Citations philosophiques expliquées Prof : Wahib
« Je pense, donc je suis ».
Descartes, Discours de la méthode.
L’homme est un être doué d’une conscience. Une formidable faculté qui lui donne la capacité
de se séparer du monde et de se représenter extérieurement les choses réelles et intérieurement
ses états intérieurs. Or la notion de conscience soulève un problème en matière de la vérité. Les
représentations extérieure et intérieure que nous fournit notre conscience sont-elles conformes à la
vérité ? Descartes remettra toute de suite en doute les représentations extérieures. Pourquoi ? Parce
que la conscience est incapable, à elle seule, de se représenter la réalité extérieure. Pour se
représenter le réel, elle doit s’appuyer sur la sensibilité ou ce qu’on appelle les sens. Les sens sont à
la conscience ce que les lunettes de vue sont aux myopes. Tel un myope qui ne peut rien voir sans sa
lunette de vue, la conscience ne peut pareillement rien se représenter sans sa sensibilité sensorielle.
Or c’est ce moyen de perception dont dispose le corps humain qui constitue une faiblesse à la
conscience. Car on sait par expérience que la sensibilité est parfois trompeuse, elle n’est pas toujours
vraie : elle nous met dans certains cas dans l’illusion, dans l’erreur et dans le faux. Par exemple, notre
vue nous fait croire que le soleil se lève de l’est et se couche de l’ouest. Elle nous fait croire donc que
celui-ci se déplace autour de la terre, qu’il est mobile. Or la science a pu démontrer que la terre
tourne autour du soleil qui lui est immobile. Ce qui amène à Descartes de douter de toutes les
connaissances sensibles, qu’elles soient extérieures ou intérieures. Intérieures car même
intérieurement les sensations sont là : les sentiments, les affects, les émotions ne sont que des
sensations intérieures qui peuvent même souvent se manifester extérieurement. Et donc aussi le
risque de se tromper est toujours présent.
En effet, pour rencontrer une connaissance vraie et certaine, il faudrait, selon Descartes,
s’appuyer purement sur la conscience et exclure la sensibili, le corps, mais également les
raisonnements intellectuels, le réel. Mais qui est-il alors ? Qu’est-ce qui reste donc de lui ? Une telle
tentative de connaître sans la sensibilité n’est-elle pas aveugle ? Que pourrait-on connaître sans la
sensibilité? Et ce doute hyperbolique n’est-il pas quelque peu pessimiste ? N’est-il pas aveugle ? Pour
Descartes, le doute n’est pas aveugle mais clairvoyant. C’est par ce doute abusé que Descartes
sortira de son doute. En doutant de tout, de ses sens, de son corps et même de ses démonstrations
rationnelles, il finira par découvrir une première vérité indubitable et certaine. Cette vérité qu’il
nomme le premier principe de sa nouvelle connaissance est la pensée. Descartes doutera de tout,
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même de son doute, mais il ne doutera pas de son esprit, de sa pensée. Car douter c’est penser. Il est
donc un « je pense », un être pensant, une chose pensante. Mais cet être pensant doit nécessairement
exister pour penser, il doit être. Le « je pense » implique nécessairement donc un « je suis ».
Descartes découvrira donc une deuxième vérité qui découle de sa première vérité. C’est le célèbre
cogito cartésien : « je pense donc je suis ».
Dans cette citation, Descartes met l’accent sur la conscience de soi et sur la dimension
intellectuelle de l’homme. Il identifie l’homme avec son âme, son esprit et non avec son corps qui lui
est changeant. L’auteur partage donc dans cette citation sa philosophie idéaliste (intellectualiste) avec
son lecteur. Il pense que l’identité de l’homme réside dans sa pensée et sa dimension spirituelle et que
l’esprit est plus évidente et plus simple à connaître que le corps, le corporel, le matériel.
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« L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature ; mais
c’est un roseau pensant »
Blaise Pascal,
Pensées
.
Dans cette célèbre citation pascalienne, la faiblesse de l’homme nous frappe tout de suite.
Cette citation pourrait à première vue nous heurter. Car on a l’image d’un homme dominant la nature,
d’un homme, comme disait Descartes, se montrant être « maître et possesseur » de la nature.
L’homme est-il vraiment faible ? Est-il comme le dit Pascal misérable ? L’homme est physiquement
faible. Comparé à d’autres êtres, surtout les animaux, il est faible. C’est pourquoi Pascal le compare à
un « roseau ». Il est faible comme un roseau. Sa faiblesse est incontestable. Elle se contraste
effroyablement à l’immensité de la nature dans laquelle il évolue. Un être faible dans une nature
immense et puissante. Pascal le décrit même l’être « le plus faible de la nature », en appuyant un peu
fort sur la faiblesse de l’homme. Certes il existe des êtres beaucoup plus forts que les hommes,
cependant, l’homme est lui aussi beaucoup plus fort que beaucoup d’autres êtres. Des êtres faibles et
minuscules tels que les fourmilles, les mouches, les plantes sont à la merci des hommes.
Mais si l’homme est physiquement petit, faible et misérable, il est mentalement grand, digne et
inégalable. Sa grandeur intellectuelle le hisse au sommet de la nature. C’est un « roseau pensant ». Il
pense l’univers ne pense point. Et la pensée lui ouvre la connaissance de l’univers. Elle arrache
l’homme de l’ignorance dans laquelle baigne l’univers et le tire vers la connaissance, vers la grandeur.
