Capital dE CrOiSSanCE Et du buy-Out

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www.venture-capital.be
guide du
capital de croissance et du buy-out
en belgique
avec le soutien
Sophie Manigart
Tom VANACKER
Olivier Witmeur
version 2.0 | mars 2011
I S BN 9 7 8 9 0 7 8 8 5 8 8 1 2
PRÉFACE
Chers lecteurs,
Le private equity - également appelé ‘capital investissement’ – reste encore méconnu et mal compris dans
notre société. Il joue pourtant un rôle important dans le développement des entreprises en mettant à leur
disposition les moyens financiers nécessaires à leur développement à moyen et long terme. Chaque année,
les investisseurs en private equity investissent dans environ deux cents dossiers rien qu’en Belgique et
mettent à disposition des entreprises des capitaux propres, le plus souvent dans un contexte de croissance.
Ce guide, écrit par des académiciens renommés de la Vlerick Management School, Université de Gand et de
la Solvay Brussels School, illustre les concepts d’une façon simple. Il a pour objectif de démystifier le private
equity auprès de chefs d’entreprises et de leurs conseillers.
Au nom de la Belgian Venture Capital & Private Equity Association asbl (“BVA”), nous vous souhaitons une
bonne lecture!
Koen Dejonckheere
Guy Geldhof
Président du Belgian Venture
Capital & Private Equity Association asbl
CEO Gimv
Secrétaire-Général du
Belgian Venture Capital &
Private Equity Association asbl
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
L’année dernière, la BVA a publié un guide traitant du segment du venture capital, en d’autres mots du
financement de jeunes entreprises, souvent technologiques, durant les premières années de leur existence.
Cette année, nous avons travaillé avec la même équipe sur un nouveau guide décrivant comment le private
equity contribue au développement d’entreprises plus matures et ce par la mise à disposition de capital de
croissance et de capital pour le financement de buy-outs. Il s’agit typiquement d’un segment où évoluent
nombre de PME belges très dynamiques ainsi que des plus grosses entreprises avec lesquelles le secteur
noue des partenariats.
Pour plus d’information sur la BVA et ses activités, visitez le site www.bva.be.
|1
Ce guide a été écrit par le Prof. dr. ir. Sophie Manigart, le dr. Tom Vanacker et le Prof. dr.
Olivier Witmeur avec le soutien du Belgian Venture Capital & Private Equity Association
asbl.
Vous pouvez leur adresser vos questions via le site www.venture-capital.be
Sophie Manigart
Sophie Manigart est associée de la Vlerick Leuven Gent Management
School où elle est titulaire de la Chaire Gimv en Private Equity. Elle est également professeur à l’Université de Gand (Universiteit Gent). Spécialisée
dans le financement d’entreprises (angel financing, venture capital et
private equity), elle a écrit de nombreux articles et livres sur le sujet. Elle siège au sein
du comité d’investissement du Baekeland Fonds II (fonds pour spin-offs de l’Université)
et administrateur dans plusieurs organisations.
Tom Vanacker
Tom Vanacker est attaché au département comptabilité et financement
d’entreprises de l’Université de Gand (Universiteit Gent) en tant que chercheur post-doctoral. Il a obtenu son doctorat en sciences économiques
appliquées à l’Université de Gand en 2009 alors qu’il était également
‘research fellow’ à la Carlson School of Management (Université du Minnesota). Il s’intéresse principalement à la relation entre le financement et la croissance des entreprises
non cotées en bourse.
2|
Olivier Witmeur est professeur à la Solvay Brussels School of Economics
and Management (Université libre de Bruxelles) où il est titulaire de la
Chaire Bernheim d’Entrepreneuriat. Il est spécialisé dans les stratégies de
création, croissance et financement de jeunes entreprises. Il est également président du Conseil de la Politique Scientifique pour la Région Bruxelles-Capitale,
ainsi qu’administrateur de plusieurs entreprises. Auparavant, il a été entrepreneur dans
une société à croissance rapide et directeur de l’EEBIC, un incubateur pour sociétés
innovantes à Bruxelles.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
Olivier Witmeur
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TABLE DE MATIÈRES
PRéFACEp. 1
4|
1.INTRODUCTION
P. 5
2.Q U’EST-CE QUE LE CAPITAL DE CROISSANCE,
D’EXPANSION OU DE DéVELOPPEMENT?
P. 9
3.definitiON, types eT FORMES DE buy-outs
P. 11
4.L E PROCESSUS D’INVESTISSEMENT ET
LA RECHERCHE D’ INVESTISSEURS ASSORTIS
P. 15
5.InTRODUCTION DaNS LeS PRINCIPALES
TECHNIQUES DE VALORISATION
P. 22
6.INSTRUMENTS FINANCIERS UTILISES
PAR LES INVESTISSEURS PRIVATE EQUITY
P. 27
7.L e rÔlE DES INVESTISSEURS private equity
APRèS l’INVESTISSEMENT
P. 36
8. LA SORTIE OU L’EXIT
P. 44
9. QUELQUES EXEMPLES
P. 50
BIBLIOGRAPHIE
P. 52
INTRODUCTION
Au fil du temps, de nombreux instruments financiers, parfois complexes de prime abord, ont vu le
jour. Pour l’entrepreneur, une bonne connaissance
des différentes possibilités est primordiale avant
d’organiser la levée des moyens financiers correspondant aux besoins de l’entreprise et de ses actionnaires. Une connaissance insuffisante ou erronée de
certaines alternatives peut mener à une structure financière sous-optimale et, par voie de conséquence,
entrainer l’abandon d’opportunité de croissance, des
difficultés financières, des tensions entre financiers
ou actionnaires, voire pire, la faillite.
L’objectif de ce guide est d’assurer une meilleure
compréhension du rôle et de l’intérêt du ‘private
equity’ en tant que mode de financement destiné
à soutenir la croissance ou faciliter la transmission
d’une entreprise. Il s’adresse aux entrepreneurs,
aux actionnaires de PME et toutes les autres parties
intéressées par ces entreprises : les comptables, les
banquiers, les consultants, les responsables politiques, les fonctionnaires, …
Le ‘private equity’ (en abrégé: PE), parfois nommé
en français ‘capital-risque’ ou ‘capital-investissement’, est un mode de financement à moyen terme
sous forme de (quasi) fonds propres pour des sociétés non cotées en bourse et à fort potentiel de
croissance. Les investisseurs en private equity ne
se limitent toutefois pas à la mise à disposition de
financement, ils sont également des partenaires de
l’entreprise à qui ils prodiguent des conseils stratégiques ou opérationnels et pour qui ils sollicitent
activement leur réseau de relations.
Il subsiste encore trop de mythes autour du private
equity. Alors que les uns chantent ses louanges et le
décrivent comme un sauveur d’entreprises, d’autres
au contraire le qualifient de pratique qui ne fédère
que des assoiffés d’argent ou autres rapaces à la recherche de gains toujours plus rapides. Ce manque
de connaissance est à l’origine de ce guide qui
entend donner une image aussi réaliste et objective
que possible du fonctionnement du private equity
et ainsi réfuter certaines idées reçues.
Le private equity ne correspond pas à une pratique
unique ou homogène. La figure 1.1. schématise les
différentes formes d’investissement qu’il recouvre
en fonction des phases de développement de l’entreprise ; depuis le financement en capital du démarrage des sociétés (on parle de ‘venture capital’),
jusqu’à la reprise de l’entreprise (on parle de ‘buy
out’) en passant par le financement de la croissance
(on parle de ‘capital de croissance’).
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
Il est aujourd’hui bien connu qu’une très petite
minorité des petites et moyennes entreprises sont
à l’origine de la grande majorité des innovations et
des créations nettes d’emplois de nos économies.
Un des plus grands défis pour les entrepreneurs à la
tête de ces entreprises est de trouver des ressources
financières adaptées à leur stratégie de croissance.
En effet, des moyens importants sont souvent indispensables pour, par exemple, poursuivre un plan
d’investissements ambitieux ou disposer d’un fonds
de roulement suffisamment solide pour faire face à
une croissance rapide.
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Figure 1.1. Les phases de développement de l’entreprise et les types de private equity
Ventes
Bénéfice/perte
Cash flow
Développement
produit
Premières activités
commerciales
Pénétration
du marché
Maturité produit
Amorçage
Démarrage et
début de croissance
Croissance rapide
Maturité
Venture capital
Capital de croissance
Temps
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Source: Smith & Smith (2000) “Entrepreneurial Finance”.
Buy-outs
Dans un premier guide publié en 2009, le “Guide
du Venture Capital en Belgique”, nous avions mis
l’accent sur le ‘venture capital’ qui ne représente
qu’une partie de l’activité du private equity destinée
aux jeunes entreprises. Avec ce nouveau guide nous
nagement souhaite racheter une société existante.
Tertio, il se peut qu’un (groupe d’) actionnaire(s) même minoritaire(s) - souhaite racheter les actions
d’un autre (groupe d’) actionnaire(s) comme c’est
parfois notamment le cas dans certaines entreprises
Pour savoir si le private equity peut vous intéresser, il suffit de répondre
aux quelques grandes questions qui suivent :
•• Acceptez-vous que de nouveaux actionnaires (minoritaires ou majoritaires) participent
à la vie de votre entreprise ?
•• Acceptez-vous que des tiers participent aux processus décisionnel et stratégique
de votre entreprise ?
•• Avez-vous l’ambition de croître et de créer plus de valeur avec votre entreprise ?
•• Avez-vous un plan d’affaires bien ficelé ?
•• Existe-t-il une possibilité de sortie réaliste pour les investisseurs qui vous soutiendraient dans les
prochaines années ? Envisagez-vous vous-même de sortir de votre entreprise?
Si vous avez répondu par l’affirmative à la plupart des questions ci-dessus, le private equity est sans
doute une forme de financement adaptée à vos ambitions.
mettons maintenant l’accent sur le rôle et l’utilisation
du private equity dans les entreprises plus matures.
Nous nous intéressons plus particulièrement à
trois situations. Primo, même quand elle est saine
et bien établie, une entreprise peut ressentir le
besoin de renforcer ses fonds propres, notamment
lors du développement ou lancement de nouveaux
produits, lorsqu’elle souhaite attaquer de nouveaux
marchés (internationaux) ou quand elle choisit de
racheter d’autres entreprises (on parle de ‘croissance
externe’). Secundo, il arrive qu’une équipe de ma-
familiales où une branche d’une famille peut souhaiter restructurer l’actionnariat. Dans la suite de ce
guide, nous parlerons de ‘capital de croissance’ pour
aborder la première situation et de ‘Buy-Out’ pour
les deux autres.
• Les alternatives au Private Equity
Il existe bien entendu des alternatives au private equity. Les trois plus fréquentes sont l’autofinancement,
le financement bancaire et la collaboration avec un
partenaire industriel.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
•• L’équipe de management de l’entreprise est-elle prête à vous suivre dans vos plans ?
Dispose-t-elle de l’expérience requise ?
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• L’autofinancement
Un entrepreneur peut naturellement choisir d’utiliser
les fonds générés en interne par son entreprise pour
financer la croissance de celle-ci. Alternativement ou
complémentairement, l’entrepreneur peut injecter
des nouveaux moyens propres issus de son patrimoine
personnel ou solliciter sa famille et ses amis. Il s’agit
sans doute du mode de financement le plus simple
et le plus rapide. Le principal désavantage de cette
approche est de limiter le développement de l’entreprise. En effet, la croissance implique que l’entreprise
investisse dans de nouveaux actifs et qu’elle dispose
d’un fonds de roulement suffisant. Si les bénéfices ne
permettent pas de financer ces deux éléments, la société se développe plus vite que ses moyens financiers
ne le permettent. Ceci peut conduire à une structure
financière déséquilibrée et, par voie de conséquence,
à des problèmes financiers. L’avantage du recours au
private equity est la possibilité de disposer de sommes
plus importantes qui permettent une augmentation
significative des fonds propres et donc une expansion
plus importante et/ou plus rapide.
• Le financement bancaire
Le financement bancaire est le mode de financement
le plus utilisé par les sociétés non cotées en bourse.
Néanmoins, les banques limitent leurs prêts en fonction de la capacité maximale de remboursement de
l’entreprise qui est déterminée par le cash flow de ses
8|
activités quotidiennes. De plus, les banques exigent
des garanties : soit des garanties réelles sur les actifs
de l’entreprise, soit des garanties personnelles données par les actionnaires. Pour les entreprises dont la
capacité d’emprunt est limitée, qui disposent de peu
d’actifs ou d’actifs peu adaptés (tels que les actifs immatériels) ou pour les entrepreneurs déjà fortement
engagés financièrement, l’obtention d’un crédit additionnel peut s’avérer difficile, voire impossible. Face
à ces contraintes, le private equity apporte du capital
frais (représenté par de nouvelles actions). Il n’entame
pas la capacité d’endettement de l’entreprise et ne
demande aucune garantie complémentaire.
• Les partenaires industriels
Un partenaire industriel peut également soutenir la
croissance d’une entreprise de plusieurs façons. Une
première approche consiste à conclure des accords de
collaboration, notamment pour la recherche ou la distribution. Ceci permet de limiter les investissements
nécessaires à la croissance. Une autre possibilité
est d’ouvrir le capital à un partenaire industriel. En
agissant de la sorte, le partenaire industriel acquiert
généralement une meilleure connaissance de nouveaux domaines de recherche, de nouveaux marchés
qu’il n’explore pas activement lui-même. Ce type
d’intervention s’accompagne donc d’une plus-value
stratégique qui est bien souvent supérieure au rendement attendu par un investisseur purement financier.
QU’EST-CE QUE LE CAPITAL
DE CROISSANCE ?
Une entreprise établie peut faire appel au private
equity pour soutenir sa croissance. On parle alors de
‘capital de croissance’, de ‘capital d’expansion’ ou de
‘capital de développement’.
Typiquement, une entreprise va d’abord utiliser ses
fonds propres pour financer ses investissements. Si
ceux-ci ne suffisent pas, elle financera ses projets par
des dettes bancaires ou autres. Si sa capacité d’endettement est épuisée et s’il subsiste des opportunités
d’investissements intéressantes, il convient alors
d’envisager une augmentation de capital, c’est-à-dire
une émission de nouvelles actions. Ce capital frais
peut provenir de diverses parties : les actionnaires
existants, des partenaires industriels ou un marché
boursier. Le private equity constitue une autre alternative.
