commissariats de police le 27 octobre. Le 28 octobre, 40 000 fascistes se présentent aux portes
de Rome, devant 28 000 soldats seulement. Mussolini exige la démission du gouvernement,
faute de quoi les fascistes prendront la ville. Le premier ministre Facta demande au roi de
décréter la loi martiale. Celui-ci refuse et propose à Facta d'inclure des fascistes dans son
cabinet. Mussolini refuse à son tour et pose ses exigences : il souhaite diriger le
gouvernement. Le 29 octobre, le roi accepte et lui demande de venir à Rome former un
gouvernement. Mussolini se présente au roi en chemise noire, uniforme du parti. Il accepte le
lendemain de pendre la charge de Président du conseil. Les fascistes entrent à Rome et se
lancent dans une série d'attaques physiques contre les socialistes, les communistes, les
syndicalistes et les popolari (catholiques).
La marche sur Rome n’est donc pas une insurrection proprement dite. Mussolini
obtient le pouvoir de manière «constitutionnelle», en se faisant nommer Président du Conseil
par le Roi (ce qui est une prérogative de ce dernier). Mais cette accession au pouvoir est
précédée d’une année de violences organisées, elle s’accompagne de la menace d’une
insurrection et est évidemment suivie de violences ciblées. S’agissait-il d’un bluff? Certains
historiens pensent que, si le Roi avait accédé aux demandes de Facta et instauré la loi martiale,
les fascistes auraient été désemparés. En tout cas, Mussolini ne s’est présenté à Rome que
lorsqu’il a été convoqué par le Roi : tout au long de l’épreuve de force, il a attendu à Milan,
prêt, dit-on, à prendre un train pour la Suisse, au cas où les choses tourneraient mal.
Mussolini forme un cabinet multipartite, où se retrouvent aussi des démocrates, des
libéraux, des monarchistes et des personnalités indépendantes (comme le philosophe Giovanni
Gentile). Mussolini est donc chef du gouvernement avec seulement 35 députés sur 535 et 3
ministres fascistes. Après la période de quasi-guerre civile qu’a connue l’Italie, plusieurs
espèrent que cette solution calmera le jeu et permettra d’insérer les fascistes dans la politique
parlementaire. Mussolini forme immédiatement le Grand Conseil du fascisme, un organe qui,
théoriquement, constituera une autorité suprême en matière de grandes orientations, mais
aussi, sur un plan plus pratique, la Milice volontaire pour la sécurité nationale, ce qui équivaut
en fait à une étatisation des instances du PNF et notamment de son armée privée (dont les frais
d’entretien sont dès lors transférés aux contribuables). Plusieurs chefs du parti fasciste
deviennent des préfets, i.e. des fonctionnaires du gouvernement central dotés de larges
pouvoirs dans les régions. Dans le climat d’intimidation qui règne, l’opposition parlementaire,
désunie, ne songe pas à renverser le gouvernement de Mussolini.
En avril 1923, le Parlement, à la fois conscient de l'impasse à laquelle a conduit le
système de représentation proportionnelle et intimidé par le climat de violence entretenu par
les fascistes, adopte la loi majoritaire: selon cette loi, le parti qui aura au moins 25% des voix
récoltera automatiquement les 2/3 des sièges. La loi est approuvée par la Chambre et le Sénat
en dépit de la position très minoritaire des fascistes. En avril 1924, des élections sont tenues:
les fascistes présentent une liste unique comprenant des personnalités qui ne sont pas membres
du parti, ce qui crée une image d'unité nationale et d'attitude non partisane; les autres partis
n'arrivent pas à trouver une formule d'entente et se présentent en rangs dispersés. Dans un
climat de violence et d'intimidation, la liste du PNF obtient 65 % des voix et 374 sièges sur
535. Les autres sièges se répartissent entre popolari (39), giolittistes (15), démocrates-sociaux
(10), socialistes réformistes (24), socialistes maximalistes (22), communistes (19),
républicains (7), libéraux (14) et autres.
Le 24 mai 1924, le député socialiste réformiste Giacomo Matteotti dénonce, lors d'un
discours en Chambre, le climat de violence dans lequel se sont déroulées les élections dont il