FICHE À DÉTACHER
136 | La Lettre du Pharmacologue • Vol. 26 - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2012
fiche technique n° 2
dans un seul groupe
(3,4)
; les patients du bras standard ne
sont pas forcément informés de l’existence d’un groupe expé-
rimental, voire même de l’existence de l’étude.
Les arguments
en faveur du schéma deZelen
L’intérêt majeur avancé avec ce type de plan expérimental est
de gagner en recrutement. En effet, certains médecins n’aiment
pas demander leur consentement aux patients pour les essais
randomisés et refusent donc de participer en tant de médecins
investigateurs. De plus, ils n’ont plus l’incertitude du traitement
liée à la randomisation pour discuter avec leurs patients.
La randomisation selon le schéma de Zelen permet aussi d’éviter
les situations dans lesquelles le consentement entraîne un stress
majeur lié au tirage au sort (en particulier pour les essais en
pédiatrie). Les patients n’ont plus la sensation d’être traités par
tirage au sort, ils adhèrent mieux au bras expérimental, et donc
à l’étude. La préférence du patient pour l’un des 2traitements
est ainsi prise en compte. Cet argument est plus ou moins solide
dans le sens où le consentement du patient dépend de la façon
dont il est demandé. L’investigateur doit être convaincu de la
nécessité d’évaluation de la nouveauté, même si celle-ci paraît
d’emblée attractive.
Enfin, si le traitement expérimental semble très séduisant
par rapport au traitement standard, ce type de plan évite au
patient la déception d’être alloué dans le groupe standard,
comme ce serait le cas avec un essai randomisé classique
(traitement à domicile versus traitement à l’hôpital, prise
orale au lieu d’un traitement par voiei.v., massage à domicile
versus prise en charge habituelle dans les douleurs lombaires
chroniques, etc.). La faisabilité du recrutement sera indiscutable
s’il existe une forte préférence pour l’un des traitements de
la part des patients.
Les contraintes de ce type de plan
expérimental
Plusieurs exemples d’études avec randomisation selon le
schéma de Zelen sont disponibles dans la littérature. La
plupart sont utilisés dans des circonstances inappropriées
(5)
.
En fait, les contraintes de ce type de plan sont souvent
méconnues.
➤
Tout d’abord, afin de respecter le principe de la randomi-
sation permettant de garantir l’absence de biais de sélection,
comme pour tout essai randomisé, l’analyse doit être réalisée
en intention de traitement. Elle doit donc inclure tous les
patients randomisés, que l’allocation aléatoire des traitements
ait ou non été respectée. Cela signifie que, quel que soit le
traitement reçu après la randomisation, le patient sera analysé
dans le bras expérimental selon le principe de l’ITT. Ce qui est
gagné en vitesse de recrutement peut donc être perdu par
la dilution de l’effet et par la perte de puissance statistique
si les refus du traitement expérimental sont nombreux. Si on
anticipe par exemple que 15 % des patients vont refuser de
donner leur consentement pour le traitement expérimental,
il faut multiplier par2 le nombre de sujets nécessaire, et on
risque malgré tout de ne plus avoir d’effet. Avec ce type de
schéma, il est donc important que la proportion de patients
refusant le traitement expérimental soit très faible. Enfin,
l’analyse per protocole est inappropriée, car fortement exposée
au biais de sélection.
➤
La seconde contrainte est qu’il est nécessaire de collecter
les données même chez les patients qui refusent de donner
leur consentement. Il faut donc informer les patients du bras
témoin que des données les concernant vont être utilisées à
des fins d’étude. Sinon, aucune information ne sera disponible
et le principe de l’ITT ne sera pas respecté.
➤
Ce type de plan ne permet pas le double aveugle et impose
donc une évaluation à l’aveugle (PROBE) pour limiter le biais
d’évaluation. Un potentiel biais de suivi peut donc entacher
ce type d’étude.
➤
Ce type de plan peut être soumis à ce que l’on appelle
en psychologie sociale l’effet Hawthorne, lorsqu’il s’agit de
comparer un groupe de sujets informés de leur participation
à une expérience à un groupe de sujets qui ne le sont pas
(6)
.
Les sujets d’une étude modifient leur comportement naturel
par le simple fait de savoir qu’ils participent à une étude et
qu’ils sont sous observation. L’effet Hawthorne a fait l’objet
d’une étude spécifique ayant inclus 2groupes de patients
à la veille d’une opération du genou : les patients qui ont
été informés qu’ils allaient être inclus dans un essai scienti-
fique se sentaient d’une manière générale plus vite mieux et
présentaient nettement moins de douleurs postopératoires
que ceux auxquels on n’avait rien dit
(7)
. Pour parer à ce
problème, il faut recourir à un schéma de Zelen, avec double
consentement
(figure3)
.
➤
Enfin, comme les patients du bras standard ne sont pas
forcément informés de l’existence d’un groupe expérimental,
voire même de celle de l’étude, les contraintes de celle-ci ne
Figure 2. Plan d’une étude randomisée selon un schéma de Zelen – consen-
tement simple.
Inclus dans l’analyse
Consentement demandé
pour le traitement
expérimental
Traitement standard
Randomisation
Traitement expérimental
Traitement
expérimental
Traitement
standard
Consentement
donné
Consentement
refusé