Introduction et problématique À en croire des statistiques récentes, l’Afrique passe pour le continent le plus jeune du monde et le restera encore pour très longtemps avec présentement près de 60% de sa population ayant moins de 25 ans (OECD, 2013). En Afrique subsaharienne ce chiffre frise facilement les 70 %. Malheureusement, cette jeunesse fait face à un sérieux problème de chômage qui ralentit considérablement la croissance du continent. En effet, 60% des personnes au chômage en Afrique sont des jeunes. Chaque année, il arrive 12 millions de demandeurs d’emploi. S e l o n un rapport de la Banque Africaine de Développement et la Commission économique pour l’Afrique des Nations Unies et le PNUD, en 2045 nous aurons 400 millions de jeunes qui débarqueront sur le marché du travail en Afrique, sans espoir de trouver un emploi. Le problème d’emploi des jeunes a toujours été un enjeu majeur. S’il est aujourd’hui inscrit au sommet des préoccupations des gouvernements, leurs partenaires techniques et financiers, les acteurs locaux impliqués et les organisations de solidarité internationale, c’est surtout à cause de la pression récente des actualités démographique, sociale, politique et économique que connaissent ces pays. Les causes Dans les pays dit développés, c’est le salariat qui organise la protection sociale, le système éducatif et également l’insertion (environ 80 % des emplois sont salariés). Le système d’éducation et de formation professionnelle est bien ajusté au système de production et les politiques macroéconomiques de croissance tiennent compte de ces faits pour orienter et appuyer les économies de ces pays. En réalité, dans les pays de l’Afrique subsaharienne la majorité (90 ou 95 %) de la population active n’est pas dans un registre d’économie salariée. Pourtant, l’économie dans ces pays est organisée sur la base du salariat alors que le secteur moderne salarial ne représente en réalité que 5 % des emplois. Il y a donc une dissociation profonde entre le système d’éducation et de formation professionnelle et le système productif. Ajoutons en plus que le système éducatif fonctionne dans l’ignorance complète des besoins des grandes, moyennes, petites et micro entreprises. Par ailleurs, les politiques macro-économiques mises en œuvre orientent ces économies vers une croissance qui ne crée pas d’emploi. Près de 95 % de jeunes (scolarisées, déscolarisés et non scolarisés) finissent tous par rejoindre le secteur dit informel. La plupart sont des jeunes qui sortent du système d’éducation et de formation et ceux qui n’ont pas pu y aller en raison de contraintes d’ordre culturel, social, économique, etc. Ce secteur est le domaine de la petite entreprise et de l’agriculture familiale, lesquelles suivent une logique d’occupation et non de rentabilité des activités économiques. Une autre cause provient de l’inadéquation des solutions déployées dans ces pays pour résoudre le problème de chômage. En effet, en analysant les solutions mises de l’avant par ces pays à la lumière des éléments du contexte africain, on ne peut s’empêcher de conclure à leur inefficacité. Si sur cinq nouveaux emplois crées dans ces économies, quatre proviennent du secteur informel, alors concentrer le gros des efforts et des ressources productives sur le secteur moderne qui ne représente que 5 % de la main d’œuvre employée, ne nous paraît pas la voie appropriée à emprunter. Les réponses On constate que des réponses opérationnelles sont recherchées dans un climat de relative urgence. En Afrique subsaharienne, par exemple, différents modèles d’appui à l’insertion des jeunes sont proposés. Un bon nombre d’entre eux est encore en phase expérimentale. Pour ceux qui sont déjà traduits à l’échelle, il est difficile de juger de leur efficacité, soit parce qu’il ne s’est pas écoulé suffisamment de temps pour assurer la fiabilité de leur évaluation, soit parce qu’ils n’ont pas été correctement évalués. Agir de façon à permettre aux jeunes de gagner leur vie, departiciper à la vie économique et sociale et d’accéder à leurs responsabilités d’adultes constitue l’objectif visé par les modèles proposés. En Afrique subsaharienne, pour la majorité des jeunes, le problème est de passer 1 d’un mauvais emploi ou sous-emploi