Les investisseurs en private equity cherchent typiquement à investir dans des entreprises établies qui ont
déjà fait leurs preuves, sont dotées d’une équipe de
management forte, disposent d’une position établie
sur leur marché et bénéficient de rentrées saines et
stables. L’existence d’opportunités de croissance, tant
internes qu’externes, est une autre dimension essentielle. Ces entreprises peuvent être actives dans des
secteurs de pointe mais également dans des secteurs
très traditionnels. Ainsi, une stratégie de croissance
par acquisition peut s’avérer très attrayante dans
un secteur venu à maturité mais peu concentré. En
rachetant plusieurs petits concurrents, l’entreprise
peut atteindre une taille qui lui permet de réaliser des
économies d’échelle et ainsi devenir plus compétitive
que ses concurrents. Ensuite, lorsqu’une entreprise a
conquis une position dominante sur le marché local,
la croissance peut se poursuivre à l’étranger et/ou sur
de nouveaux marchés adjacents. On parle alors d’une
stratégie de ‘buy-and-build’.
Au delà de l’augmentation de capital liée à un projet
de croissance, l’appel au private equity peut aussi
résulter du souhait de certains actionnaires de vendre
leurs actions. Si la valeur des actions à racheter est
supérieure à ce que les actionnaires restants sont en
mesure de payer, un investisseur en private equity
peut aider à acheter le solde. Dans ce cas, il n’y a
pas d’augmentation de capital et les fonds propres
restent inchangés. En général, les investisseurs en
private equity sont uniquement intéressés par ce
type d’opération s’il existe de réelles perspectives
de croissance. De plus, dans la majorité des cas, il
devra également y avoir une capacité d’endettement
suffisante pour permettre le financement des futurs
investissements. Le cas échéant, l’investisseur en
private equity injectera aussi du capital de croissance
additionnel dans l’entreprise.
Enfin, le private equity constitue parfois une solution
pour aider au redressement d’entreprises en difficulté, typiquement lorsque celles-ci sont incapables
de faire face à leurs engagements vis-à-vis de leurs
créanciers. Ces entreprises tenteront d’abord de
trouver une solution en interne, notamment en
restructurant leurs opérations ou en revendant des
actifs. Elles essaieront également de contracter de
nouvelles dettes et/ou de négocier un rééchelonne-
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
2
|9
ment des dettes existantes. Ce type de stratégie n’est
bien entendu pas aisé à mettre en œuvre car peu de
créanciers sont prêts à y participer. Dans ce cas de
figure, pour autant que le plan de redressement soit
crédible, le private equity peut apporter une solution
10 |
en souscrivant à une augmentation de capital. Il va de
soi que cette opération se réalisera à une valorisation
plutôt basse. Ensuite, si la réorganisation porte ses
fruits, la valeur de l’entreprise se redresse rapidement et l’investisseur réalise une très belle opération.
TYPES ET FORMES DE BUY-OUTS
3.1. Définition
On parle d’une transaction de ‘buy-out’ quand un
manager (ou une équipe de management) reprend
une entreprise et obtient ainsi une part importante
de son capital. L’entreprise à reprendre peut être
soit une entreprise familiale pour laquelle il n’y
a pas de successeur au sein de la famille, soit une
société cotée en bourse (une transaction appelée
“public-to-private”), soit encore un département
d’une entreprise plus grande.
La façon la plus simple et la plus courante pour
financer un buy-out consiste à compléter les fonds
propres du manager avec des dettes bancaires. La
plupart des petites transactions sont financées
de cette façon, sans que le terme de buy-out soit
utilisé.
Lors des transactions plus importantes, il est fréquent que le financement conjoint du management
et des banques soit insuffisant pour payer le prix de
rachat. C’est pourquoi ces transactions sont régulièrement financées par une combinaison de fonds
propres, de dettes et de private equity. Notons que
dans la mesure où il existe peu de très grands fonds
de private equity en Belgique, les buy-outs les plus
importants impliquent presque toujours des fonds
étrangers.
La figure 3.1 précise la structure type d’un buy-out.
Une nouvelle société (Newco) est créée spécialement pour la transaction et achète l’entreprise cible
: soit ses actions, soit tout ou une partie de ses actifs
(on parle de ‘asset deal’). Pour financer l’achat,
Newco fait appel à plusieurs sources de financement : du capital (actions ordinaires ou préférentielles,…) et de l’endettement (dettes classiques ou
mezzanine,…). Le capital est typiquement apporté
par le management et les investisseurs en private
equity. Le vendeur peut lui aussi y participer pour
une partie. Le financement par endettement est
pour sa part mis à disposition par des institu-tions
financières telles que les banques traditionnelles
mais aussi par des investisseurs spécialisés qui
proposent des financements dits ‘mezzanine’ (voir
chapitre 6) ou encore par le vendeur (on parle de
‘vendor loans’).
La figure 3.1. illustre le cas où Newco achète les actions de la société cible (‘transaction d’actions’).
Dans cette hypothèse, les actifs et les passifs sont
repris.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
3
| 11
Figure 3.1. Structure typique d’un buy-out
Sources de financement
par endettement
•• Banques
•• Investisseurs institutionnels
•• Marchés de capitaux publics
•• Vendeur
Sources de financement par actions
•• Management
•• Investisseurs en private equity
•• Vendeur
DETTES
•• Dettes classiques
•• Dettes ‘mezzanine’
•• Obligations à rendement élevé
(‘High yield bonds’)
CAPITAUX PROPRES
•• Capital par actions ordinaires
•• Capital par actions préférentielles
•• Prêts d’actionnaires
NEWCO
ENTREPRISE CIBLE
Une fois la transaction clôturée, Newco peut soit fusionner avec la société cible, soit continuer à exister
comme une société de type holding. La décision de
fusionner ou non dépend d’aspects légaux, financiers et fiscaux que nous ne développons pas ici.
3.2. Types de buy-outs
Il n’existe pas de définition très précise de la notion
de ‘buy-out’. Différents termes sont souvent utilisés
comme synonymes alors qu’ils recouvrent des opérations assez différentes. Schématiquement, nous catégorisons les buy-outs en fonction du type d’acheteurs
et de la structure financière de la transaction.
12 |
•  Management Buy-Out
Un Management Buy-Out (MBO) est un buy-out
où l’équipe de management en place au sein de la
société cible est le principal acteur de l’opération.
Elle joue alors un rôle crucial lors des négociations
avec le(s) vendeur(s), éventuellement en partenariat avec des investisseurs externes. En fonction de
son apport financier et de la valeur de la société
cible, le management obtiendra une participation
majoritaire ou minoritaire dans le capital de Newco.
Ensuite, dans la mesure où l’équipe dispose du
savoir-faire et de l’expérience nécessaires pour la
poursuite du développement de l’entreprise, elle
joue un rôle critique dans le succès du MBO.
•  Leveraged Buy-Out
Un Leveraged Buy-Out (LBO) est un buy-out financé
avec un endettement important. Dans de telles tran-
sactions, les investisseurs en private equity jouent
un rôle essentiel lors des négociations non seulement avec le(s) vendeur(s) mais également avec les
pourvoyeurs de dettes afin d’optimiser la structure
financière. Vu l’importance de l’endettement et la
nécessité de rembourser les intérêts et le principal
du montant emprunté, tant les investisseurs en capital qu’en dettes veillent à disposer de mécanismes
de contrôle leur permettant d’intervenir si le management ne répond pas aux attentes. Ainsi, les créanciers ne demandent pas uniquement des garanties
mais ils attachent également de l’importance aux
montants et à la stabilité du résultat opérationnel
de la société. Pour limiter les risques, des clauses
restrictives sont donc intégrées dans les conventions
d’emprunt. Ces transactions s’accompagnent d’une
discipline de fer pour optimiser l’efficacité et créer
un maximum de valeur après la transaction.
•  Autres types de buy-outs
Un Management-Employee Buy-Out (MEBO) est
une transaction de buy-out où le management et
une part importante des employés deviennent
actionnaires. Ces derniers détiennent typiquement
une participation minoritaire.
Dans le cas d’un Investor-Led Buy-Out (IBO), un
investisseur institutionnel ou private equity prend
le lead sur la transaction et reprend la société
cible directement du (des) vendeur(s). Suivant les
cas, l’investisseur choisit soit de garder l’équipe de
management en place, soit préfère en attirer une
nouvelle.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
•  Management Buy-In
Lors d’un Management Buy-In (MBI), c’est une
équipe externe qui prend le contrôle de l’entreprise
après le buy-out. Cette équipe, en général restreinte,
est souvent composée de dirigeants qui disposent
d’une grande expérience dans l’industrie de la
société cible. Elle n’est en général pas à l’origine de
l’opération, mais est plutôt contactée par des investisseurs en private equity après des négociations
avec le(s) vendeur(s).
Il arrive également que des managers externes à
l’entreprise participent à l’achat de la société cible
en partenariat avec (une partie de) l’équipe de
management en place, on parle alors de ‘buy-in
management buy-out’ (BIMBO).
La structure transactionnelle d’un MBI est comparable avec celle d’un MBO. L’opération comporte
toutefois plus de risques car l’équipe de management qui reprend les rênes de l’entreprise est
nouvelle. L’avantage d’un MBO est que l’équipe
en place dans la société cible a une bien meilleure
connaissance de celle-ci. Dans le cas d’un MBI, les
managers externes et les investisseurs n’ont pas
accès aux mêmes informations que les managers
internes, ce qui, par après, peut faire surgir des
problèmes dans la société reprise. Par contre, un
MBI présente l’avantage d’apporter un regard neuf
qui peut conduire à l’exploration de nouvelles stratégies.
| 13
3.3. Origine des buy-outs
Les buy-outs trouvent leur origine dans diverses
situations :
•  Succession au sein de sociétés familiales
Comme évoqué précédemment, les buy-outs
constituent souvent une solution aux problèmes de
succession dans des sociétés familiales lorsque les
propriétaires ou fondateurs décident de quitter la société. Si aucun membre de la famille n’est en mesure
de gérer la société, la famille peut opter pour la vente
de l’entreprise à son équipe de management.
•  Désinvestissement d’un département
Un buy-out est également une pratique fréquente
quand une entreprise souhaite se défaire d’une activité. Plusieurs raisons peuvent pousser des sociétés
industrielles ou holding à vendre certaines activités
(business units, filiales, participations, …). Ainsi, si une
société décide d’ajuster sa stratégie, il se peut que
certains départements ne cadrent plus avec celle-ci.
Un autre cas de figure se présente si une société est
confrontée à un problème opérationnel qui a pour
conséquence que le cash généré n’est plus suffisant
pour répondre aux engagements financiers. Cette
société se voit alors contrainte de vendre certains
départements ou activités pour renflouer sa trésorerie. Dans d’autres situations, la législation sur la
concurrence peut imposer à une société la vente de
certaines unités.
Les buy-outs suite à un désinvestissement sont souvent motivés par l’esprit d’entreprise de managers
14 |
qui voient des opportunités importantes au sein de
leur entité mais sont parfois dans l’incapacité de les
poursuivre à cause de la structure peu flexible de
leur entreprise ou du caractère non-stratégique de
leur entité. Un buy-out offre alors au management la
possibilité de saisir ces opportunités.
•  Transaction ‘Public-to-private’
Dans une transaction ‘public-to-private’, le management ou l’investisseur en private equity fait une offre
d’achat sur une société cotée en bourse pour ensuite
la délister. Quand il s’agit de transactions à valeur élevée, elles sont souvent caractérisées par un recours
important à l’endettement.
Les transactions public-to-private constituent également une solution pour des petites sociétés cotées en
bourse dont les actions sont peu liquides et donc peu
attrayantes pour des investisseurs institutionnels. Pour
ces sociétés, le manque de liquidité limite les possibilités de recherche de financement additionnel auprès
des investisseurs boursiers alors que, dans le même
temps, leurs actions sont souvent sous-valorisées. La
combinaison de ces facteurs créent une opportunité
de racheter des actions à un prix intéressant !
•  Sortie d’un autre investisseur financier (‘Secondary’)
On parle de ‘secondary’ buy-out quand une société
qui a fait l’objet d’un buy-out réalise ultérieurement
un deuxième buy-out dans le but d’organiser la sortie
d’investisseurs du premier buy-out. Ces derniers ont
alors la possibilité de vendre leurs actions à de nouveaux investisseurs. A l’heure actuelle, les secondary
buy-outs sont de plus en plus fréquents.
4
LE PROCESSUS D’INVESTISSEMENT ET
DE RECHERCHE D’INVESTISSEURS
Comment un entrepreneur doit-il s’y prendre pour
attirer un investisseur en private equity ? Ce chapitre
décrit la démarche à suivre. Elle est globalement
similaire pour un financement de croissance et pour
une transaction de buy-out. Nous commencerons
par revenir sur l’importance de disposer d’un plan
d’affaires solide et bien ficelé. C’est une condition sine
qua non pour convaincre des investisseurs. Ensuite,
nous aborderons la recherche de l’investisseur qui
convient le mieux au projet de l’entreprise. Le chapitre comprend également un aperçu des différentes
phases de négociation avec ce dernier et se conclut
en soulignant le rôle d’autres acteurs qui interviennent dans le processus.
Le tableau 4.1 synthétise les différentes étapes du
processus d’investissement, depuis la rédaction du
plan d’affaires jusqu’à l’investissement final.
Tableau 4.1. Les étapes du processus d’investissement
Entrepreneur
Rechercher des
investisseurs/
Evaluation du plan
d’affaires
- Rédiger le plan d’affaires
- Choisir les conseillers
- Contacter les
investisseurs
Premières
négociations
- Fournir des informations
complémentaires
Due diligence
Négociations finales
Entrepreneur et
investisseurs PE
Investisseurs PE
- Passer en revue
le plan d’affaires
- Discussion du plan
d’affaires
- Contacter les banques
- Développer une relation
de confiance
- Rédiger un projet de ‘term
sheet’
- Analyse approfondie
du plan d’affaires
- Valorisation
- Structure financière
- Nommer les comptables,
- Démarrer un ‘due diligence’
avocats et autres conseillers
externe
- Fournir toutes
les informations
pertinentes
Closing /
Investissement
- Négocier avec les banques
- Négocier le ‘term sheet’
final et la convention
d’actionnaires
- Boucler les formalités
administratives
- Rédiger les documents
nécessaires
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
Phase
Source: BVCA/PWC (2003) “A guide to private equity”.
| 15
4.1. Plan d’affaires
Attirer un investisseur en private equity commence
par l’élaboration d’un plan d’affaires (ou ‘business
plan’) solide et bien rédigé. Le plan d’affaires est un
instrument analytique qui répertorie les principales
variables qui influencent la réussite de l’entreprise.
