A. Bournel
augmente fortement pour W décroissant. En fait lorsque
l'on tend vers une trajectoire de type unidimensionnel,
l'effet de relaxation de spin lié aux interactions disparaît
progressivement : les interactions ne peuvent plus
rendre aléatoire la direction du vecteur de précession de
spin qui est perpendiculaire au vecteur vitesse de
l'électron. En outre, on peut noter d'après la Figure 3
qu'il n'est pas nécessaire de réaliser un véritable fil
quantique pour obtenir une longueur de relaxation de
spin supérieure au µm à 300 K : limiter la largeur du
transistor à moins de 100 nm est suffisant.
(ii) Pour une trajectoire 1D entre source et drain, le
vecteur de précession de Rashba a une direction qui
reste toujours parallèle à la largeur du transistor.
L'orientation de spin des électrons injectés dans le canal
du spin-FET ne peut donc être quelconque : elle doit
être perpendiculaire à la largeur du transistor [8]. Cette
condition est particulièrement importante pour le
dimensionnement du spin-FET. En effet, l'anisotropie de
forme tend à imposer un alignement du moment
magnétique des source et drain parallèle à la plus grande
dimension de ces contacts, soit parallèle à la largeur du
spin-FET (cf. Figure 2). Pour résoudre cette difficulté,
on peut envisager de réduire fortement la dimension e
des couches ferromagnétiques dans la direction
source-drain, soit à des épaisseurs de quelques nm, afin
de bénéficier de l'anisotropie de surface qui favorise
l'aimantation des couches ferromagnétiques
perpendiculaire aux interfaces. D'un point de vue
technologique, il semble toutefois très délicat de réaliser
un transistor comportant à la fois un canal de largeur
réduite voire unidimensionnel et des contacts de source
et drain à aimantation perpendiculaire. Il est à noter de
plus qu'il est assez difficile de déposer des couches de
métaux ferromagnétiques de bonne qualité magnétique
sur des matériaux comme GaAs [9].
(iii) Enfin, il faut évidemment que les contacts de
source et drain constituent véritablement des filtres à
spin efficaces. Ce point délicat, qui constitue une pierre
d'achoppement pour la viabilité du spin-FET, fait l'objet
de la section suivante.
4-Contacts sélectifs en spin
Si la création et la détection par voie entièrement
optique d'électrons polarisés en spin dans les
semiconducteurs constituent aujourd'hui des techniques
bien maîtrisées, il n'en est absolument pas de même des
méthodes électriques. Malgré des efforts intenses, la
sélectivité en spin d'un contact constitué par un métal
ferromagnétique et un semiconducteur n'a encore jamais
été démontrée expérimentalement. D'après une étude
théorique récente [10], il semble en outre que le concept
d'injection sélective en spin par un contact ohmique
ferromagnétique/semiconducteur ne soit pas viable, sauf
si le ferromagnétique est entièrement polarisé en spin.
Cela est attribué aux grandes différences de conductivité
et de longueur de relaxation de spin entre ces deux types
de matériaux. Ce problème pourrait être résolu avec des
contacts Schottky ou à effet tunnel [11], ou bien en
utilisant des matériaux magnétiques aux propriétés de
transport plus proches des semiconducteurs, c'est-à-dire
des composés II-VI ou III-V alliés au Mn. Il a été en
effet démontré expérimentalement que BeMnZnSe [12]
ou GaMnAs [13] constituaient d'efficaces polariseurs de
spin. Néanmoins, des difficultés subsistent quant à
l'utilisation de ces deux types de matériaux. Les II-VI
magnétiques ne constituent d'efficaces filtres à spin qu'à
très faibles températures et sous forte excitation
magnétique ou optique. Si les III-V alliés au Mn
peuvent être ferromagnétiques jusqu'à un peu plus de
100 K, leur utilisation est rendue délicate par le fait que
le Mn constitue un dopant accepteur pour GaAs.
D'autres matériaux incluant des ions "magnétiques"
(métaux de transition) sont étudiés actuellement, comme
CrAs [14] ou ZnCoO [15]. Si les premiers résultats sont
prometteurs, ces études de nouveaux matériaux pour
l'électronique de spin doivent encore être poursuivies
pour véritablement aboutir.
Pour ce qui est de la collection sélective en spin, un
autre problème lié au semiconducteur existe et pourrait
expliquer l'échec des mesures de collection dépendant
du spin dans des simples contacts établis entre un métal
ferromagnétique et GaAs. Dans ce type d'expériences,
des électrons polarisés en spin sont photogénérés dans
un substrat GaAs dopé P et on étudie la variation du
courant collecté par un contact Schottky ou tunnel
ferromagnétique, déposé sur GaAs, en fonction des
orientations relatives du moment magnétique du contact
et des spins majoritairement générés dans le
semiconducteur. Cette variation relative est désignée par
la suite comme "l'asymétrie en spin" du photocourant.
Jusqu'à présent, les effets mesurés restent de l'ordre de
1%. Cependant, même si l'interface
ferromagnétique-semiconducteur est intrinsèquement
sélective en spin, l'asymétrie en spin effective peut être
fortement réduite du fait des caractéristiques du
transport électronique dans GaAs. Afin que l'excès
d'électrons dû à la photogénération dans GaAs soit
éliminé tout en conservant une forte asymétrie en spin
du photocourant, il faut que les électrons a priori non
collectés par le ferromagnétique, car de la mauvaise
orientation de spin, se recombinent avant de perdre leur
cohérence de spin. Or les temps typiques de
recombinaison sont nettement plus grands que les temps
de relaxation de spin électronique et encore plus grands
que les temps de collection. Le contact ferromagnétique
ne peut donc jouer son rôle de filtre à spin. Pour pallier
cette difficulté, nous proposons de déposer sur GaAs
deux contacts "en peigne" (cf. Figure 4) : des contacts
larges non magnétiques (NM) pour réguler l'excès
d'électrons dû à l'éclairement, avec des "doigts"
intercalés de contacts ferromagnétiques (FM) qui jouent
alors leur rôle d'analyseur de spin.