STAGE DE MASTER 2
Décohérence et Intrication quantique
Sylvain Vogelsberger
sous la direction de Dominique Spehner
de l’Institut Fourier, Grenoble
Master 2 de Physique
ENS Lyon
Avril/Juillet 2008
Résumé
Table des matières
1 Motivations 1
2 Un peu d’information quantique pour se motiver ! 2
3 L’intrication 5
3.1 Définitions et premiers Critères . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
3.2 Mesure d’Intrication de Wootters . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
3.3 Intrication pour les systèmes à variables continues . . . . . . . . 9
3.4 Comment fabriquer des états intriqués ? . . . . . . . . . . . . . . 13
3.4.1 Atome à deux niveaux dans une cavité. Modèle de Jaynes-
Cummings .......................... 13
3.4.2 Les pistes expérimentales pour fabriquer un ordinateur
quantique........................... 14
4 Décohérence 16
4.1 Formalisme des Systèmes Ouverts : . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
4.2 Formalisme de projection et approximation de l’onde tournante : 20
4.3 Retour sur l’atome à deux niveaux et formule de Wigner-Weisskopf 22
4.4 Résultats rigolos sur la décohérence . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
5 Désintrication due à la décohérence 27
5.1 Application du critère d’intrication pour les variables continues . 27
5.2 Désintrication de deux qubits due au couplage à leurs environne-
ments ................................. 29
6 Conclusion 33
1 Motivations
On entend, de nos jours, de plus en plus parler des ordinateurs quantiques.
Vous savez, ces machines qui fonctionneraient non plus sur la base du bit, valant
0 ou 1 mais sur le qubit qui prend ses valeurs sur la sphère de Bloch. L’infor-
matique quantique est très prometteuse. Les informaticiens ont déjà conçu des
algorithmes fonctionnant sur ce système. Ils ont, par exemple, découvert une
façon de factoriser les grands nombres entiers en facteurs premiers en un temps
polynomial (algorithme de Shor 1994). Bref, ils ont théoriquement cassés le fa-
meux code RSA, à la base de la sécurité bancaire depuis plus de vingt ans ! Plus
généralement, ils ont transformé de nombreux problèmes NP en problème P. Il
manque cependant un ingrédient essentiel à leur recette : l’ordinateur quantique.
En vérité, depuis quelques années, les gens ont réussi à construire de telles ma-
chines mais ne fonctionnant qu’avec un nombre très limité de qubits : environ
une dizaine. Ceci permet uniquement de faire des calculs très modestes, comme
factoriser 15 !
Il parait donc très intéréssant de comprendre les mécanismes physiques qui
contraignent la manipulation de plus de qubits simultanément. C’est tout l’objet
de la thèse qui va venir. Quant au stage, il nous a permis, de nous familiariser
avec ces notions :
1
2 Un peu d’information quantique pour se moti-
ver !
Dans un ordinateur quantique, le support physique traitant l’information
obéit aux lois de la Mécanique Quantique ! Les bits sont remplacés par des
qubits. Mais qu’est-ce que cela veut finalement dire ? Et puis c’est quoi un
qubit ?
Définition 2.1. Un qubit est l’état d’un système quantique à 2 niveaux. On
peut par exemple réaliser un qubit en considérant les 2 états de polarisation d’un
photon ou les 2 états de spin d’un électron : haut et bas.
On reviendra aux réalisations expérimentales plus tard. Concentrons nous
pour l’instant sur le principe du calcul quantique. Un qubit peut donc se trouver
dans une superposition cohérente de deux états de référence notés |0>et |1>.
Un registre, constitué d’un ensemble de qubits, peut également se trouver dans
une superposition cohérente de différents états, donc prendre diverses valeurs
à la fois ! Le calcul quantique consiste à manipuler de tels registres. On peut y
explorer simultanément des situations correspondant aux différentes valeurs du
registre. En particulier, on verra par la suite que les états de qubits intriqués
contiennent le maximum d’informations.