Typiquement, il présente l’équipe de management
et leur expérience, les opportunités, le marché, la
concurrence …, détaille la stratégie de l’entreprise,
précise son plan d’action et quantifie les flux financiers.
du plan d’affaires; il le conclut en traduisant la
stratégie et le plan d’action en termes financiers.
Il sert aussi de point de départ pour le calcul de la
valorisation de la société.
• Le plan d’affaires doit également être vu comme
un moyen de communication pour convaincre tous
les partenaires financiers potentiels. Il joue donc
un rôle central lors des négociations avec ceux-ci.
Chaque année les fonds de private equity en Belgique
reçoivent des centaines de plans d’affaires alors
qu’ils n’en financent que quelques-uns. Ceci souligne à quel point il est difficile d’attirer leur attention.
Le plan d’affaires est crucial pour plusieurs raisons :
• Il oblige le management à fixer des objectifs
concrets. C’est un outil stratégique et opérationnel
qui expose la manière dont tout sera mis en place
en distinguant des étapes bien précises définies
par des ‘milestones’.
• C’est un instrument financier avec une projection
du compte de résultat et des prévisions de besoins
en liquidités. Le plan financier n’est qu’une partie
Dans ce contexte, la qualité de l’executive
summary qui chapeaute le plan d’affaires est
essentielle pour amener l’investisseur à entamer
la lecture complète du plan d’affaires. Un bon executive summary décrit en deux pages, en termes
concrets et non-techniques, en quoi consiste
l’activité de l’entreprise, quels sont ses objectifs
et comment ils seront atteints. Bien qu’il figure au
début du plan d’affaires, l’executive summary doit
bien entendu être écrit en dernier lieu.
“CONCOURS DE BEAUTE”
Malgré leur sélectivité, il n’est pas rare de voir des fonds de private equity se concurrencer pour investir dans les meilleurs buy-outs et les meilleures équipes de management. Dans ce contexte, certains
intermédiaires organisent des “concours de beauté” où un nombre limité d’investisseurs sont invités à
faire une première offre sur base d’un plan d’affaires. La phase de due diligence en profondeur et les
négociations ne sont alors poursuivies qu’avec l’investisseur qui a soumis l’offre la plus avantageuse.
Les entrepreneurs ont ainsi plus de choix et de pouvoir de négociation pour sélectionner les partenaires financiers qui correspondent le mieux à leurs ambitions et attentes.
Il faut savoir que les “concours de beauté” ne se font presque jamais lors d’investissements dans de
jeunes entreprises par les fonds de venture capital. En effet, la connaissance spécifique du secteur par
l’investisseur et la prise de connaissance progressive du dossier y sont incompatibles avec ce mode de
mise en concurrence des investisseurs dès le début du processus.
1
16 |
Même si le plan d’affaires est un document essentiel, l’objectif n’est pas d’expliquer en détail comment le rédiger. A la fin du
guide, vous trouverez une bibliographie comprenant plusieurs références excellentes sur la rédaction d’un plan d’affaires.
Nous venons de le voir, les investisseurs en private
equity sont très sélectifs. La sélection des entreprises les plus prometteuses et des équipes de
management les plus performantes sont donc des
facteurs-clé de réussite.
Il est fréquent que des opportunités d’investissement ne cadrent pas avec la stratégie d’investissement des investisseurs. Elles sont donc très rapidement exclues du processus. En effet, les investisseurs
tendent à se concentrer sur des phases spécifiques
de développement des entreprises, sur des secteurs
spécifiques ou sur des zones géographiques bien
définies. Ils travaillent également avec des montants
d’investissement minimum et maximum. Il est donc
important de cibler sa recherche vers des financiers
dont les critères d’investissement correspondent
aux caractéristiques de l’entreprise.
• Phase dans le cycle de développement
d’une entreprise
Certains investisseurs ont une stratégie d’investissement large et investissent dans toutes les
phases de développement. D’autres se focalisent
exclusivement sur des entreprises qui se situent
dans une phase précise de leur développement, par
exemple les jeunes entreprises (venture capital), les
entreprises en croissance, les entreprises matures
ou les buy-outs.
•  Secteur
En règle générale, les fonds de capital de croissance
ou de buy-out excluent peu de secteurs a priori.
Néanmoins certains se concentrent sur des secteurs
spécifiques. Dans ce cas, (une partie de) l’équipe
de management de la société d’investissement est
composée de spécialistes de ce secteur. La valeur
ajoutée de l’investisseur sera alors plus importante.
Il arrive également qu’un investisseur dont l’expérience sectorielle est limitée invite d’autres investisseurs qui y ont plus d’expérience. En combinant
leurs réseaux, ils créent un ‘syndicat’ d’investissement et investissent alors ensemble dans la société.
•  Situation géographique
De nombreux fonds ont une préférence géographique. Le marché comporte ainsi des investisseurs
avec un focus régional, national ou européen alors
que d’autres investissent sur un plan mondial.
Pour certaines entreprises, il peut être utile de chercher des investisseurs à l’étranger, notamment s’il
s’agit de soutenir une stratégie d’internationalisation. Dans ce cas précis, les investisseurs étrangers
apportent une connaissance spécifique du marché,
donnent accès à leurs réseaux et/ou confèrent
plus de légitimité à l’entreprise. Il ne faut toutefois
pas perdre de vue qu’il est plus difficile pour des
investisseurs étrangers d’être fort impliqués dans
le développement de l’entreprise car la distance
complique la communication. Créer un syndicat
comprenant des investisseurs locaux et étrangers
permet de combiner tous les avantages ! Enfin, il est
évident que la présence d’un investisseur national
fort est souvent une condition sine non pour attirer
un investisseur étranger. Le premier fonctionne
alors comme tête de pont pour le second.
•  Montant d’investissement
L’implication des investisseurs dans l’analyse puis
le suivi de leurs participations implique des coûts
fixes (c’est-à-dire indépendants du montant investi)
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
4.2. Identifier les investisseurs
| 17
qui sont plus faciles à récupérer si le montant investi
est important. C’est pourquoi les investisseurs en
private equity sont plus intéressés par des investissements plutôt élevés. Ainsi, il est très difficile de
trouver un investisseur professionnel pour un projet
dont le besoin en capital est inférieur à plusieurs
millions d’euros, à moins que le rendement potentiel soit réellement exceptionnel. Pour des montants
plus petits, les entrepreneurs doivent faire appel à
d’autres partenaires financiers tels que, par exemple,
les business angels (investisseurs individuels).
Afin de répartir le risque de leur portefeuille, les
fonds de private equity se fixent un montant plafond
par participation. Des fonds de petite taille souhaitent par exemple ne pas investir plus de 10% de leur
fonds dans une seule entreprise. Pour réaliser des
investissements importants, ils constituent des syndicats d’investissement où plusieurs fonds apportent
ensemble le financement nécessaire.
En Belgique, les transactions de buy-out les plus
importantes sont souvent le terrain privilégié d’investisseurs étrangers car les investisseurs belges
disposent généralement de moins de fonds. Certains
fonds étrangers disposent d’ailleurs d’une antenne
en Belgique.
4.3. Deal structuring
Même si les caractéristiques de l’entreprise correspondent aux critères d’investissement de l’investisseur, aboutir à un investissement reste un processus
qui prend beaucoup de temps, sans garantie de
réussite. Les entrepreneurs sous-estiment souvent
cette dimension.
18 |
Globalement, depuis le contact initial jusqu’à l’investissement final, le processus prend minimum
trois mois et la moyenne est en réalité de six mois.
Et il ne s’agit ici que d’une moyenne ! En fonction de
la situation économique, le processus peut prendre
bien plus de temps. Il est donc important de démarrer la recherche d’un investisseur bien avant que ne
se présente le besoin en financement.
Bien que chaque investisseur ait sa propre façon
de travailler, tous passent par les mêmes étapes.
Une fois qu’un plan d’affaires suscite de l’intérêt,
l’entrepreneur est invité pour une présentation
sommaire face à un ‘analyste’ ou ‘investment manager’. L’objectif est double : vérifier si les attentes
initiales sont confirmées et mieux connaître les
personnes derrière l’initiative. Si la première rencontre est positive, il s’ensuit une succession de
réunions où les différents aspects du plan d’affaires
sont passés en revue. L’analyste questionne surtout
les hypothèses qui sous-tendent le plan d’affaires.
Les aspects financiers sont bien entendu également
traités notamment en vue d’une valorisation initiale
qui permet de déterminer le pourcentage d’actions
auquel l’investisseur pourrait avoir droit. Suite à
ces réunions, l’investisseur confirme sa position
de principe, sous forme d’une décision dite de
‘recevabilité’. En cas de décision positive, une lettre
d’intention non-contraignante est signée et la phase
de due diligence démarre. Dans la mesure où cette
phase implique des coûts importants, l’investisseur
demande souvent une exclusivité à l’entrepreneur.
Il revient à l’entreprise d’accéder ou non à cette
demande...
• Une ‘management due diligence’ : vérification de
la motivation et de la réputation des personnes
clés au sein de l’entreprise.
• Une ‘due diligence commerciale’ : analyse des
produits et clients de l’entreprise ainsi que des
marchés où elle est active. L’analyse peut être
complétée par une étude de marché.
• Une ‘due diligence financière’ : audit des données
comptables historiques de l’entreprise, vérification de la valeur réelle des actifs, de la situation
fiscale ainsi que des autres engagements financiers.
• Une ‘due diligence juridique’ : recherche principalement axée sur les implications des litiges
en cours, les titres de propriété des actifs et la
propriété intellectuelle.
Les conclusions de la phase de due diligence peuvent le cas échéant conduire à une révision plus ou
moins profonde du plan d’affaires. Si le résultat du
due diligence est positif, les principales conditions
de l’investissement sont discutées puis résumées
dans un ‘term sheet’. C’est également à ce stade que
la valorisation de l’entreprise telle que discutée lors
des premières négociations peut encore être revue
sur base de nouvelles informations obtenues lors
du due diligence. Le term sheet contient également
une série de dispositions sur la structure financière
de l’investissement, le contrôle de l’entreprise (tel
que la composition et le fonctionnement du conseil
d’administration), la rémunération de l’équipe de
management, ainsi que les modalités d’une sortie
envisagée. Les dispositions du term sheet seront
ultérieurement détaillées dans une convention
d’investissement.
Dès qu’il y a accord sur le term sheet, on procède
au ”closing”. Les investisseurs effectuent les derniers contrôles formels et lancent les démarches
juridiques et administratives (modification des
statuts de la société, rédaction d’un contrat d’investissement détaillé incluant une convention
d’actionnaires, …).
Une fois ces démarches conclues à la satisfaction de
toutes les parties, l’investissement peut se réaliser.
Il faut garder à l’esprit que jusqu’au dernier jour, le
moindre contretemps peut bloquer le processus
d’investissement.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
Le processus de due diligence consiste en une
analyse approfondie du projet, tant par l’analyste
que par des experts technologiques, industriels,
comptables, financiers et/ou juridiques externes. Le
processus comprend notamment mais de manière
non exclusive :
| 19
NEGOCIATIONS AVEC DES BANQUES
Les banques jouent parfois un rôle crucial à côté des investisseurs en private equity, notamment lors
des opérations de Buy-Out. Si un banquier suffit pour conclure des petites transactions, les opérations de plus grande envergure s’accompagnent souvent de la formation de syndicats où plusieurs
banques financent l’opération à des conditions identiques.
Sans sous-estimer l’importance du rôle du management lors de l’explication du plan d’affaires aux
banquiers, il est évident que l’expérience importante des fonds de private equity facilite le processus. Grâce à leurs bonnes relations avec les banques, les investisseurs en private equity sont en mesure de faire une estimation assez correcte des possibilités de financement bancaire et cela facilite
bien évidemment les négociations.
Concrètement, les investisseurs en private equity et l’équipe de management choisissent les banques sur base de plusieurs critères, parmi lesquels:
•• importance de l’emprunt et de l’intérêt ;
•• flexibilité pour obtenir un financement additionnel ;
•• contraintes des clauses protectrices (“covenants”) ;
•• expérience et relation personnelle avec le banquier.
Les conventions conclues entre les investisseurs en
private equity et les entrepreneurs sont souvent
complexes. Il est clair que les entrepreneurs se
trouvent dans une position de faiblesse comparée
à celle des investisseurs plus expérimentés. En effet,
ces investisseurs professionnels ont déjà parcouru
leur courbe d’apprentissage lors d’investissements
antérieurs ou à travers leurs co-investisseurs. Ils
maitrisent donc parfaitement les clauses qui leur
offrent une protection accrue dans diverses situations. Ainsi, il n’est pas étonnant que de nombreuses
clauses aient pour objectif de protéger l’investisseur
et de transférer une partie des risques chez l’entrepreneur. Pour les entrepreneurs peu expérimentés
en la matière, il est important de se renseigner et
20 |
de bien s’entourer avant de signer toute convention
d’investissement. Toutefois, il est également important de se rendre compte que des conventions,
quelle que soit leur sophistication, ne pourront
jamais résoudre tous les problèmes possibles à
venir. D’où l’importance de développer une relation
de confiance qui doit être respectée tant par l’entrepreneur que par l’investisseur. Le processus de due
diligence offre à l’entrepreneur l’opportunité de voir
si l’investisseur mérite sa confiance. Il est également
recommandé que chaque entrepreneur fasse sa due
diligence sur l’investisseur. Dans cette perspective, il
est utile de rencontrer d’autres entrepreneurs qui
ont déjà travaillé avec ce dernier. L’expérience sera
certainement révélatrice.
De nombreux conseillers jouent également un
rôle crucial dans le processus d’investissement et
travaillent à côté de l’équipe de management et des
investisseurs.
Le comptable et/ou le consultant financier sont souvent le premier point de contact de l’entrepreneur.
Ils apportent leur aide principalement au niveau de
l’optimisation et de la traduction de la stratégie de
l’entreprise dans le plan d’affaires. De bons comptables et consultants attirent l’attention sur nombre
d’aspects critiques du plan d’affaires et sur son
caractère réaliste ou irréaliste. Ils aident également
l’entrepreneur dans sa recherche d’investisseurs au
profil souhaité et organisent éventuellement des
“concours de beauté”.
