Mesure de bruit dans des nanostructures silicium semiconductrices

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Commissariat à l’Energie Atomique
Service de Physique Statistique, Magnétisme et Supraconductivité
Laboratoire de Transport Electronique Quantique et Supraconductivité
Ecole Normale Supérieure de Lyon
Rapport de stage de fin de Master 2
Mesure de bruit dans des nanostructures
silicium semiconductrices
Benoit Voisin
Dirigé par :
Marc Sanquer
Xavier Jehl
Résumé :
Ce stage a pour objectif de mesurer le bruit, soit les fluctuations autour du courant
moyen, créé dans des transistors MOSFETs de tailles ultimes où se produisent à basse
température des effets mono-électroniques. Dans cette optique, un nouveau montage a été
créé afin de pouvoir mesurer le bruit en tension de ces dispositifs de hautes impédances.
Nous avons pour l’instant réussi à mesurer le bruit thermique de nos échantillons pour
une gamme de résistances où ces effets apparaissent mais l’importance du bruit 1/f aux
trop faibles fréquences mesurées nous empêchent pour l’instant d’identifier le bruit de
grenaille, signature des corrélations électroniques qui apparaissent dans ces dispositifs.
Mesure de bruit dans des nanostructures
silicium semiconductrices
Benoit Voisin
16/08/10
Table des matières
1 Introduction
2
2 Instrumentation
4
3 Présentation des échantillons
3.1 Caractéristiques à haute température . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.2 Caractéristiques à basse température . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6
7
8
4 Le bruit dans les transistors : rappels
4.1 Le bruit thermique Johnson-Nyquist
4.2 Bruit de grenaille . . . . . . . . . . .
4.3 Bruit en 1/f . . . . . . . . . . . . . .
4.4 Bruit des amplificateurs . . . . . . .
théoriques
. . . . . . .
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. . . . . . .
5 Dispositif et premiers résultats obtenus
5.1 Dispositif expérimental . . . . . . . . . . .
5.2 Limites du dispositif . . . . . . . . . . . .
5.3 Résultats obtenus . . . . . . . . . . . . . .
5.3.1 Observation du bruit thermique . .
5.3.2 Evolution en fonction de Vg . . . .
5.3.3 Evolution en fonction du courant I
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10
10
11
11
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12
12
12
13
13
15
16
6 Conclusion et perspectives
20
7 Bibliographie
21
1
1
Introduction
Les dernières années ont été marquées par une réduction très rapide de la taille des
transistors à effet de champ. Cette miniaturisation s’inscrit dans une logique technologique actuelle qui vise à augmenter leur densité d’intégration et leur vitesse. Les dimensions aujourd’hui atteintes sont de l’ordre de la dizaine de nanomètres, échelle où les
effets quantiques peuvent se faire ressentir et changer le régime de condution à très basse
température : cohérence des électrons de conduction, corrélations électroniques. Des effets mono-électroniques apparaissent donc, d’où la dénomination de MOSSET (SET pour
Single Electon Transistor) au lieu de MOSFET. La recherche fondamentale a aussi trouvé
plusieurs intérêts dans l’étude et le contrôle de ces nanodispositifs [1]. Par exemple, la
métrologie s’en inspire pour former un nouvel étalon de courant grâce aux systèmes de
pompes à électrons, tandis que le contrôle et la détection de spin unique en font un
candidat idéal pour le développement de bits quantiques [2].
La branche de la physique mésoscopique, attachée à la notion de cohérence de phase,
est donc en plein essor depuis une vingtaine d’années : on peut notamment citer les travaux
effectués par Webb sur l’effet Aharonov-Bohm [3] ou ceux de Fulton sur les premiers
dispositifs à blocage de Coulomb [4]. D’abord concentrée sur des mesures de conductance
classique, c’est-à-dire sur la valeur moyenne du courant traversant l’échantillon, elle s’est
très vite dirigée vers des mesures de bruit, c’est-à-dire vers la mesure des fluctuations
autour de la valeur moyenne. C’est en effet cette valeur de bruit qui donne accès aux
corrélations entre les électrons participant au transport et donc qui différencie de manière
mesurable les régimes de conduction de ces dispositifs.
L’objectif de ce stage était de modifier un cryostat à dilution afin de monter une
expérience visant à mesurer le bruit de grenaille dans des dispositifs MOSSETs fabriqués
selon la technologie SOI (Silicon On Insulator) où des effets mono-électroniques ont été
révélés et très étudiés depuis 2005. Le LaTEQs, laboratoire implanté sur le centre du
CEA Grenoble où j’ai effectué ce stage, a par le passé déjà obtenu de nombreux résultats
concernant des mesures de bruit sur des échantillons de très faibles impédances comme
par exemple des jonctions supraconducteur, métal normal et supraconducteur (jonctions
dites SNS) [5]. Ici, l’idée est de développer une mesure de bruit sur des échantillons de
très fortes impédances, supérieures au quantum de conductance, où les oscillations de
Coulomb peuvent se développer.
Le LaTEQs (Laboratoire de Transport Electronique Quantique et Supraconductivité) est composé d’une vingtaine de personnes, réparties équitablement entre permanents, post-docs, thésards, et ingénieurs. Outre ces études sur le transport quantique
dans des boı̂tes et fils quantiques, il axe ses recherches sur le bruit quantique dans les
hétérostructures supraconducteur-métal normal, la microscopie et spectroscopie tunnel à
très basse température sur les films supraconducteurs désordonnés et aussi sur les propriétés électroniques du graphène.