Un exemple pour comprendre quelque chose :
Si on dispose de N qubits, on peut très bien, comme avec les bits, représen-
ter tout nombre entier inférieur à 2N. Il suffit d’écrire ce nombre en base 2.
L’avantage d’un état qubit par rapport à un état bit classique est qu’il peut
représenter tout une floppée de nombres à la fois. Par exemple l’état EPR 1:
|01 >+|10 >qu’on peut fabriquer grâce à 2 qubits permet de représenter 1
et 2 en même temps ! Encore mieux avec 10 qubits, l’état :
1
10 £|0000000001 >+|0000000010 >+|0000000100 >+|0000001000 >+
|0000010000 >+|0000100000 >+|0001000000 >+|0010000000 >+
|0100000000 >+|1000000000 >¤
est support des nombres 1, 2, 4, 8, 16, 32, 64, 128, 256 et 512 ! Pour factoriser un
nombre entier inférieur à 1024, mettons 538, on peut donc imaginer multiplier
des états intriqués contenant un grand nombre d’entiers. On diminue ainsi d’au-
tant le temps de factorisation que l’on considère de gros états non séparables.
L’inconvénient est qu’on récupère un résultat probabiliste (c’est une mesure sur
le système quantique).
Cependant le problème principal ne se situe pas à ce niveau. En effet dans
beaucoup de domaines on se satisfait très bien de réponses probabilistes :
Le test de Miller-Rabin pour les nombres premiers
Le calcul Monte-Carlo.
On a vu que la puisssance du calcul quantique était basé sur la manipulation
d’états intriqués. Ceci impose de préserver la cohérence durant toute la durée
du calcul. Or les qubits sont des objets physiques et non des êtres abstraits. En
particulier, ils vivent dans un environnement donné. Ils sont donc couplés avec ce
dernier. Ce phénomène induit de la décohérence, ainsi qu’une perte d’intrication
1Pour Einstein Podolsky Rosen qui sont finalement à la base de toute cette théorie.
2
en général, rendant le calcul quantique faux. Tout le jeu consiste à comprendre
comment ces phénomènes apparaissent et à quelle vitesse ?
Notons également que le même problème intervient pour la téléportation
quantique. Comment cela marche t-il ?
Fig. 1 – Principe de la téléportation quantique
Les fameux Alice et Bob veulent téléporter un état quantique (a). On sup-
pose qu’ils disposent d’une paire intriquée comme dans l’exemple ci-dessus. Alice
mesure la polarisation des deux particules (a) et (b). Mais (b) et (c) étant intri-
qués, cette mesure a un effet immédiat sur l’état de la particule (c) de Bob. On
voit donc que l’état final de (c) (celui mesuré par Bob) dépend de l’état initial
de (a) et du résultat des mesures d’Alice. Elle transmet alors classiquement ces
données à Bob, qui peut reconstituer l’état initial de (a) par une transformation
unitaire (qui dépend du résultat transmis par Alice) sur l’état de (c).
Ce n’est pas encore Star-Trek car il n’y a pas de téléportation de matière !
Comme a répondu Asher Peres, un des pères de la téléportation quantique,
récemment disparu, à un journaliste qui lui demandait si l’on peut téléporter
l’esprit en même temps que le corps : "Non, on ne peut téléporter que l’esprit !"
Ajoutons que la téléportation quantique ne viole en rien la relativité res-
treinte et le principe de causalité. En effet, dans cette affaire, il faut bien voir,
qu’à un moment donné on transmet de l’information classiquement : c’est quand
Alice envoie à Bob le résultat de sa mesure. Mais alors, à quoi ça sert la télépor-
tation quantique ? Une des applications principale est la cryptographie quan-
tique. Imaginons qu’Alice veut transmettre à Bob un message. Pour ce faire, on
transforme ce message en un état porté par la particule (a). Bob reconstitue ce
message grâce au résultat de la mesure d’Alice et à la mesure qu’il fait sur (c)
3
1 / 37 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !