires: une rigidité appréciable pour les
intéressés, mais qui évite aussi que les ralentissements soient plus accentués. La répartition
plus structurelle entre épargne et consommation dépend de facteurs de fond que l'on décrypte
mal: rendements et produits de l'épargne, incitations fiscales, position dans le cycle de vie,
évolution des systèmes de retraite, etc.
Les aléas de l'investissement (D2)
Le deuxième pilier de la croissance, qui en fait son dynamisme, est l'investissement des
entreprises. Avec 267 milliards d'euros, on est bien loin de la consommation: il représente
"seulement" un cinquième du PIB. Pour partie, cette différence est artificielle, car on
comptabilise mal l'investissement immatériel (*). Ainsi, par exemple, formation initiale et
formation continue façonnent pour de longues années le niveau et les structures de la
compétence de la main-d’œuvre. Au total, les dépenses d'éducation représentent 7% du PIB et
n'apparaissent pas comme un investissement, alors qu'elles en ont les caractéristiques.
Les dépenses à long terme des entreprises forment la variabilité du PIB: de 1998 à 2000, elles
ont progressé à un rythme supérieur à 6%. Au cours de cette période, l'investissement
explique à lui seul 40% de la croissance totale. Sa source première est la demande
qu'anticipent à moyen terme les entreprises. Pour acheter une machine, il faut avoir de bonnes
perspectives de ventes. Mais il faut aussi que ce soit rentable, c'est-à-dire que les rendements
réels escomptés (inflation déduite) dépassent le coût des emprunts à réaliser ou la rentabilité
des placements financiers. La montée des taux d'intérêt peut rendre les placements financiers
plus attractifs que l'investissement dans la production.
Derrière la rentabilité de l'investissement, se cache la question du partage du profit. Si les
entrepreneurs estiment que la part qu'ils vont récupérer est trop faible, ils auront peu intérêt à
investir et à prendre des risques. Avec des conséquences négatives à long terme sur le
potentiel de fond de l'économie et sur ses capacités d'innovation et d'adaptation. A l'inverse, si
la part des profits est trop élevée, non seulement les travailleurs sont spoliés du fruit de leur
labeur, mais, comme l'avait souligné Keynes, il y a un risque important d'une déprime de la
demande, avec répercussion sur l'investissement. L'équilibre résulte toujours d'un rapport de
force entre patrons et salariés, arbitré par la collectivité qui, via la fiscalité, peut prendre aux
uns et redonner aux autres.
L'ouverture de l'économie (D4)