Il collabore avec le LETI, plateforme grenobloise dotée d’une salle blanche industrielle
pour la fabrication de transistors CMOS (Complementary metal-oxide-semiconductor) et
peut donc diposer de très nombreux échantillons. Nous sommes capables de mesurer la
reproductibilité de nos mesures (lorsque les échantillons sont supposés identiques) et aussi
de pouvoir comparer les résultats lorsque certains de leurs paramètres diffèrent (comme
la longueur de grille, le dopage du canal. . .), ce qui est un fait quasi unique pour un
laboratoire de recherche fondamentale en physique mésoscopique. On peut aussi noter que
celle-ci a tendance à laisser un peu de côté l’étude de ces transistors de taille largement
inférieures au µm, alors que beaucoup de phémonènes nouveaux sont apparus et restent
à comprendre.
2
La première partie de ce rapport montrera le travail d’instrumentation effectué sur
le cryostat. La seconde s’intéressera à présenter les échantillons étudiés, de leur fabrication aux principaux effets rencontrés. La troisième partie sera le lieu de quelques rappels
théoriques sur le bruit ainsi que de quelques résultats expérimentaux concernant les MOSFETs. Enfin la quatrième partie s’attachera à montrer les premiers résultats obtenus au
cours de ce stage.
3
2
Instrumentation
La première partie de ce stage a été de modifier un cryostat à dilution afin de rendre
possible ces mesures de bruit. Cela m’a aussi permis d’apprendre le fonctionnement
du système cryogénique de cette dilution (pot, bouilleur, échangeur continu, boı̂te de
mélange). Sept nouveaux câbles coaxiaux ont été installés. Ils sont appelés microcoax de
par leur taille : l’âme est en inox de diamètre 0,11 mm, la gaine en Teflon de diamètre
0,38 mm et la masse en inox de diamètre 0,51 mm. Ils ont pour rôle non seulement de
conduire le signal mais aussi de faire office de filtres comme le montre la figure 1. Par rapport aux câbles précédemment installés, ceux-ci réalisent aussi une meilleure adaptation
50Ω. La référence [6] étudie plusieurs types de filtres cryogéniques utlisés dans ce type
d’expériences.
0
a tte n u a tio n ( d B )
-1 0
-2 0
-3 0
-4 0
-5 0
1 E 8
1 E 9
1 E 1 0
fre q u e n c y (H z )
Figure 1 – Atténuation de 50cm d’un microcoax inox-teflon-inox. La perte est supérieure à 30 dB
pour des fréquences supérieures à environ 9 GHz.
La principale difficulté rencontrée au cours de cette phase a été d’assurer une bonne
thermalisation de ces câbles aux différents étages du cryostat, notamment à la boı̂te
de mélange (figure 3), dont la température vaut environ 40 mK, afin d’obtenir une
température électronique la plus basse possible, en-dessous de 100 mK.
On peut voir sur les figures 2(a) et 2(b) que les câbles coaxiaux ont été enroulés respectivement autour du pot à 1,2 K et de la boı̂te de mélange, puis légèrement pressés
grâce à des gaines en cuivre-béryllium, alliage facilement déformable et dotée d’une certaine élasticité. La figure 3(a) montre quant à elle l’ensemble du système de cryogénie, le
porte-échantillon (figure 3(b)) venant se placer tout en bas.
Ce travail d’instrumentation, allant de la soudure des connecteurs sur les câbles coaxiaux à la vérification du système cryogénique, s’est étalé sur un peu plus de deux mois,
période plus longue que prévue initialement. Nous avons notamment rencontré un lourd
problème de cryogénie, avec un blocage du circuit de dilution à l’entrée de l’échangeur et
aussi une fuite dans une pompe.
4
Figure 2 – Thermalisation des câbles coaxiaux : pot (a) et boı̂te de mélange (b). Les câbles coaxiaux
sont légèrement pressés autour de ces deux éléments grâce à une gaine en cuivre-béryllium.
(a)
(b)
Figure 3 – (a) Photo du porte-échantillon. Le bout de puce au centre est collé au porte-échantillon,
les plots des dispositifs sont ensuite reliés à ceux du porte-échantillon en utilisant une machine à souder
aux ultrasons. Le tout vient se fixer verticalement en bas du cryostat, représenté sur la photo (b).
5
3
Présentation des échantillons
Je présente ici brièvement le type d’échantillons utilisés, leur fabrication ainsi que leurs
principales caractéristiques à haute et basse températures.
Les transistors étudiés sont des nanofils de silicium fabriqués par la technologie SOI
(Silicon On Insulator) : le silicium est déposé au-dessus d’une couche d’oxide, dite enterrée,
très épaisse. Autour de trois des quatre côtés du nanofil est implantée une grille en silicium
polycristallin, grille et nanofil étant séparés par une couche d’oxide Si O2 pour éviter toute
fuite de grille. La source et le drain du canal silicium sont rendus conducteurs grâce à un
fort dopage arsenic (Heavily Doped Drain, noté HDD). Le but étant de créer une zone sous
la grille où les électrons vont pouvoir être confinés, il faut protéger cette zone du dopage
du canal et surtout de la diffusion des dopants, leur longueur de diffusion pouvant être de
l’ordre de grandeur de la longueur de grille. Cela est réalisé en implantant des espaceurs à
côté de la grille, le tout jouant le rôle de masque lors du dopage. A noter qu’un éventuel
dopage léger (Lightly Doped Drain, noté LDD) peut être effectué dans le canal avant
l’implantation de ces espaceurs. La figure 4 montre une vue de dessus au Microscope
Electronique à Balayage, une coupe au Microscope Electronique à Transmission et une
vue schématique d’un exemple d’échantillon.
(a)
(b)
(c)
Figure 4 – (a)Vue au MEB d’un échantillon simple grille (bande horizontale gris clair, de largeur 70
nm). (b) Coupe TEM selon l’axe de la grille, qui entoure un nanofil (en noir) de section 20 × 10nm2 . (c)
Représentation schématique en coupe selon l’axe du nanofil.