à un meilleur emploi. Donc, si l’on veut insérer, il faut créer des emplois. Or pour créer des emplois, il faut faire croître l’économie. Il faut pour cela d’abord une politique macro-économique conséquente. Ce qui n’est pas le cas en Afrique en général. Mais, tant et aussi longtemps que cette situation restera inchangée, fonder l’insertion des jeunes en les ramenant vers le salariat qui ne représente que 5 % de la main d’œuvre ne résoudra pas le problème du chômage de ces jeunes. En Afrique, si on veut faire de l’insertion, il faudra passer par la création d’activité. Dans quelle mesure l’insertion peut elle-même contribuer à l’insertion d’activité? Comment peut-on aider les jeunes à créer leur propre activité ? Est-ce qu’ils devront le faire individuellement ? Est-ce qu’on devrait au contraire favoriser des créations collectives comme les coopératives ? Voilà autant de questions dont les réponses aideraient à concevoir des solutions pertinentes, adéquates et efficaces. Le secteur agricole et artisanal : secteur prioritaire pour l’activité des jeunes Justifications Le secteur agricole, défini ici comme contenant l’agriculture, l’élevage, la pêche, la pisciculture, l’artisanat, etc., est la base, l’épine dorsale de toutes les économies des pays en développement d’Afrique. Selon une analyse de la Banque Mondiale (2011) Dans ces pays, en dépit des transformations qu’a subi l’environnement du secteur productif et de l’urbanisation galopante qu’ils connaissent, ce secteur occupe encore en moyenne entre 70 et 80 % de la population active. L’analyse des parts relatives des différents secteurs dans le PIB réel révèle qu’entre 1990 et 2013, le secteur primaire est resté dominant avec un poids moyen de 54%, suivi du secteur tertiaire marchand pour 26,0% et du secteur secondaire pour 20,%. Notons que le secteur agricole est resté et le restera pendant longtemps encore le secteur qui offre le plus de possibilités pour accélérer la croissance, assurer la sécurité alimentaire, créer des emplois, accroître les revenus des pauvres et contribuer à la balance commerciale et au développement de l’agro-industrie. La modernisation du secteur agricole Face aux transformations de l’environnement du secteur productif agricole de ces pays, notamment ceux de l’Afrique de l’Ouest, il y a de quoi s’alarmer, surtout lorsqu’on considère la rapidité de la croissance démographique et de l’urbanisation. En 2003 on comptait 290 millions d’habitants en Afrique de l’Ouest. En 2020 ils seront 430 millions et les grandes villes abriteront plus de 60 % de la population totale. Comment pourra-t-on nourrir adéquatement ces 430 millions de personnes et leur garantir une sécurité alimentaire et de revenu durable ? Il ne fait aucun doute que la modernisation du secteur agricole, le développement du commerce sous régional et l’ouverture sur les marchés internationaux constituent les seules issues durables. Pour une stratégie réaliste de modernisation du secteur agricole D’après nous et l’avis de plusieurs observateurs, autorités sur les questions de développement rural, une croissance économique, dont la portée est assez étendue pour réduire de manière efficace et écologiquement durable la pauvreté dans les pays en développement, ne sera possible sans l’accès à des marchés internes et externes vastes et diversifiés pour les petits producteurs du Sud. Donc, pour ces derniers, à ce point, la question n’est pas de savoir s’ils doivent intégrer ou non le marché au niveau local, régional, national ou international, mais plutôt de voir comment ils doivent y participer. En tenant compte de la réalité des pays du Sud, du temps que cela prendra pour faire émerger une nouvelle classe d’entrepreneurs orientés exclusivement vers le marché, la possibilité de recourir à l’entrepreneuriat collectif et à des stratégies organisationnelles adaptées pour les petits exploitants, nous avançons que les deux positions pour approcher la modernisation sont possibles. Chacune 2 ayant son rôle à jouer et ne sont en aucun cas antinomiques. Nous voyons donc une stratégie à deux piliers complémentaires. Premier pilier : modernisation du système de production agricole traditionnel Le premier pilier poursuivra prioritairement la diversification des