Les comptables et consultants forment aussi un
point de contact central pour les investisseurs lors
du processus de due diligence. Ils participent ou
réalisent la valorisation de l’entreprise, organisent
la structure de l’investissement et anticipent
d’autres points contractuels importants. Ils continuent à tenir un rôle tout aussi important lors des
négociations avec les banques. En effet, il ne faut
pas uniquement négocier le montant des crédits et
le taux d’intérêt associé, il convient également de
négocier les clauses de garantie. Dans la mesure où
ces clauses (telle que, par exemple, l’obligation de
maintenir un certain niveau de fonds de roulement
net) peuvent avoir un impact important sur la gestion ultérieure, il est essentiel d’en maitriser toutes
les implications.
Les avocats et fiscalistes sont pour leur part en
grande partie responsables des aspects légaux de
l’investissement et de l’optimalisation des aspects
fiscaux de la transaction. Comme déjà indiqué,
les investisseurs en private equity ont recours à
des conventions complexes. Les avocats aident les
entrepreneurs à bien saisir tous les aspects de ces
conventions.
L’accès à des conseils professionnels n’est pas
gratuit ; les honoraires peuvent être élevés. C’est
pourquoi il importe d’avoir une vue claire des coûts
liés aux différentes missions confiées aux experts
externes. De plus, il est également important de se
mettre d’accord au préalable sur la partie qui paiera
les frais du due diligence approfondi.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
.4. Le rôle de conseillers professionnels dans le
4
processus d’investissement
| 21
5
INTRODUCTION AUX PRINCIPALES
TECHNIQUES DE VALORISATION
La valorisation de l’entreprise constitue une étape
incontournable dans le processus d’investissement
en private equity car elle seule permet de déterminer le pourcentage d’actions auquel les investisseurs
ont droit en échange de leur investissement.
Comme la valorisation de n’importe quel bien
économique, la valeur d’une société est avant tout
déterminée par l’ampleur des flux de trésorerie (en
Les free cash flows correspondent aux moyens
générés par les opérations de l’entreprise et sont
dés lors disponibles pour être distribués à ses partenaires financiers (actionnaires et créanciers) sans
mettre en péril la continuité des activités (c’est-àdire en tenant compte des investissements et de la
constitution du fonds de roulement nécessaires aux
opérations futures de l’entreprise).
anglais, ‘cash flow’) que l’entreprise générera dans
le futur. Elle dépend également du niveau de risque
associé à ces flux. En effet, plus le risque est élevé,
plus l’investisseur exige un rendement potentiel important. Enfin, la valorisation dépend également du
profil de celui qui procède au calcul. Par exemple,
nous avons déjà évoqué le fait qu’un investisseur
industriel peut reconnaitre une valeur stratégique à
une entreprise (par exemple liée à son savoir-faire,
à sa technologie et aux synergies attendues) et la
valorise donc plus qu’un investisseur financier.
Dans la suite de ce chapitre, nous nous limiterons à
une synthèse des techniques utilisées afin de valori-
CALCUL DES FREE CASH FLOWS:
Résultat d’exploitation avant impôts (en anglais :
Earnings Before Interest and Taxes ou EBIT)
- Impôts opérationnels (EBIT x taux d’imposition)
+ Amortissements et réductions de valeur
= Cash flow opérationnel
- Investissements nets
-A
ugmentation (parfois diminution) du besoin
en fonds de roulement
= Free Cash Flow
ser des sociétés établies.
5.1. La méthode du ‘Discounted Cash Flow’ (DCF)
La méthode DCF est la plus utilisée pour valoriser
une société établie (en français on parle de ‘Valeur
Actuelle Nette’ ou VAN). Selon cette méthode, la
valeur d’une entreprise est égale à la valeur actualisée de tous les flux de trésorerie disponibles futurs,
également appelés ‘free cash flows’ (FCF) :
∞
Valeur de l’entreprise =
Σ
FCFt
t
t=1 (1 + R)
=
FCF1
(1 + R)1
Comme les free cash flows sont disponibles pour
tous les financiers, le taux de rendement utilisé
pour calculer la VAN tient compte aussi bien du taux
de rendement des créanciers (c’est-à-dire le taux
d’intérêt moyen des dettes après impôts) que du
taux de rendement attendu par les actionnaires ; on
parle dès lors du coût moyen pondéré du capital ou,
en anglais, de ‘Weighted Average Cost of Capital’
(WACC).
+
FCF2
(1 + R)2
+
FCF3
(1 + R)3
Où FCF = Free Cash Flow et R = taux de rendement attendu par les partenaires financiers.
22 |
+ ...
Le WACC est calculé comme suit:
WACC = Le taux de rendement des actionnaires x
FP
FE
+ Le taux d’intérêt des dettes x (1 - t) x
FT
FT
Au niveau du rendement attendu par les investisseurs en private equity, il faut bien comprendre qu’il
est supérieur à celui exigé par les investisseurs en
bourse, et ce pour plusieurs raisons. D’une part, audelà du risque systématique (c’est-à-dire, le risque
lié à l’ensemble de l’activité de l’entreprise), les investisseurs en private equity exigent une prime pour
compenser le manque de liquidité de leur investissement. D’autre part, en plus du rendement de leurs
capitaux, ils attendent également un rendement
complémentaire pour rémunérer leur implication
dans la gestion de l’entreprise. En effet, alors que les
investisseurs boursiers sont essentiellement passifs
et suivent leurs actions d’assez loin, les investisseurs
en private equity sont actifs au sein de l’entreprise, y
consacrent du temps et fournissent des efforts qu’ils
doivent valoriser. Ces différents éléments expliquent
pourquoi le rendement demandé par des investisseurs en private equity pour financer des projets de
croissance et des buy-outs se situe généralement
entre 25% et 35% sur base annuelle.
Au niveau du coût des fonds externes, il correspond
au taux d’intérêt moyen que l’entreprise devrait
payer si elle avait signé de nouveaux emprunts aux
caractéristiques similaires au moment de la valorisation. Le coût des fonds externes est multiplié par (1-t)
car les paiements d’intérêt comportent un avantage
fiscal du fait de leur déductibilité pour des sociétés
en bénéfice (les sociétés en perte ne peuvent pas en
profiter et dans ce cas, ‘t’ est égal à zéro).
Enfin, il est logique de considérer que des flux de trésorerie futurs ont moins de valeur que ces mêmes
flux s’ils entrent aujourd’hui. C’est pourquoi la valeur
actuelle des flux de trésorerie futurs est calculée en
les actualisant (ou escomptant), c’est-à-dire en les
ramenant à leur valeur actuelle. La somme de tous
les flux de trésorerie disponibles futurs actualisés
reflète la valeur de l’entreprise entière, c’est-à-dire
celle qui revient à tous ses financiers.
Prévoir des flux de trésorerie plus ou moins éloignés
dans le temps est non seulement très complexe
mais aussi souvent peu fiable. C’est pourquoi la
valorisation d’une entreprise selon la méthode DCF
est souvent divisée en deux phases.
Lors de la première phase dite ‘explicite’, un calcul
détaillé de free cash flows est réalisé pendant un
nombre (représenté par ‘C’) d’années raisonnablement maitrisables.
Lors de la seconde phase, on part de l’hypothèse
que le dernier free cash flow, celui de l’année dite
‘C’, continuera à croître à un taux constant jusqu’à
l’infini. La valeur de tous les flux générés après la
phase explicite (estimée en année C) est appelée
la ‘continuing value’ et se calcule selon la formule
suivante:
Continuing valuec =
FCFc (1 + g)
R-g
Où g = taux de croissance annuel prévu des FCF
R = rendement attendu par les investisseurs
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
Où FP = Fonds Propres; FE = Fonds Externes (empruntés); FT = Fonds Totaux = FP + FE;
t = taux d’imposition moyen.
| 23
Il importe de traiter la ‘continuing value’ avec prudence notamment en ne surestimant pas Le taux de
croissance (g). Concrètement, il est conseillé de ne
pas dépasser le taux de croissance nominal du PNB
(Produit National Brut). En effet, choisir une valeur
supérieure revient à supposer que l’entreprise dépassera un jour toute l’économie !
La valeur totale de l’entreprise selon la méthode
DCF décomposée en deux phases est donc égale à la
somme de valeur actuelle des flux de trésorerie pendant la période explicite et de la valeur actualisée de
la ‘continuing value’ :
c
Valeur de l’entreprise =
Σ
FCFt
Continuing valuec
+
( 1 + R )t
( 1 + R )c
t=1
VALEUR DE L’ENTREPRISE (“ENTERPRISE VALUE”) VERSUS VALEUR DES
CAPITAUX PROPRES (“EQUITY VALUE”)
Dans le texte nous avons toujours mis l’accent sur le calcul de la valeur de l’entreprise, c’est-àdire la valeur des activités de l’entreprise qui revient à tous ses financiers, donc aussi bien aux
actionnaires qu’aux créanciers. La valeur des capitaux propres, c’est-à-dire celle qui revient aux
seuls actionnaires, est inférieure à la valeur totale de l’entreprise, car ceux-ci doivent en premier
lieu rembourser les dettes contractées.
La valeur des capitaux propres est donc calculée de la façon suivante:
Valeur des capitaux propres = valeur de l’entreprise – valeur des dettes financières
Remarque :
Les actions dites ‘ordinaires’ et des dettes financières ‘traditionnelles’ ne sont pas les seuls
moyens financiers mobilisables par une entreprise. Celle-ci peut par exemple recourir à des
obligations convertibles, des actions préférentielles, des obligations avec warrant, etc. Pour déterminer la valeur des actions d’une entreprise qui se financerait de la sorte, la valeur de tous
les instruments financiers utilisés doit être déduite de la valeur totale de l’entreprise. Il s’agit
souvent d’un exercice complexe. Nous renvoyons à la littérature spécialisée pour plus de détails.
Dans la mesure où la valorisation d’une entreprise
reste un exercice difficile et subjectif, il est courant
d’avoir recours à plusieurs méthodes. Celle des DCF
24 |
constitue en général le point de départ mais d’autres
méthodes peuvent être mobilisées pour tester la
fiabilité de la valorisation.
La méthode dite des ‘multiples’ se fonde sur le principe d’une comparaison entre l’entreprise à valoriser
et d’autres entreprises issues d’un groupe de sociétés
similaires ou comparables (on parle de ‘groupe de
référence’ ou de ‘peer group’). Le calcul se base alors
sur l’utilisation d’un rapport ou ratio, appelé ‘multiple’, entre la valeur de l’entreprise et une mesure de
performance financière. Le rapport valeur-bénéfice
ou le rapport valeur-flux de trésorerie opérationnel
(valeur-EBITDA ) sont deux mesures couramment
utilisées dans ce cadre.
Le principe qui sous-tend la méthode des multiples est
que si l’on observe sur le marché des valorisations de
sociétés comparables à, par exemple, une moyenne
de 7 fois leur EBITDA au moment de la transaction,
alors la valeur de la société à valoriser se situe également aux alentours de 7 fois son EBITDA actuel.
Bien entendu, ceci ne vaut que si la transaction de
référence se fait au juste prix et si la société à valoriser
est totalement semblable aux sociétés du groupe de
référence.
Concrètement, si le flux de trésorerie opérationnel est
utilisé comme référence, alors la valeur de l’entreprise
(“enterprise value” ou V) est déterminée comme suit:
V=
Valeur
Flux de trésorerie opérationnel
(du groupe de référence)
5.3. Sujets de valorisation spécifiques
•• L’effet du taux d’endettement sur la valorisation
Dans des transactions de (leveraged) buy-out,
l’opération est financée avec un endettement proportionnellement élevé qui influence fortement la
valeur de l’entreprise. C’est pourquoi les éléments
suivants doivent être pris en compte lors de la valorisation d’entreprises fortement endettées.
Tout d’abord, il est important de bien comprendre
la relation entre le taux d’endettement et la valeur
de l’entreprise. D’une part, une augmentation
du taux d’endettement génère un avantage fiscal
additionnel. D’autre part, une entreprise qui paie
moins d’impôts dispose d’un flux de trésorerie plus
important. Toutefois, le taux d’endettement ne peut
pas monter à l’infini car le risque d’une défaillance
financière progresse en parallèle. Donc, en cas d’endettement croissant, il convient de tenir compte du
coût d’une faillite éventuelle. La valorisation des
sociétés avec un taux d’endettement important
constitue dès lors un exercice complexe car il est
difficile d’estimer les coûts d’une éventuelle faillite.
Ensuite, le taux d’endettement ne reste jamais
constant à travers le temps. Dans les transactions
marquées par un endettement très élevé, le taux
d’endettement va typiquement diminuer significativement du fait des remboursements exigés par
les créanciers. Le coût moyen pondéré du capital
(WACC) utilisé dans le modèle DCF doit donc refléter ces changements dans la structure du capital de
l’entreprise.
* Flux de trésorerie opérationnel
(de l’entreprise à valoriser)
2
E BITDA = earnings before interest, taxes, depreciation and
amortization, ou flux de cash opérationnel.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
5.2. La méthode des multiples
| 25
• Investissements en fonds de roulement
(“working capital”)
Quand une entreprise croît, elle mobilise de plus
en plus de moyens dans son cycle opérationnel (par
exemple, ses stocks ou créances commerciales augmentent), ce qu’on appelle le besoin en fonds de
roulement net (qui tient aussi compte des crédits
accordés par les fournisseurs). Ainsi, les entreprises
qui ambitionnent une croissance rapide, doivent
tenir compte de la croissance de leur besoin en
fonds de roulement qui absorbe donc une partie
des flux de trésorerie opérationnels. Les free cash
flows doivent donc être revus en fonction de cette
croissance.
•  Relativité du prix
Nous souhaitons terminer ce chapitre par une
remarque importante. La valeur de l’entreprise obtenue par calcul ne correspond pas toujours au prix
réel payé pour les actions de l’entreprise. En effet,
26 |
ce dernier prix est le fruit d’une négociation entre
entrepreneurs et investisseur. Il est donc influencé
par des facteurs subjectifs ou spécifiques à la négociation. Citons à titre d’exemples de ces facteurs
importants le pouvoir de négociation des parties ou
les attentes de l’entrepreneur vis-à-vis de l’investisseur. Si l’entrepreneur estime que l’investisseur
en private equity contribuera significativement au
développement de son entreprise, il peut accepter
d’une valorisation plus basse.
Quoi qu’il en soit, il est inconcevable de commencer
les négociations sans une préparation préalable
rigoureuse.
Dans ce chapitre nous avons abordé les méthodes
classiques les plus fréquentes. Pour ceux qui
souhaitent creuser ce sujet, nous avons inclus un
nombre de références complémentaires dans la
bibliographie.
INSTRUMENTS FINANCIERS UTILISES PAR
LES INVESTISSEURS EN PRIVATE EQUITY
Les investisseurs en private equity recourent à des
combinaisons d’instruments financiers dont les
entrepreneurs ne comprennent pas toujours bien
toutes les implications. Ce chapitre en donne un
aperçu. La figure 6.1. reprend les instruments les
plus fréquents et met en avant la relation entre le
niveau de risque et le rendement. Nous commen-
cerons par présenter les deux extrêmes: les dettes
classiques et le capital par actions ordinaires. Nous
aborderons ensuite les instruments plus complexes
dits ‘mezzanine’ car leur niveau de risque et de rendement attendu se situent entre le financement par
dettes classiques (moins risqué) et le financement
par actions (plus risqué).
Figure 6.1.: Instruments financiers selon le profil risque-rendement
Rendement
attendu
Capital par actions
ordinaires
Financements
‘mezzanine’
Capital par actions
préférentielles
Dettes subordonnées
Dettes avec ‘equity
kickers’
Les dettes classiques
Risque
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
6
| 27
6.1. Les dettes classiques
Se financer par dettes revient à s’engager à payer
des intérêts à des échéances déterminées ainsi
qu’à rembourser le montant emprunté (on parle du
‘principal’ de la dette) selon un calendrier précis.
Les dettes classiques ne sont pas toujours accompagnées de garanties même si ces dernières sont
souvent exigées par les créanciers, notamment les
banques. Il faut également garder à l’esprit que les
créanciers n’ont pas de droit de vote lors de l’assemblée générale.
La ‘hiérarchie des dettes’ détermine la priorité avec
laquelle elles sont remboursées. Les créanciers
privilégiés sont les premiers à être remboursés,
ensuite viennent les créanciers ordinaires, suivis par
les créanciers subordonnés. Les créanciers passent
toujours avant les actionnaires et courent donc
moins de risque. C’est pourquoi ils se contentent
d’un rendement inférieur.
Lors de transactions de buy-out, on mobilise souvent
un endettement important qui confère dès lors un
rôle crucial aux banques. En effet, il est indispensable, tant pour le management que pour les investisseurs en private equity, de connaître le montant
de dettes dont l’opération peut bénéficier car cet
élément est déterminant pour calculer le solde en
capital nécessaire pour racheter la société cible.
Les fournisseurs de dettes appliquent différents
critères pour déterminer l’endettement maximal
qu’elles sont prêtes à accorder à une société. Les
plus fréquents sont :
28 |
•• Les ratios de couverture. Afin d’estimer le
risque qu’une entreprise ne soit plus capable de
rembourser ses dettes, on compare souvent le
résultat opérationnel avant impôts (ou alternativement le flux de trésorerie opérationnel) avec
les paiements d’intérêt et le remboursement
du principal des dettes en cours. Afin de limiter
leur risque, les créanciers incluent régulièrement dans les contrats de crédit l’obligation de
respecter de ratios de couverture minimum.
•• Les capitaux propres de l’entreprise. Les entreprises financées avec plus de capitaux propres
résistent mieux à d’éventuels problèmes internes
ou autres chocs externes. En d’autres termes,
les capitaux propres jouent un rôle tampon. Le
ratio minimum de capitaux propres exigé sur
fonds totaux varie de 20% pour des sociétés
immobilières à 40% pour des sociétés de production. Notons qu’à côté du capital par actions
ordinaires, d’autres instruments financiers (qui
en cas de liquidation seront remboursés juste
après les dettes) peuvent être pris en compte
pour calculer le ratio de capitaux propres. On
les nomme souvent ‘quasi’ fonds propres.
•• La présence d’actifs pouvant servir de garanties.
Il importe également de savoir si l’entreprise
dispose d’actifs qui pourraient être vendus au cas
où elle ne serait pas en mesure de rembourser
ses dettes. Pour évaluer la valeur des garanties,
les créanciers utilisent divers coefficients de
pondération en fonction de la liquidité des actifs
et de la prévisibilité de leur valeur de revente.
6.2. Le capital par actions ordinaires
Les (simples) actionnaires détiennent les actions de
l’entreprise et en sont à ce titre les copropriétaires.
Ils disposent des droits de vote lors de l’assemblée
générale des actionnaires et peuvent percevoir des
dividendes si la situation le permet. Ils assument le
risque principal de l’entreprise et sont les derniers
à être payés en cas de faillite. Leurs droits de liquidation sont donc assez faibles. Ainsi, lors d’une
faillite, les moins-values importantes associées à
la liquidation des actifs et les frais liés à l’arrêt des
opérations font qu’il ne reste souvent peu voir plus
du tout de trésorerie à distribuer après le remboursement des créanciers. On affirme donc parfois que
les actionnaires sont des propriétaires résiduels car
seule la valeur créée par une entreprise au-delà du
montant de ses dettes leur revient.
Exemple de distribution de la valeur d’entreprise entre
actionnaires et créanciers
Supposons qu’une entreprise soit financée avec une combinaison de dettes (valeur: 1500) et de capitaux
propres. La figure 6.2. illustre l’évolution de la répartition de la valeur de l’entreprise entre ses créanciers
et actionnaires.
Si la valeur de l’entreprise est supérieure à 1500, tous les créanciers sont intégralement remboursés
(1500) et l’excédent revient aux actionnaires. En d’autres termes, si la valeur d’une entreprise est supérieure à la valeur des dettes, la valeur additionnelle va entièrement aux actionnaires. Le rendement des
actionnaires n’a donc pas plafonné.
Par contre, si la valeur de l’entreprise est inférieure à 1500, toute la valeur de l’entreprise est octroyée
aux créanciers et il ne reste rien pour les actionnaires. Dans ce cas de figure, les créanciers ne sont pas
non plus remboursés intégralement.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
De plus, toujours afin de réduire le risque de problèmes financiers ou de défaillance, la plupart des
conventions de dettes contiennent également des
clauses qui imposent des restrictions à l’entreprise,
en anglais on parle de ‘covenants’. Il est ainsi fréquent
d’obliger le preneur de crédit à maintenir un niveau
minimum de fonds de roulement net ou de limiter la
distribution de dividendes.
Le financement par dette présente plusieurs
avantages : les charges d’intérêts sont fiscalement
déductibles et l’endettement génère un effet de
levier financier qui peut augmenter le rendement des
fonds propres tant que le rendement opérationnel de
l’entreprise est supérieur au coût des dettes. Il ne faut
toutefois pas perdre de vue que le principal désavantage du financement par dettes est que le risque augmente proportionnellement au taux de l’endettement
du fait des obligations de paiements fixes qui peuvent
conduire à la faillite quand les choses tournent mal.
3
On émet parfois des actions sans droit de vote, c’est-à-dire qui ne donnent pas droit à un vote lors de l’assemblée générale.
Notons cependant que cette technique est rarement utilisée.
| 29
Figure 6.2.: Combinaison de dettes et de capital par
actions ordinaires
3000
2500
2000
1500
1000
500
0
0
500
1000 1500 2000 2500 3000 3500
Dettes classiques
Valeur totale
de l’entreprise
Capital par actions ordinaires
6.3. Les financements dits ‘mezzanine’
Les financements ‘mezzanine’ comprennent de nombreux instruments financiers. Différentes institutions
telles que les filiales private equity des banques, les
banques elles-mêmes, des institutions spécialisées
ou des institutions publiques en proposent. Il arrive
régulièrement que les investisseurs en private equity
utilisent des combinaisons de capital par actions
ordinaires et de financements ‘mezzanine’.
Nous donnons ci-après un aperçu de quelques
formes fréquentes de financement “mezzanine”.
• Les actions préférentielles
Les actions préférentielles combinent les caractéristiques des actions ordinaires et des obligations.
30 |
Comme les actions ordinaires, elles donnent droit à
un vote par action et à des dividendes. Toutefois, en
cas de liquidation, elles passent après les dettes mais
avant les actions ordinaires. Elles sont donc moins
risquées que ces dernières.
En pratique, les investisseurs en private equity
demandent presque systématiquement des actions
préférentielles alors que les entrepreneurs et l’équipe
de management reçoivent des actions ordinaires.
Outre la priorité en cas de liquidation, l’avantage le
plus fréquent des actions préférentielles est le droit
à des dividendes préférentiels. Ces derniers ont très
souvent un caractère cumulatif au sens où les dividendes préférentiels non payés sont reportés d’une
année à l’autre jusqu’à ce qu’ils soient versés. Ainsi,
avant que l’entreprise ne puisse distribuer un dividende aux actionnaires ordinaires, elle doit d’abord
verser les dividendes préférentiels. Le paiement d’un
dividende préférentiel relève de la compétence de
l’assemblée générale des actionnaires, sur proposition du conseil d’administration. Le non-paiement
d’un dividende préférentiel n’est donc pas une
infraction légale et ne peut donc pas être qualifié
de défaillance de paiement pouvant par exemple
entrainer une faillite.
En règle générale, les actions préférentielles participent aux plus-values créées par l’entreprise.
Toutefois, en fonction de la façon dont elles y
participent, on peut distinguer trois types d’actions
préférentielles: le capital par actions préférentielles
ordinaires, les actions préférentielles convertibles et
les actions préférentielles participatives et convertibles.
Les actions préférentielles ordinaires sont la forme la
plus simple d’actions préférentielles. Elles bénéficient
d’un dividende fixe, souvent cumulatif, mais elles
ne participent pas au partage des plus-values. On
y ajoute parfois une possibilité de remboursement
anticipé, par exemple à des échéances déterminées
ou lors de certains évènements tels qu’une introduction en bourse. Cette modalité aide l’investisseur à
récupérer son investissement plus rapidement.
Supposons que le management d’une société décide de réaliser un buy-out et paie un montant de
2000 lors de l’acquisition. Pour financer cette transaction, un investisseur en private equity investit
1500 et les 500 restants sont apportés par le management. Partons de l’hypothèse que l’investisseur
achète des actions ordinaires, il obtient 75% du capital et le management en détient alors 25%. La
figure 6.3. représente la répartition de la valeur de l’entreprise lors de la sortie. Elle montre que la
valeur d’exit doit se trouver au dessus de 2000 avant que l’investisseur en private equity ne récupère
son investissement initial. En effet, 75% de 2000 est égal à 1500.
Figure 6.3.: Capital par actions ordinaires
3500
3000
2500
2000
1500
1000
500
0
0
500
1000 1500 2000 2500 3000 3500
Capital par actions ordinaires
(25%)
Valeur totale
de l’entreprise
Capital par actions ordinaires
(75%)
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
Capital par actions préférentielles ordinaires: Exemple
| 31
Il est toutefois plus réaliste de supposer que l’investisseur en private equity reçoive des actions
préférentielles. Supposons qu’après la transaction, l’investisseur détienne du capital par actions
préférentielles ordinaires d’une valeur nominale de 1500 et 50% du capital sous forme d’actions
ordinaires. Le management détient les 50% restants du capital par actions ordinaires. La figure 6.4.
représente la répartition de la valeur de l’entreprise lors de la sortie. Dans le cas d’une valeur de sortie inférieure ou égale à 1500 (après remboursement des autres créanciers), la valeur totale revient
aux actionnaires préférentiels et les actionnaires ordinaires ne reçoivent rien. En cas de valeur de
sortie supérieure à 1500, par exemple 2000, les premiers 1500 reviennent aux actionnaires préférentiels. Les 500 restants sont divisés proportionnellement entre tous les actionnaires ordinaires.
Dans le cas présent, l’investisseur en private equity touche donc 1500 + 50% de 500 = 1750, soit
plus que ce qu’il aurait obtenu dans la situation où il n’aurait détenu que des actions ordinaires.
Observez que si la valeur de sortie est supérieure à 3000, l’investisseur en private equity gagne plus
dans la première situation (75% du capital par actions ordinaires) que dans la deuxième (Capital par
actions préférentielles ordinaires et 50% de capital par actions ordinaires). Quand on compare les
figures 6.3. et 6.4., on observe clairement que l’investisseur a déplacé une partie du risque vers le
management. Si la valeur de sortie est égale à 1500, il récupère tout son investissement. Si la sortie
s’organise à une valeur inférieure, le management ne touche rien et l’investisseur récupère une
partie de son investissement.
Figure 6.4.: Capital par actions ordinaires et par actions préférentielles ordinaires
3500
3000
2500
2000
1500
1000
500
Valeur totale
de l’entreprise
0
0
500 1000 1500 2000 2500 3000 3500
Capital par actions ordinaires
Capital par actions préférentielles
(50%)
ordinaires (valeur nominale: 1500) +
Capital par actions ordinaires (50%)
Valeur totale de l’entreprise
32 |
Les actions préférentielles convertibles sont des actions préférentielles grâce auxquelles son propriétaire
bénéficie d’une option de convertion de ses actions
préférentielles en actions ordinaires. L’actionnaire
préférentiel a donc le choix de percevoir son rendement soit en obtenant le remboursement de la valeur
nominale des actions préférentielles, soit en participant aux plus-values après la conversion en actions
ordinaires. Il est évident que si la valeur de conversion
est supérieure à la valeur nominale des actions préférentielles, les actionnaires préférentiels opteront
pour la conversion. Les actionnaires préférentiels sont
souvent obligés de convertir leurs actions préférentielles en actions ordinaires si la société s’introduit en
bourse car les marchés de capitaux publics préfèrent
les sociétés dont la structure financière est simple et
transparente, c’est-à-dire composée d’actions ordinaires et de dettes traditionnelles.
Nous continuons avec l’exemple présenté ci-avant pour illustrer la différence entre les actions préférentielles ordinaires couplées à des actions ordinaires et les actions préférentielles convertibles. Supposons que
l’investisseur en private equity reçoive des actions préférentielles convertibles avec une valeur nominale de
1500 ainsi que l’option de convertir les actions préférentielles en échange de 50% des actions ordinaires. Si
la valeur d’entreprise est inférieure ou égale à 3000, l’investisseur ne va logiquement pas convertir et préférera récupérer la valeur nominale des actions préférentielles. Par contre, dès que la valeur de l’entreprise
sera supérieure à 3000, il convertira ses actions préférentielles en actions ordinaires pour profiter du
rendement supérieur. La figure 6.5. illustre la répartition de la valeur de l’entreprise entre les actionnaires
ordinaires et préférentiels.