6
Le tableau suivant donne les principaux paramètres de fabrication qui affectent le
comportement de l’échantillon ainsi que les valeurs usuelles utilisées :
paramètres
largeur du canal W
épaisseur du canal TSi
longueur de la grille L
longueur des espaceurs Tspacers
hauteur d’oxide Si O2 tox
dopage léger
dopage fort
valeurs extrêmales
20 à 100 nm
10, 20 ou 25 nm
20 à 80 nm
0, 15, 40 ou 45 nm
4 ou 5 nm
non dopé / dopage arsenic 5.1014 cm−3
non dopé / dopage arsenic 1020 cm−3
Chaque lot reçu par le laboratoire, fabriqué conjointement avec le LETI, est constitué
d’une vingtaine de plaques de 20 cm de diamètre. Ces plaques ont des caractéristiques
technologiques différentes comme le niveau de dopage ou l’épaisseur de la couche de silicium. Chaque plaque est divisée en une cinquantaine de puces, dont seules dix contiennent
les transistors à étudier. Ces puces comptent environ 150 échantillons différents. Ainsi,
les transistors placés au même endroit de deux puces différentes d’une même plaque sont
géométriquement identiques, ce qui permet de tester la variabilité et la reproductibilité
des résultats obtenus.
3.1
Caractéristiques à haute température
A 300 K, on peut considérer que ces MOSFETs se comportent comme des transistors
classiques : apparition du courant pour un certain potentiel de grille (noté Vg ), dit champ
seuil. Elle est suivie d’une augmentation linéaire de la conductance due à l’activation
thermique du canal et finalement saturation de la conductance à Vg fort. La figure 5
montre que ces trois caractéristiques dépendent bien évidemment de tous les paramètres
décrits précédemment. On mesure toujours la conductance drain-source (notée G ou R
pour la résistance en légende des courbes) dans le régime linéaire du transistor, donc en
appliquant un potentiel drain-source (noté Vds ) très faible. Pour que le système soit à
l’équilibre thermodynamique, il faut aussi veiller à ce que eVds << kB T , e étant la charge
élémentaire, kB la constante de Boltzmann et T la température.
1 E -4
1 E -5
G
(S )
1 E -6
1 E -7
1 E -8
1 E -9
-1 0 0 0
0
1 0 0 0
2 0 0 0
V g (m V )
Figure 5 – Conductance à 300K pour trois échantillons. On peut observer les différences de champ
seuil, de pente sous le seuil et de conductance maximale selon les paramètres de l’échantillon.
7
Les effets mono-électroniques dus à la miniaturisation des transistors, bien que pouvant
perturber les courbes à température ambiante et par exemple expliquer des variations de
pente sous le seuil pour un même échantillon, apparaissent beaucoup plus nettement à
basse température, au-dessous de 4 K.
3.2
Caractéristiques à basse température
Le premier fait marquant auquel on s’attend à basse température est l’apparition d’oscillations de Coulomb. A température suffisamment basse, les électrons peuvent se confiner
sous la grille lorsqu’un potentiel assez fort y est appliqué. Ces électrons sont alors séparés
des deux réservoirs que sont la source et le drain par des barrières tunnels. La figure 6
montre l’équivalent électrostatique de l’échantillon. On peut alors ajouter périodiquement
un à un les électrons dans l’ı̂lot central lorsque le potentiel de grille augmente. Cette
période est reliée à la capacité entre l’ı̂lot et la grille, soit à la hauteur tox . Ce phénomène
est appelé blocage de Coulomb. On peut aussi ajouter un potentiel drain-source Vds et
tracer la conductance en fonction de Vg et Vds et obtenir un diamant de Coulomb. Cet
effet a été très largement étudié dans ce type de transistors par Max Hofheinz au cours
de sa thèse [7].
Cs, Rs
Cd, Rd
îlot
Cg
Vds
Vg
source
drain
grille
Figure 6 – Equivalent électrostatique de l’échantillon. L’ı̂lot contrôlé par la grille est séparé des
source et drain par deux barrières tunnels, une barrière pouvant être considérée par une résistance et un
condensateur en parallèle.
1 E -4
1 E -6
1 E -5
1 E -7
G
(S )
1 E -7
G
(S )
1 E -6
1 E -8
1 E -9
1 E -1 0
1 E -8
-7 5 0
-5 0 0
-2 5 0
0
2 5 0
5 0 0
7 5 0
1 0 0 0
8 6 0
V g (m V )
8 8 0
9 0 0
9 2 0
9 4 0
V g (m V )
(a)
(b)
Figure 7 – (a) Conductance à 300K (rouge) et à 4K (noir) pour un même échantillon. On remarque
une forte perte de courant, un décalage du champ seuil vers la droite et l’apparition d’oscillations. (b)
Zoom sur ces oscillations de Coulomb, de période bien régulière égale à 12 mV.
Les caractéristiques de l’échantillon présenté sur la figure 7 sont les suivantes :
W = 100nm, L = 50nm, TSi = 10nm, Tox = 4nm, Tspacers = 45nm, pas de LDD.
8
La figure 7 montre la différence de conductance entre 4 K et 300 K : à 4 K, le champ
seuil s’est déplacé vers la droite. Il faut appliquer un Vg plus fort pour observer du courant,
ce qui est logique car l’activation thermique est beaucoup plus faible. Il y a une forte perte
de courant entre 300 K et 4 K. Cela s’explique pour cet échantillon par les très longues
barrières tunnels qui sont créées : les espaceurs étant de 45 nm et la grille de 50 nm,
le courant par effet tunnel à travers ces barrières a totalement disparu. Ce sont alors les
dopants qui font passer les électrons dans l’ı̂lot par effet tunnel résonant. On observe aussi
très clairement des oscillations de conductance de période environ 12 mV en Vg , montrant
le transport séquentiel des électrons à travers le canal : on a bien formé un transistor
mono-électronique.
Mais ce n’est pas le seul phénomène observable à cette échelle de taille. Il est possible
qu’aléatoirement un (ou plusieurs) dopant diffuse du drain ou de la source jusque sous
la grille, la longueur typique du gradient de concentration des dopants étant d’environ 5
nm/décade. Cela rend alors possible l’apparition de transport par effet tunnel résonant.
Cela se produit généralement lorsque les espaceurs sont courts et en présence de LDD. La
figure 8 montre que la caractéristique G-Vg à 4 K s’en trouve alors totalement modifiée :
au lieu d’oscillations régulières, on observe des pics plus larges que s’ils étaient dus à du
transport séquentiel.
1 E -4
G
(S )
1 E -5
1 E -6
1 E -7
-3 0 0
-2 0 0
-1 0 0
0
1 0 0
2 0 0
3 0 0
V g (m V )
Figure 8 – Conductance en fonction de Vg à 300 K (rouge) et à 4 K (noir) pour un échantillon
présentant du courant par effet tunnel résonant. Au lieu d’oscillations de Coulomb, on observe des pics
plus larges. Caractéristiques de l’échantillon : W = 100nm, L = 40nm, TSi = 10nm, Tox = 4nm,
Tspacers = 45nm et présence de LDD.
A ce niveau, il semble très intéressant d’être capable de faire une étude systématique
des échantillons afin de pouvoir connaı̂tre le comportement à très basse température d’un
dispositif en fonction de ses caractéristiques géométriques. Cela a été effectué par Mathieu
Pierre au cours de sa thèse [8], il a ainsi mis en évidence des lois d’échelles concernant par
exemple l’augmentation de l’énergie de charge (énergie à fournir au système pour ajouter
un électron) avec la réduction des tailles.
9
4
Le bruit dans les transistors : rappels théoriques
Le bruit désigne les fluctuations autour de la valeur moyenne du courant mesuré. Il
est souvent exprimé par sa densité spectrale, exprimée en A2 /Hz :
SI (ω) =
Z
hδI(t)δI(0)i exp(iωt)dt
(1)
avec δI(t) = I(t) − I et I = hI(t)i.
Ce bruit a plusieurs origines que l’on va détailler plus bas. Aucun de ces bruits n’est
en cohérence de phase avec un autre, ils s’ajoutent donc bien en puissance.
4.1
Le bruit thermique Johnson-Nyquist
Le théorème de fluctuation-dissipation à l’équilibre relie la densité spectrale de bruit
à l’energie dissipée par le système sous l’action d’une perturbation extérieure. Dans le cas
d’une résistance R à température T, on trouve dans la limite basse fréquence (hf << kB T )
le bruit de Johnson-Nyquist :
4kB T
(2)
R
Ce bruit est donc considéré comme blanc (indépendant de la fréquence) aux fréquences
et températures mesurées. Par la suite, on écrira donc sans distinction SI (f → 0) et SI .
SI (f → 0) =
Les bruits en courant et en tension sont reliés par la formule :
SV = R 2 SI
(3)
Le bruit thermique en tension est donc donné par : Sv = 4kB T R.
4.2
Bruit de grenaille
Ce bruit est d’origine quantique : il est lié à la granularité de la charge. Pour une revue
complète sur le bruit de grenaille dans les conducteurs mésoscopiques, on peut se référer
à [9]. On peut exprimer ce bruit de grenaille dans le cas général Vds 6= 0 (ou tension aux
bornes de l’échantillon) et T 6= 0 :
SI =
N
4e2 X
eVds
(Tn (1 − Tn )eVds coth(
))
h n=1
2kB T
(4)
où les Tn représentent les facteurs de transmission des différents canaux de conduction
à travers l’échantillon. Le bruit de grenaille est un bruit hors-équilibre : il est proportionnel
à la polarisation appliquée à l’échantillon. L’expression (4) n’est que rarement utilisée dans
les faits. On lui préfère la définition du facteur de Fano F, rapport entre le bruit mesuré
et le bruit de grenaille classique associé à un processus poissonien, dit bruit Schottky :
SIp (ω → 0) = 2eI
F =
SI
SIp
(5)
(6)
On parle de bruit sur-poissonien si F > 1 ou sous-poissonien si F < 1. Mesurer F n’a
évidemment de sens que si eVds >> kB T .
10
On peut alors énumérer plusieurs situations expérimentales :
– simple barrière tunnel : on obtient F = 1.
– double barrière tunnel : on considère un système formé de deux barrières de
résistances R1 et R2 . Le facteur de Fano vaut alors :
F =
R12 + R22
(R1 + R2 )2
(7)
F est minimum et vaut 1/2 pour des barrières symétriques (R1 = R2 ) et tend vers
1 pour des barrières complètement asymétriques (R1 R2 ou l’inverse). Le bruit
est donc toujours sous-poissonien.
– blocage de Coulomb : le bruit est là aussi sous-poisonnien. On peut citer les
travaux de Birk et al. [10] qui ont mesuré le bruit de grenaille pour ces trois types
de jonctions et ont observé une réduction du facteur de Fano jusqu’à 1/2.
– jonction ballistique : Le facteur de Fano s’annule. Cela peut se comprendre par
le fait que comme Tn = 1, le faceur Tn (1 − Tn ) présent dans F est nul.
– courant par effet tunnel résonant : du bruit sur-poissonien a été observé dans
des structures où des états localisés, causes de ce courant tunnel résonant, sont en
intéraction [11] ou aussi lorsque la conductance différentielle est négative [12].
Un point important ici est que dans tous les cas expérimentaux, l’observation d’un
pic dû à la résonance d’une unique impureté n’était pas possible. Or cela peut être
le cas dans nos structures, Pierre et al. [13] en ont par exemple fait la spectroscopie.
4.3
Bruit en 1/f
Le bruit 1/f est un bruit très général qui dénote une augmentation de la densité
spectrale aux basses fréquences. Il est observé dans beaucoup de situations expérimentales.
Ici, ce bruit est lié aux fluctuations de conductance liées aux défauts du conducteur, des
impuretés, comme des dopants, qui sont capables de piéger des électrons. C’est un bruit
hors-équilibre, proportionnel à I 2 . Ainsi ce bruit 1/f va devenir prépondérant devant
le bruit de grenaille, proportionnel à I, à basse fréquence et à courant fort. Cela sera
extrêmement problématique pour nos mesures comme nous le verrons par la suite.
4.4
Bruit des amplificateurs
On verra dans la partie 4 que l’on utilise des amplificateurs en tension pour mesurer la
tension aux bornes de l’échantillon. Ceux-ci sont aussi la cause d’un bruit en tension (noté
δVn ) et aussi en courant (noté δIn ), qu’il faudra prendre en compte. Les caractéristiques
nominales de ces bruits données par le fabricant sont :
δVn ≈ 2, 5.10−17 V 2 /Hz
δIn ≈ 9 − 25.10−28 A2 /Hz
Les amplificateurs peuvent aussi donner lieu à du bruit 1/f. Il faudra donc être capable
de le dissocier de celui de l’échantillon.
Finalement, on peut résumer le bruit mesuré par l’analyseur de spectre par la formule
suivante :
Svmesuré = Svthermique + Svgrenaille + Sv1/f + Svampli
11
(8)
5
Dispositif et premiers résultats obtenus
5.1
Dispositif expérimental
La figure 9 montre que l’échantillon est polarisé en courant à la source grâce à une
source de courant pilotée en tension (100nA/V ). La tension mesurée est envoyé vers un
amplificateur en tension (gain G = 100 en amplitude). Le drain est à la masse.
Ampli gain 100
Analyseur de
spectre
+
I
multimètre
300 K
R
Vds
1K
Figure 9 – Schéma du dispositif expérimental. Puisque l’échantillon est de haute impédance, on doit
mesurer le bruit en tension et donc polariser en courant.
Nous sommes obligés de mesurer le bruit en tension car aux hautes impédances, le
bruit en courant est trop faible pour être mesuré. Il est donc indispensable de polariser
l’échantillon en courant. Il est peu commun de fonctionner ainsi car le comportement de
l’échantillon est donné par l’énergie eVds (e étant la charge de l’électron), énergie à comparer par exemple à l’énergie de charge de l’échantillon ou à l’énergie d’activation thermique.
Il existe bien évidemment une équivalence entre les deux dispositifs expérimentaux à travers la relation Vds = R(I)I, mais il faut être conscient que R(I)I est généralement une
fonction non linéaire (voire non monotone) de I.
5.2
Limites du dispositif
On peut d’ores et déjà avoir une idée de la bande de fréquences et des résistances qui
vont pouvoir être mesurées grâce à ce montage :
– La tension maximale délivrée par l’amplificateur avant sa saturation est d’environ
3 V. Pour un courant appliqué de 1 nA, cela revient à être capable de mesurer des
résistances inférieures à :
3.10−2
= 300kΩ
(9)
Rmax =
1.10−9
Cette valeur est à comparer au quantum de résistance (environ 25, 8kΩ) ainsi qu’aux
valeurs de résistance observées dans nos échantillons. 200kΩ représente la limite
inférieure où des oscillations de Coulomb bien contrastées apparaissent dans nos
échantillons : il semble donc difficile de mesurer le bruit de grenaille de ces oscillations à courant faible. Si l’on imposait un courant trop fort, la tension Vds deviendrait supérieure à la tension de charge : on perdrait là aussi du contaste dans les
oscillations.
En revanche, il semble pour commencer plus facile de mesurer le bruit dans un
échantillon où de l’effet tunnel résonant est observé : c’est le cas de l’échantillon de
12
la figure 8, dont on peut observer que la résistance varie entre 35 et 100kΩ pour de
valeurs de Vg légèrement inférieures à 100 mV. Les résultats qui vont suivre ont été
mesurés sur cet échantillon.
– On peut s’attendre à une coupure RC dans le signal mesuré : les câble coaxiaux
représentent une capacité totale d’environ 200pF et avec une résistance d’environ
100kΩ, on obtient une fréquence de coupure :
1
≈ 8kHz
(10)
2πRC
Cette fréquence est relativement basse, il faudra en tout cas qu’elle soit inférieure à
la fréquence de coupure du bruit 1/f pour que le bruit de grenaille soit mesurable.
fc =
Les mesures ont été effectuées à 1 K sur l’échantillon de la figure 8 autour de valeurs de
Vg telles que la résistance de l’échantillon soit comprise entre 40kΩ et 1M Ω. Nous avions
remarqué que le contraste des pics n’augmentait pas pour des températures inférieures.
5.3
5.3.1
Résultats obtenus
Observation du bruit thermique
R ( Ω)
Le premier résultat est d’être capable de mesurer le bruit thermique de la résistance à
courant nul. Nous avons ainsi mesuré le spectre le plus large possible (soit 0 − 102, 4kHz)
de bruit à résistance fixée : 43kΩ correspondant à Vg = 91mV comme on peut le voir sur
la figure 10.
1 0
6
1 0
5
1 0
4
5 0
6 0
7 0
8 0
9 0
1 0 0
V g (m V )
Figure 10 – Résistance de l’échantillon mesuré. Malgré que l’on soit à Vg fort, on peut toujours
observer des variations de résistance d’un ordre de grandeur.