cultures et l’intensification des activités productives et l’insertion au marché des petits producteurs traditionnels par une stratégie organisationnelle novatrice. Deuxième pilier : création d’un système de production agricole professionnalisé Le secteur agricole, pour se moderniser, nécessite également l’entrée d’autres types d’acteurs grâce auxquels la professionnalisation des activités du secteur serait accélérée. Le secteur agricole et agroalimentaire pour cela doit être investi d’entrepreneurs sur toute la chaîne des valeurs des produits agricoles de la production à la distribution en passant par la commercialisation. Le deuxième pilier stratégique se centrera donc sur l’entrepreneuriat agricole en milieu rural et périurbain. Ceci peut offrir des opportunités réelles pour l’réinsertion au marché du travail des jeunes urbains et ruraux au chômage, notamment les diplômés des écoles, collèges, centres professionnels et universités, et notamment celui des jeunes femmes et hommes comme moyen de leur insertion et pour la professionnalisation des activités génératrices de revenus dans le secteur agricole en général. Ces entrepreneurs agricoles pourront concevoir la production agricole comme une entreprise en respectant les principes de rentabilité, de gestion et de marketing. Ils pourront avoir la confiance des banques et mobiliser d’importants financements pour le développement de nouvelles filières. Nous proposons une approche globale pour comprendre et envisager désormais l’action dans le secteur agricole. Concrètement, cela veut dire qu’il faut reconnaître l’interdépendance étroite entre les activités des acteurs du milieu comme un facteur crucial pour accélérer la modernisation. La production, la conservation, le conditionnement, la transformation, la commercialisation, la distribution et la consommation sont désormais vues comme des systèmes de production connectés dans une chaîne de valeur ou une filière qu’il faut optimiser pour obtenir un impact important. L’intégration cohérente des fonctions formant ce réseau pourrait accroître l’équité dans la participation des acteurs1 et donc stimuler positivement la compétitivité globale du réseau. Les projets d’insertion des jeunes jusqu’à la création d’activités dans le secteur agricole Les projets ou programmes publiques, privés ou en ppp dans ce secteur pourraient opter pour l’un ou l’autre des deux piliers ou se positionner simultanément dans les deux piliers. Tout dépendra des préférences des promoteurs, des ressources mobilisables, de la disponibilité des groupes cibles, des incitatifs offerts par l’État, des risques perçus, etc. Dans tous les cas, l’objectif général reste le même. Dans le cadre des deux piliers stratégiques, l’investissement privé peut emprunter dans l’approche de chaîne de valeur deux voies: 1. la voie de l’intégration verticale fondée sur un investisseur ou groupe d’investisseurs encore appelés agrégateurs qui organisent la filière en apportant, à un groupe de petits producteurs ou agrégés, des intrants en amont, des paquets technologiques, des services techniques, de transport, de transformation et de commercialisation. 1Le concept d’équité recouvre les dimensions économiques, sociales, de genre, générationnelle et culturelles. 3 2. la voie de l’intégration horizontale surtout convenable aux groupes d’intérêt publiques ou privés désirant encourager la compétitivité globale d’une chaîne de valeur. Quelques projets dans le deuxième pilier stratégique (intégration verticale et investissement privé) 1. Projet 1: Création d’une organisation de jeunes qui portera le programme/projet d’implication des jeunes dans l’entrepreneuriat agricole. Nom de l’organisation : Jeunesse en Mouvement pour l'Innovation et le Développement Endogène (JAIDE). La prise en main de l'avenir des jeunes par les jeunes". La jeunesse béninoise prend à son actif l'exhortation du regretté président des ÉtatsUnis JFK: "Ne demande pas ce que ton pays peut faire pour toi, demande plutôt ce que tu peux faire pour ton pays". Le programme de l'organisation s'articule autour des thèmes suivants: Information, conscientisation des jeunes pour comprendre l'impact des problèmes causés par l'exode rural et le chômage des jeunes et actions pour les surmonter Promotion du retour à la terre Promotion de l'entrepreneuriat jeunesse et de la formation professionnelle Promotion du modèle coopératif. 