Figure 6.5.: Capital par actions ordinaires et par actions préférentielles convertibles
3500
3000
Capital par actions
préférentielles convertibles
(valeur nominale: 1500) + 50% capital
par actions ordinaires lors de la conversion
2500
2000
1500
Capital par actions ordinaires
1000
500
0
0
500
1000 1500 2000 2500 3000 3500
Valeur totale
de l’entreprise
La figure ci-dessus indique bien que dès le moment où les investisseurs en private equity ont récupéré
leur investissement initial (1500), le management participe au partage de la valeur. Il parvient d’ailleurs à
rattraper les investisseurs à partir d’une valeur de 3000.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
Capital par actions préférentielles convertibles: Exemple
| 33
Il existe également des actions préférentielles
convertibles participatives. Elles sont comparables
aux actions préférentielles convertibles mais prévoient en plus, en cas de sortie, une participation
dans les bénéfices avec les actionnaires ordinaires.
A coté des préférences purement financières évoquées ci-dessus, les actions préférentielles peuvent
également conférer des privilèges de contrôle qui
sont très importants. Grâce à ce type de préférences,
les actionnaires préférentiels - dans la pratique les
investisseurs externes - ont par exemple le droit de
nommer un nombre d’administrateurs supérieur à
celui qui leur reviendrait sur base de leur participation proportionnelle. Un autre privilège fréquent
est l’octroi de droits de veto aux administrateurs
représentant les actionnaires préférentiels. Ces
droits de veto portent par exemple sur les décisions
relatives à des investissements importants ou sur la
rémunération des dirigeants. Enfin, les actionnaires
préférentiels peuvent aussi recevoir des droits
spéciaux tels que le droit de vendre toute la société
s’il n’y a pas de sortie avant une date déterminée.
Ces différentes modalités donnent aux investisseurs
plus de contrôle que leur participation en actions ne
laisse paraître.
• Les dettes subordonnées
En cas de liquidation, les dettes subordonnées sont
remboursées après les dettes privilégiées et ordinaires mais avant les actions préférentielles et ordinaires. Du point de vue des créanciers privilégiés et
ordinaires, elles peuvent être perçues comme des
capitaux propres qui renforcent la structure financière de l’entreprise.
34 |
Dans la mesure où ce type de dettes comporte plus
de risques que des dettes ordinaires, elles exigent
naturellement un rendement plus élevé.
• Les obligations convertibles
Une obligation convertible donne à son détenteur
le droit (mais pas l’obligation) de demander la
conversion de l’obligation en un nombre préalablement fixé d’actions et ce endéans une période de
conversion préalablement fixée. Elle équivaut à la
combinaison d’une obligation classique et d’une
simple option pour acheter des actions. Pour exercer son option, l’investisseur ne paie rien en cash
mais remet l’obligation en échange. Comme cette
option peut avoir une valeur importante, le taux
d’intérêt nominal d’une obligation convertible est
inférieur à celui d’une obligation comparable sans
option de conversion. De même, la valeur réelle
d’une obligation convertible peut être substantiellement plus élevée qu’une obligation normale (dont
le prix dépend du coupon) du fait de la valeur de
l’option de conversion.
Notons que l’émission d’obligations convertibles
ne peut toutefois pas être considérée comme une
augmentation de capital différée car la société n’est
jamais sûre que l’emprunt sera converti.
• Les obligations avec warrant
Des warrants peuvent être annexés à une obligation. Ils permettent d’acheter des actions de la
société à un prix fixé à l’avance. Les warrants sont
utilisés comme incitants que l’investisseur reçoit en
complément de ses obligations. Ils prennent de la
valeur si la valeur de l’action monte. Cet avantage
permet à l’entreprise émettrice de négocier un taux
d’intérêt plus bas que pour une obligation simple.
obligations à split-coupon, il y a un coupon d’intérêt
peu élevé durant les premières années et un coupon à intérêt plus élevé pour les années ultérieures.
Les obligations avec payment-in-kind permettent à
l’émetteur durant les premières années de payer
de l’intérêt sous forme d’instruments complémentaires (par exemple avec de nouvelles obligations
ou actions) et prévoient ensuite le paiement des
intérêts sur toutes les obligations émises. Dans le
cas des obligations ‘reset’, on prévoit d’abord un
paiement d’intérêt temporairement assez bas, puis
un recalcul du taux d’intérêt selon le niveau où
l’obligation est négociée ‘a pari’ sur le marché.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
• Les dettes subordonnées avec remboursement
différé
Si l’entreprise entrevoit le risque d’être à court de
liquidités à court terme, les dettes subordonnées
avec remboursement différé peuvent être utilisées
pour alléger le poids des remboursements dans un
premier temps. Différentes modalités sont envisageables : obligations à ‘coupon zéro’, obligations à
‘split coupon’, instruments avec ‘payment-in-kind’
et obligations ‘reset’. Dans le cas d’obligations à
coupon zéro, il n’y a pas de paiement d’intérêt
mais la valeur nominale est payée à l’échéance. La
rémunération de l’investisseur se trouve dans la
valeur très basse d’émission de l’obligation. Chez les
| 35
7
LE RÔLE DES INVESTISSEURS EN PRIVATE
EQUITY APRÈS L’INVESTISSEMENT
investissement. Dans la suite de ce chapitre nous
dresserons un aperçu des sources de création de
plus-values sur actions, une description du modus
operandi des investisseurs en private equity au profit
des entreprises de leur portefeuille et, finalement, un
état des lieux de la littérature académique sur la création de valeur par les investisseurs en private equity.
Le fait que les investisseurs en private equity attendent un rendement annuel de, par exemple, 20% ne
signifie pas qu’ils s’attendent à un dividende annuel
égal à 20% du montant investi. Au contraire, les flux
de trésorerie réalisés par l’entreprise du fait de ses
activités opérationnelles sont affectés, en premier
lieu, au remboursement des dettes (intérêts et
amortissement du capital) puis, en second lieu, à
la croissance et au développement de l’entreprise.
Des dividendes ne sont distribués que si la trésorerie
résiduelle le permet.
7.1. Sources de création de valeur
Lors de la vente de tout ou partie d’une entreprise,
l’acheteur procède à une nouvelle valorisation de
celle-ci. La figure 7.1. donne un aperçu des différentes sources de création de plus-value qui sont
détaillées ci-après.
Le rendement des investisseurs se réalise avant tout
sous forme de plus-values réalisées lors de la vente
des actions, en moyenne de 3 à 6 ans après leur
Figure 7.1. Sources de création de valeur
Valeur d’entreprise
Valeur d’entreprise = Multiple X EBITDA
Dettes
Capitaux
propre
Capitaux
propres
Entrée
• Multiple plus élevé
• Hausse de l’EBITBA
• Temps
• Réduction endettement
36 |
Dettes
Sortie
Temps
Source: Présentation Herman Daems (Gimv) “Will Private Equity and Venture Capital change Europe?”
La génération de trésorerie par les opérations est le
principal déterminant de la valeur d’une entreprise.
Plus elle est élevée, plus la valeur est élevée. Il existe
différentes façons d’y arriver: soit en réalisant un
meilleur résultat opérationnel, soit en investissant
moins. Ajoutons qu’un meilleur résultat opérationnel peut être atteint:
•• en réalisant des volumes de vente plus élevés à
des prix de vente et marges identiques;
•• en réalisant des marges brutes plus élevées,
grâce à des prix de vente plus élevés, ou en
négociant des prix d’achat plus bas;
•• en réduisant les coûts par davantage d’efficacité.
Les investisseurs en private equity suivent bien entendu de près et optimisent chacune de ces pistes.
Ils essaient également d’optimaliser la structure du
bilan de l’entreprise en procédant à une évaluation
en profondeur de tous ses actifs. Par exemple, les
actifs non productifs sont vendus et le besoin en
fonds de roulement est optimisé (réduction des
délais accordés aux clients, rotation plus rapide des
stocks, …).
Revoir à la hausse les perspectives de croissance
A côté de l’optimisation de la trésorerie, une plusvalue peut également résulter d’une hausse des
perspectives de croissance. Celles-ci peuvent résulter du développement de nouveaux produits ou de
nouveaux marchés et ont un impact positif sur le
continuing value.
Par ailleurs, in fine, la valeur augmente quand le
rendement attendu par les actionnaires diminue.
Cela peut être le cas notamment quand l’entreprise
devient plus mature. Ainsi, lors d’une introduction
en bourse, le rendement attendu par les nouveaux
actionnaires est généralement inférieur à celui des
investisseurs en private equity car (a) leurs actions
sont liquides, (b) leurs frais de transactions sont
beaucoup moins élevés et (c) ils sont des investisseurs passifs qui n’attendent pas de rendement
additionnel pour compenser le suivi de leur participation. Le seul fait d’une introduction en bourse
augmente donc la valeur de l’entreprise.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
L ’optimalisation des flux de trésorerie
opérationnelle (EBITDA)
| 37
Un multiple supérieur lors de la sortie
Certains investisseurs en private equity tablent sur
la croissance du multiple entre leur entrée et leur
sortie. Par exemple, si lors de l’investissement, l’entreprise a été valorisée à 5 fois l’EBITDA, ils espèrent
pouvoir la vendre à 6 ou 7 fois l’EBITDA lors de la
sortie. Ils appliquent simplement la devise “buy low,
sell high”, ou ‘achetez bon marché et vendez cher’.
Cette approche est logique mais ne constitue pas
une politique d’investissement réellement durable
car les multiples sont fortement influencés par le
sentiment des marchés financiers : prédire le bon
timing est quasi impossible. De même prévoir le
niveau des multiples dans 3 à 5 ans est très aléatoire.
38 |
L’optimalisation de la structure financière
Le remboursement des dettes par l’entreprise est une
autre source de rendement spécifique aux leveraged
buy-outs. Prenons l’exemple suivant. Supposons
qu’au moment du buy-out une entreprise réalise un
EBITDA de 100 et qu’elle est valorisée à 500, soit 5
fois l’EBITDA. La transaction est financée avec 200
en capital par actions (mis à disposition par les investisseurs private equity et le management) et 300
en dettes. Si l’EBITDA de l’entreprise reste constant,
si la moitié (50) est utilisée pour rembourser des
dettes et si la société est vendue au bout de 5 ans, il
reste un encours de dette de 300-5x50=50. En cas de
vente au même multiple EBITDA de 5, les vendeurs
touchent 500, dont les premiers 50 sont utilisés pour
rembourser la dette résiduelle. Il reste alors 450 pour
les actionnaires qui initialement ont investi 200. Ils
ont donc plus que doublé leur investissement. Tenant
compte d’une période d’investissement de 5 ans, ceci
est équivalent à un rendement annuel moyen de 18%
pour les actionnaires. Notons cependant que nous
n’avons pas tenu compte des frais de transactions
dans ce calcul de rendement !
Sources de création de valeur: Exemple
Des investisseurs en private equity injectent €3 millions dans une entreprise en pleine croissance
dont les capitaux propres sont valorisés à €10 millions lors de l’investissement. Ils obtiennent
donc 30% du capital en actions, les 70% restants restent entre les mains des entrepreneurs initiaux. Si lors de l’entrée, l’entreprise a encore une dette financière de €5 millions, la valeur totale
de l’entreprise à ce moment est de €15 millions. Si l’EBITDA est alors de €3,5 millions, le multiple
est 4,3 (arrondi).
•• Augmentation de l’EBITDA. Si l’EBITDA double pendant la période d’investissement, jusque
€7 millions par exemple, la valeur de l’entreprise peut atteindre €30 millions avec un multiple
identique. Si le niveau des dettes est resté identique, alors la valeur pour les actionnaires est
monté jusqu’à €25 millions et le(s) paquet(s) d’actions des investisseurs en private equity vaut
€7,5 millions. Ceci signifie que ce dernier a récupéré 2,5 fois son investissement initial, ce qui
représente un rendement annuel de 20%.
•• Meilleure gestion des actifs. Si les investisseurs s’attendent à une optimalisation du besoin en
fonds de roulement qui peut générer €0,5 million et si ce montant ne doit pas être utilisé pour
des investissements additionnels, il peut être distribué aux actionnaires, par exemple sous
forme d’un dividende unique. 30% de €500.000, soit €150.000 de ce dividende, revient aux
investisseurs, ce qui représente une amélioration de 1% de leur rendement.
•• Multiple plus élevé lors de la sortie. Si les vendeurs arrivent à négocier un multiple EBITDA
de 5,5, alors la valeur de revente de l’entreprise monte à €38,6 millions, ce qui signifie une
valeur de €33,5 millions pour tous les actionnaires et €10,05 millions pour les investisseurs.
Ces derniers récupèrent alors presque 3 fois leur investissement de départ et réalisent un
rendement annuel moyen de 27%.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
Imaginons que les investisseurs en private equity prévoient de pouvoir sortir de l’entreprise au
bout de 5 ans et s’attendent aux sources de création de valeur suivantes:
| 39
.2. Comment les investisseurs en private equity
7
contribuent-ils à la création de valeur?
Un aspect essentiel du private equity est l’implication
active des investisseurs dans les sociétés de leur
portefeuille. Ils s’y impliquent pour deux raisons
différentes:
•• Ils veulent garder le contrôle sur le management
et éviter que ce dernier ne prenne des décisions
qui iraient à l’encontre des intérêts de l’actionnaire
externe. Cela permet de limiter ainsi le risque de
leur investissement.
•• Ils veulent créer activement de la valeur afin de
maximaliser la valeur de leurs actions.
Les investisseurs en private equity qui souhaitent une
implication active demandent au moins un siège au
conseil d’administration de l’entreprise, le principal
organe de contrôle et de prise de décisions stratégique. Grâce à cette représentation, ils contribuent au
caractère professionnel de l’entreprise, notamment
en appliquant les principes de bonne ‘corporate governance’ et en apportant une expertise complémentaire lors des décisions importantes. Ils demandent
également une information régulière et complète,
essentielle pour comprendre où en est l’entreprise et
être capable de prendre les décisions qui s’imposent.
Si l’entreprise ne dispose pas de systèmes suffisamment performants pour produire ces informations de
gestion, ils veillent à ce qu’ils soient mis en place au
plus vite.
40 |
Un autre aspect consiste à motiver les managers et les
employés à travailler en les rémunérant davantage en
fonction des résultats obtenus. De plus, il est fréquent
que les managers eux-mêmes investissent une partie
importante de leur patrimoine privé dans l’entreprise.
Ces facteurs jouent en effet un rôle important lors de
la création de valeur car les intérêts du management,
du personnel et des investisseurs sont bien alignés.
En général, les investisseurs en private equity interviennent peu dans la gestion opérationnelle de
l’entreprise. Quand une équipe de management
forte et bien équilibrée est en place, la gestion opérationnelle reste entièrement de leur ressort. Il arrive
toutefois que les investisseurs prodiguent des conseils
ponctuels sur des points opérationnels bien précis,
qu’ils soient impliqués dans la gestion financière ou
dans la recherche de nouveaux partenaires financiers.