Comme ces mesures sont à courant I nul, le bruit de grenaille et 1/f n’ont pas lieu
d’être. Il reste donc le bruit thermique de l’échantillon et le bruit de l’amplificateur. On
peut ainsi calculer la valeur attendu à 1,13 K pour une résistance de 43kΩ :
Svthermique = 4kB T R = 3.10−18 V 2 /Hz
Svampli = δVn + R2 δIn = 2, 8.10−17 V 2 /Hz
calculé avec δVn = 2, 5.10−17 V 2 /Hz et δIn = 1, 6.10−27 A2 /Hz
soit
Svattendu = 3, 1.10−17 V 2 /Hz
13
(11)
Le calcul précédent met en évidence deux faits importants. D’une part le bruit thermique est d’un ordre de grandeur inférieur au bruit de l’amplificateur. C’est donc celui-ci
qui prédomine. D’autre part, le bruit en courant de l’amplificateur, qu’il faut multiplier
par R2 pour obtenir son équivalent en tension, deviendrait aussi prépondérant devant le
bruit thermique si on voulait mesurer une gamme de résistances plus grande. Ainsi, il
semble indispensable pour pouvoir mesurer des résistances supérieures à 200kΩ comme
c’est le cas dans le régime du blocage de Coulomb d’avoir des amplificateurs ayant un
bruit en courant beaucoup plus faible que ceux utilisés.
Il faut donc comparer le spectre mesuré à cette valeur attendue, représentée sur la
figure 11 par la ligne pointillée. Ce spectre nous donne beaucoup d’informations. Il faut
éliminer les points représentant les plus basses fréquences où l’analyseur de spectre donne
des valeurs faussées. Il existe ensuite deux zones où le bruit mesuré semble être en accord
avec la valeur attendue : une autour de 1 kHz et une autre pour des fréquences supérieures
à 20 kHz. Au milieu de ces deux zones se trouve une bosse que nous pensons être liée à la
coupure RC car elle se situe autour de 10 kHz. On peut même aller un peu plus loin en
observant que le bruit mesuré aux plus hautes fréquences se trouvent être le bruit attendu
moins le bruit thermique.
S
v
( V
² / H
z )
1 E -1 6
1 E -1 7
1 0 0
1 0 0 0
1 0 0 0 0
1 0 0 0 0 0
fre q u e n c y (H z )
Figure 11 – Spectre large à Vg = 91mV . La ligne pointillée rouge représente la valeur moyenne
attendue. On observe une bosse autour de 10 kHz après laquelle le bruit dû à l’échantillon semble coupé.
Une zone autour de 1 kHz semble donner la bonne valeur.
Un premier point pour appuyer cette hypothèse est d’effectuer une mesure croisée en
utilisant un deuxième amplificateur à la sortie du cryostat : on devrait ainsi supprimer le
bruit en tension dû à l’amplificateur et retrouver seulement le bruit thermique et le bruit
en courant des amplificateurs. C’est ce que montre la figure 12 où l’on peut observer que
le bruit mesuré dans cette gamme de fréquences se situe autour de 10−20 V 2 /Hz, soit deux
ordres de grandeur en-dessous du bruit attendu.
Enfin, un rapide coup d’oeil sur l’évolution de ce niveau de bruit dans cette gamme
de fréquences supérieures à 20 kHz lorsque l’on fait varier Vg et donc la résistance montre
qu’il se situe bien après la coupure. En effet, nous avons observé qu’il restait constant
pour deux valeurs de résistance différentes.
14
1 E -1 6
1 E -1 7
1 E -1 9
S
v
( V
² / H
z )
1 E -1 8
1 E -2 0
1 E -2 1
1 0 0
1 0 0 0
1 0 0 0 0
1 0 0 0 0 0
fre q u e n c y (H z )
Figure 12 – Spectre large à Vg = 91mV , mesure croisée. On observe que la mesure croisée rejoint la
mesure non croisée pour les fréquences inférieures à 10 kHz mais que le signal est totalement coupé pour
les plus hautes fréquences.
5.3.2
Evolution en fonction de Vg
En observant finement plusieurs bandes de fréquences dans la gamme 0 − 5kHz, nous
avons retenu la bande 500Hz − 1, 3kHz pour la suite de nos mesures : le bruit paraı̂t bien
être blanc, mis à part les quelques résonances dues au rayonnement électromagnétique des
appareils de mesures (50 Hz notamment). Cependant, ces pics étant généralement bien
résolus, il est facile de les éliminer afin de ne pas les prendre en compte dans le calcul de
la moyenne.
Il faut maintenant comparer les valeurs mesurées et attendues. Pour cela, nous avons
fait varier Vg entre 50 et 95 mV et suivi l’évolution du niveau de bruit. La figure 13
montre les spectres mesurés pour quatre valeurs différentes de Vg . On peut se rendre
compte que le niveau de bruit semble qualitativement suivre les évolutions de résistance :
le bruit augmente bien si la résistance augmente aussi. En revanche, la mesure semble plus
problématique pour des valeurs de résistance supérieures à 200kΩ, où le spectre commence
à se pencher et à être beaucoup plus bruyant.
-1 5
1 0
-1 6
1 0
-1 7
S
v
( V
² / H
z )
1 0
4 0 0
6 0 0
8 0 0
1 0 0 0
1 2 0 0
1 4 0 0
fre q u e n c y (H z )
Figure 13 – Spectres mesurés pour 4 valeurs de Vg : noir Vg = 50mV , marron Vg = 65mV , rouge
Vg = 75mV , bleu Vg = 90mV . On observe une augmentation du bruit lorsque la résistance augmente
aussi. Pour des valeurs de résistance supérieures à 200kΩ, les spectres se penchent et deviennent bruyants.
15
Nous avons aussi réalisé cette expérience en faisant une mesure croisée avec deux
amplificateurs, comme décrit à la partie 5.3.1. Nous avons alors remarqué que quelque
soit la valeur de résistance, l’écart entre les mesures croisées et non croisées était constant
et correspondait bien au bruit en tension de l’amplificateur. Comme il ne s’agit donc que
d’un offset, nous représentons sur les figures seulement la mesure non croisée.