Sa grandeur réside donc dans sa pensée, dans sa connaissance, dans son savoir. Et la petitesse de
l’univers s’explique par son manque de pensée et de connaissance. Ainsi même si la nature est
beaucoup plus puissante physiquement, plus immense spatialement, elle demeure intellectuellement
beaucoup plus inférieure à l’homme. L’univers peut écraser et tuer l’homme. Une goutte d’eau suffit,
elle seule, à tuer un homme dira Pascal. Mais toujours l’homme demeurera plus noble, plus digne et
grand vis-à-vis de l’univers car il sait qu’il meurt.
N’oublions pas que Pascal est un homme croyant. Dans la religion chrétienne, le corps est
maudit : il incarne le péché, la tentation, le mal. Il est associé au péché originel. C’est notre misère,
notre petitesse. Notre salut est spirituel et non corporel. D’où l’importance qu’accorde ici Pascal à
l’esprit humain. L’esprit est associé à l’univers divin. C’est lui qui nous sauve du péché originel, du mal,
de la misère… C’est lui qui nous permet de renouer avec la grandeur, la noblesse que l’homme avait
perdu en commettant le péché originel, en écoutant son corps et en ignorant sa pensée, son esprit. Le
corps tue, l’esprit sauve. Le corps dégrade, l’esprit hisse.
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« Ce n’est pas la conscience des hommes qui déterminent leur existence c’est
au contraire leur existence sociale qui détermine leur conscience »
KARL MARX, Préface de la contribution à la critique de l’économie politique.
Dans cette citation, Karl Marx signe et affirme sa pensée matérialiste. Pour ce philosophe
sociologue, l’existence de l’homme ne dépend pas de sa conscience ; sa conscience, sa pensée ne
déterminent pas ce qu’il est (sera) réellement et socialement : être un prolétaire, être un bourgeois,
etc. Mais c’est inversement ce qu’il est socio-économiquement qui déterminera sa manière de penser,
de se représenter sa vie, son monde. Par cette citation, Karl Marx affirme la primauté de la vie
matérielle de l’homme (sa condition socio-économique) sur sa conscience (sa vie mentale). Et il
défend ici son matérialisme philosophique.
Cette idée philosophique de Karl Marx s’oppose à celle de son maître Hegel. Ce dernier avait
développé une pensée idéaliste. Pour Hegel, « la conscience précède l’être », c’est-à-dire que pour lui
c’est l’esprit (la conscience) qui détermine notre être, notre existence, notre vie matérielle. Nous
pouvons ainsi penser ce que nous voulons être, et agir conformément à notre pensée et votre volonté.
Hegel accordera donc une place déterminante à la conscience dans la vie humaine, une conception que
partageront des grandes figures de la philosophie (Descartes, Pascal, Alain…).
Même si Karl Marx fût influencé par la philosophie hégélienne, il se séparera de l’idéalisme de
ce dernier, et soutiendra une pensée matérialiste. Il pense que Hegel ignore la place capitale que joue
la condition socio-économique dans la vie de l’homme. Il souhaite élaborer une pensée « pratique »,
politique et matérielle afin de rompre avec la pensée « spéculative », idéaliste de Hegel. Il faudrait
changer, selon Marx, les conditions matérielles des hommes pour changer leur conscience.
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« Le moi n’est pas maître dans sa propre maison »
Freud,
Introduction à la psychanalyse.
« Le moi n’est pas maître dans sa propre maison » est une citation de Freud. Il met en doute
dans cette phrase le pouvoir du moi (la conscience). A ses yeux, le psychisme humain n’est pas tout
conscient. La conscience n’aurait pas une emprise totale sur l’ensemble de son psychisme.
Philosophiquement, Freud réalisera une rupture totale avec la conception classique du psychisme
humain. Avant lui, des grands philosophes tels que Descartes, Kant, Locke, avaient défini l’homme par
la conscience (et la pensée). Ils proposèrent un Moi (ou un Je) capable de penser, de se connaître, de
se maîtriser (Cf. le cogito cartésien). Ainsi, selon cette conception idéaliste de l’homme, ce dernier
serait une pure conscience.
C’est cette conception dominante de son temps que Freud espère balayer avec cette citation.
Il propose une nouvelle conception, une conception radicalement critique à celle classique, c’est sa
nouvelle théorie du psychisme humain. Dans cette nouvelle théorie qu’il pense être le troisième
démenti affligé à la « mégalomanie humaine », il théorise l’idée d’un psychisme structurellement
double (voire triple : le Moi, le Ca et le Surmoi) comportant une partie conscience (la conscience ou le
Moi) et une partie inconsciente (l’inconscient ou le Ca). Ainsi, selon Freud, il ne s’agit plus d’un
inconscient signifiant un défaut de conscience, mais un inconscient (substantivé) et substantiellement
distincte de la conscience qui loge au cœur du système psychique de l’homme. De plus, l’inconscient
freudien échappe à la conscience par le processus du refoulement. Les pulsions, les libidos, les désirs
inconscients sont essentiellement refoulés et ne parviennent pas à se montrer à la conscience.
De ce fait, le moi n’est conscient qu’une toute petite partie de son psychisme et non pas de sa
totalité. Il se contente de quelques « renseignements fragmentaires » et des donnés incomplètes. Une
grande partie de son monde psychique lui est étranger : il est ncapable de dompter sa vie sexuelle (les
pulsions libidinales), et de prendre pleinement et entièrement conscience de ses processus
psychiques (les rêves, les actes manqués, les névroses), Par l’analyse psychanalytique, Freud rêve
donc d’« instruire », comme il le dit, le moi pour lui apprendre qu’une partie énorme de son psychisme
est étrangère à sa connaissance, à sa maitrise et son emprise. Il rêve de permettre au moi de réaliser
une vraie immersion dans sa profondeur afin de se réconcilier avec son monde intérieur.
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