Par contre, quand l’équipe de management est incomplète ou si certains managers ne répondent pas
aux attentes, alors les investisseurs interviennent et
participent à la recherche de remplaçants notamment
en mobilisant leurs réseaux de relations.
Ces réseaux peuvent également être interpellés à
d’autres occasions. Les investisseurs expérimentés et
réputés disposent d’une panoplie de contacts intéressants, aussi bien dans le monde financier, qu’auprès
de managers de sociétés avec lesquels ils ont travaillé
auparavant. De plus, ils font souvent appel à des
experts sectoriels ou des spécialistes en technologie,
notamment pour obtenir un avis sur une nouvelle
opportunité d’investissement. Ces experts peuvent
aussi être appelés pour des missions spécifiques dans
une société en portefeuille.
Que ce soit par ses missions de contrôle, d’alignement
des intérêts et de la collecte d’information, en tant
qu’interlocuteur avisé ou grâce à son networking, le
private equity représente bien plus qu’une simple possibilité de financement pour une entreprise. Les bons
investisseurs en private equity jouent un rôle actif et
positif dans les entreprises qu’ils ont en portefeuille,
les poussent à une forte croissance et leur permettent
de devenir des acteurs importants sur leurs marchés.
Tous ces éléments apparaissent clairement dans le
code de conduite de la Belgian Venture Capital &
Private Equity Association (BVA). Il s’agit d’une charte
qui fixe les principes généraux relatifs aux activités des
investisseurs en private equity belges.
LE CODE DE CONDUITE DU BELGIAN VENTURE CAPITAL & PRIVATE
EQUITY ASSOCIATION
1. Les membres veillent à renforcer durablement la valeur des sociétés qu’ils ont en portefeuille.
2. Les membres jouent un rôle actif dans l’intérêt des sociétés en portefeuille.
3.Les membres n’acceptent pas l’argent issu de sources d’investissement d’origine non spécifiée
telles que celles qui proviennent d’actes criminels ainsi que le blanchiment d’argent.
4.Les membres n’investissent pas dans les domaines d’activité jugés incompatibles par le CA de la
BVA. On peut citer en guise d’exemples : les substances illégales, la traite humaine, l’exploitation
sociale ou le crime organisé.
5.Les membres veillent au respect de l’intégrité et à l’établissement d’un climat de confiance
mutuelle dans les relations entre toutes les parties prenantes à une entreprise
6.Les membres veillent au respect des lois et des réglementations non seulement dans leur chef
mais également dans celui des sociétés qu’ils ont en portefeuille
7.Les membres s’engagent au respect de la confidentialité dans le traitement des informations
des sociétés qu’ils ont en portefeuille
8.Les membres participent à la mise en place de mécanismes de surveillance et de contrôle internes et externes tant dans leur propre organisation que dans leurs sociétés en portefeuille
9.Les membres s’engagent à organiser une communication ouverte et régulière quant à leurs
investissements et à la conduite de leurs activités
10.Les membres veillent collectivement au respect de l’image du secteur du private equity et du
venture capital.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
Afin d’améliorer l’image du secteur private equity (PE) et de clarifier la déontologie du PE, la
BVA a rédigé un code de conduite en 10 points. Le BVA veille au respect de ces règles par ses
membres.
| 41
7
.3. Les investisseurs en private equity créent-ils
vraiment de la valeur par leur rôle actif dans les
entreprises ?
Dans une revue de la littérature scientifique sur la
création de valeur par des investisseurs en private
equity dans des buy-outs, Peter Roosenboom (2009)
conclut que la majorité des études constatent une
amélioration des performances après un buy-out.
4-5
Non seulement les entreprises affichent une
meilleure performance qu’avant le buy-out, mais
elles travaillent également mieux que leurs concurrents dans le même secteur. Ceci confirme que les
investisseurs en private equity apportent leur aide
dans l’amélioration de la gestion d’entreprise et le
développement de stratégies innovantes.
Les études démontrent que leurs interventions sont
fructueuses dans presque deux tiers des cas. La plus
grande valeur est créée quand l’investisseur en private equity passe au moins la moitié de son temps
au sein de l’entreprise durant les cent premiers
jours après le buy-out.
Des critiques affirment que le private equity crée
de la valeur au dépens de l’emploi. En réalité,
les conclusions sur ce sujet sont contradictoires.
Certaines études démontrent que l’emploi dans
des unités d’entreprises existantes diminue dans
les premières années suivant le buy-out. D’autres
études, par contre, constatent une augmentation
de l’emploi et des salaires, ainsi que de meilleures
relations avec les employés après le buy-out.
La presse populaire avance une autre critique selon
laquelle les investisseurs en private equity doperaient artificiellement l’efficacité et la profitabilité
de leurs participations en coupant dans les investissements à long terme, tels que le développement
de nouveaux marchés ou l’innovation. A court
terme, cette pratique augmenterait la profitabilité
et l’efficacité, mais à long terme elle pourrait affaiblir la compétitivité de l’entreprise. Cette thèse est
mise à mal par la recherche scientifique. En effet,
Strömberg et Lerner (2010) ont démontré que les
entreprises qui ont fait l’objet d’un buy-out déposent plus de brevets. Ceci tend à prouver que les
investissements en recherche et développement ne
sont pas supprimés mais au contraire mieux ciblés.
Des études scientifiques montrent que seulement
une fraction de la création de valeur provient
d’arbitrage, c’est-à-dire de la revente (rapide) d’un
investissement à un “multiple” supérieur comparé à celui utilisé lors de la valorisation à l’entrée
(Roosenboom, 2009). En bref, la critique selon laquelle les investisseurs en private equity gagneraient
eter Roosenboom (2009) “On the Real Effects of Private Equity.” Rotterdam School of Management, Erasmus Universiteit Rotterdam;
P
http://publishing.eur.nl/ir/repub/asset/16710/EIA-2009-040-FA.pdf
5
Malheureusement nous n’avons pas connaissance d’études sur les performances et la création de valeur après des investissements de
capital de croissance dans des sociétés matures.
4
42 |
Il est fréquent que les investisseurs en private equity
réorganisent les sociétés directement après l’investissement afin de les préparer pour une croissance
future. Ensuite, ils recrutent du nouveau personnel,
mieux adapté à la nouvelle stratégie et donc souvent mieux rémunéré. A moyen terme, ceci mène
à une croissance des effectifs totaux de l’entreprise.
Les effets sur l’emploi restent néanmoins difficile à
cerner si l’entreprise fait des acquisitions puis vend
certaines activités après le buy-out.
En général et mis à part certaines exceptions,
la recherche scientifique donne une image plus
positive du private equity que celle présentée
par les médias et le monde politique. Il est vrai
que certaines questions importantes restent sans
réponse, comme par exemple l’impact du private
equity sur le développement des entreprises. Des
recherches futures devront y apporter la lumière
nécessaire.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
de l’argent facile en achetant en bourse des actions
sous-valorisées dans le but de les revendre quand
le climat boursier s’améliore, sans créer beaucoup
de valeur, constitue bien plus l’exception que la
règle. Selon Strömberg qui fait figure d’autorité
dans le domaine du private equity, seuls 9% des
buy-outs sont revendus endéans les 2 premières
années, alors qu’environ 70% des buy-outs restent
en portefeuille pendant cinq ans ou plus.
| 43
8
LA SORTIE OU L’EXIT
La sortie ou l’exit est la dernière étape du cycle
d’investissement du private equity. Elle est nécessaire pour permettre aux investisseurs de réaliser le
rendement de leur investissement. C’est pourquoi,
avant d’investir, les investisseurs procèdent à une
estimation du timing et des différentes modalités
de sortie envisageables.
La bonne gestion du processus de sortie peut fortement influencer le rendement de l’opération et
bénéficier à tous les actionnaires. Il peut toutefois
créer des tensions avec le management. En effet, si
les investisseurs et le management ont les mêmes
objectifs de création de valeur avant la sortie, ils
peuvent avoir des visions totalement différentes
sur le timing de l’exit et l’avenir de la société après
celle-ci. Le management peut par exemple être
réticent face à la décision de vendre l’entreprise à
un concurrent.
Afin d’éviter tout malentendu, il est important pour
les managers de ne pas perdre de vue que les investisseurs voudront sortir pour réaliser un rendement
et que cette sortie sera assez proche dans le temps.
Il est donc très important de conclure des accords
clairs avant de réaliser l’investissement.
8.1. Timing de l’exit
L’horizon de sortie pour un investisseur en private
equity est en règle générale de trois à cinq ans après
l’investissement initial dans l’entreprise. Le timing
dépend en grande partie de l’évolution de l’entre-
44 |
prise. Au départ, l’entrepreneur et les investisseurs
cherchent à poursuivre une stratégie de croissance
rapide mais la plupart des sociétés ne savent pas
soutenir indéfiniment une telle stratégie. En effet,
la concurrence, la propagation du savoir-faire technique et les tendances du marché vont affaiblir la
croissance avec le temps. Quand l’entreprise n’est
plus capable de grandir rapidement, les investisseurs
en private equity préfèrent en sortir car elle n’est
plus capable de générer les rendements attendus.
Les facteurs propres à l’entreprise ne sont pas les
seuls éléments qui déterminent le moment de sortie
optimal. En effet, il faut également tenir compte des
facteurs de marché et des tendances au sein de l’industrie. L’évolution du sentiment boursier est également un des éléments les plus importants. Quand
les marchés d’actions se portent bien, la valeur des
transactions privées est traditionnellement plus élevée. Par exemple les investisseurs qui sont sortis de
leurs investissements en 2007 ou au début de 2008,
soit juste avant le crash boursier, via une introduction en bourse ou la vente à une autre entreprise,
ont réalisé des rendements nettement supérieurs à
ceux qui ont gardé leurs participations dans l’attente
d’une augmentation de valeur plus forte (augmentation qui ne s’est jamais matérialisée).
La consolidation au sein d’une industrie peut également jouer un rôle. Certains secteurs peuvent
présenter beaucoup d’opportunités de vendre
une entreprise alors que dans d’autres le nombre
Les caractéristiques du marché du private equity
sont également importantes. Un fonds de private
equity est présenté à ses actionnaires potentiels
comme un projet d’investissement avec un horizon
bien défini dans le temps, en règle générale pour 10
ans. Cependant, le marché belge est caractérisé par
l’importance de fonds captifs (également nommés
‘evergreen funds’ en anglais). Ces fonds sont structurellement intégrés dans une autre organisation
(telle qu’une banque ou une grande entreprise
industrielle) et n’ont pas de durée limitée dans le
temps. La pression sur ces fonds pour réaliser une
sortie est donc moins élevée que celles des fonds
indépendants qui ont une durée de vie limitée. On
observe qu’en moyenne, les fonds captifs gardent
leurs entreprises en portefeuille plus longtemps.
En résumé, le timing optimal d’un exit dépend de
facteurs sous le contrôle du management et des
investisseurs mais aussi de facteurs qu’ils ne contrôlent pas.
8.2. Types d’exit
Nous présentons ci-dessous les principaux types
d’exit ainsi que leurs avantages et inconvénients.
Vente à une autre société (trade sale)
La vente à une autre société est la sortie le plus
répandue en Europe continentale. Lors de la vente
à une autre entreprise, l’acheteur peut être un
concurrent direct, un fournisseur, un client ou toute
autre entreprise avec un intérêt stratégique. Le
‘trade sale’ est le principal type de sortie pour les
sociétés bien développées mais encore trop petites
pour être cotées en bourse. Il peut aussi bien se faire
dans une situation de réussite qu’en cas de nonréussite (‘fire sale’). Les trade sales réussis peuvent
générer un rendement identique, voir supérieur à
celui d’une introduction en bourse, tout en évitant
de devoir passer par le processus complexe de ce
type d’opération.
Le trade sale offre nombre d’avantages par rapport
à l’introduction en bourse:
•• Le timing, la procédure et les conditions ne sont
pas aussi stricts que lors d’une introduction en
bourse. Il en résulte des frais de transactions
moins élevés.
•• Il est plus simple et moins cher de divulguer de
l’information vers un nombre limité d’acheteurs
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
d’occasions de vendre est très limité. Une réaction
rapide est donc nécessaire dès qu’une possibilité
d’exit se présente car la suivante peut se faire attendre longtemps.
| 45
potentiels que vers le grand public. De plus, les
concurrents ne reçoivent pas cette information
s’ils ne sont pas parmi les éventuels acheteurs. Il
est donc possible de donner plus d’information
à des acheteurs potentiels, ce qui réduit leur
risque et a une influence positive sur le prix de
vente.
paiement par l’utilisation d’une convention
“earn out” par laquelle le prix de vente final dépend des performances futures de l’entreprise.
Il arrive aussi que le rachat soit payé avec des
actions de l’acheteur. Dans ce cas, la liquidité de
telles actions peut être très basse et la valeur est
aléatoire.
•• Le transfert de propriété est direct et immédiat.
Ce n’est pas le cas lors d’une introduction en
bourse où les actionnaires existants sont souvent
dans l’impossibilité de vendre directement leurs
actions, voire obligés de les garder pendant une
certaine période après l’introduction en bourse
(la période du lock-up). Durant cette période de
lock-up, le cours de l’action peut diminuer. Par
conséquent, le rendement en cas d’une introduction en bourse comporte plus de risques que
lors d’un trade sale.
Buy-out
Un buy-out est une autre possibilité de sortie, tant
pour des sociétés qui ont mobilisé du capital de
croissance que pour des entreprises qui ont déjà
réalisé un (premier) buy-out. On parle alors de secondary buy-out. Le rachat peut alors se faire avec
le financement d’un nouvel investisseur en private
equity.
Un trade sale peut aussi comporter des désavantages:
•• Le management peut s’opposer à la vente à une
autre société par crainte de perdre son indépendance.
•• L’identification des candidats acheteurs peut
s’avérer difficile.
•• Les acheteurs peuvent reporter une partie du
46 |
Un (secondary) buy-out donne la possibilité au management de garder le contrôle de l’entreprise alors
que les investisseurs peuvent réaliser le rendement
de leur investissement. Il offre également l’opportunité aux membres de l’équipe en place de vendre
une partie de, voir toutes, ses actions. De même,
dans un buy-out, il est possible d’impliquer des managers qui n’étaient pas actionnaires auparavant.
