Chapitre V : Les hétérostructures GaN/(Ga,Al)N 142
Chapitre V : Les hétérostructures GaN/(Ga,Al)N
Après s’être intéressé au cours des deux derniers chapitres à des études sur couches
épaisses nous nous focalisons maintenant sur l’étude d’hétérostructures GaN/AlGaN. Les
hétérostructures à base de puits quantiques sont les constituant de base de la majeure partie
des dispositifs optoélectroniques actuels. L’intérêt principal de ce type de structure est le
confinement des porteurs dans le puits quantique suivant la direction de croissance. Ce
confinement discrétise les niveaux énergétiques accessibles aux porteurs, et l’écartement entre
les niveaux confinés déterminera l’énergie des transitions inter-bandes et inter-sous bande de
l’hétérostructure. L’énergie des niveaux confinés dans le puits, dépend de différents
paramètres des matériaux barrière et puits : l’offset de bande, l’épaisseur et le dopage des
différentes couches. Nous avons mentionné au cours du chapitre I l’existence dans les nitrures
en phase hexagonale d’une forte polarisation interne issue de la superposition de la
polarisation piézoélectrique et de la polarisation spontanée. Cette polarisation va également
avoir un effet majeur sur les niveaux confinés dans les puits quantiques en phase hexagonale.
Le début de ce chapitre sera consacré à l’étude des propriétés optiques des
hétérostructures GaN/AlGaN et GaN/AlN en phase hexagonale au moyen de mesures de PL,
PR et EPL. Nous déterminerons pour les deux types de structures les valeurs des champs
électriques présents à l’intérieur des puits. Connaissant cette polarisation nous confrontons les
mesures d’ EPL destinées à l’observation de niveaux excités avec les calculs de niveaux
réalisés sur les structures en présence d’un champ électrique. Pour terminer, nous proposons
une hétérostructure à base de puits quantiques en phase cubique (permettant de s’affranchir
des inconvénients liés à la polarisation) susceptible d’atteindre les longueurs d’onde
employées dans le domaine des télécommunications optiques.
Chapitre V : Les hétérostructures GaN/(Ga,Al)N 143
V.1 Hétérostructures GaN/AlGaN en phase hexagonale
La structure des échantillons réalisés au GES que nous avons étudiés est décrite au
§ II.2.2.1. Nous présentons au cours des prochains paragraphes les propriétés optiques de ces
structures obtenues par PL, PR et EPL. Nous discuterons ensuite des valeurs de champ
électrique déterminées par ces deux méthodes décrites précédemment.
V.1.1 Photoluminescence
V.1.1.1 Spectres de PL à basse température
Sur la Figure V 1 (A) sont représentés les spectres de PL normalisés, obtenus à basse
température sur les différents puits. On observe sur chaque échantillon un pic principal
d’autant plus bas en énergie que l’épaisseur du puits est grande. Nous reviendrons sur cette
évolution au prochain paragraphe. Les spectres présentent une nature multi-pics. Nous
détaillons la nature des différents pics sur la Figure V 1 (B) où est représenté le spectre de PL
en échelle logarithmique obtenu à 8K sur l’échantillon 56 dont l’épaisseur du puits quantique
est de 13 Å (voir tableau II.4). Des mesures de PR et EPL complémentaires ont permis
l’attribution de chacun des pics. Le pic de plus haute énergie (A) est attribué à la
luminescence bord de bande de la barrière dont la concentration est 16.5% en aluminium en
accord avec la littérature [Steude,1999]. Le pic principal du spectre est quant à lui attribué à la
recombinaison E1H1 dans le puits quantique en négligeant le Stokes shift de la transition qui
sera déterminé par EPL dans la suite. Sur cet échantillon on observe donc un effet de
confinement quantique qui se manifeste par une énergie d’émission du puits supérieure à celle
du matériau GaN massif. Les deux pics suivants notés respectivement 1-LO et 2-LO sont
attribués aux répliques phonon de la transition E1H1, ceci est accord avec l’énergie du
phonon optique dont la valeur est proche de 90 meV dans les nitrures [Song,1998]. Le pic noté X
correspond à la transition excitonique couramment rapportée dans GaN hexagonal. A ce pic
est associée sa réplique phonon notée X-LO à 90 meV d’écart. Le pic suivant noté D-A
correspond à une recombinaison donneur-accepteur accompagnée de sa réplique phonon
notée DA-LO.
Chapitre V : Les hétérostructures GaN/(Ga,Al)N 144
Figure V 1: (A) Spectres de photoluminescence mesurés à 8 K sur les hétérostructures
GaN/AlGaN (échantillons voir tableau II.4) (B) Spectre de PL à 8K en échelle logarithmique
du puits d’épaisseur 13 Å (échantillon 56).
V.1.1.2 Détermination du champ piézoélectrique dans les puits
Nous avons déterminé sur l’ensemble de cette série d’échantillons, l’énergie de la
transition fondamentale obtenue à 8K, nous avons ensuite tracé sur la Figure V 2 son
évolution en fonction de l’épaisseur du puits quantique. On remarque sur la figure que
l’énergie de cette transition est supérieure à l’énergie de gap de GaN massif pour des
épaisseurs inférieures à 35 Å en accord avec l’effet de confinement dans le puits. En revanche
cette énergie se situe en dessous du gap de GaN pour une épaisseur inférieure ou égale à 35 Å,
ce qui est une parfaite illustration de l’effet Stark quantique confiné.