2. Projet 2 : Apprendre à pêcher plutôt qu’à compter sur le poison qu’on nous donne. Description générale : Fournir à la diaspora Béninoise à travers le monde des structures par lesquelles ils pourront contribuer à l’autosuffisance et à la sécurité alimentaire en participant, par leurs investissements directs, au développement de l’agriculture, de l’élevage, de la pisciculture et de l’agro-alimentaire. Exemple : production de gros escargots (achatinidés et hélicidés), de clarias et de cultures maraîchères. Les pays d’Afrique de l’Ouest, notamment le Bénin, le Togo, le Ghana et la Côte d’Ivoire doivent aujourd’hui relever plusieurs défis: répondre à des situations alimentaires tendues qui pourraient déboucher sur des famines meurtrières, à une croissance démographique et urbaine explosive; lutter contre la pauvreté et les inégalités; occuper une main-d’œuvre nombreuse, notamment en milieu rural, comptant 60 % de jeunes âgés moins de 25 ans et qui sont en grand nombre au chômage; préserver les ressources naturelles. etc. Le développement dans cette partie de l’Afrique est devenu un sujet qui préoccupe la plupart des membres de sa diaspora. Le constat fait à partir de l’expérience des cinquante dernières années d’un développement, pensé et conçu à l’extérieur de l’Afrique pour les Africains, ne laisse aucun doute dans l’esprit de la majorité des gens que l'aide au développement ne produit pas de résultats tangibles et que les actions caritatives traditionnelles ne contribuent pas réellement au développement. Il est devenu clair aujourd’hui, pour beaucoup d’Africains en général et de Béninois et Togolais en particulier, que les intérêts des Africains ne peuvent être mieux servis que par euxmêmes. Toutefois, s’il est maintenant bien accepté que le développement de l’Afrique doit être l’affaire des Africains, une question importante reste posée: pendant combien de temps doit-on encore attendre 4 avant de voir se manifester la volonté politique pour affirmer cette posture et le leadership qui doit animer le processus de conception et d’administration d’un modèle de développement véritablement endogène? En raison de l'incertitude paralysante qui résulte de cette situation, l’avenir reste complètement illisible pour les populations de ces pays. C’est ici que l’appel lancé au peuple américain il y a plus de 50 ans par le regretté président américain John F. Kennedy (JFK) prend tout son sens, toute sa pertinence. « Ne demande pas ce que ton pays peut faire pour toi, demande plutôt ce que tu peux faire pour ton pays ». La leçon qui découle est que, même dans les meilleures conditions, les gouvernements ne peuvent pas tout faire. Alors, se pose la question qui nous taraude tous l’esprit : que peut faire le citoyen lambda ou un collectif de citoyens lambda? Depuis de nombreuses années, des actions sont menées par des individus ou collectifs d’individus à travers des associations, des ONG et des entreprises ordinaires, etc., certaines formelles et d’autres informelles. L’efficacité de ces actions à réduire la pauvreté reste encore à démontrer. Quant aux entreprises et investisseurs privés, leurs actions sont souvent motivées par la recherche de profits et des opportunités d’affaires qui s’y prêtent. Et très souvent elles manquent pour la plupart d’ancrage réel dans la connaissance du contexte global et dans les besoins réels des populations. Cependant, il faut saluer avec respect toutes ces initiatives. Cela dit, ce qui peut et doit nous préoccuper, s’agissant des actions individuelles ou collectives menées dans ces conditions, c’est le peu d’impacts réels sur la capacité des bénéficiaires visés et des pays à se prendre véritablement et durablement en main. C’est-à-dire à savoir pêcher le poisson par eux-mêmes au lieu d’attendre que d’autres viennent d’ailleurs le leur donner selon leur convenance. Projets spécifiques A. Élevage des gros escargots africains (Voir planification de projet) B. Pisciculture de clarias (Voir planification de projet) C. Élevage de dindons, de dindes, d’aulacodes et de lapins D. Cultures maraîchères (choux, épinards…) 5