Vente à un autre investisseur financier (‘Secondary
sale’)
Les investisseurs peuvent préférer vendre leurs
actions à un ou plusieurs nouveaux investisseurs
financiers. Quel intérêt un investisseur financier
Néanmoins, une vente à d’autres investisseurs financiers peut être pertinente pour les raisons suivantes:
•• Un fonds private equity a une durée de vie limitée. A la fin du cycle de vie du fonds, il est obligé
de vendre toutes ses participations. Une vente
à d’autres investisseurs financiers est parfois la
seule ou la meilleure alternative à ce momentlà. Pour l’acheteur cela peut aussi présenter un
avantage, car toutes les possibilités de création de
valeur n’ont peut-être pas encore été réalisées.
•• Les investisseurs en private equity n’ont pas tous
les mêmes moyens (financiers). Un transfert à un
fonds plus solide peut permettre le financement
de la croissance future de l’entreprise et ainsi
le support de la phase de croissance suivante.
Quand plusieurs financements successifs sont
nécessaires, ceci peut conduire à une dilution
importante de l’investisseur initial. Certains investisseurs préfèrent alors sortir de l’entreprise
plutôt que de garder une participation minime,
surtout si leur propre rôle est limité.
Introduction en bourse (‘Initial Public Offering’ ou IPO)
Pour des sociétés moyennes ou grandes, l’introduction en bourse peut représenter une voie de sortie
intéressante pour les investisseurs en private equity.
Lors d’une IPO, les actions de la société sont offertes
pour la première fois sur un marché où elles peuvent être négociées librement. Certaines sociétés
peuvent avoir déjà été cotées avant d’être retirées
de la cote lors d’un public-to-private buy-out.
Quand de telles entreprises retournent à la bourse,
on parle d’un reverse buy-out.
L’introduction en bourse est souvent perçue comme
la meilleure sortie par des investisseurs en private
equity car elle dégage en moyenne un rendement
élevé quand l’opération est un succès. De plus, elle
permet au management de conserver le contrôle
sur la société.
Elle présente encore d’autres avantages, tant pour
le management, que pour les investisseurs et l’entreprise:
•• Liquidité des actions : l’IPO ouvre la possibilité
à tous les actionnaires de vendre leurs actions
(après la période de lock-up).
•• Possibilité de lever de nouveaux fonds après l’introduction en bourse : quand une société a be-
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
a-t-il d’acquérir les actions d’un de ses collègues ?
La question de la possibilité de pouvoir encore
créer de valeur se pose, surtout quand l’investisseur
précédant a déjà optimalisé l’entreprise pendant un
certain nombre d’années.
| 47
soin d’un nouveau financement pour poursuivre
sa croissance, il peut être plus facile de l’obtenir
en offrant de nouvelles actions en bourse que de
chercher des capitaux privés.
•• Financement d’acquisition avec ses propres
actions : une entreprise dont les actions sont cotées peut payer une acquisition avec ses propres
actions plutôt qu’avec de l’argent.
•• Plus de légitimité et d’attention : les sociétés cotées en bourse bénéficient de plus de visibilité et
d’une meilleure réputation. Il en résulte une attention accrue pour ses produits, plus de facilité
pour le recrutement de personnel hautement
qualifié, une meilleure position de négociations
avec des clients et fournisseurs, ...
Une introduction en bourse comporte aussi des
désavantages:
48 |
•• Après l’introduction, d’autres coûts importants
s’additionnent. En effet, une société cotée doit
fournir de l’information aux autorités boursières
et aux analystes financiers. Ces coûts peuvent
peser lourd sur des entreprises de taille réduite.
•• Une société cotée peut également être obligée
de publier de l’information qui pourrait nuire à
sa position concurrentielle, surtout si les concurrents principaux ne sont pas cotés et que ces
derniers sont donc dispensés de cette obligation
d’information.
•• Les investisseurs marquent souvent peu d’intérêt pour les petites entreprises cotées en bourse.
Les investisseurs institutionnels, tels que les
fonds de pension et les compagnies d’assurance,
préfèrent les grandes sociétés. Nombre de petites entreprises éprouvent donc des difficultés à
maintenir l’intérêt des analystes financiers et des
investisseurs. Cet aspect peut significativement
diminuer la liquidité des actions.
•• La préparation de l’introduction : préparer
l’opération est un processus long et coûteux
(jusqu’à 10 voir 12% du capital récolté lors de
l’introduction).
•• La visibilité accrue, notamment dans les médias,
peut aussi devenir un désavantage, surtout
quand l’entreprise connaît des difficultés.
•• Coût indirect : bien que les procédures diffèrent
d’un marché d’actions à l’autre, le processus
d’IPO reste complexe et strictement réglementé.
Il demande donc beaucoup de temps et d’attention de la part du management. De plus, durant
les années précédant l’introduction, il convient
d’augmenter la visibilité de l’entreprise en
annoncant régulièrement des développements
positifs.
Faillite/Liquidation
Dans le cas d’investissements non fructueux, il est
convient d’abord de restructurer. Si la restructuration ne donne rien et s’il n’y a pas d’acheteur pour la
société, il ne reste plus qu’à fermer l’entreprise en liquidant ses actifs (cette approche est possible si tous
les créanciers peuvent encore être remboursés) ou
la faillite. Ce dernier scénario est évidemment celui
que redoutent les investisseurs et le management.
Pour réussir l’exit, l’entreprise doit le préparer en
mettant en ordre une série d’aspects formels mais
aussi en optimalisant sa gestion. C’est ainsi que le
choix du type d’exit doit être décidé conjointement
par les investisseurs private equity et le management. Il doit être planifié dès la phase d’entrée.
Divers aspects formels tels que la rédaction des
comptes annuels selon les normes des autorités
boursières, y compris leur certification par des auditeurs externe doivent être anticipés. On conseille
également de simplifier les structures juridiques
et financières afin de ne pas effrayer les acheteurs
potentiels.
Disposer d’un bon reporting et d’une logique de
contrôle interne facilitera le processus de vente,
car l’acheteur potentiel obtiendra plus facilement
l’information dont il a besoin. Si ce n’est pas le cas, il
convient d’y remédier au plus vite.
Le reporting et la communication vers l’extérieur
sont aussi importants. Dans la mesure où l’objectif
est de vendre la société à moyen terme, il est utile
de la faire connaitre d’une façon positive et de
communiquer les bonnes nouvelles : alliances,
ouverture de nouveaux bureaux à l’étranger, percée
technologique... Une communication régulière à
travers la presse générale ou spécialisée, un site
web, etc. est donc requise.
Enfin, afin d’obtenir une valeur de sortie maximale,
il est également nécessaire d’optimaliser tous les leviers créateurs de valeur évoqués dans les chapitres
précédents.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
8.3. Préparer l’exit
| 49
9
QUELQUES EXEMPLES
Cas 1: Le management buy-out de Pizza Hut Belgique
Tricon Restaurant (la sociète mère de Pizza Hut)
décide en 2000 de vendre toutes ses activités nonstratégiques dont faisait partie Pizza Hut Belgique.
La façon la plus directe de se séparer de cette filiale
aurait été de la vendre à un autre acteur belge du
même secteur d’activités tel que Carestel ou Lunch
Garden. Mais le CEO de Pizza Hut Belgique, Stef
Meulemans, se montra intéressé à l’idée de devenir
co-propriétaire de l’entreprise pour laquelle il travaillait depuis 11 ans. Pour Tricon, cela constituait
une excellente alternative car Pizza Hut Belgique
performait bien et pourrait continuer à générer des
revenus pour elle sous forme de revenus de licence.
Trois partenaires ont finalement financé le rachat de
Pizza Hut Belgique dans une transaction de buy-out
classique. Un prêt bancaire traditionnel a permis de
payer 46% du prix de rachat alors que le restant a
été financé avec du capital par actions apporté par
Stef Meulemans et par le Buy-Out Fund. Le Buy-Out
Fund reçut un mélange d’actions ordinaires et préférentielles, Stef Meulemans ne reçut, quant à lui, que
des actions ordinaires. Lors des premières années
qui suivirent le buy-out, la croissance fut inférieure
aux attentes du plan d’affaires initial, mais des gains
internes résultants d’une plus grande d’efficacité ont
finalement conduit à une belle marge bénéficiaire.
En 2004, quand le bénéfice et le cash flow ont atteint
le niveau escompté, le Buy-Out Fund a voulu sortir
du capital de Pizza Hut Belgique. Stef Meulemans,
qui était convaincu que l’entreprise avait encore un
potentiel de croissance important, initia un second
buy-out (‘secondary buy-out’), où KBC Private Equity
contribua à racheter le Buy-Out Fund. Lors de cette
transaction, Stef Meulemans, avec l’aide de quelques managers clés, réussit à obtenir la majorité.
Ce fut alors le début d’une période de croissance
rapide des activités de Pizza Hut Belgique grâce à
une plus grande diversification soutenue par des
investissements importants. A titre d’illustration, la
société possède aujourd’hui la majorité des activités
de Pizza Hut France et a une licence exclusive pour
exploiter la chaîne “Boulangerie Paul” en Belgique.
Cas 2: NMC
NMC a été créé en 1950 par les entrepreneurs
Noël et Marquet. En Europe, le groupe est considéré comme la référence sur le plan du design,
de la production et de la commercialisation de
produits en mousse extrudés et préformés, avec
des applications dans le bâtiment (par exemple
l’isolation de tuyaux de chauffage), l’automobile
(en tant qu’emballage) ou l’industrie de jardinage et
des jouets (par exemple des tapis pour le jardin ou
50 |
des jouets pour la piscine). Le siège principal et le
centre de recherche de NMC se trouvent à Eynatten.
A travers ses filiales, sites de production et bureaux
de vente, NMC est actif dans plusieurs pays européens. Presque 95% du chiffre d’affaires de NMC
est réalisé en dehors de la Belgique. En 2001, NMC
employait plus de 700 personnes en Europe, dont
400 en Belgique.
Sources: rapports annuels Ackermans & van Haaren, sites web et communication personnelle.
L’objectif de la participation de Sofinim était de
renforcer les structures financière et d’actionnariat
de NMC, notamment en redistribuant au sein de
l’actionnariat familial des intérêts industriels. En
effet certaines activités (localisées par exemple aux
Etats-Unis et dans de nouvelles applications tels
que les bouchons) étaient logée dans des entités
séparées. Ces ajustements furent aussi combinés à
des changements dans le management.
L’entrée de Sofinim a également permis le rachat du
groupe allemand Schäfer et la création de la marge
financière nécessaire à la poursuite de nouvelles
opportunités (nouveaux produits, rachats,…). Dans
ces circonstances, Sofinim fut dans la possibilité
d’augmenter sa participation dans le groupe NMC.
Fin 2009, Sofinim détenait ainsi 30,7% des parts de
NMC. Yves Noël, le président du Conseil d’Administration de NMC, déclarait lors de l’entrée de Sofinim
dans le capital de NMC : “J’ai une entière confiance
dans le potentiel de NMC et de son management
c’est pourquoi j’ai cherché des partenaires qui pourraient accompagner les actionnaires familiaux dans
la réalisation de leurs ambitions”. Sofinim siège dans
le Conseil d’Administration ainsi que dans le comité
d’audit et de rémunération de NMC.
Alors qu’en 2001 le chiffre d’affaires consolidé de
NMC s’élevait à 101 millions d’euros (BGAAP), il est
monté jusque 151 millions d’euros en 2006, 161
millions d’euros en 2007 et 170 millions euros en
2008 (IFRS). En 2009, il y eut un léger recul suite à
la situation économique difficile, notamment dans
les marchés du bâtiment et de l’automobile, des
secteurs cibles pour NMC. Le résultat opérationnel
(EBITDA), qui s’élevait à 14,9 millions d’euros en
2001 (BGAAP), était monté à 22,4 millions d’euros
en 2009 (IFRS). Les capitaux propres ont augmenté
de 14,3 millions d’euros (BGAAP) à 72 millions euros fin 2009 (IFRS), et ceci malgré une politique de
dividende continue. L’endettement financier net est
monté de 6,7 millions d’euros fin 2001 (BGAAP) à
21,3 millions d’euros fin 2009 (IFRS), et est resté à
un niveau inférieur à une fois l’EBITDA. A travers les
années, le groupe a également réalisé des investissements tels que le démarrage de la production en
Pologne et Russie ainsi que le rachat de 3 sociétés
en Scandinavie et de 1 au Royaume-Uni en 2008.
En 2009, NMC gardait son focus sur l’innovation et
la R&D.
Guide du capital de croissance et du buy-out en Belgique
En 2002, Sofinim a pris une participation de 22%
dans NMC. Sofinim, société belge d’investissement
importante cotée en bourse, coordonne les activités “private equity” du groupe Ackermans & van
Haaren qui détient 74% de son capital. Sofinim met
du capital de croissance à risque à la disposition de
sociétés de moyenne et grande tailles. Au moment
de l’investissement dans NMC, Sofinim gérait 25
participations, dont la moitié en capital de croissance, avec une valeur d’investissement (normes
de valorisation EVCA) de 272 millions d’euros. Elle
adopte une vision industrielle à long terme et s’intéresse surtout à des sociétés avec une équipe de
gestion compétente et motivée, une vision claire,
un plan d’affaires élaboré, une position de marché
stable et solide, un excellent track record financier,
des perspectives de croissance rentable et des ambitions qui dépassent la Belgique. Le groupe NMC
répondait clairement à ces critères.
| 51
BIBLIOGRAPHIE
Quelques ouvrages à lire pour apprendre davantage sur le sujet:
•• Financing Entrepreneurial Companies: How to Raise Equity as a High-Growth
Company
Sophie Manigart & Miguel Meuleman
De Boeck & Larcier
•• Private Equity and Management Buy-outs
Mike Wright & Hans Bruining
Edward Elgar Publishing
•• Private Equity: Fund Types, Risks and Returns, and Regulation
Douglas Cumming
John Wiley and Sons
•• The Dark Side of Valuation: Valuing Young, Distressed, and Complex Businesses
Aswath Damodaran
Financial Times Press
•• The Definitive Business Plan: The Fast-Track to Intelligent Business Planning
for Executives and Entrepreneurs
Richard Stutely
Financial Times Press
•• Valuation: Measuring and Managing the Value of Companies
Tim Koller, Marc Goedhart & David Wessels
John Wiley & Sons
52 |
www.venture-capital.be
guide du
capital de croissance et du buy-out
en belgique
avec le soutien
Sophie Manigart
Tom VANACKER
Olivier Witmeur
version 2.0 | mars 2011
I S BN 9 7 8 9 0 7 8 8 5 8 8 1 2
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