A partir de ces données expérimentales nous avons cherché à déterminer la valeur du
champ dans le puits quantique. Nous avons donc ajusté l’évolution de la transition E1H1 en
résolvant l’équation de Schrödinger en présence d’un champ électrique (voir § V.1.2.1). Les
calculs ont été réalisés en considérant les deux concentrations en aluminium (12% ou 16.5%)
suivant l’échantillon considéré. Sur la Figure V 2 la courbe en pointillés représente
l’évolution de l’énergie de transition E1H1 pour une concentration en Al de 12% dans la
barrière en présence d’un champ électrique dans le puits de 600 kV/cm. Les mêmes calculs
obtenus pour une concentration en Al de 16.5% dans la barrière en présence d’un champ dans
le puits de 600,700,750 et 800 kV/cm sont représentés par les lignes continues sur la figure.
Nous avons considéré tout au long des calculs une répartition de la différence d’énergie de
3.2 3.4 3.6 3.8
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
gap GaN
hexagonal
(A)
65
Å
55
Å
21
Å
42
Å
34
Å
13
Å
Intensité normalisée (UA)
Energie (eV)
2.8 3.0 3.2 3.4 3.6 3.8 4.0
104
105
106
107
(B)
DA-LO
D-A
X-LO
X
2-LO
1-LO A
E1H1
Intensité (AU)
Energie (eV)
Chapitre V : Les hétérostructures GaN/(Ga,Al)N 145
gap de 70% sur la bande de conduction [Su Huai,1996] entre le puits et la barrière. La précision sur
la détermination du champ électrique F est limitée par la connaissance des masses effectives
des trous dans GaN et dans l’alliage AlGaN. Les paramètres de calculs sont reportés dans le
Tableau V 1. Les résultats expérimentaux reportés sur la Figure V 2 correspondent à un
champ électrique interne compris entre 600 et 800 kV/cm à l’intérieur des puits. Nous
discuterons de ces valeurs au cours du prochain paragraphe.
Figure V 2: Evolution théorique de l’énergie de la transition E1H1 à basse température (8K)
en fonction de l’épaisseur du puits pour plusieurs valeurs du champs électrique (lignes pleines
12% Al, ligne pointillée 16% Al). Les cercles représentent les résultats expérimentaux dans
les échantillons à 12% d’Al dans la barrière, les étoiles ceux à 16% d’Al.[Fanget,2003]
AlGaN
GaN 12 % 16.5
Valeur de gap (8K,eV) 3.26 3.75 3.88
Masse effective electron 0.22 [Drechsler,1995] 0.22
Masse effective trous 1[Vurgaftman,2001] 1
Constante diélectrique 8.5 8.5
Tableau V 1 : Paramètres utilisés pour les calculs de structure de bande et de niveaux
confinés dans nos hétérostructures GaN/AlGaN hexagonales.
0 102030405060708090
3.1
3.2
3.3
3.4
3.5
3.6
3.7
3.8
3.9
Energie gap GaN 8K
800 kV/cm
750 kV/cm
700 kV/cm
600 kV/cm
600 kV/cm
Energie transition E1H1 (eV)
Epaisseur du puits (
Å
)
Chapitre V : Les hétérostructures GaN/(Ga,Al)N 146
V.1.2 Photoréflectivité
V.1.2.1 Spectre de PR à température ambiante
Nous détaillons sur la Figure V 3 le spectre réalisé sur l’échantillon 49 (voir Tableau
II.4) constitué d’un puits de 42 Å entouré de barrières dont la concentration d’aluminium est
de 12%. Sur ce spectre on distingue deux régions, la première située entre 3.3eV et 3.6 eV et
la seconde entre 3.6eV et 3.9eV. Le système d’oscillations compris dans la première région
est attribué à la recombinaison associée à la transition E1H1 (légérement inférieur au gap de
GaN) et à la transition excitonique dans la couche épaisse de GaN (transition présente à
environ 3.42 eV à température ambiante). Le second système autour de 3.7 eV est attribué à la
recombinaison bord de bande de la barrière Al12Ga88N. Au dessus de cette valeur on distingue
un système d’oscillations amorties que l’on attribue à l’effet Franz-Keldysh (voir § II.3.2.2)
dans la barrière.
Figure V 3: Spectre de PR obtenu sur l’échantillon 49 (épaisseur du puits de 42 Å,
concentration de 12% en Al dans la barrière), présence de OFK.
V.1.2.2 Mesure du champ électrique dans la barrière
Afin de déduire des oscillations de Franz-Keldysh la valeur du champ électrique dans
la barrière AlGaN, nous appliquons le formalisme décrit dans le paragraphe II.3.2.2. Pour
cela, nous traçons (Figure V 4) l’évolution de la quantité
()
3
2
4-
3Em Eg
π



, où Em est
l’énergie du m ième extremum et Eg le gap du matériau (ici la barrière), en fonction de l’indice
3.0 3.2 3.4 3.6 3.8 4.0
-2.0x10-3
-1.0x10-3
0.0
1.0x10-3
2.0x10-3
3.0x10-3
OFK
AlGaN
GaN
(B)
PR
Energie (eV)
1 / 31 100%
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