L’étape suivante est de prendre les moyennes des spectres, de les tracer en fonction
de Vg et de les comparer aux valeurs attendues Svattendu (Vg ) = Svthermique + Svampli . Cela
est exposé sur la figure 14. On peut observer qu’il y a un accord excellent entre les
deux pour des valeurs de Vg supérieures à 60 mV, soit une résistance de 190kΩ ce qui est
conforme avec l’analyse qualitative précédente. Pour des valeurs de résistance supérieures,
on s’aperçoit que le bruit mesuré est en fait largement inférieur au bruit attendu, il semble
donc que l’on soit entré dans la coupure RC.
1 E -1 4
S
v
( V
² / H
z )
1 E -1 5
1 E -1 6
1 E -1 7
5 0
5 5
6 0
6 5
7 0
7 5
8 0
8 5
9 0
9 5
V g (m V )
Figure 14 – comparaison moyenne des spectres mesurés (noir) avec les valeurs moyennes attendues
(rouge) en fonction de Vg . La concordance est bonne pour des valeurs de Vg supérieures à 60 mV. Pour
des résistances plus fortes, supérieures à 200kΩ, le bruit semble coupé.
Cependant, le fait d’être capable de mesurer le bruit thermique et de l’amplificateur
pour une gamme de résistances est encourageant et nous a poussé à essayer de mesurer
ce bruit en imposant un courant I.
5.3.3
Evolution en fonction du courant I
Nous avons donc décidé de mesurer le bruit en fonction de I à Vg = 91mV , soit sur un
minimum local de résistance. Nous avons fait varier le courant entre -500 nA et 500 nA.
On devrait s’attendre à l’apparition de bruit 1/f qui devrait masquer en premier lieu le
bruit de grenaille. Malgré tout, si le bruit 1/f n’est pas trop fort, une possibilité sera de le
”fitter” pour en extraire ensuite le bruit de grenaille. On s’attendrait alors à observer un
crossover entre le bruit mesuré à courant nul (Svthermique + Svampli ) et l’émergence du bruit
de grenaille pour un courant Icross donné par la formule suivante :
Icross ≈
Sv (I = 0)
≈ 50nA
2eR(I = 0)2
(12)
On a supposé ici que le bruit de grenaille serait quasi-poissonien. Cependant cette
valeur de Icross serait aussi mesurable si le bruit était sur-poissonien.
16
La figure 15 présente tout d’abord la caractéristisque Vds − I mesuré ainsi que la
résistance différentielle Rdif f qui en découle, calculée après lissage et dérivation de la
caratéristique. Les points correspondant à des courants très faibles sont faux car la tension
mesurée correspond en fait au bruit de l’amplificateur. On peut considérer que la mesure
est bonne pour de valeurs de tension supérieures à 6 mV (après amplification) soit des
valeurs de courant telles que :
|I| >
6.10−5
Umin
≈
≈ 2nA
R
3.104
0 ,0 2 0
0 ,0 1 5
7 x 1 0
4
6 x 1 0
4
5 x 1 0
4
4 x 1 0
4
3 x 1 0
4
2 x 1 0
4
1 x 1 0
4
(13)
0 ,0 1 0
( Ω)
0 ,0 0 0
R
V d s (V )
0 ,0 0 5
-0 ,0 0 5
-0 ,0 1 0
-0 ,0 1 5
-6 ,0 x 1 0
-7
-4 ,0 x 1 0
-7
-2 ,0 x 1 0
-7
0 ,0
2 ,0 x 1 0
-7
4 ,0 x 1 0
-7
6 ,0 x 1 0
-7
-4 ,0 x 1 0
I (A )
(a) caractéristique Vds -I
-7
-2 ,0 x 1 0
-7
0 ,0
2 ,0 x 1 0
-7
4 ,0 x 1 0
-7
I (A )
(b) résistance (rouge) et résistance différentielle
(noir)
Figure 15 – (a) : caractéristique Vds -I. (b) : Résistance (rouge) et résistance différentielle (noir) à
Vg = 91mV en fonction de I. On peut remarquer des bosses dans la courbe de résistance différentielle.
On se rend bien compte que cette caractéristique est non-linéaire avec notamment
l’apparition de bosses dans la courbe Rdif f en fonction de I. Il faut garder à l’esprit
que faire varier le courant revient à faire varier les échelles d’énergies aux bornes de
l’échantillon. Cela permet ainsi d’explorer l’environnement du nanofil en chargeant ou
déchargeant des impuretés par exemple. On peut d’ailleurs noter une forte asymétrie
entre les courants positifs et négatifs. Cela semble logique puisque l’on sonde en quelque
sorte soit le drain ou la source.
Cependant, ces différences de conductance sont relativement faibles et seraient invisibles dans le tracé du diamant de Coulomb de l’échantillon car masquées par la conductance, trop forte à ce potentiel de grille. C’est là où le bruit trouve aussi son utilité puisqu’il
ne s’attaque justement qu’à mettre en lumière ces variations. La figure 16 montre le bruit
(ramené en courant par la formule (3)) mesuré en fonction du courant I, pour des valeurs
comprises entre -500 nA et 500 nA.
17
6 ,0 0 E -0 2 3
6 0 0 0 0
5 ,0 0 E -0 2 3
Ω)
(
4 0 0 0 0
i f f
3 ,0 0 E -0 2 3
R
S
I
d
( A
² / H
z )
4 ,0 0 E -0 2 3
2 ,0 0 E -0 2 3
1 ,0 0 E -0 2 3
2 0 0 0 0
0 ,0 0 E + 0 0 0
-4 ,0 x 1 0
-7
-2 ,0 x 1 0
-7
0 ,0
2 ,0 x 1 0
-7
4 ,0 x 1 0
-7
I (A )
Figure 16 – Rouge : Rdif f et noir : SI en fonction de I. Le bruit 1/f, trop important, empêche
d’extraire le bruit de grenaille. On observe cependant des correspondances entre les bosses de résistance
différentielle et des pics de bruit.
