DICI Nº 160 •
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11 août 2007
fusion erayante de l’avortement, meurent
sans avoir reçu le baptême. Que dire de ces
enfants ? Sont-ils eux aussi d’une
certaine manière sanctiés dans
le sein maternel ? Y a-t-il un sa-
lut pour eux ?
« Sans hésiter je réponds : bien sûr que
le salut existe pour eux. Jésus ressuscité
dit également d’eux : « Laissez venir à moi
les petits enfants ». L’idée selon laquelle les
enfants non baptisés étaient destinés aux
Limbes, un lieu intermédiaire dans lequel
on ne soure pas mais dans lequel on ne
jouit pas non plus de la vision de Dieu,
s’est répandue à partir du Moyen-âge.
Mais il s’agit d’une idée qui n’a jamais été
dénie comme vérité de foi de l’Eglise. Il
s’agissait d’une hypothèse des théologiens
qu’à la lumière du développement de la
conscience chrétienne et de la compréhen-
sion des Ecritures, nous ne pouvons plus
maintenir ».
A i n si d o n c p o u r l e p è r e
Cantalamessa, la question des
Limbes est dénitivement close. La
doctrine traditionnelle exprimée,
entre autres, par le Catéchisme de
saint Pie X, n’était qu’une hypothè-
se aujourd’hui balayée par le docu-
ment de la Commission Théologique
Internationale : « La discussion est
aujourd’hui close car récemment, la
Commission théologique internationale,
qui travaille pour la congrégation pour la
Doctrine de la foi a publié un document
armant précisément cela ».
Le père Cantalamessa omet de
préciser ici que ce texte est le fruit
d’un organe consultatif, dépourvu de
toute autorité magistérielle, et que le
cardinal Levada en a approuvé la pu-
blication en qualité de président de
la CTI, et non en qualité de préfet
de la Congrégation pour la doctrine
de la foi, et que l’« approbation ora-
le », donnée pour la publication par
Benoît XVI à l’audience du 19 jan-
vier 2007, n’engage pas l’autorité pon-
ticale et n’oblige pas la conscience
des dèles (voir l’étude parue dans Le
Courrier de Rome n° 302, juillet-août
2007, Les Limbes aux… Limbes).
« Il me semble utile de revenir sur ce
thème à la lumière de cet important docu-
ment pour expliquer certaines des raisons
qui ont conduit l’Eglise à tirer cette conclu-
sion. Jésus a institué les sacrements comme
moyens ordinaires pour le salut. Ceux-
ci sont donc nécessaires et celui qui, alors
qu’il peut les recevoir, les refuse contre sa
conscience ou les néglige, compromet sérieu-
sement son salut éternel. Mais Dieu ne s’est
pas lié à ces moyens. Il peut sauver égale-
ment à travers des chemins extraordinai-
res, lorsque la personne, sans aucune fau-
te de sa part, est privée du baptême. Il l’a
fait par exemple avec les Saints Innocents,
morts eux aussi sans baptême. L’Eglise a
toujours admis la possibilité d’un baptême
de désir et d’un baptême de sang, et tant de
ces enfants ont vraiment connu un baptê-
me de sang, même s’il est de nature dié-
rente ». – Le prédicateur de la Maison
pontificale mêle la doctrine tradi-
tionnelle du baptême du sang - celui
des martyrs exécutés en haine de la
foi catholique – et l’hypothèse nou-
velle d’un « baptême » des victimes
de l’avortement, abusivement identi-
ées par lui à des martyrs de la foi.
« Je ne crois pas que la clarication de
l’Eglise encourage l’avortement ; si c’était
le cas, ce serait véritablement tragique et
il faudrait se préoccuper sérieusement, non
pas du salut des enfants non baptisés mais
de celui des parents baptisés. Ce serait se
moquer de Dieu. Cette déclaration donne-
ra en revanche un peu de soulagement aux
croyants qui, comme chacun, s’interrogent,
earés, sur le sort atroce de tant d’enfants
dans le monde aujourd’hui ».
En fait, la question qui se pose
vraiment est la suivante : une « inter-
rogation », même « earée », sur le sa-
lut des millions d’enfants victimes de
l’avortement aujourd’hui autorise-t-
elle le rejet pur et simple de la doc-
trine et de la pratique traditionnelle
de l’Eglise ? Car, comme rappelle très
justement l’étude déjà citée du der-
nier Courrier de Rome, « la négation
des Limbes est d’une gravité déme-
surée, puisque les principes dont el-
le découle sont démesurément faux
(naturalisme, panthéisme, « Christ
cosmique », droit à la grâce de la part
de la nature), toutes erreurs déjà réfu-
tées et condamnées, mais aujourd’hui
reproposées par la Commission
Théologique Internationale. En
outre, même les simples dèles en ont
été troublés au plus haut point, car
en général, seuls les théologiens sont
en mesure de saisir les autres erreurs
plus subtiles ; alors qu’il est évident
pour tous (et pas seulement pour les
savants) qu’avec les Limbes, a été at-
teinte la possession tranquille d’une
doctrine certaine, étudiée par tout
dèle et même par les enfants, ensei-
gnée par le Catéchisme romain (IIe
partie, chap. 2, n. 32). Ce « scandale
passif » (subi par les dèles) suppose
le « scandale actif » de la part des pas-
teurs. (…) Or le scandale donné pu-
bliquement doit être réparé publique-
ment. C’est ce que nous demandons
fermement ».
Mais le capucin, prédicateur de
la Maison pontificale, n’est pas un
novice en la matière. Déjà lors du
Vendredi Saint 2002, prêchant de-
vant le pape Jean-Paul II et le car-
dinal Ratzinger alors préfet de la
Congrégation de la foi, sur le thème
du salut universel apporté par le
Christ et par les religions non-
chrétiennes (sic), il s’était demandé :
« Pouvons-nous admettre qu’il y ait une
autre voie encore par laquelle le Christ
attire à lui tous les hommes ? C’est-à-di-
re à travers ce qu’il y a de vrai et de va-
lide dans les autres religions ? Le concile
(Vatican II, N.D.L.R.) et le magistère
(post-conciliaire, N.D.L.R.) n’ont pas
exclu cette possibilité qui est maintenant
activement explorée par la théologie ».
« La préoccupation pour le moment
est de reconnaître aux autres religions une
existence non seulement de fait, dans le
plan divin du salut, mais aussi de droit, de
façon à retenir qu’elles sont non seulement
tolérées, mais aussi positivement voulues
par Dieu, comme l’expression de l’inépuisa-
ble richesse de sa grâce et de sa volonté que
tous les hommes soient sauvés ».
Et un peu plus loin : « Le pluralisme
religieux ne consiste pas dans le fait de re-
tenir toutes les religions également vraies :
cela serait pour tous du relativisme, mais
dans le fait de reconnaître à chacun le droit
de tenir pour vraie sa propre religion, et
de la diuser par des moyens paciques
dignes d’une religion. Pierre recommande
aux chrétiens : « avec douceur et respect ».