Dossier Brexit
29/06/16
Et pour l'ancien Premier ministre - qui retrouvera son poste en 1951 - l'avenir du Vieux Continent
doit passer par la constitution de "quelque chose comme les Etats-Unis d'Europe". Le joug
germanique et l'anéantissement de la culture européenne ayant été évités, il convient désormais de
"reconstituer la Famille européenne, aussi largement que possible, et de lui donner un cadre de
telle manière qu'elle puisse se développer dans la paix, la sécurité et la liberté", présente-t-il depuis
la Suisse.
La formule "Etats-Unis d'Europe", utilisée bien avant Churchill par Victor Hugo, est encore
aujourd'hui présente dans l'imaginaire européen. Pouvant représenter, pour les pro-européens, un
idéal à atteindre, qu'elle ait été prononcée par un Britannique ne constitue pour autant pas un
paradoxe. En effet, Winston Churchill n'inclut pas son pays dans le projet. L'homme d'Etat place en
effet le Royaume-Uni à la croisée de trois mondes : l'Atlantique, le Commonwealth et l'Europe.
"Chaque fois que nous devrons choisir entre l'Europe et le grand large, nous choisirons le grand
large", avait-il d'ailleurs confié au général de Gaulle en juin 1944. Dans l'esprit de Churchill, la
Grande-Bretagne serait le "sponsor" d'une construction européenne, dont la direction relèverait de
la responsabilité commune de la France et de l'Allemagne.
Quelque 70 ans plus tard, Boris Johnson - auteur d'une biographie remarquée de Churchill et figure
de proue des partisans du Brexit - voire David Cameron, dont la fibre européenne ne s'est
véritablement éveillée qu'avec la nécessité politique de remporter le référendum, ne sont
probablement pas éloignés de cette conception de l'Europe.
1950 : Le Royaume-Uni refuse de participer à la CECA
En 1950, Robert Schuman, l'un des pères fondateurs de l'Europe, pose les premiers jalons de la
construction européenne et présente son plan pour la création d'une Communauté européenne du
charbon et de l'acier (CECA). Le Royaume-Uni refuse d'y participer.
Discours de Robert Schuman, le 9 mai
1950
Le 9 mai 1950, Robert Schuman
prononce le désormais fameux discours
de l'Horloge, véritable coup d'envoi de la
construction européenne et expose son
plan pour instaurer une Communauté
européenne du charbon et de l'acier
(CECA). L'objectif est de rendre la
guerre aussi "impensable" que "matériellement impossible" entre les puissances européennes. Six
pays adhèrent au projet : la France et l'Allemagne, principaux intéressés, ainsi que les Pays-Bas, la
Belgique, le Luxembourg et l'Italie - les futurs membres fondateurs de la Communauté économique
européenne en 1957. Le Royaume-Uni, alors producteur incontournable de charbon et d'acier, n'est
pas consulté.
Le travailliste Clement Attlee est, en 1950, le Premier ministre britannique. Invité à participer au
projet, ce dernier présente rapidement son refus, dès le 3 juin. Ce dernier, tout comme l'opposition
conservatrice menée par Winston Churchill, voit d'un mauvais œil ce qui est alors perçu comme une
atteinte à la souveraineté du pays et un risque pour leurs relations commerciales privilégiées avec
les pays membres du Commonwealth. "Nous sommes désireux de jouer un rôle actif dans tous les
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