On peut remarquer que le niveau de bruit augmente considérablement avec le courant,
bien plus que si seul du bruit de grenaille était mesuré. En effet, pour I = 500nA, on
mesurerait environ SI ≈ 2eI ≈ 1, 6.10−25 A2 /Hz alors que les valeurs ateintes sont plutôt
de l’ordre de 10−23 A2 /Hz. Il semble donc bien que le bruit 1/f de l’échantillon soit très
important. Cela se confirme par le tracé de quelques spectres enregistrés au cours de cette
mesure, montrés sur la figure 17. Ce bruit 1/f est bien dû à l’échantillon car les mesures
croisées et non croisées donnaient bien le même résultat, à un offset près comme décrit
dans la section précédente.
1 E -1 4
S
v
( V
² / H
z )
1 E -1 3
1 E -1 5
4 0 0
6 0 0
8 0 0
1 0 0 0
1 2 0 0
1 4 0 0
fre q u e n c y (H z )
Figure 17 – 6 spectres mesurés à Vg = 91mV pour différentes valeurs de I : respectivement de bas en
haut I= 100, 150, 250, 350, 450 et 500 nA. Les lignes rouges représentent les fits linéaires de ces spectres.
Ils sont tous de pente proche de -1. Mais la valeur de log(βI 2 ), donnée par l’ordonnée à l’origine, ne
permet pas d’aboutir à un β constant.
18
En échelle log-log, on voit que les spectres sont à peu près parallèles entre eux : il
suivent tous une droite de pente -1, ce qui confirme le comportement moyen du spectre
en 1/f. Dans le cas idéal, on tenterait de ”fitter” ces spectres par deux paramètres α et β
2
tels que Sv = α + βIf . Si le paramètre β est trouvé constant, montrant que la puissance
du bruit en 1/f est bien proportionnelle à I 2 , on peut essayer de ”fitter” le paramètre α .
Si la valeur trouvée est cohérente, notamment proportionnelle à I, celle-ci peut alors être
considérée comme le bruit de grenaille de l’échantillon. Malheureusement, dans notre cas,
nous nous sommes rapidement rendus compte que le paramètre β avait un comportement
beaucoup trop aléatoire, variant sur au moins un ordre de grandeur. Bien évidemment,
il est alors illusoire d’essayer d’extraire le paramètre α. Cela peut s’expliquer par la trop
faible gamme de fréquences sur laquelle les mesures ont été faites.
Cependant, on peut observer sur la figure 16 des pics de bruit qui semblent tout à
fait corrélés aux variations de résistance différentielle. Ces pics apparaissent pour des
maxima locaux de résistance lorsque I est positif et pour des minima locaux lorsque I est
négatif. Cela semble bien indiquer que le bruit mesuré par l’analyseur de spectre n’est
pas seulement dû à l’amplifcateur ou à l’électronique mais a bien une corrélation avec le
comportement de l’échantillon, encore inconnue mais qu’il serait intéressant d’étudier par
la suite car signature remarquable d’un phénomène physique. Cela montre que l’on est sur
la bonne voie mais que beaucoup de travail reste à faire au niveau du dispositif, encore
trop simpliste pour être capable de sortir une véritable signification de nos résultats.
19
6
Conclusion et perspectives
L’objectif de ce stage était de mesurer le bruit de grenaille de transistors MOSFETs
silicium dont les tailles caractéristiques sont de l’ordre de la dizaine de nanomètres. Cet
objectif était très ambitieux car cela incluait une lourde partie d’instrumentation qui s’est
révélée trop longue. Nous avons cependant réussi à mesurer le bruit thermique de nos
échantillons, jusqu’à des résistances de l’ordre de 100kΩ, où des oscillations de Coulomb
peuvent apparaı̂tre ou qui peuvent correspondre à des maxima de pics de courant par
effet tunnel résonant. Nous avons aussi réussi à mettre en lumière un phénomène d’augmentation du bruit de l’échantillon en fonction du courant de polarisation, et ce malgré la
présence d’un bruit 1/f important. C’est d’ailleurs sur ce bruit 1/f qu’il faudra travailler
par la suite afin de s’en affranchir et d’avoir accès au bruit de grenaille. Pour cela, il semble
évident qu’il faudra être capable d’élargir la bande de fréquences mesurable. On pourrait
aussi penser à inclure ces échantillons dans un RF-SET, comme Kafanov et Delsing l’ont
fait [14], et ainsi mesurer le bruit à très haute fréquence (de l’ordre de 100 MHz).
D’un point de vue personnel, je pense que ce stage a été très formateur. Monter
une nouvelle expérience n’est pas une chose facile mais demande beaucoup de réflexion
pour faire les bons choix, d’investissement et de minutie. J’ai été heureusement très bien
encadré au cours de ce stage, sur cette partie d’instrumentation comme sur l’obtention
des premiers résultats, et tiens donc à remercier mes deux principaux encadrants avec qui
j’ai pris beaucoup de plaisir à travailler, Marc et Xavier, toujours prêts à répondre à mes
questions, à me donner un coup de main ou une astuce pour débloquer une situation. Je
dis principaux car c’est aussi tout le personnel du laboratoire qui m’a chaleureusement
accueilli, toujours prêt à me rendre service.
Tout cela m’amène logiquement à poursuivre ce travail dans le cadre d’une thèse au
LaTEQs, qui s’orientera sur la physique des dopants uniques dans ces transistors, et plus
particulièrement vers le contrôle et la dynamique de leur spin.
20
7
Bibliographie
Références
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Université Joseph Fourier de Grenoble, Décembre 2006.
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21
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